Le Contrat Social - anno II - n. 5 - settembre 1958

QUELQUES LIVRES La naissance du Kominform EUGENIO REALE : Avec Jacques Duclos au banc des accusés à la réunion constitutive du Kominform à Szklarska Poreba (22~27 septembre 1947). Traduit de l'italien par PIERREB0Nuzz1. Paris, Pion; 1958. DES DIX-HUIT chefs communistes présents à la fondation du Kominform, en 1947, quatre seulement ont conservé jusqu'à maintenant leur position. L'un des quatre, Dej, est au pouvoir en Roumanie, et trois autres profitent de la sécurité qu'offre la démocratie bourgeoise : Duclos, Fajon et Longo. Tous les ~utres sont rétrogradés, exclus, emprisonnés ou morts ; deux ont rompu avec le communisme : Djilas emprisonné en Yougoslavie et Reale, l'auteur de ce livre. E. Reale a reproduit scrupuleusement les notes qu'il avait prises à la réunion constitutive du Kominform. Il n'a ni dramatisé les faits, ni inventé les « dessous » de l'événement, ni cherché le sensationnel. Il est instructif, à cet égard, de comparer le chapitre consacré au Kominform par F. Borkenau dans son livre sur le communisme européen avec l'exposé de Reale pour voir l'énorme différence entre celui qui, ignorant tout de la réunion, est victime de son imagination délirante et celui qui, témoin, a enregistré les faits. Reale apporte des précisions sur deux données capitales et déjà connues de cette réunion : les décisions prises sur la soviétisation des pays de l'Est et les attaques des Yougoslaves, appuyés par Moscou, contre les partis communistes italien et français. La franchise du langage ne surprend pas lorsque par exemple V. Tchervenkov déclare:« Nous sommes disposés à clore la bouche des opposants. 11 existe encore des impérialistes parmi nous, mais nous sommes décidés à en finir » (p. 66) ; ou Revaï : « La destruction du parti de Pfeiffer est indispensable ; nous y parviendrons par des moyens de police» (p. 125); ou R. Slansky : « En ce qui nous concerne, notre tâche est de fral)per à mort la réaction en Slovaquie ... » (p. 165 ). Lorsque les connaisseurs du communisme se réfèrent à certains faits, ils sont qualifiés de calomniateurs par les communistes, mais lorsque ceux-ci se trouvent entre eux (ou quand plus tard ils rompent avec le communisme) ils les confirment pleinement. Ainsi à cette réunion, Kardelj définit l'essence du Front national en Yougoslavie : « Dans le Front national il n'y a que le parti communiste, les autres ne sont que des noms, des titres... Les secrétaires de tous les comités du Front national sont en même temps les secrétaires du Parti » (p. 114). Revaï explique en ces termes le rôle du parti national paysan en Hongrie : u Il agit sous notre direction. Le secrétaire est communiste, l'un des deux ministres qui le représentent est communiste. Quinze de ses députés sur trente-deux sont communistes, huit sympathisants» (p. 119). Dej fournit les chiffres Biblioteca Gino Bianco 307 suivants sur les élections roumaines : « Le résultat des élections a montré que le Parti était le plus fort : 180 élus communistes sur 340. Officiellement, il n'y en avait que 70 » (p. 93). Ceux qui sont portés à interpréter la politique communiste en fonction des schémas marxistes feraient bien de lire ce livre pour constater à quel point les préoccupations policières priment les prétendus impératifs économiques dans la détermination de la politique communiste. Outre ces confidences, le procès-verbal dressé par Reale confirme un autre point : les chefs communistes font souvent usage entre eux des mêmes platitudes, lieux communs et mensonges dont ils abreuvent leurs militants et les masses. Malenkov, premier rapporteur, s'étend des pages entières d~s le style même de la Pravda : « .~.La guerre a resserré l'unité des peuples soviétiques autour du parti bolchévik... Les problèmes nationaux ont été résolus brillamment ... Le développement de l'économie nationale est magnifique ... En 1950 nous atteindrons 150 % du niveau d'avant-guerre dans les transports et dans la production... Les paysans ont répondu avec enthousiasme à l'appel du Parti [pour augmenter la production] etc. » J. Duclos assomme cet aréopage communiste de la même manière que dans les meetings parisiens : chiffres interminables sur l'extraction du minerai de fer, sur le bauxite, l'acier, la fonte, les locomotives, les camions, le ciment, les produits chimiques, le commerce extérieur, etc. J. Revaï rapporte cette baliverne : cc L'Institut Gallup a posé une question : quel est l'homme le plus populaire de Hongrie ? Réponse : Rakosi. Tout le monde lui demande conseil ou lui adresse des protestations ... » (p. 27). R. Slansky, à la fin de son intervention, s'écrie sérieusement : « C'est nous [les communistes] qui sommes les défenseurs de l'indépendance ~> (p. 167). Il reste à déplorer le titre absurde et mesquin donné en France à ce témoignage dont l'édition italienne s'intitule simplement et justement : La naissance du Kominform. BRANKO LAZITCH Nouvelle droite ? THIERRYMAULNIER: La Révolution du xxe siècle. Paris, Pion (Tribune libre), 1957, 48 pp. PAULSÉRANT: Où va la Droite ? Paris, Plon (Tribune libre), 1958, 172 pp. DROITE, GAUCHE,ces mots ont-ils encore un sens ? Ils correspondent originellement à une répartition sur l'hémicycle parlementaire : c'est· un cadeau des Britanniques. Pourtant, ils évoquent certaines attitudes fondamentales, beauc up plus affectives que politiques. Dans un de ses pr miers ouvrages, Di 1gnostics, Gu tavc Thibon - qui est u de droite» - a essayé d'analyser le tempé-

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