p---.;.,.J----------------------------~--------------------------- ses instruments, est obligé de les avilit, pour qu'ils ne <deviennent pas rivaux ; il les froisse pour le:; employer. Aussi, tontes les âmes fières s'éloighent ; et quand les âmes fières s'éloignent, que reste-t-il? Des hommes qui :savent rampét, mais ne sauraient défendre; des hommes qui insulteraient les premiP.rs, après sa chute, le maître' 1u'ils auraient flatté." ,. Ceci fait de l'usurpation le plus di!>pendieux de tous les gouvernements. " Il faut d'abord payer les agents pour qu'ils se laissent dégrader; il faut ensuite payer encore ces agents dégradés pour qu'ils se rendent utiles. L'argent doit faire le service et de l'opinion et de l'honneur. " Les représentants d'un peuple, sous un usurpateur, doivent être ses esclavE's pour n'être pas 1,es maîtres. Or, de tous les fléaux politiques, le plus effroyable est une assemblJe'qui n'est que l'instrument d'un seul homme. Nul ne saurait v-ouloir en son nom ce qu'il ordonne à ses agents ne vouloir, lorsqu'ils se disent les interprètes libres du vœu national. Songez au sénat de Tibère, songez au parlement d'Henri VIH." "S'il fallait choisir entre l'usurpation et un despotisme consolidé, je ne sais si ce dernier ne me semblerait pas préférable. " Le di:spotisme bannit toutes les formes de la liberté ; l'usurpation, pour motiver le renversement de ce qu'elle rempla<:e, a besoin de ces formes; mais en s'en emparant, elle les profane. L'existence de l'esprit public lui étant dangereuse, et l'apparellce de l'esprit public lui étant nécessaire, elle frappe cl'une main le peuple pour éto11ffer l'opinion réelle, et elle le frappe encore de l'antre pour le contraindre au simulacre de l'opinion supposée. "Q1iand le grand seigneur envoie le cordon à l'un des ministres disgraciés, les bourreaux sont muets comme la v1ct1me; quand un usurpateur poscrit l'innocence, il ordonne la calomnie, pour qne, répétée, elle paraisse un jugement national; le despote inter,lit la discussion, et '11'exige que l'obéissance; rnsurpateur prescrit un examen dérisoire, comme préface de l'approbation. "Cette contrefoço11 de la liberté réunit tous les maux de l'anarchie et tous ceux de-l"e~clavage; il n'y a point de terme à la tyrannie qui veut arracher les symptômes du consentemrnt. Les hommes paisibles sont persécutés comme indifférents, les hommes éuergiques comme dan- _.gereux. "C'est l'usurp,:tion qni a inventé ces prétendues sanc- 'tions, ces adresses, ces félicitations monotones, tribut habituel qu'à toutes les ép©qaes, les mêmes hommes prodiguent, presque clans les n:1ê-rnesmots, aux mesures les plus opposées: la -peur y vient singer tous les dehors du courage, pour se félioiter de la honte et pour remercier du malheur. Singulier genre <l'artifice dont nul n'est dupe! comédie convcn11e qui n'en im110.:;e à personne, et qui, d€puis l0ngtemps, aurait d:l succomber sous les traits du ridicule ! l\Iais le ri<licule attaque t:.>ut et ne détrnit rien. Chacun pense avoir reconquis, par la moquerie, l'honneur de l'indépendance, et, coutent ,l'avo_ir désavoué ses actions par ses paroles, se trouve à l"aise pour démentir ses paroles par ses actions. "'Qui ne sent que plus un gouvernement, est oppressif, plus les citoyens épouvantés s'empressent de lui faire hommage de leur enthousiasme de commande? Ne voyez- ,·ous pas_, à côté d'!s registres, que chacun signe d'uue main tremblante, (;es délateurs et ces soldats? Ne lizezvous pas ces proclamations déclarant factieux ou rebelles cE:ux dont le suffrage serait négatif? Qu'est-ce qu'interroger un peuple au milieu des cachots et sous l'empire de l'arbitraire, sinon dc.1 ander aux adversaires de la puis- ··sance "une liste pour les reconnaître et pour les frapper à loisir? BENJAMIN CONSTANT. CORRESPONDANCE. On nous écrit de Londres : Louis Bonaparte n'a point visité le Parlement, bien· ,qu'il y fût invit:é par 153 Lords présents à Londres. Cela a remis en1mémoire la dissolutio~ de l'Assemblée Législative et tout le Coup d'Etat. Le décret nommant l';.imiral Hamelin ministre de la Marine, est daté de Windsor Castle!. .. . . . Quatre Chartistes ont été arrêtés pour a\·oir vendu iles pan.iphlets de V. Hugo ; les efforts d'Ernest Jones et de ses. amis n'ont pu les faire relâcher en attendant T audience ...... ... Le ùocteµr Pliilippe, qui avait eu l'heureuse idée de •.collectiom1er 50 à 60 caricatures sur le premier et le troisièm-eBonaparte, anciennes ou nouvelles, avait converti · sa boutique de pharmacien en magasin d'estampes et en avait couvert sa devanture. Vendredi, vers midi, je passe ,chez lui. C'était depuis qi1elques jours une prncession de , curieux et de furieux dans Greek Street. Mais, à ce mo- -ment, une troupe de forcenés, conduits~ pa-r un homme -ivre, se rua sur ou 'plutôt vers la devanture, en proférant ,des menaces de mort contre les Républicains rouges. .Placés, Philippe et moi sur le seuil de ia boutique, nous •eümes· à subir un as, aut, plutôt en injures et menaces ·toutefois qu'en actions; h foule était furieuse. et excitée par les vociférations de -quelques mouchards. Toutefois, mous avons maintenu t1\~tgiqU'em-ent la bande ,le forieux à ,'!!istance,jusg_u'à ce que les difl.