Le Contrat Social - anno II - n. 4 - luglio 1958

226 de l'insurrection de Poznan, elle n'arrivait même plus à disçerner les concessions secondaires de celles qui risquaient de rendre à la classe ouvrière sa liberté d'action. Elle se résigna par exemple à abandonner la détermination des conditions de travail par décret. En effet, la septième réunion du Comité central du Parti, en juillet 1956, déclara dans sa résolution : La pratique des conventions collectives nationales, définissant les conditions de salaires et de travail des ouvriers et employés dans les branches fondamentales de l'économie nationale, devrait être rétablie. 9 A la huitième session du Conseil central des syndicats, au mois d'août, le président Wiktor Klosiewicz fit remarquer, en commentant cette décision : « Désormais, l'administration ne pourra plus prendre de décisions unilaté_rales, sans l'assentiment des syndicats, sur des questions relatives aux salaires. » 10 · La << démocratie ouvrière>> Cependant, c'est à propos de la représentation des intérêts du personnel à l'usine que la vieille équipe se fit arracher les concessions les plus importantes. Dès la fin de mai 1956, d'ailleurs, les dirigeants des syndicats officiels commencèrent à se faire l'écho, à ce sujet, des revendications ouvrières. Un secrétaire du Conseil central des syndicats, B. Taub, publia alors un article retentissant pour réclamer une extension des droits conférés aux conseils d'entreprise. 11 Le Comité central du Parti, réuni au mois de juillet pour tirer les enseignements des événements de Poznan, s'essaya à une solution transactionnelle en consacrant un important passage de sa motion à l'extension de la « démocratie ouvrière » dans les fabriques : Les conseils d'entreprise devraient avoir le droit de prendre part à la solution de tout problème lié à la situation matérielle du personnel et aux conditions de travail, et en particulier, de tout problème concernant les salaires et normes, les primes, la durée du travail, les vêtements spéciaux, les congés payés, l'embauchage et le licenciement, la discipline de travail, l'octroi de logements et leur répartition, les services sociaux et culturels, etc. ; de participer à l'élaboration du plan d'usine dans les limites fixées à la direction de l'entreprise; de participer aux décisions portant sur l'emploi du fonds d'entreprise; de contrôler et d'assurer au besoin l'application des conventions collectives d'entreprise ainsi que de l'accord d'entreprise. [...] L'extension des droits conférés aux conseils d'entreprise, tandis qu'est confirr.né le principe de direction par une seule personne dans les établissement socialistes, rend possible la manifestation de différences d'opinion entre le conseil d'entreprise et la direction, notamment lorsqu'il s'agit de questions ayant trait à la législation du travail. Il appartient aux organismes supérieurs de l'administration économique et aux syndicats de trancher ces différends. 12 9. Trybuna Ludu, 31 juillet 1956. ro. Glos Pracy, 21 aoüt 1956. · II. Ibid., 24 mai 1956. 12. Trybuna Ludu, 31 juillet 1956. Biblioteca Gino Bianco L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE Cette motion ne suffit pas à apaiser l' effervescence dans les usines. Aussi bien, le projet d'une nouvelle loi sur les conseils d'entreprise, approuvé par le Conseil central des syndicats en août 1956, 13 concéda-t-il au conseil d'entreprise le droit de regard sur la gestion de l'usine. Ce fut là une concession d'une portée considérable et qui se rapprochait fortement du programme authentique des salariés. Le contrôle ouvrier, exercé par l'organe habilité à représenter les intérêts du personnel vis-à-vis de la direction, risquait d'encourager fortement l'action revendicative : il permettait à celle-ci de s'appuyer sur une connaissance précise de la situation et de l'établissement ; et contrairement à l' « autogestion ouvrière » du modèle yougoslave, il ne faisait pas peser sur les revendications le poids de la responsabilité pour la rentabilité de l'exploitation. On peut aussi rappeler dans cet ordre d'idées un article fort intéressant du quotidien syndical polonais qui soulignait que les conseils ouvriers .yougoslaves, n'ayant pas pour mission fondamentale de défendre le personnel, adoptaient souvent des décisions contraires aux intérêts immédiats de celui-ci. 1 ' Aussi ne fait-il aucun doute que ce projet de loi fut imposé aux dirigeants syndicaux par la pression des revendications de plus en plus insistantes qu'ils ne pouvaient plus esquiver. Il n'en reste pas moins qu'au cours de la discussion qui lui fut consacrée dans les milieux syndicalistes, la disposition relative au contrôle ouvrier fut jugée insuffisante par la plupart des participants. 11 Or, on sait maintenant, grâce à une indiscrétion du quotidien syndical, 16 que cette même disposition fut à l'origine du sort réservé au projet: celui-ci ne put jamais franchir le seuil de la Diète pour être soumis au vote des députés. Après avoir fait l'objet de vifs débats dans les usines et les comités syndicaux, il fut relégué à l'arrièreplan, on ne savait pas très bien par qui. C'est à ce moment précis que jaillit une campagne bien orchestrée en faveur des « conseils ouvriers » plus ou moins calqués sur le modèle yougoslave ; on suggéra aux travailleurs réclamant le droit de regard sur la gestion qu'ils pouvaient faire bien mieux : prendre d'emblée les usines en • mam. C'est là un des épisodes les plus extraordinaires de la pseudo-révolution accomplie dans ce pays en octobre 1956. Il révèle qu'avant même de remporter la victoire, les partisans de Wladyslaw Gomulka s'effrayaient de la débandade de l'équipe au pouvoir ; et qu'en poussant la classe ouvrière vers des solutions en apparence plus radicales que son propre programme, ils lui proposaient sciemment des objectifs chimériques. 13. Glos Pracy, 21 aoüt 1956. 14. Ibid., 24 septembre 1956. , 15. Ibid. 16. Ibid., 9•Io février 1957. ·

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