Correspondance de P. J. Proudhon - Vol. 1 - 1875
... DE P.-J. PROUDHON. 2a tionnaire; après. avoir traduit en latin tout ce que me \ fournissait ma mémoire, je laissais en blanc les mots qui m'étaient inconnus, et, à la porte du collége, je remplissais les places vides. J'ai subi cent punitions pour avoir oublié mes livres : c'était que je -n'en avais point. Tous mes jours de congé étaient remplis par le travail des champs ou de la maison, afin d'épargner une journée de manmuvre; aux vacances, j'allais moi- mème aux bois chercher la provision de cercles qui de- vait alimenter la boutique de mon père, tonnelier de profession. Quelles études ai-jc pu faire avec une sen-• blable 1néthode? Quels n1inces succès j 'ai du obtenir 1 A la fin de ma quatrième, j'eus pour prix 1~ JJérnon- strationde l'existencede JJieu de Fénelon. Ce livre me sembla tout à coup avoir ouvert mon _intelligence et illu1niné 1na pensée. J'avais entendu parler de matéria- listes et d'athées : il me tardait d'apprendre co_mment ì'on s'y prenait pour nier Dieu. Je l'avouerai cependant: la philosop~ie de Descartes~ ornée de l'éloquence de Fénelon, ne me satisfit pas en- tièrement. J e sentais Dieu, j 'en avais l'àme pénétrée ; saisi dès l'enfance de cette grande idée, elle débordait en moi et dominait toutes mes facultés. Et dans un A livre fait pour prouver l'Etre supreme, je ne rencontrais qu'une métaphysique chancelante dont les déductions avaient l'air d'une hypothèse plus commode, mais ne ressemblaient point à une tl1éorie scientifique et cer- taine. Permettez-moi, Messieurs, de vous en offrir un exemple. L 'ame ne peut périr, disent les cartésiens, parce qu'elle est immatérielle et simple. Mais pourquoi, ce qui a une fois cornn1encéd'ètre, ne pourrait-il cesser d'exister? Quoi donc ! l'àme, dans sa durée, serait, d'une part, infinie et éternelle, de l'autre bornée? Cela est Biblioteca Gino Bianco ' . ,
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