Interrogations - anno III - n. 8 - settembre 1976

SOCIALISME NON TOTALITAIRE Je connais des cas où des collaborateurs scientifiques sont demeurés des mois absents de leur travail sans faire l'objet de sanctions, ou bien ont fourni des résultats truqués, non concurrentiels. Dans nos grandes villes de nombreux collaborateurs scientifiques titulaires de grades universitaires consacrent pas mal de leur temps à se procurer des revenus supplémentaires en donnant des leçons privées aux écoliers - une situation qui serait tout à fait inadmissible aux U.S.A. Dans l'industrie, il existe moins de latitude. Un ingénieur d'une grande usine de Gorkii m'a néanmoins raconté qu'ils doivent tolérer aujourd'hui le fait que parfois jusqu'à 6 % des ouvriers se présentent au travail en état d'ivresse ! Tout chercheur scientifique sait qu'il faut payer aux techniciens dans les instituts de Russie un complément en alcool prélevé sur les réserves des instituts pour obtenir une exécution « à la pièce », c'est-à-dire une vitesse d'exécution normale des commandes. L'affectation de travailleurs à des fonctions ne correspondant pas à leur qualification mais donnant droit à une rémunération supérieure, l'exagération des travaux exécutés dans les comptes, dans les calculs de primes, etc., sont des phénomènes courants. Les chefs agissent à cet égard en accord avec leurs subordonnés. Une longue observation montre que l'absence de patron n'est pas la seule cause de l'apparition de ces phénomènes curieux. L'homme moderne, le citoyen d'un pays industriellement développé, ne peut pas vivre tout à fait sans droits. Privé de la possibilité d'élever son niveau de vie au moyen d'actions franches et ouvertes, telles que grèves, manifestations, protestations publiques dans la presse, etc., il s'arroge le droit de travailler plus mal, quelquefois beaucoup plus mal, qu'il ne le pourrait, Il a recours à la grève inconsciente et la grève perlée, la fraude et la demi-fraude. Tout cela élève son salaire d'une manière ou d'une autre à un niveau correspondant au travail réellement fourni. En conséquence - pour l'amener à travailler plus normalement - on augmente son salaire absolu. Ainsi, se poursuit lei d'une manière originale le processus de la lutte incessante de l'homme pour l'amélioration de son niveau de vie. Ce processus pourrait être considéré comme normal s'il n'aboutissait, ou plutôt s'il n'était lié, à un phénomène de démoralisation de la société, typique pour le socialisme totalitaire et non sans rapport avec les intérêts de ce pouvoir. Ici en U.R.S.S. d'aucuns considèrent que la démoralisation sociale dans le domaine économique provoquera la désintégra63

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