Correspondance de P. J. Proudhon - Vol. 1 - 1875

,,,,, 60 COI\RESPONDANCE I suis ta route de réformateur à travers les persécutions, f la calomnie, la douleur, et la mort méme. Crois aux l destinées qui te sont pro1nises : mais ne va pas préférer ' au ma1tyre glorieux d'un apòtre, les jouissances et les chaìnes dorées des esc1aves. « Serais-tu vaincu par les flatteries, les séductions du plaisir et de la fortune? Toi, enfant du peuple, filius faòri, comme on le disait autref ois de J ésus-Christ, tu ( abdiquerais ta conscience, tu apostasierais ta foi pour 1 etre heureux à la manière de ceux-ci et de c~ux-là I . 'Tes frères ont les yeux ouverts sur toi : ils attendent '; avec anxiété s'ils doivent bientòt déplorer la cbute et . la trahison de celui. qui avait tant juré d'ètre leur dé- : fenseur; ils n'auront jamais pour te récompenser, quc •,leurs bénédictions; elles valent mieux que les écus ; comptant du pouvoir. Souffre et meurs, s,il le faut; . mais dis la vérité, et prends la cause de l' orphelin. » · J e suis oppressé des honteuses exhortations de tous ceux qui m'environnent. Quelle fureur du bien-ètre matériel 1 Quel abject épicurisme je vois partout l J e ne m'avise plus de laisser échapper un seul mot de mes pensées. J'ai acquis la certitude que ma profession de foi me fait considérer comme un cerveau frappé ou tout au moins exalté. J e fais rire par ici; mais je ne con- vaincs personne. Le matérialisme est implanté dans les ames, le 1natérialisme pratique, dis-je, car on n'a déjà plus assez d'esprit pour professcr l'autre. Les cagots, par leurs singeries, leur cxemple, leur ignorance, leur fanatisme et leur mauvaise foi, entretiennent tant qu'ils peuvent ces funestes dispositions. La volonté et la foi ont été proclarnées de tout temps les plus grandes j ouissances de la nature et de l 'hun1a- . nité ; nous avons foi en la justice de uotre cause, en la Biblioteca Gino Bianco ,