Interrogations - anno V - n. 16 - ottobre 1978

FREDDY GOMEZ raître comme un groupuscule. Les militants en prirent conscience pour la première fois et ils n'en étaient pas les moins surpris. Pour de multiples raisons, relevant à la fois du souvenir, de la curiosité, mais aussi de l'originalité que représente la CNT dans la panorama politico-syndical de l'Espagne de aujourd'hui, ces mobilisations furent les points forts d'une année d'intenses efforts militants. A travers elles, la CNT - plus ou moins ignorée jusqu'alors par les médias - acquit une place spécifique dans l'échiquier des forces syndicales. Par elles, la CNT eut droit à la consécration et devint une espèce de nébuleuse, certes difficile à cerner (on le comprend!), mais pesant ou pouvant peser d'un poids non négligeable dans la modification du tissu social. Elle était différente, hétérogène, contradictoire au possible, mais elle commençait à exister de nouveau, non plus par rapport à son passé, mais comme alternative et mouvement social du moment. Telle fut la prèmiere signification des grands rassemblements libertaires de cette année 77. Pratiquement, cependant, ceux-ci n'avaient qu'une valeur indicative quant à la profondeur du phénomène anarcho-syndicaliste et ne pouvaient, par conséquent, pas être perçus comme autant de preuves de l'implantation nouvelle et de la popularité de la CNT. C'était réduire la nécessaire volonté d'analyse au grotesque triomphalisme qui s'étalait dans les pages de certaines publications du mouvement. C'était prendre ses désirs pour des réalités, en ignorant cependant certains aspects bien significatifs de la réalité du mouvement espagnol. C'était, encore une fois, remplacer la lucidité par le discours complaisant et inébranlablement optimiste. C'était aussi faire preuve d'une sidérante courte vue, car ces rassemblements - et particulièrement celui de Barcelone - démontraient pratiquement les fantastiques incohérences du mouvement libertaire et, surtout, les difficiles problèmes que la CNT aurait à résoudre pour ne pas périr, les nombreuses contradictions qu'elle allait devoir dépasser pour commencer à exister réellement, au-delà des arènes et des slogans, dans l'ingratitude du quotidian (21). Il (21) Pour un compte rendu, partiel mais intéressant, de la Semaine libertaire de Barcelone, se rapporter au n. 25 (septembre 1977) de Ajoblanco. Paradoxalement, la Semaine libertaire freina, plus qu'elle n'accéléra, le développement de la CNT. En insistant démesurément - et de façon intéressée - sur son aspect folklorique et outrancièrement spontanéiste, 86

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