Le Contrat Social - anno I - n. 2 - maggio 1957

132 « A· des hommes imprégnés de la tradition '' de gauche" du communisme et impatients d'y revenir, écrit-il, l'essentiel du néo-maoïsme [de Jdanov] pouvait néanmoins passer inaperçu, dans la masse du langage radical. » Balchand Ranadive, qui rongeait alors son frein sous la direction Joshi du PCI, était de ces communistes-là. Les déclarations militantes de la conférence crypto-communiste de la Jeunesse d'Asie du Sud-Est, tenue en février 1948 à Calcutta, suffirent à persuader Ranadive et ses alliés que la ligne Jdanov envisageait en effet un retour total à la stratégie de gauche. Le second congrès du PCI> immédiatement après la conférence de la Jeunesse, ratifia le passage à la nouvelle ligne, élimina J oshi et lui substitua Ranadive. La tactique insurrectionnelle qui suivit n'était cependant pas nécessairement ce que Moscou avait en vue. Pendant la réunion de l'Académie des sciences de l'URSS, en juin 1949, la ligne de Moscou revint finalement au néo-maoïsme. L'indianiste soviétique · V. V. Balabouchévitch, dernier opposant à la nouvelle ligne, concéda que des « groupes particuliers » chez les .capitalistes locaux peuvent éventuellement« devenir des compagnons de route des forces démocratiques dans leur lutte contre l'impérialisme et ses alliés ». Mais tandis que Moscou évoluait dans cette direction, les communistes indiens, sous la conduite de Ranadive, continuaient à fonder leurs actions sur le postulat de gauche selon lequel le moteur de la révolution, le prolétariat urbain et rural, doit mener une lutte violente dans laquelle les paysans pauvres et moyens eux-mêmes, ainsi que la petite bourgeoisie, ne peuvent être considérés tout au plus que comme des alliés vacillants. Ranadive faisait une guerre idéologique acharnée, dans la presse du Parti, au Comité communiste d' Andhra qui était à la tête des néo-maoïstes. Bien plus, tout à fait sûr de lui, il entreprit de s'attaquer à Mao Tsé-toung lui-même, l'accusant de « formulations horrifiantes ... telles que n'en peut accepter aucun parti communiste... en contradiction avec l'entente mondiale des partis communistes». Bien que la tactique de Ranadive provoquât le mécontentement croissant de nombreux dirigeants du PCI, ils se sentaient en même temps impuissants à l'évincer. Le 13 janvier 1950, dernier recours désespéré, Joshi publiait sa «Lettre aux camarades étrangers». ,, Le communisme international doit intervenir,» plaidait-il dans un appel ouvert au soutien soviétique. « C'est vous à l'étranger qui devez agir et agir vite. » L'intervention vint promptement sous forme d'un éditorial dans la revue du Kominform (27 janvier). L'article déclarait que cc la tâche des communistes indiens... est d'unir · toutes les classes, les partis, groupes et organisations prêts à défendre l'indépendance nationale et la liberté de l'Inde ». Les membres du PC I se le tinrent pour dit. Ranadive céda la place à Rajeshwar Rao, d'Andhra,~ et le nouveau programme du Comité central - << document nettement néo-maoïste », écrit Kautsky, déclara tout net en· avril 1951 que le Parti cherche BibliotecaGinoBianco LE CONTRAT SOCIAL seulement à former « une coalition de toutes les forces démocratiques anti-féodales et anti-impérialistes ». Lorsque Rajeshwar Rao regimba contre certains points de détail, il fut remplacé par Ajoy K. Ghosh, resté jusqu'à ce jour secrétaire général du Parti. KAUTSKYprésente les circonvolutions du communisme indien avec une minutieuse précision qui fait de son ouvrage une source majeure de référenc~s. Il utilise une documentation. allemande de première main, des traductions anglaises de textes soviétiques et les documents communistes indiens· en langue anglaise dont on dispose aux États-Unis. Il est cependant inévitable, et ce n' e·st pas là une critique, qu'un travail de bibliothèque manque d'aperçus que, seules, auraient pu offrir des recherches sur place. Par moments, Kautsky se perd un peu dans l'abstraction. Dès le début, il déclare : ...Un des postulats sur lesquels se fonde la présente étude est qu'en dernière analyse les fluctuations de la ligne de tout parti communiste sont dues à des fluctuations correspondantes intervenues antérieurement à Moscou et peut-être à Pékin, plutôt qu'à l'interpré-· tation du marxisme ~t du léninisme par des dirigeants communistes locaux ou qu'aux conditions intérieures du pays donné. Si l'hypothèse peut valoir en soi, il est risqué de la pousser trop loin car elle peut brider inutilement l'analyste. On doute qu'il soit prudent de minimiser sans réserve le rôle. des « conditions intérieures» au nom de la méthodologie. Considérer les développements politiques dans un vide doctrinal est particulièrement paralysant lorsqu'il s'agit d'un pays aussi distinct des autres· à tant d'égards que l'Inde. Par exemple, Kautsky explique son choix du PCI comme objet d'étude en partie par le fait que ses publications sont en langue anglaise. « Aucun . autre grand parti communiste d'Asie, écrit-il, ne rédige tous ses principaux documents en anglais. » Mais l'anglais est la langue officielle du communisme indien comme de l'Inde. elle-même., la seule permettant à des territoires linguistiques disparates d'avoir un programme commun. La faiblesse de l'organisation communiste centrale dans un pays segmenté par les langues est un fait d'importance fondamentale, mais · les lecteurs pourraient facilement supposer qu'un appareil communist~ efficacement centralisé et unifié existe en Inde. Kautsky s'affirme dans toute son originalité quand il retrace des développements parallèles et simultanés en Inde, dans l'Union soviétique et en Chine~ Il étaye pleinement sa conclusion que les fluctuations de· Moscou résultent d'une concentration . ' . . opporturuste « a certam moment et sur certaine région où une stratégie donnée peut s'appliquer, et d'un manque d'intérêt et de savoir pour d'autres

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