Correspondance de P.J. Proudhon - Vol. 2 - 1875
376 CORRESPONDANCE 'l'histoire: depuis quatorze siècles, ~Ile n'a fait que lutter contre la royauté et se préparer àla Républiqu·e, et ce n'est pas sa faute, croyez-moi, si en 89, pensant avoir trouvé: la démocratie, elle est tombée aux n1ains des doctri- naires anglomanes.Jamais, sous sa propre inspiration, la bourgeoisie française n'eût songé à la théorie de la bascule constitutionnelle; par ses conquêtes munici- pales, elle s'était façonnée, elle s'était mûrie pour la République. Cinq fois en quarante ans, en 90, 95, 99, 1814 et 1830, les Jourdain de la Révolution, les grands seigneurs du coffre-fort, unis aux pédants de la doc- trine, ont fait avorter dans notre pays· cette institution toute nationale, la République; ils la feront avorter une sixième fois, en 1849 , si, par une obstination sans cause, vons refoulez dans leurs bras la bourgeoisie républicaine. Quant au peuple, à l'exception de la classe ouvrière des grandes villes, qui ne se distingue pas de la petite bourgeoisie, le peuple est naturellement plus enclin au socialisme, par cela même moins arrêté dans son répu- blicanisn1e. Cela peut surprendre au premier abord. Le fait pourtant est vrai. Le socialiste, plus occupé de la réalisation du bien-être matériel que de la rigueur 'du droit politique, répugne moins à l'autorité que le républicain. Interrogez, sur le boulevard, le premier cocher de fiacre : il vous dira que~ si les affaires ne vont pas, la faute en est, non au Président de la République, mais à la Constitution. Le paysan raisonne de même : dans son esprit, ce n'est pas une démocratie, chose trop métaphysique; c'est un maître, un roi, un empe- reur qu'il faut pour diminuer les impôts, abolir l'usure et rendre toutes les conditions égales ; - ce que le républicain de la ville attend de la science et de la loi, , Biblioteca Gino Bianco \ I
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