JEAN BARRUÉ consommation, sous l'aiguillon de la sainte Production, est devenue la société du gaspillage tandis que des continents entiers sont voués à la disette et manquent des éléments les plus rudimentaires du bien-ètre. Et pour produire toujours davantage - en dépit des machines et de l'automation - on est condult à donner une forme moderne à l'antique esclavage en lmportant une main-d'reuvre qui n'aura jamais la jouissance de ce qu'elle prodult. Il a suffi d'un quart de slècle pour que le moteur de la production se soit emballé ! Avec encore plus de motlfs d'inquiétude qu'en avalt Sismondi, nombreux sont ceux qui conselllent de freiner cette production délirante. Déjà en 1959, l'économiste et diplomate Galbraith estimait nécessaire de changer les prlncipes de base de la société, et Jean Fourastié, dans son ouvrage La grande métamorphose du xx• siècle (1964), mettalt en garde contre l'accrolssement perpétuel du taux de croissance de la production : 7 % chaque année, cela revlent à doubler la production industrielle en dix ans, à la multiplier par 32 en clnquante ans ! Si la France avait depuis 1750 maintenu ce taux d'accroissement, Ja production industrielle nationale seralt en 1960 dix mille fois plus forte que la production mondiale actuelle. Fourastié conclut que le maintlen d'un tel rythme aboutlrait à une catastrophe. ce ne serait plus une évolution, ni une explosion, mais une mutation, une métamorphose. Les travaux du Club de Rome, les études de l'Institut de Technologle du Massachussets, les recherches de la Fondatlon Volkswagen, les ouvrages de Dennis Meadow - Les linnites de la croissance, L'équilibre mondial -, aboutissent aux mèmes conclusions. Le mythe de la production accélérée, du progrès sans fin de la quantité d'objets produits par la société industrielle doit ètre dénoncé. Et Meadow conclut en ces termes : « la seule solution au problème de la croissance, c'est de mettre un terme à la croissance. Cet arrU peut Ure volontaire et contr6lé, ou bien alors, ne pouvant plus supporter le fardeau de la croissance, nous y serons contraints contre notre volonté et sans notre contr6le ,. Croissance économique zéro ou catastrophe inéluctable : telle est aussi la conclusion à laquelle arrive le socialiste hollandais Sicco Mansholt, celui que l'on a appelé le père de l'Europe agricole. Dans une interview accordée au quotidien régional Sud-Ouest (3 décembre 1974), il insiste sur la liaison étroite qui existe entre tous les prq}?lèmes traglques qui se posent au monde moderne : énergie, alimentation, démographte, pénurie 18
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