Correspondance de P. J. Proudhon - Vol. 1 - 1875
DE P.-J. PROUDHON. 19 sans aucune perte pour ses travaux et ses études ; ma présence étant presque de Lous les instants, j 'étais pour lui comme un domestique, mais un domestique intelli- gent et ami de son maitre. Qui pouvait me remplacer? Nul ne l'a fait, et la preuve, c'est qu'il est mort. Quand je débarquai chez lui, il avait déjà présent~ à l'Académie de Besançon son mémoire pour la pension Suard : il calculait qu'avec ses modiques revenus et le bénéfice de •cette pension, s 1 il l'obtenait, plus le peu qu'il me permettrait de gagner dans ma profession d'imprin1eur, nous pourrions très-bien vivre, jusqu'à ce qu'une occasion quelconque nous tirat de la misère. Je n~y consentais qu'avec peine. Tout à coup, des nou- velles facheuses lui arrivant de son pays, il se vit forcé, par suite de tracasseries domestiques, de payer une très- forte somme. Dès lors je cherchai de l'emploi chez les imprimeurs. C'était l'époque des journées de Juin, les temps les plus difficiles de la r~volution de J uillet. Tous les ateliers fériaient; je fus obUgé d'aller chercher fortune ailleurs; et depuis, je ne l'ai plus revu. Je me sens obligé de vous demander pardon, Mon- siel1rWeiss, de ce qu'au lieu de vous parler de Fallot jo n'ai fait jusqu'ici que 111apropre histoire. Eh! c'est jus- te111ent pour cela que je reculais tant à vous fnirc un plaisir si léger, malgré toute la volonté que j 'ai de vous ètre agréable. Je n'entends pas autrement la biographie, quand je l'écris en mon no1n. Que vous dirai-je n1ain- tenant? Fallot, attaqué du choléra et croyaut 1nourir, Fallot me tendit les mains, ce soir que je regardais comme une veille de mort, et me dit avec un enthou- siasme capable de tuer un hornme robuste: Sije meurs, j"u1·ez-rnqoui e vous rn'immo1 1 taliserez! Ces mots me tourmentent et n1e poursuiveut comme Biblioteca Gino Bianco I
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