Correspondance de P.J. Proudhon - Vol. 2 - 1875
28 CORRESPONDANCE malveillance de ces messieurs, de nos magistrats et de notre clergé, jointe à mon procès, ne m'a pas, vous imaginez bien, ramené de mes défiances; seulement je déguise ma colère par prudence pure et nécessité. Mon prochain ouvrage sera aussi calme et convenable dans ses formes que le plus délicat le puisse souhaiter; mais j'ai besoin pour cela de me promettre à moi-même que plus tard j'aurai ma revanche. Oh! million de tonnerres de diables! je vous jure que tout ce qui est différé n'est pas perdu. Dans vingt ans mon ressentiment sera aussi vif qu'aujourd'hui, et je comprends assez la marche lente de la société pour espérer que les sots et les récal- citrants ne me manqueront pas. Pour le moment, il faut songer à ma réputation et à mon avenir. Je ne désespère toujours pas de me faire agréer un jour; il ne faut pour cela qu'un changen1ent de règne et de minis- tère. Cela pourrait venir plus tôt qu'on ne pense. Dans tous les cas, on ne me reprochera rien l'année prochaine, pas 1nêmc d'avoir dit la vérité. Vous savez qu'il a été question de 1ne placer à la mairie; la place est donnée à un homn1e dont les longs services le 1néritaient n1ieux que mes brochures. Au reste, il n'y a pas eu candidature de ma part; ceux qui me portaient se sont désistés, et il n'est plus question de rien. Un nouvel ouvrage réveillera le zèle; puis, après quelques semaines, ce zèle s'éteindra. Voilà comme se passe une vie. Il vous faut, mon cher, pro- fiter de l'expérience des autres; sollicitez-vous? ne laissez pas dormir les recommandations, surtout faites vos affaires vous-même. Marn1ier n'est pas arrivé à la cour sur la faveur de ses compatriotes; il y est arrivé par ses propres efforts. Enfin, comptez que la bienveil- lance des autres vous servira toujours plus que votre Biblioteca Gino Bianco
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