Correspondance de P. J. Proudhon - Vol. 1 - 1875
264 CORRESPONDANCE les éléments d'une idée, d'un principe, d'une loi; je les analyse, je 16s compare; à fur et mesure que je les classe, je pose des généralités sur lesquelles fopère ensuite de la méme manière, et j'arrive, d'échelon en échelon, à l'expression la plus générique, la plus compréhensive, qui est celle par où tu commences ta revue intuitive, mais, eu égard aux nécessités de l'ex- position, également successive. Ta marche est ensei- gnante, la mienne est d'un éclaireur et d'un aven- turier. On a beaucoup disputé sur l'excellence de chacune de ces méthodes : c'est une de ces inu- tilités scolastiques sur lesquelles un esprit bien fait ne prend pas meme de parti. Traliit sua quemque voluptas. Mais, tandis que l'induction ordinaire conclut tou- j ours au delà des faits qu'elle a reconnus, de méme que le syllogisme part de généralités hypothétiques ou mal définies, je ne donne jamais à mes conclusions rien de plus que ce que l'observation me fournit. Par exemple, on disait : Il est juste que celui qui travaille jouisse du produit de ce travail ; . il est juste que le marchand soit payé de ses peines; il est juste que le meilleur produit reçoive la meilleure récon1pense; tout cela était vrai. Mais, au lieu de discuter minutieuse- ment tous les cas analogues jusqu'à ce qu'ils fussent tous épuisés, on faisait sauter l'induction et l'on con- , cluait : donc celui qui fait bàtir une n1aison, après avoir payé les ouvriers, est propriétaire légitime; donc le bénéfice du marchand est honnète; donc le général doit ètre plus grassement payé que le soldat, etc. Dans le premier cas, on ne tenait pas compte d'un nouvel élément, la force collective ; dans le second, on violait le principe de l'échange; dans le troisième on outra- Biblioteca Gino Bianco
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