Homme - anno II - n.32 - 11 luglio 1855

sans réplique; et le Gouverpement en est venu à condamner lni-même cette farte de la limitation. Le Conte de Clarendon, en énumérant les détails relatifs anx Quatre Points, a avoué que " tout cela n' o.-ffraitaucune sécurité à la Turquie." Et l'autorité si grave de Lord Lyndhurst a résumé solennellement toutes les charges ,de l'accusation, en déclarant solennellement, Mardi dernier : " Qu'il se réjouissait d'avoir vu échouer les négociations de Vienne, car si les conditions proposées par les Alliés eussent été acceptées, la Russie aurait encore monté sur l'échelle de la • " pmssance. Je puis donc écarter tout le fatras diplomatique sur la Limitation qui n'affaiblit en rien la force de mon dilemme, et je puis résumer la question de Sébastopol' par les paroles <le ]\.[. Cobden ( 5 Juin): '' Je demande à ceux sur qui repose la responsabilité de l'avenir, si Sébastopol vaut le sang et les trésors prodig·ués pour s'en emparer ( si jamais nous en venons à bout ) ? si la prise de cette ville ne changerait pas la politique du Gouvernement, cette politique qui le privera de tout conconrs populaire snr le continent, car elle consiste à ne rien changer, en aucun cas,, à l'arran_r;ement territorial actuel de l'Europe ? Si on s'en tieut à cette politique, je ne tro:.ive d'antre but au siège de Sébastopol que de faire casser les têtes de braves gens contre des tas de pierres, de briques et de mortier, pour.avoir le plaisir de.dire ensuite: Nous avons pris Sébastopol ! taudis qne la Rnssie, au moyen d'un emprunt contracté le lendemain chez. un des banquiers de Londres, serait en état <le tout reconstrnire en trois ans, pins menaçant et plus fort qne jamais ! '' ,Je retrouve dans ces parolt>s l'opi11ion.q11ej'éxposais, il y au~ an, à Glasg·ow et à Henley; 8t je défie la sophistique subtile des dipl<rn1ateseuxmêmes d'y répondre. Voilà la position. Pourquoi vos héros vont-ils mourir en Crimée? Ponr donner à L. Bonaparte un pen de gloire militaire <lout il est en grand besoin '? Vraiment, faire ainsi la guerre ~quivaut à assassiner ; des journées comme le 18 Juin sont uue cahlmité nationale. Quel remède à nne telle position? Est-ce de s\nrêter tout-à-fait, comme paraît le recommander Cobden ? Dien nons eu préserve ! Ce serait pire que le mal. La question agitée par cette guerr~ doit être résolue; sinon ce sera, pour l'avenir, uu ){'gs de <lan~·ersaccrus et de guerres intermiuables. Quitter Sébastopol sa11s le prendre 't Non, il est trop tard; et ee serait maintenant dangereux. Le remède consiste à' cha11ger cette fatale politique qui s'est engagée à ne rien changer à.la carte de l'Europe. Voilà le remède; alors•la cataracte tomberait des yeux de votre Gou vernernent, le cauchemar quitterait leur poitrine oppressée, leurs chaînes seraient brisées; ils reprendraient du cœur en se retrouvant. hommes f't pattiotes, vrais Bretons; ils verraient aussitôt le moyen d'accomplir leurs énergiques résolutions ; ils viseraient à détruire la force de l'ennemi, et non pas seulement' à l'insulter; et le siège de Sébastopol ne serait plus la principale opération militaire, mais servirait de diversion et de complément. En agissant aiusi, ils prendraient Sébastopol plus aisément aveè 20,000 hommes, qu'avec les deux cent mille hommes aujourd'hui aux ordres de leur politique erronée. C'est là, c'est au point principal, à la politique, que doit s'attacher l'attention incessante de tous les patriotes, et non pas aux incidens et aux accidens sans importance de la guere. LOUIS KOSSUTH. :Revue cle la §en1aine. Le général Simpson a remplacé le maréchal Raglan comme chef de l'armée anglaise. Le Parlement a voté des pensions pour la veine et le fils de Lord Raglan. L'attitude de l'Autriche, et la déclaration de