érentes proscriptions, qui demeurent aux environs, nous vinssent en aide. A ce moment 1a circulation était interdite entre Church StrePt et Old Compton. Craigl'lant l'irritation accnmulée au cœur des proscrits, les furieux se sont pruclemment retirés, et la police. est enfin arrivée ... pour protéger la boutique_. ... Voici en -quels termes le Daily News, rend compte clés incidents qui ont signalé la visite de Louis Bonaparte à Guildhall : 1 " Il y a dans Pickett Street, juste en dehors de Temple Bar, une boutique de libraire, tenue par M. Truelove, et appelée "la librairie de la Réforme": sur la porte, 1111 placard était affiché ; on y lisait , " visite de l'empereur d·es Français en Anglt:terre, par M. Victor Hugo, de son'exil." " Le placard annonçait aussi qu'on pouvait acheter le pamphlet du réfugié moyennant nn penny. Quelques remarques furent faites sur l'inconvenance d'afficher un placard destiné à insulter les hôtes distingués de la reine; mais cela ne fit aucun effet sur le libraire. Vers onze heures, un gronpe de personnes bien mises s'avança vers la bo11tique : l'une d'elles portait une gaffe de marin, et commença à déchirer le placard, objet de leur colère. En ce. moment, Sir W Molesvorth et sa femme passaient en voiture. et la foule les reconnaissant, les salua de bruyrrntes acclamatio11s qui furent priies, à tort,par les asaillants de la librairie pour des appla1,1tlissements. Ceux-ci se précipitèr'ent aussitôt dans la boutiqne, détruisant les vitrages et menaçant le propriétaire. L'inspecteur Dodd, de la police métropolitaine, assisté de plusieurs constables, se jrta entre les deprédateurs et Lt porte et garantit la mai,on contre toute attaque subséquente." Le Jvlorning-Post ajoute que l\f. Truelove ferma sa bontique et ses volets et s'~nferma dans sa-maison, château jo1·t rle l'auglais." Ce sont là -de tristes scènes, mRis bien connues des proscrits français qui Ile les out vu qne trop souvent pratiquer dans Paris, depuis l'Empire et même sous la Présidence. li n'est donc pas étonnant, puisque 11 police bonapartiste y foisonnait, qu'o11ait eu ce petit spectacle dans les dernières fêtes de Londres. ' Mais il est à regretter que, chez un peuple lihre, les mœurs sévères et fortes 11e soient pas mieux g·ardées. Il est vrai que c'est, parfois, une étran~·e ~iberté que celle d' Ang-leterre. Ainsi, 11011 seulement on pille, 011 dévaste la boutique d'un libraire qui paie, comme tous ses confrères, ses impositions et ses taxes, mais on refuse des timbres à M. Ernest Jones, le courageux éditeur du People's Paper, et on le poursuit dans ses r(ferences-ccrntions. . • On veut le prendre par l'argent <JUi est le nerf de la publicité, comme <le toute chose en Angleterre. Entravée par l'argent ou bien étrang·lée par la •force, qu'importe à la liherté '? - C'est toujours la mort, et le crime est le même. C. R. Be-vue tle la Seo1aine. Les Conférences de Vienne so.nt ajournées sine die, indéfiniment ajournées; c'est un terme polï pour dire qu'elles sont rotl}-pues; mais l'AutrichP a insisté pour laisser la porte ouverte aux négociations et aux espérances pacifiques, et la France et l'Angleterre ne savent rien refuser à l'Autriche. C'est le 'rroisième point qui a fait rompre les Conférences. Les Puissances Occidentales avaient cependant atténué, amoindri leurs demandes "au point, dit un journal, qu'aller plus loin dans les concessions, c'était rendre illusoire le troisième Point." Les diplomates russes ont demandé des instructions à St.