Homme - anno II - n.36 - 8 agosto 1855

seul mot- Italie·- rallie· des millions d'âmes et fait-secouer les cliaînes, dans toutes•les·prisons-, de Venise à Rome et de Naples à Milan ; c'est que laittorte· est vivante, plus vivante que la Maison d'Autriche et· qu'un jour viendra, jour prochain, où· les deux sœurs inscrites au livre de vie, au livre des Révolutions, les deux sœurs Italie et Hongrie s'enlaceront dans le saint amour et, sous leurs pieds, écraseront l'Empire-ulcère. Ah! L'Autriche aura de bellP-sfunérailles! . Regardez du côté du Sud, cette nation qui, l'an dernier, se leva pour élargir sa souveraineté, retremper son âme dans les révolutions et vivre libre en face de l'Europe vassale· et tombée. Elle avait dormi longtemps sous le suaire et sous le dogme : lorsque 1848 sema ses tempêtes, elle était restée- calme, comme un cimetière, et l'on disait alors : " L'Espagne ne suivra jamais; elle a fa grande maladie catholique, et l'on n'en revient pas!'' Eh bien, lorsq~e la n?it s'est faite ai.Heurs, lorsque la France, po1gnardee par la trahison, a trébuché dans la servitude, l'Espagne a fièrement ouvert ses fenêtres sur cet Empire; elle a relevé ses tribunes, appelé ses gardes nationales, donné libre essor à la parole comme à la pensée, et si, depuis, elle s'ast arrêtée dans son œuvre, si elle n'a pas marché dans la pleine lumière jusqu'au droit absolu,-sa quasi-révolution n'en est pas moins au- fond un grand acte de solidarité révolutionnaire·: l'Espagne a fait armée dè réserve ! Ce peuple là, pourra ~escendre, encore une fois, comme les autres, nous le savons : les intrigues, les trahisons, les crimes qui guettent partout le~ révolutions et la liberté, lui seront embftche, peut-être, et l'entraineront hors de ses voies ; mais il ne disparaitra plus; il restera dans l'histoire et dans la vie, comme la Hongrie, comme l'Italie, comme la Pologne, et jamais l'Europe des priviléges, l'Europe des peurs ne dormira tranquille sous ses dictatures. • On dit que, parfois, l'homme des Tuileries entend comme des voix de tribune du côté du Palais Bourbon, et comme des bruiti d'armes du côté des faubourgs; Tibère a raison dans ses terreurs de nuit : les morts de la France parlent, mais il y a d'autres voix, et qui viennent de pins loin : les faubourgs de la Révolution s'appellent Vienne, Pesth, Milan, Rome, Varsovie ! II. La Révolution a d'autres serviteurs, d'autres représentants sur la terre que les natious opprimées et les patries envahies; elle a tons ceux,- et ils forment Légion, - qui n'ont plus ni patries, ni familles,ni droits ni,foyers. Errants et pauvres, mais fidèles an devoir, les Proscrits ébauchent, chez l'étranger, la fédération future qui sera la transition, entre les groupes de violence, empires ou monarchies, et la grande famille humaine. A~nsi , les Slaves de la Pologne tendci1t leur mtlin meurtrie aux Slaves de la Conquête, aux Russes, et la Communion de la race entière se prépare aux autels de l'exil. Les Hongrois, sans rien perdre des énergies natives, s'associent à la misère des Valaques; ils 1 comprennent comme n~us le grand droit humain, et la calomnie qui les divisa pour les affaiblir est démasquée dans les deux camps. • Les Italiens n'ont plus vingt patries et cent capitales: malgré les rivalités historiques et les ambitions municipales, l'unité s'est fondée dans les cœurs et sur le drapeau. L'exergue dit: République Italienne! Les Proscrits de France, enfin, dès long-temps ralliés à l'idée humaine, étudient, au dessus des castes, des religions, des races, et sans perdre le sens politique _despatries qui seront une dernière fois des armées, ils travaillent à dégager l'avenir des ràncunes ou des jalousies de l'initiative. Que ceux.-là, donc, tièdes complices, tombés en défailtance au spectacle de la force heureuse, ou violents ennemis qu'enivre l'idée des éternelles dictatures, que ceux des petites espérances et des colères absolues·regardent à travers les peuples et le long des chemins : ils verront si la Révolution est morte, si la moisson ne germe pas sous les pluies de sang, si les terribles questions qu'on a supprimées çà et là, emportées par les martyrs, ne foot pas se,. mence ailleurs ; ils verront s'il y a un peuple ou une idée <lemoins, dans le monde, depuis cettedate de Décembre qui marqua la grande victoire du crime! Non, les peuples s'agitent sous les échafauds; les patries violées et foulées ne se rendent pas : les idées font leur chemin dans la nuit, et sous le silence lugubre de la vie publique, la terr~ est pleine de murmures: il en sort des tombes, des prisons, des champs, des villes : les morts parlent, les pierres portent témoignage, l'histoire est vèngeance, et profondement troublée-l'Europe est si peu certaine, si mal assise, que la mort touchant le front d'un homme, il s'écroulerait vingt monarchies! Une vie d'homme, le grain de Cromwell, voilà la digue. Y a-t-il de quoi désespérer? Ah! que les pionniers de l'autre siècle travaillant sous la crypte catholique et sous les formidables assises de monarchies dix fois séculaires avaient plus de, peine que nous à monter vers la lumière et jusqu'à la liberté ! • Peuples et Proscrits~ faisons comme eux : organisons et servons par nous et par les nôtres uue infatigable propagande. Rallions au lieu de désunir, concentrons au lieu d'élaguer, appelons au ,combat, comme à la science, comme à l'étude patiente des problèmes sombres. Quel est le droit éternel et quel est le devoir sacré, permanent des nationalités morcelées ou des patries conquises? La conspiration, la révolte, la guerre, la guerre ouverte et la guerre masquée, toute~ les forces contre la force, contre !'Etranger toutes les luttes! •Que faisait l'Angleterre en Espagne quand elle prêtait aux bandes de l'Indépendance l'appui de ses armées? Elle servait, intérêt ou non, la cause· légitime des patries contre la violence étrangère. Que faisait l'Angleterre en 1648, lorsqu'entrant en révolte contre le trône, elle le changeait en échafaud et y poussait son roi Charles ? Elle retrempait dans le combat et dans le châtiment ses vieilles libertés menacées, elle pratiquait jusqu'au sang- le droit révolutionnaire contre les servitudes. Tous les peuples esclaves et tous les penples conquis ont le même droit que l'Angleterre; c'est l'histoire de la Suisse, c'est l'histoire de la Hollande, c'est l'histoire de 89, c'est la morale de tous les temps, et c'est le devoir du jour! Affadie par les habitudes commerciales et gouvernée par une oligarchie de vices et ce priviléges, l'Angleterre, aujourd'hui, semble avoir perdu ses mœurs fortes et les hautes inspirations de ses pères. Elle se traîne, avec ses vieillards, dans l'ornière des diplomaties, et ne reconna1t que des gouvernements. L'Angleterre sera plutôt morte que la Pologne ! Il y a plus de vie, en effet, dans certaines tombes où poussent les idées et les générations, et qni gardent la lampe du sacrifice, que dans )es sociétés opulentes et sans foi, qui ne savent ni h1tter, ni souffrir. Les martyrs sont plus forts que les Lords ! Ch. RIBEYROLLES. REVUE DE LA SEMAINE. Les Bashi-Bouzopks ont assassiné le général an(J'laisBeatson, chargé de les organiser. Jusqu'au Ier Ao(H, la situation était la même devant Séb~stopol. Le général Canrobert revient en France. Un Bill rétablissant l'ancienne législation du Dimanche passe en ce moment dans la Chambre des Communes; les manifestations de Hyde Park· ont eu raison ainsi et du Bill de Lord Grosvenor, et de la législation récemment introduite contre les Public-Houses. Le Time.~ donne de nouveaux détails sur la conspiration légitimiste .en France et en Espagne. D'après un document adressé au Comte de Mont(•molin (Carlos VI) et saisi sur le général Elio, arrêté en France, M. le duc d'Escars, bien connu comme un actif conspirateur légitimiste, aurait eu à Vienne une entrevue avec le prince Gortschakoff, l'ambassadeur russe. Celui-ci ayant répo11du qu'il n'avait pas d'instruction du Czar pour accorder des sécours pécuniaires aux Carlistes, Montemolin aurait alors proposé une confédération entre lui, son frère, Cabrera, et le Comte de Chambord et le duc de Modène, pour créer un premier fonds, déposé chez un banquier, pour solder la guerre civile. Aussitôt ce premier fonds formé, il serait plus facile de négocier ; mais les noms des personnages espagnols devraient seuls paraître, les Français préférant ne pas être mentionnés.