L. Bonaparte que " cette puissance n'avait pas rempli ses engagements," excitent beaucoup d'émotion tant à Vienne qu'à Londres. Le Go11vernemP.ntAutrichien ayant affirmé que ses propositions avaient été agréées par les Plénipotentiaires, et J. Russell ayant a voué que cela était vrai, le Times demande la destitution de ce Ministre trop pacifique, et recommence ses articles menaçants contre l' Allemagne. Le roi des Belges est à Londres ; des sollicitations ont été faites pour l'entraîner dans l'alliaoce occidentale. Il a expulsé de B·elgique les rédacteurs du journal le Nord, fondé pour défendre la Russie. Le roi de Naples, encouragé sans doute par l'échec du I8 J u'4.i, a proliibé l'exportation de toute espèce de provi- ,.. sions destinées aux armées Alliées. Il e11t rud1:.mrmt attaqué et menacé par la presse ~anglaise ; et l'agitation de l'Itali€, sillonnée en outre par des bandes de brigands, est-regardée comme une preuve de la nécessité d'agir contre les gouvernements ...... amis de la Russie. Espartero 'a donné sa démission, aussitôt que les Cortès ont eu voté les bases de la Constitution. Sur les prières d'O'Donnell et de la Reine, qni parlait déjà de s'enfuir de Madrid, li maréchal a repris la. Présidence du Conseil. Les Cortès, cependant, ont rejeté le projet d'emprunt forcé présenté par lui. Les bandes carlistes continuent à piller les provinces; et voici qu'un 'mouvement iocialiste vient encore compliquer la situation. Une insurrection a éclaté en Catalogne: les ouvriers réclament la reconstitution de la Société de Secours Mutuels, leur seul protection contre la cupidité des manufacturiers. Le Times prétend que ces derniers, craignant une révi1sion des tarifs des douanes préjudiciable à leurs intérêts, auraient fait des offres à Cabrera et aux Carlistes; et que l'insurrection-maîtresse de Barcelone par la retraite de troupes restées fidèles dans la cit,ùlelle-mérite l'appni d'Espartero, dont elle acclame <l'ailleurs le nom. LPs manifestations d'liyde Park l'ont emporté sur la bigoterie des classes gouvernantes ; Lord R. Gru$vcnor a retiré le Bill, cause de l'agitation populairP. MM. D11~~ combe, Wilkinson, Roebuck, Fox, Williams, 011tvainement réclamé une enquête parh:mentaire contre les brutalités de la police; et .M:. Duncombe ayant annoncé que Je peuple irait en armes, le Dimanche suivant, à Hyde Park, Sir G. Grey a répondu que le Go~1vernement saurait rési:;;;- ter anx perturbateur~. ' Pourtant, on s'est sagement abstenu d'cngcJgcr la lutte; 011 a laissé la foule remplir Hyde Park, écouter le!5 orateurs, huer le petit nombre de voiturrs particulières hnsardées rlans le P:.rk; la police est intervenue, mais en petit nombre et sans se montrer provocante, pour mettre fin anx plnies rle pierres lancées contre les maisons aristocratiques de Gros,·rnor Squnre et rles rues arnisinantes : "les gamins ont donné là de l'ouvrage à tons l0s vitriE'rs de Lo11dres." Les tribunaux ont prononcé iles condamnationi.- peu sévères - contre les 'Personllf's accusées d'avoir jeté des, pierres à la police le Dimanche p1:~cédent. Lorrl Pal mers ton a été hué (sans être reconnu) ; Lord Cardigan, le vaillar,t vaincu de Balaclava, a été reconnu et salué par les applaudissements patriotiques de la foule. La maison de Lord R. Grosvcnor a dû être protégée par la police, qui été forcée de demander du renfort pour soutenir le siège. Co1r1·espontlan.ce d~ 5 juillet l 855. Paris,~près un si long hiver, se débat au_iourd'hui sous des chaleurs tropi<.:ales et s'apprête à recevoir de son mieux le fléau Choléra qui vient de franchir le Rllin. La fieur de l'Empire, Madame Eugénie, se fait éventer, là bas, àans sa villa de Biaritz, entre les montagnes et la mer, et les Pëtrisiens s'attendent à voir bientôt partir le chef-époux qni