Homme - anno II - n.43 - 26 settembre 1855

aujourd'hui. Nous le disons, profondément co11vainc11s : le parti est dès ee moment responsable pour le sang qui couic sur les échafauds, pour les lentes agonif!s dont les prisons <le l'Europe sont le secret théâtre; car il peut vaincre. Il est temps que le parti apprenne à sentir sa force comme la sentent ses ennemis. Pour la sentir, pour puiser dans ce sentiment la foi qui combat et triomphe, il 11'ya qu'à se constitner, qu'à s'organiser, qu'à ceutraliser sa vie multiple en uu foyer commun pour, de là, rayonner snr les masses par la parole et par l'action. Le jour où il agira ainsi, la bataille éclatera vigoureuse et puissante. N c doutez pas de la victoire.: 11ous n'avons ponr la " ' • 1 t t d g·agner, qu n ecrll'C, nou sen emen sur no re rapeau mais dans notre cœnr, dans nos plans de guerre, dans chacun de nos actes, ce grand mot de Solidarité Européenne dont nous avons tous, en 1848, plus ou moins, méconnu la \'aleur. Et cf-la se fera. A part la sainteté dn priucipe, source et justification de notre action, nous savons tons depuis 1848, que le salut est à ce prix, qnïl nous faut vaincre pour tous, ou tomber. ' Nous sommes forts, car nous avons pour nous la loi providentielle qui dirige les destinées du ,monde et nous avons les peuples. Nous sommes forts par le droit, par la vérité, par la justice de la •cause à laquelle notre vie· s'est vouée, par le martyre que des milliers de nos frères ont héroïquement enduré; par le souvenir des ··victoires ,que chaque ·peuple a remportées, par la conscience qu'il ne les a, nulle part, souillées de vengeances ou de crimes. Nous sommes forts par le npmbre, par les aspirntions des ma~ses, par leurs-souffrances, 1)ar leurs intérêts matériéls, par la toute puissance du seutiment national que nient les maîtres, par cet instinct immortel qui rebondit sous la pression, , et crie aux cœurs : Liberté ! Nous sommes f0rts par les -crimes et les fautes des oppresseurs ; par leur manque de génie et cle cœur; par leur a\'idité; par l'insouciance avec laquelle ils poussent, pour une guerre-sans but, les nations à la banqueroute; par le mépris de la vie humaine qui leur fait verser en Crimée, le sang de milliers de braves pour faire réussir un· emprunt on célébrer un anniversaire. Nous ·sommes forts par l'inique absurdité des arrangements -territoriaux qu'ils cherchent à maintenir, par le germe inépuisable de désordre et de guerres que ces arrang·ement-s arbitraires contiennent, et que nous seuls pouvons faire disparaître, la carte de l'Europe à venir ne pouvant être tracée que par l'épée <le la révolution. Oui, là surtout est notre force· à nous révolutionnaires. Partoat aujourd'hui les royautés nient la vie; la révolution seule peut lui dire : sois sainte et éclos sous la protection de tes frères. Seule ,elle peut résoudre cette question vitaie des nationalités que des intelligences superficielles continuent encore à m_éconnaître, mais qtii est pour nous l'org-anisation de l'Europe. Seu le elle pent donueT le baptême de l'humanit~, à ces races qui <lemanpent à ~onconrir à l'œuvrc commune et auxquelles on refuse le signe de leur individualité. Seule elle peut faire _revivre à sa troisième vie l'Italie, dire: Soyez! à la Hongrie et à la Pologne, constituer l'Allemagne, fonder par l'Espagne et le Portugal la République Ibérienne, créer la jeune Scandiuavie, donner un corps à !'Illyrie, organiser la Grèce, étendre la Suisse aux dimensions d'une Confédération des Alpes, grouper en une fraternité libre, en uue Suisse de l'Orient, Serbes, Roumains, Bulgares et Bosniaques. Par elle seulement pen- ·vent s'harmoniser, au dessus de ce véritable équiJibre européen, garantie de progrès pacifique, ces ,deux grandes idées qui mènent le monde et qui •s'appellent: Liberté, Association. Ne doutez pas de vos forces, ô frère."; votre programme répond à tous les instincts de l'ipoque, ,c'est pour lui qn'on lutte, qu'on souffre, qu'on meurt en ce-moment sur tous les points de l'Eu- ,rope. • Org·auisez-vous et osez : oser, c'est la prudeuce ·des forts~ Il faut au parti un centre d'actiot1 reconnu, uu.e caisse, ·un mot d. ordre, commun. Si le parti ne -se donne pas cela en un mois, il u'est pas à la hau- ,teur de s.amission. Le centre d'action, c'eet nous, ou tous autres possédant la confiance du parti.: quelques homn~es purs, comprenant, représentant le&gTandes Nationalités Européennes, s'entendant, s'aimant, aimant ,la causa commune, prêts-à se trouver au premier rang le jour de la bat.aille, .an dernier