-U ne lettre de Montemolin lui-même charge Cabrera d'expliquer (au Comité, sans doute) ce qu'on espère de la Russie, Tondis que les Légitimistes de France et d' .Espagne sont- ainsi accusés de préparer la guerre civile en s'appuyant su: le Czai:, le duc de Montpensier est reçu à Vienne avec des égards qui étonnent la presse; et ce fils de Louis-Philippe, ce beau-frère d'Isabelle II, visite le Comte de. Chamhord, avec qui, dit le Times, "il s'entend parfaitement sur les affaires qui les intérressent tous deux- au même dégré, celles de France et d'Espagne." . Voici, d'après l' ltalia e Popolo, la proclamation du Maréchal Castellane. Celui-ci vient d'être ap-- pelé à Paris et remplacé, par intérim, par le général Parthouneaux. Soldats de l'armée du Midi ! "S. M-. !'Empereur Napoléon III est mort. (Suivait un pompeux panégyrique du souverain défunt, avec l'expression des plus vifs regrets de sa part.) Le maréehal continue : " Le gouvcrriement ùe la France est de nouveau livré au hasard, car Napoléon III ne laisse pas d'héritier digne de lui. C'est de l'armée, ce boulevard de l'or,lre social, que le pays attend le choix du pouvoir auquel il devra confier ses destinées. " Or, quel est le gouvernement qui oWre les plus s0.res garanties de sagesse et de durée ? - La République ? Nous l'avons connue et appréci6e en 1848. (Ici, une diatribe furibonde contre les hommes de cette époque). " La maison d'Orlfans ? Elle nous ramènerait à ce gouvernement bâtard 41ui a donn~ tant de preuves d'inap. titude et de faiblesse, et qui nous entrainerait de nouveau aux abîmes dans lesquels il s'est déjà précipité,, " Reste la Légitimité. Elle est le seul principe qui puisse réunir tous les intérêts, tous les cœurs honnêtes, &.- ( Eloge magnifique de Henri V et de son systême.) .'' Donc, Soldats de l'arm~e du lHdi, vo11sn'hésiterez pas à vous rallier à mon exemple autour du Roi Légitime que la Providence nous a conservf, &." Un des soldats les plus dévoués de l'ancien parti répu. blicain, le citoyell Lecureux-, de la Marne, vient de mourir en Belgique-où, depuis la ruine de nos libertés, il vivait au milieu des proscrits ses frères. Beaune a prononcé-sur la tombe quelques paroles touchantes, et l'hoanête homme a été dignement honoré dans sa mort. VARIÉTÉS. MONUMENRTESV-OLUTIONNAIRES. '?odefroy C~vaignac ~st mort il y a•dix ans·: mais en nous vivent toujours son souvenir et sa pensée. Esprit puissant et noble cœnr, comme il nous a fait défaut ,dans la dernière Révolution ! Voici quelques lignes par lui publié'es, il y a vingt ans, dans la Revue Républicaine ; c'était le grand souffle qui l'animait ! Quand les académies, les instituts ne, sont qu'1me sorte d_esuperfétati~ns péd_an~esqueset gê~antes, des corpora. t1ons <lequas1-bénéd1ct1ns, un dortoir où vont s'assoupir des fainéans en réputation, des intrigants ou des· charla4 tans, on a grandement raison ùe les attaquer pour ce qu'on· n'y fait pas et ce qu'on y empêche de faire ailleurs. Mais comprise ainsi, comme une large centralisation de moyens et d'hommes spéciaux, fonctionnant dans cet ensemble d'impulsion que le pouvoir doit ajouter à la marche des intér~ts. moraux et matér~els <l'u?e _épo~ue, ces corps· academiques seront de véritables mst1tutions de -service public et de progrès social. Il faudrait seulement' que leurs séances fussent très fréquemment p11bliques et qu'ils fusseut formés par un système. spécial d'élec:ion, tout autre que cette candidature domestique qui les compose aujourd'hui. Publicité, flection, conditions fructueuses de toute assemblée, préservatifs contre l'esprit de par~sse, de coterie, de servilisme, La cour de cassa. tio~, elle-même, f~t dans_son plus grand éclat quand ell~ était élue. Helvétiu~, D1de~ot,Mably, Jean-Jacques, ne le furent pas par 1Académie; Corneille pensa· y avoir pour successeur un prince de quatorze ans, et Racine di. sait au duc du Maine : " que qua1ld il n'y aurait point de place vacante, il n'était pas un académicien qui ne tînt à grand honneur de mourir pour lui en faire une." La Révolution en fit donc une aux sciences, aux lettres aux art~, da~s ~'administration conventionnelle, et au; p~r son orgamsat1on, comme par son esprit, se les assimil?r pour _le commun av~ntage, Sous l'empire, il y ava1tà la pohce un bureau d esprit public, qui employait des faiseurs de vers et d'opéras à. échauffer l'admiration pour le mattre. Sous Ja Convention, une des sections du comité d'instruction publique comprenait, sous le titre de "!oralepublique, les théâtres, les fêtes nationales, l'érectl~n ~es monuments, _les in~titutions· natiowa)es et répu. bhcames; cette section était chargée de l'inspection des autres travaux du comité. Morale, instruction . voilà ce qui embrassait _etdominai~ tous les produits de '1a pensée, e~ ce_mot publi~ car~cténse, tout.es !es parties de l'orgamsat1on révolutionnaire. C est arnsi que, tirant le savant de sa solit11de, elle sortait le peintre et l'artiste des antichambres, des boudoirs, leur donnant à tous trois rendu;- vous sur la place publique. La Révolution animait les esprits les plus graves, épurait les habitudes ks plus li-

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