n'aime guères, comme chacun sait, ni la peste ni les balles. Cet homme-providence était bien triste rlans son dernier discours; il annonçait mélancoliquement son impuissance dans les Conférences de Vienne et l'Mernelle temporisation r1e l'Autriche si féconde en péripéties et· métamorphoses. Hélas! qu'en dira le chevaleresqite empereur de Vienne ? ils étaient si bien faits pour se comprrrndre, les è.eux Césars d.u vol et du sang ... M. Bonaparte a déclaré qu'il ne demanderait l)OÎnt au pays ùe levées extraordinaires, mais le voilà qui coupe en fleur sa moisson de l'année. 140 mille conscrits seront massés en octobre, et le premier janvier partiront r.es nouveaux i:-onvoisdt la mort. Dans l'année 1855, on aura fait deux' récoltes humaines, on aura fa11ché près de 300,000 hommes ; que te rcscera-t-il,' ô Patrie ! quand viendra l'invasion ? La France ne sait pas ce qui se passe en Crimée ~ maii. parfois cle:séclairs arrivent par la presse étrangère, et ee sont pour les familles rle sinistres lueurs. Voici ce que dit la dépêche russe de Sébastopol, publiée par les journaux allemands : Il s'agit de la journée du 18, anniversaire-W arterloo,et de l'assaut Malakoff. C'est l' Abeille russe qui parle: "Les pertes de l'ennemi, dont les colonnes étaient expo- " sées à un feu de mitraille et à une fusillade bien entre- " tenus, sont extrêmement considérables. " Nous en avons eu la preuve 1rnndant l'armistice " demandé le lendemain, à 6 heures du soir, par le corn- " mandant en chef des armées alliées,. Le nombre des " morts était si grand que les Français manquaient de " moyens de transport, pour emporter tous leurs cada- " vres,. et que l'officier qui diri,9eait cette opération s'est " vu dans la nécessité de nous inviter à vouloir bien en- " terrer nous-mêmes les cadavres ennemis qui se trou- " vaient DA~s nos fortifie 11,tidns. "Ainsi 1:i.garnison de Sébastopol, aprè11 un siége de "9 mois et 3 bombardements meurtriers a repoussé un "assaut qui devait être dé~isif; elle a fait essuyer à l'enN ons savons ce que valent tous ces bulletins et quoique les Russes soient moins hâbleurs que nos héros-aventuriers, nous n'acceµtons point leurs chiffres pour ~rapte. Mais que faut-il penser après cette version, des 15 cents morts accusés par l\f. Pélissier ? c·est au moins cinq ou six mille soldats qne doit nous avoir coüté cette fantaisie dernière ! Si nous 11e savons rien du dehors, si ce R'est par contrebande, nous ne sommes guères mieux rcmseig-nés au dedans, et c'est encote à la presse ét.1angère que j'emprunte les révélations qui suivent. On lit dans la Gazette d'Augsbourg: Rorrleaux a été dernièrement le théâtre d'un événement fort triste et dont il a été strictement interdit aux journalistes de parler. Il s'agit d'une grève. L'opposition commencée par les cordonniers a été suivie par les boulangers et les ouvriers en bàtiment. L'augmentation énorme des loyers et des objets de consommation a contraint les 011vriers à réclamer une aug•1entation proportionnelle d<> leurs salaires. Les boulangers se réuuirent et élnt"rnt une députation chargée de se rendre chez le préfet pour lui présenter leurs griefs. Le préfet refusa d'iBtcrve11ir et l~ur <lit que l'affaire était de la compétence du maire. Trois ,lélégués furent <loue envoyés i't cc magistrat : mais le commissaire central Chauvin les fit arr8ter sans autre forme de procè~. Cette mesure exaspéra les onni ers qui se livrèrent à divers désordres (sic). ll paraît, qu'alors, M. Chauvin, entouré d'un gr::ind nombre d'agents de police, dé houcha snr la place, et sans ancune provocation de b, part des travailleurs, les frappa rle sa cravache. Les; agents, à son exemple, distribuèrent ~l0s coups de rotin. De là, un grand tumulte qui rendit uécessaire l'intervention des tronpes, et