Interrogations - anno III - n. 7 - giugno 1976

VACLAV HAVBL n'importe quoi, de toucher des prébendes et, dans Jeurs décisions, font préva.Joir sans scrupules des points de vue qui leur sont dictés par Jeurs intérêts matériels et personnels les plus divers. Ceux qui croient sincèrement ce que dit la propagande officielle et qui soutiennent d'une manière désintéressée le pouvoir gouvernemental sont aujoµrd'hui de moins en moins nombreux. Par contre, il y a de plus en plus d'hypocrites ; à vrai dire, chaque citoyen est obligé de l'être, dans une certaine mesure. Cette situation peu réjouissante a, bien entendu, ses causes logiques : rarement, au cours des dernières années, le régime s'est si peu préoccupé des véritables idées des citoyens apparemment loyaux et de la sincérité de leurs paroles. Il suffit de voir, par exemple, que lors des différents autocritiques et repentirs, personne, à vrai dire, ne cherche à savoir si les gens les font sincèrement ou uniquement' dans leur propre intérêt. Et on peut même dire que l'on ~•at• tend plus ou moins automatiquement à cette seconde alternative sans y voir quelque chose d'immoral. Les avantages personnels servent précisément d'arguments pour retenir de telles déclarations : personne ne cherche à convaincre le repenti qu'il s'est trompé ou qu'il a fauté mais dans la phipart des cas, qu'il doit se repentir pour être sauvé. Les avantages ainsi obtenus sont dépeints de façon exagérée et attrayante, tandis que le gofit amer qui reste dans la bouche après Je repentir est p_résenté comme sans importance. Et si, toutefois, se manifeste un original qui le ferait vraiment sincèrement et confirmerait son attitude en refusant, a priori, toutes les récompenses qui lui reviennent, il y a de grandes chances que même le régime le suspecterait. On peut dire que, d'une certaine manière, nous sommes tous ouvertement soudoyés : si dans une entreprise tu acceptes telle ou telle :fonction (naturellement pas au service des autres, mais au service de la direction de l'entrP-prise) on t'accorde divers privilèges. Si tu adhères à l'Union de la Jeunesse, tu acquiers le droit et. les moyens de te divertir de différentes façons. Si, en tant que créateur, tu participes à telle ou telle manifestation officielle, on te donnera telle ou telle v~ritable occasion de création. Tu peux penser ce que tu veux, à condition de manifester ton accord et de ne pas èréer des obstacles, ~e supprimer ton intérêt pour la vérité et pour ta · propre conscie~ce. - a.lors les portes te seront grandes ouvertes. Mais, si le· principe d'adaptation extérieure est devenu le prin~ipe de basé de la mise en va.leur dans la société, quelles peuvent être, alors, les qualités des personnes mobilisées et quelles sortes de gens peuvent bien arriver au-devant de la scène ? Quelque part, entre la défense contre Je monde, mue: par la crainte, et la conquête agressive du monde, guidée par le désir d'obtenir des avantages personnels, s'étend une sphère qu'il serajt injuste de sous-estimer, qui elle aussi et dans une grande mesure, contribue à créer le climat moral de la « société unie » d'aujourd'hui. Oette sphère, c'est l'indi/férence avec tout ce que cela comporte. Après les récents bouleversements historiques et après la sta9ô

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