216 pas le courage d'accepter un débat ouvert et loyal. Ils font au soi-disant « groupe antiparti » un procès d'intentions et ils tiennent secrètes les interventions des membres de ce groupe au Comité central. Ils ne se soucient pas plus de vraisemblance que de justice et ils s'empêtrent dans des explications aussi contradictoires que peu convaincantes. Mais tout en ayant recours à ces procédés staliniens de lutte intestine, ils s'engagent dans des réformes irréversibles que la sourde pression d'en bas leur impose. · 11 s'agit d'une évolution sur le seul plan intérieur et dictée par des besoins de productivité accrue : avantages matériels concédés aux cultivateurs, atténuation de l'inégalité par trop criante des salaires, octroi d'une certaine marge d'initiative aux kolkhozes dans la réalisation des plans agricoles, refonte de la gestion industrielle par la décentralisation des organes économiques d'exécution (strictement subordonnés aux autorités centrales), parallèlement à l' extension des attributions administratives dévolues aux autorités locales, régionales, nationales, et à quelque réduction des effectifs pléthoriques de la bureaucratie parasite. Cet ensemble de mesures n'implique pas le moindre amoindrissement des pouvoirs exorbitants du Parti - au contraire. L'avenir montrera bientôt si de tels pouvoirs sont compatibles avec l'ambition proclamée par le Comité central de «rattraper dans les années prochaines les États-Unis quant à la production de lait, de beurre et de viande par habitant », prétention ridicule que Staline affichait il y a déja un quart de siècle, mais étrangère à l'avènement du socialisme. Sur le plan extérieur, l'évolution n'est que de pure forme et ne se traduit qu'en phrases creuses sur «l'orientation léniniste en vue ~'assurer la coexistence pacifique entre les Etats de systèmes sociaux différents, la détente internationale et l'instauration de relations amiBiblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL cales entre l'URSS et tous les peuples du monde». La dite orientation ne correspond à aucune réalité appréciable. Si le Pr~sidium a jugé bon de changer sa politique à l'égard de la Yougoslavie, de conclure un traité avec l'Autriche, de rétablir les relations avec le Japon, de modifier ses manières dans les rapports avec l'étranger, il ne l'a fait que pour mieux accomplir son dessein stratégique de subversion universelle. Ses actes essentiels le prouvent : il rend impossible, aux Nations Unies, toute coopération internationale ; il sabote par système et comme à plaisir les négociations relatives au désarmement ; il dénie aux pays satellites le droit de disposer d'eux-mêmes ; il empêche par tous les moyens la réunification de .. l'Allemagne ; il intrigue en Orient et au ProcheOrient pour créer ou attiser des hostilités raciales, religieuses ou nationalistes ; il livre des armes modernes au fanatisme musulman rétrograde afin de provoquer une guerre à proximité des frontières soviétiques et loin des bases américaines ; il spécule ouvertement sur les crises économiques et les conséquences désastreuses de toute guerre future pour nourrir son obsession de « révolution mondiale ». On ne saurait donc s'illusionner longtemps sur les réalités de l'évolution soviétique. Le prétendu« retour à Lénine» prôné par Khrouchtchev et compagnie consiste à s'obstiner dans ce qu'il y a d'erroné ou de périmé chez Lénine et à persévérer dans l'impérialisme agressif de Staline. Un dépassement de ce « marxismeléninisme » théorique et pratique n'est guère concevable sans l'effacement politique de la génération qui a anéanti le parti de Lénine et qui s'avère impuissante à renouveler l'idéologie figée du communisme contemporain, voire à en mettre en doute les postulats simplistes, à en remettre en question les certitudes prouvées irrationnelles. B. SOUVARINE ,
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