FREDDY GOMEZ tarisme que d'une quelconque réflexion débouchant sur l'ébauche d'un projet organisationnel conséquent. En se confondant avec le mouvement libertaire, en essayant de coller à toutes ses sensibilités, en ne délimitant que très élastiquement son territoire, la CNT se voulait, dans cette première étape, structure ouverte où chacun trouvait une justification à sa présence, sans pour autant se sentir solidaire d'une structure organisationnelle fonctionnant selon des critères bien précis. Et cela n'allait pas sans poser problème. La volonté d'ouverture signifiait aussi incapacité de se définir. Paradoxalement, on trouvait à l'intérieur de la CNT un fort pourcentage d'antisyndicalistes, extrêmement sensibilisés au discours ultra-gauche et, par là-même, fort critiques quant au devenir de l'anarcho-syndicalisme. D'autre part, la renaissance CNT se situait plus, extérieurement du moins, - par les thèmes le plus souvent abordés et les formulations employées - dans la sphère de l'anarchisme que dans celle de l'anarcho-syndicalisme. La lecture de la presse confédérale de cette période reste, à ce propos, extrêmement révélatrice. On y trouve plus de «pavés» idéologiques que d'analyses concrètes, plus de proclamations vengeresses que d'informations de luttes. La CNT, il est vrai, n'a été - à de très rares exceptions près - que peu présente dans les mobilisations de cette première année de l'aprèsfranquisme. Peu implantée sur les lieux de production, elle ne pouvait prétendre jouer un rôle déterminant dans le déclanchement, l'organisation et la poursuite des luttes. Ce développement inégal de l'implantation se faisait également sentir, d'ailleurs, au niveau territorial. Si la CNT existait - au moins force potentielle - dans le Levant (Valence), dans le Centre (Madrid) et surtout en Catalogne (Barcelone), elle ne faisait que vivoter dans des régions d'implantation historique traditionnelle, comme !'Aragon et l'Andalousie, et avait les proportions d'un groupuscule dans le Nord (Santander), en Euzkadi, en Extrémadure, en Galice et en Rioja. Cette faible implantation est le plus souvent comblée par le dynamisme et l'activisme des nouveaux cénétistes. Ceux-ci, très jeunes pour la plupart (la moyenne d'âge est bien inférieure à la trentaine), sont mobilisables à tout moment. Entre eux et les « vieux » ( ceux de '36), la génération des 30-50 ans est presque totalement absente, et la traduction politique de cette rupture générationelle est évidente. Pas de conflit de génération à proprement parler, mais de notoires différences de comportement, d'analyses, de sensibilités. L'absence de génération-tampon se déjà déjà lourde76
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