le lendemain de la victoire. Quels qu'ils soient, ne les .craignez .poo, ils ne peu vent être forts que par le .gros de l'armée. La caisse du parti peut se fonder rapidement si chacun veut npporter son obole; si partout où un soldat <le la Répnblique, homme ou femme, exerce une influence sur un cercle quelconque, une souscri pt ion s' t>rganise ·; si depuis le (ranc du pauvre jusqu'au millier <lefrnocs du riche, chaque croyaut veut se regarder comme dèbiteur d'une action à l'cmpruut de la Liberté. Nous sommes, si nous voulons, le parti le plus riche, car nous dénombrous 110sra11g·spar millions. , Le mot <l'ordre, nous l'avons dit.: Liberté pow· ·tous; Associ(lfion dr tous. Il n'exclut rieu; il renferme tout. Au delà c'est la tyrannie. Quel centre <l'action voudrait ou pourrait l'exercer? 'Ce n'est pas à quelques hommes, ce n~ost pas même an parti actif tout entier qu'il appartient de décider sur les moyens pratiques par lesquels la -Révolution portera remède aux maux qui ro11gent les masses, aux inég·alités frappan 1es de l'ordre social actuel : c'est à la Révolution elle-même dont nous ne ponvons être que les ,initi::Stenr.-;;c; 'est de l'inspiration collective, du sein frémissant de ces peuples, s'agit:1nt à l'benre qu'il est sous le linceul, que surgira, <lès qu'ils auront fait de cc linceul nn labarum de victoire, le mot dP. l'époque ; car la vie eug·endre la vie, la liberté féconde l'i11tellig-ence, l'h~mme qui presse la nrnin de ses frères, 1·éunis dans un élan de dévouement, . d'enthousiasme, de triomphe et iamour, 1·eçoit nne révélation de la vérité, refosée à l'esclave isolé qui n'ose,pas briser sa chaine. Brisons donc notre ·chaîne et uniss·onsnous pour cela. Que chacun de nous élabore et propose la solution, •tèlle qu'elle lui apparaît, <les problèmes ·sociaux; ,c'est notre 1<lroit, c'est notre devoir. "'.!\faishonte à,celui d'entre nous -qui, eu se -séparant de l'œuvre •commune, désertera rarmée que le cri <leses frères souffrants pousse vers la bataille, pour-s'isoler dans l'orgueil stérile <l'un prog;ramme exclusif: celui-là peut -être un secta.irc, ·mais ce n'est pas l'homme de lei grande èg-lisc. Armée, avons-nous dit, et c'est bien là le mot qui répond le mieux à notre mission présente. Nous ne sommes pas l'A venir, nous en sommes les précurseurs ; nous ne sommes pas la Démocratie,_ uous somn1es une armée charg·ée de ,lui déblayer le terrain. Le but ,êléfini, 'le ·but commun, évident désormais pour toutes les intellig·ences non corrompues, c'est la forme ,républicaine, organisée par le peuple et poi1f -le peuple ; c'est l'émancipation de toutes les nationalit.és, se solidarisant dans une fédération. républicaine. Le moven, ce n'est ni la liberté absolue <le l'individu, ni la discussion : c'est l'association, l'organisation, le travail en faisceau, la discipliue, l'ahnégatio11, le .dévouement. L'anarchie n'a jamais gagué de batailles. La discussion est impuissante, inutile quand elle s'a<lresse à des peuples marqués au front du sceau de la servitude. Rendez-leur l'air de Dieu, le souffie purificateur de la liberté, la plénitude de leur facultés, l'enthousiasme sacré de la créature qui peut s'aflirmer; v_otreparole ' alors eng-endrera des actes; aujourd'hui, il faut des actes pour que la sainteté de la parole puisse reparaître. Les Grecs du Bus-Empire discutaient et mouraient ; le sabre de Mahomet frappait en sileuce. • Il faut que chaque homme se disant républicain, s'appelle aujourd'hui action et représente une force. Il faut que tout individu, donnant son nom au parti, apporte au ce11t1.1ceommun~ son contingent de dé.vouemeut et d'activité, son bras, son intellig·ence, sa bourse. Il faut que la même parole, sortant de toutes les bouches, rayonue sur tous les cercles secondaires, et y communique la foi, le beioin •d'agir, la croyance que le moment favorable est venu. Il faut que, clu sein du parti, un seul cri aille secouer la torpeur des populations incertaines : nous sommes un, soyez un. Là sont l'honneur, le devoir, le salut. Nous avons dit ce que nous croyons être lavérité.sur la position actuelle des gouvernements, sur l'qpportunité pour· les peuples, sur la mission que devrait accomplir ·1e parti. Que les patriotes de tous les pays méditent et décident. A eux Ie choix du moment, à eux le choix du terrain sur' lequel doit s'engager la bataille. Il y a pour tous identité de but et identité de devoir; mais il y a diversité de circomtances et de position. Nous savons des peuples qui, comme la Hongrie et l'Allemagl)e, entourés, pressés d'ennemis, ne peuvent ent,rer qu'en seconde ligne dans la lutte suprême; ceux-là doivent se préparer à sui• 1 vre im~édintement l'impulsion qui viendrait d'ail:- leurs.