-Pétersbourg .... et ont enfin rejeté l'ultimatum. Après une chaude discussion: " Vous n'avez rien à ajouter, demande 1\L de Buol, le ministre nutrichien, à M. Drouin de Lhuys. " Rien absolument; rwus sommes au bout," a répondu ce dernier; et on s'est séparé sans prendre jour. Lord John Russell est de retour en Angleterre, où Lord Palmerston a déjà annoncé ,le résultat négatif des Conférences, et où le ministère fait un empi-nnt de 400 millions de francs pour subvenir aux frais de la guerre. On assure que M. de Rotschild fera cet emprunt. Le bruit c0urt à Paris de la levée du sièg·e de Sébastopol. Toujours est-il que l'ouverture de !'Exposition universelle, à laquelle doit présider Louis Bonaparte, est ajournée a-u 15_ Mai, les équipages et les préparatifa de voyage contremandés, et un messager envoyé à Constantinople pour fo-ire-suspe-nd-reles préparatifs de la rlception impéri'alti. L'e voyage en Crimée n'aura pas lieu. L'embarquement et le transport des troupes continue néanmoins. Tandis que vingt mille 'rurcs ont quitté Enpatoria pour protéger Bnlaclava contre Liprandi et couvrir les opérations de l'armée assiégeante, la cavalerie fr:iuçaise, déjà ~n 'rurquie se concentre à Constantinople, po.ur s'embarquer; les vapenrs emportent eu Orient chevaux, et cavaliers par milliers; et le 2Ie de ligne a quitté Rome en destination pour la Crimée. L'armée piémontaise s'embarque et par't aussi pour le siége meurtrier. Ull triste incident a signalé le départ; le Crésus, vapeur anglais, transportant trois cents hommes et <le nombreux ap- • provisionnements, a pris feu et a dû. s'échouer sur le sable du rivage pour sauver la vie des hommes qu'il çivait à bord et dont p!usiei:.1rsont néanmoins péri. ·ce désastre est de funèbre présage pour l'ex péd1tion. Le feu des batteries de siège s'affaiblit de jour en jour, et une escarmouche de nuit, tentée par deux frég·ates contre les forts, n'a eu aucuu résultat. La flotte de la Baltiq1.Leest ar;ivée à Kiel; les glact'S fondent mais lentement, et les opérations· navales seront moins prolongMs que l'an'née, dernière dans les mets dn Nord. Dans !'Océan l>acifique, la frégate russe Diana, vainement poursuivie dans les ports du Kamtschaka par les escadres alliées, il y a un an, vient de faire naufrag~ sur la côte du Japon, à la suite d'un tremblement de terre et d'un ourag·an. L'équipage tout entier a é(é sn':n·é. Les escat1res alliées se prér>arent à recommencer l'attaque. <le Petropawloski. Le ministère piémont:Jis a d,onné sa démission, à la suite de l'opposition faite par le Sénat à l'abolitio:1 des Coavens, et par crainte de l'adoption d'une proposition faite par les évêques pour transformer en dotation le salaire des prêtres inscrits au budjet. • Les Cortès espag·no!es ont voté la loi relative à L-.1 vente des biens nationaux, communaux, du Clergé, eufin cle tous les biens <lemain-morte. 'route la presse européenue, maintenaut que les Confëtences sont romp.ies, s'occupe de l'attitude de l'Autriche. Le corresnondant du Time$ à Vienne a, dès le débnt, an;10ncé que l'Autriche ne ferait pns la guerre à la Russie, et il ne change , pas d'opinion, malgré les assertions du _!Jfouiteur et le huig-age <lessalons et des jou, nuux autrichiens • Ûrt parle du départ <lu général Hess pour l'~nnée; d'une convention militaire signée avec la France; et le correspondant dit que cela se réduira à un~ inspection <lu général en Hongrie et sur le Danube, et à des promesses faites avec des conditions qui les rendront inexécutables et illusoires. Quant à la Prusse, on la regarde comme alliée à la Russie, et on suppute quellf's seront les autres puissances allemandes qu'elle entraînera dans cette alliance, au moment décisif. 011 dit gue la Prusse a offert à la Bavière le Tyrol et Falshourg (Etats aµtrichiens), si elle prend le pc1rti du Czar: ceci ferait croire à la sincérité de l'Autriche dans ses promesses aux Cabinets Occidentaux, si sa perfidie u'était proverbiale. Tandis que les diplomates se trbmpent mutuellement, et que les armées expirent sans résultats, la science jette une ligne télégrnp1lique dans la Mer Noire, de Balaclava à Varna. On pourrait savoir dans la journée ce qui se passe en Crimée. Le .llfoniteur français annonce officiellement, à la date de dimanche dernier, qu'un Italien des Etats-Romains a tiré sur Louis-Napoléon qui se promenait à cheval aux Champs-Elysées . Uu journal anglais du soir, qui donne quelques détails, prétend que l'homme arrêté aurait dit : j'ai voulu venger la République romaine ! Il y aura bientôt, six ans, le fait n'est que trop certain, que la Répnblique romaine est morte sous les bayonnettes françaises, et, M. Bonaparte étant Président, Ceci nous rappelle •un autre souvenir : Il y a trois ans passés, en plein Coup d'état, et sous Louis Bonaparte, dictateur, douze ou quinze cents citoyens, parmi lesquels des vieillards, des enfans, des femmes, tombèrent as~assiués sous la mitraille, en plein boulevard de Paris : il n'y avaft pas eu provocation ; il n'y avait pas de défense possible! Ceci est de l'histoire qu'on trouverait écrite dans le Times lui-même.
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