l'on fit un grand nombre d'arrestations. Ainsi, guerre malheureuse, impôts écrasants, emprunts fabuleux:, grèves et misères, voilà le temps ! Le peuple et l'armée, dit-on, vonlaicnt l'Empire; il lenr fait de charmants loisirs et cle l)ellrs destinées ! Un vétéran du travail, 1111 de ces hommes .du devoir qui honorent l',ttelier <'t la patrie, le père du citoyen Grepp0, ex-représentant 'du peuple, est mort dernièrPme11t à Lyon. A sa dernière heure, il n·a pu ,,oir son fils, proscrit par :\1. Bonaparte et qui lutte à l'étranger pour trouver son pain et garder l'honneur. Hélas ! ces cruelles séparations sont la plns terril,lr, douleur de l'exil, mais les âmes républicaine~ ue savent pas plier: et, nous connaissons celle de Greppo. T. J. STATISTIQUE DR LA GUERRE. A une époque où la gueru préoccnpe si vivement l'attention publique, on ne lira pas sans intérH les renieignement 8 qui suivent: Dans ~e quatorzième siècie, il y eut quarante-trois ans de gnerre, cinq de guerre civile, treize de guerre porti\e à l'ext6ricur, vingt-cinq de guerre sur le sol de h France. Il y eut quatorze grandes batailles, entre autres celle de Courtrai, où les flamands firent trophée de quatre mil1e paires d'êpe1 ons rie chev:diers francais, et celle de Poitiers, qui coûta la liberté au roi di Fran~e. Dans le quinzièmt: siècle, on trouve soixante-et-onze années de guerre: treize <leguerre civile, quarante-trois de g11erre sur le sol d0 la Fra~1ce, qniRze seulement où la guerre fut portée sur le 1;01étranger, et onze grandes batailles, parmi l,esquelles on remarque celles d' Azincourt, de Castillon et de Monthéry. Dans le 11eizièmesiècle, on compte quatre-vingt-cinq aunées de guerre: quarante-quatre de guerre extérieure, huit de guerre sur le territoire français, trente-trois <leguerre ci,·ile et religieuse. Il y eut vingt-sept batailles rangées, parmi lesquelles on en compte onze où les Français, animés par l'isprit de parti, et surtout par le fanafüme religieux, se battirent et se déchirèrent entre eux. Dans le clix-septième siècle, il y eut s;oixante-ueuf années de guerre : six de guerre religieuse, onze de guerre civile, cinquante-deux de guerre portée à 1'extérieur. On compte, dans ce siècle, trente-neuf batailles rangéeg. Dans le dix-huitième siècle, on trouve cinquante-et-un ans de guerre extérieure, ufl an de guerre religieuse, six a.ns de g1,erre civile, en tout cinquante-huit années de guerre et quatre-vingt-treize batailles. Ainsi, dans l'espace de cinq siècles seulement, 011 compte trente-cinq ans de guerre ci vile, quarante ans cle guerre religieuse, 'soixante-seize ans de guerre sur le sol de la France, cent soixante-quinze ans rle guerre à l'extérieur, eu tout trois cent vingt-six années de guerre, pendant lesquelles se livrèn,nt cent quatre-vingt-quatre • batailles rangées. En lisant ce triste compte, qui n'est pas fini, l~élas ! en songeant que nous figureroni; quelque jour al!ssi dan3 ce total des boucherie:s humaines, combien l'on est tenté de s'écrier avec le poète anglais : " nemi des pertes énormes, et elle se prépare à repousser " de nouvelles attaques avec trne abnégation héroïqtte." " Oh! que j'aie un coin où œ'abriter, dans quelquo vaste désert, dans le voisinage de quelque forêt illimit&e, là où la rumeur de l'opJlression et de l'imposture, de la guerre heureuse ou malheureuse, ne puisse jamais plus m'atteindre. :M:onoreille est blessée, mon âme est malade de ce que j'apprends chaque jour des maux et des outrages dont la terre est remplie. Il n'est plus de chair qui palpite dans le cœur endurci de l'homme, il ne sent plus rien pour l'homme ; le lien naturel de 1a, fraternité est tombé, comme le chanvre qui tombe brin à brin au tflu- • cher du feu." . ~

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