· N 011s en sarons d'autres que le passé. lt" présent, f't des circonstances spéciales appellent iiux honnems de l'initiative. La France et l'Italie sont de ceux-là. La France, jadis ;\ la tête du mouvement qni emporte l'Europe verE l'avenir, ne peut se résigner longtemps, san~ périr, à déclwir clans le matérialisme des intérêts égoïstes, et à voir le dmpeau qni a foit le tour du monde, tn1îné par u11 maître nalg·aire à la remorque <l'un pouvoir qui s'appelle l'Autriche. L'Italie a tout à craindre, depuis la honte qui tue l'avenir jusqu'à de nouveaux démembrements qui aug·menteraient le nombre de ses f'rrnemis, si, contre les factions qui l'assiéo·ent, elle n'affirme pas son droit, sa Nationalité, s~ ,·ie une et républicaine. La France a sa puissante tradition de 9~ à continuer, à dé,•elopper pom sa gloire et pour le bien <le tous; l'Italie a sou programme de 1848, daté du soulèv.ment sicilien, drs journées de Milan, de Venise-et de Rome, à remplir; c'est ·à son peuple de relever l'étendard 11ational trahi par ses roii,;. Pom se lerer, la France n'a pas d'ennemi étranger à c0mbat-t-re; l'Italie r11 a uu, mais faible, isolé, environné à -son tour d'ennemis que le cri <leguerre italien fornit ~urg-ir sur ses derrières, sHr ses {fanes., pnrtont. La Frnnce porte en son sein le réveil de tont ce qni s0nffre et aspire eu Europe, sous 1111 ordre social c~)rrompu• l'Italie tient dans le pan de so11 drnpeau trioolor~ le soulèvement des Nationalités. Lï1ormne du :i Décembre est le meurlrier de Rome ; Fran<"c et Italie, Rome et Paris; tel devrait être le mot d'ordre do la bataille. l\1ais quel que soit le poi11t, <p1elle que soit. l'heure, où la Révolution éclat.<', 11011s pouvons afümwr ceci:: le premier peuple qui levera son drapeau au nom de la patrie c-t .de l'liuma•nité, ser.. a sui,·i par les autres.. Lï11surrectio11 procl11in1 l'iusurrection, la première victoirn dix. victoires sur dix points différents.. li 11'y a pas de -11atio11, aujourd'hui, qui ne puisse, par u11 acte èHl:'rgique de sa volonté., enfanter le saint du monde>. Septembre l S55. KOSSUTH. LEDRU ROLLIN. l\'IAZZ(NJ. . L'HOMME --PR-OVlDE Ils disent q11e notre lmine ('St pur trop monotone, que nous n'avons que la conle d'airnin, d que notre plainte est usée. Ils <lisf'nt qne nous fatiguons en vain les sourds échos de la tnre étrangère, que l'âme publique 1wus est pnrtout indiïtërente ou fermée, soit au <leùans, soit an drhors, et que, vents tombés, nos malédictio11s d'exil s'l•- teig11ent. le long des grèves : ils <lisent que nous smm1w,~ mor{s. li est très vrai qu'une certaine force appare11tc et momentanée arrive toujours ~l ce qui dure. Les ambitieux, les corrompus, les eff.i'rés, tons ceux qui tiennent plus à la Yalise qu'à la conscience se précipitl·nt et se rallient derrière toutes les victoires, mêmes celles du grand chemin; les opir.ions perdent la vigueur, et les seutirncnts perde11t la flenr. Sons cette atmosphère aux ténèbres épaisses, qui a pour premiers proscrits b parole et le rayon, tout s'affadit, s'étiole, s'endort, et l'ht!ure vient • , ' nous le savons, où, dans le silence 1111iverseldes âmes, les carnassiers repus peuvent tailler en pleine_orgie les hommes du devoir et ses martyrs. Oui, nous le savons : nous savons aussi que, dans cette nouvelle et grande éclipse, • l'ombre a gagné l'Augleterre comme la Fra11ce, que l'île protestante, ayant peur pour ses ballots, a fermé ses bibles, répudié ses tradition~. étouffé l'esprit iutérieur de ses propag·andes et füiJ une alliance monstrueuse,· élvec le despotisme-guet-ar ens qui lui prêtait ses armées. Mais qu'importent ces léthargies affaissées et ces lâches défaillances à ceux qui vivent à l'écart, dans la i:eligion sévère du droit et la probité des souvenirs? . Est-ce que la conscience humaine est un registre de commerce où le crime a ses prescriptions et la justice ses échéances ? Est-ce qu'on amnistie Néron parce qu'il y a près de deux mille ans qu'il a brûlé Rome? Est-ce qû'en société ré 6·ulière, en civilisation, on peut porter aux profits at p.ertes le.s serments violés, les lois dé~ trn-ites, -les tribunes brisées, et tout le saug, et toutes les ruines, et tous les cada~res d'une nuit eomme celle de Décembre ? Ah ! nous sommes monotones f oui, monotones comme lajusti~e éternelle, monotones comme les

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