SANS COMMENT AIRE il ne lui resterait plus, et dans son propre intérêt, qu'à mettre !in à ses interventions. Lorsqu'un ouvrier, après avoir acquis la compétence nécessaire quitte le secteur du travail manuel pour passer à celui de la gestion, il cesse de ce fait d'être un ouvrier, qu'il se nomme Ford ou Khrouchtchev. La nationalisation de la grande industrie ne la soumet pas au contrôle ouvrier. La propriété dite «publique» des moyens de production est une fiction encore plus grande dans la mesure où la gestion de la grande industrie au niveau de l'Etat tout entier exige encore plus de compétence, alors que les moyens de contrôle sur cette gestion par des personnes non spécialisées sont extrêmement réduits. Par conséquent, le contrôle de la grande industrie par les producteurs eux-mêmes est impossible, ce qui !ait que la nationalisation des entreprises les fait passer des mains de propriétaires privés aux mains de l'Etat, qui se transforme en une énorme et toute-puissante corporation monopoliste. Une telle corporation se met à vivre et à travailler selon les lois de toute corporation monopoliste, mais en ne trouvant plus cette fois de résistance à l'intérieur du pays. Exactement comme les «technostructures» dont parle J. Galbraith, cette corporation d'Etat commence en premier lieu par chercher à assurer sa propre conservation. C'est dans ce but qu'elle engage et choisit son personnel, avec la différence que le critère n'est plus la fortune personnelle, comme dans le système capitaliste privé ; les choix se font selon d'autres critères sociaux tels que par exemple l'aptitude à servir les intérêts de la corporation et la fidélité au principe de la responsabilité solidaire. Une des conditions indispensables, mais non suffisante, est évidemment l'appartenance au parti. Nous voyons donc que par sa structure même la grande industrie rend impossible sa gestion par les ouvriers qui y travaillent. Mais ce n'est pas la seule caractéristique de la grande industrie. Une fois mise en place, quelle que soit sa !orme de gestion, elle se transforme en une sorte de facteur autonome qui se met à faire activement pression sur l'économie. Tout particulièrement cela concerne les secteurs qui fabriquent en masse tel ou tel produit. Lorsqu'un secteur industriel tel que, par exemple, l'automobile est créé, en un premier temps il se contente de satisfaire la demande qui existe pour des automobiles. Mais dès que cette demande est satisfaite, le secteur se trouve menacé de régression, ce qui parait évidemment catastrophique à la direction, qu'elle ressorte du capi1alisme privé ou du capitalisme d'Etat. Par conséquent, pour survivre, l'industrie automobile doit se procurer des commandes. Elle ne peut changer l'objet de sa production pour différentes raisons. Tout d'abord, l'outillage hautement spécialisé dont elle dispose ne peut servir qu'à un éventail très étroit de produits fabriqués et sa transformation serait très coO.teuse. Ensuite, le personnel de production n'a d'expérience précise que dans le domaine de l'automobile et serait obligé de se recycler 78
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