Interrogations - anno II - n. 5 - dicembre 1975

La politique du fran~ais national CONSl'RUITE sur la base d'annexions, la France a ete francisee tout au long d'une politique d'assimllatlon qui portait d'abord sur la langue. Des 1539, l'edit de Villiers-Cotterets, qui introduit !'usage du franc;ais pour la redaction de tous les actes notaries, en fait la langue administrative du royaume et discredite du coup les autres langues. Avec la creation de l'Academie franc;aise, ce ne sont pas seulement les parlers « provinciaux » et les cultures des pays conquis qui sont menaces, mais la langue franc;aise elle-meme va se trouver « normalisee >, edulcoree, ratissee ; coupee de ses sources populaires, elle perd sa richesse expressive et sa faculte de renouvellement. Entre la langue de la minorite « cultivee ~ et le bas langage du peuple va s'installer un abtme croissant. Plus generalement, la brlllante culture de cour qui se concentre a Versailles entratne la decadence de toutes les formes de la culture populaire et « provinciale ,. Sur ce plan, la Revolution va suivre la ligne tracee par l'absolutlsme monarchique. Avec une exception notable : la vie politique bouillonnante des clubs et des societes populaires va revigorer et renouveler considerablement le fra~als. Mais elle n'en malmene que plus durement les langues minoritaires. 11 s'agit d'abord d'un effet tout spontane et ce moment determinant revele bien l'ambigu'ite du debat linguistique. La nouvelle pratique politique active fortement la propagation du franc;ais a travers les clubs, les reunions, les fetes civiques, a travers une volonte de communication generalisee. De larges secteurs de la population se mettent au fran~ais par enthousiasme pour la Revolution et par « devouement » a ses ideaux. Plus profondement, la Revolution cree une adhesion a la France : ce n'est pas seulement le cas pour les Nii;ois et les Savoyards, mais pour les Alsaciens qui pour la premiere fois glissent resolument dans l'aire politique et culturelle franc;aise. C'est un point d'histoire que les nationalistes peripheriques oublient volontiers. BientOt, cependant, une guerre systematique sera menee contre les patois, et ce terme meme restera jusqu'a maintenant un efficace instrument de la guerre linguistique. C'est sous la convention montagnarde de 1793 que se fait le grand tournant et s'instaure la « terreur linguistique ». Dans les premieres annees de la Revolution, par la force des choses, les decrets et textes officiels sont traduits dans les parlers des differentes regions. A partir de 1793,les representants de la Nation decident 14

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