Nous recevons de Londres la lettre suivante qui s'adresse aux proscrits. Nous ne partageons pas toutes les opinions historiques formulées ch111sce document: mais la condition de liberté, dans l'exil comme ailleurs, est notre progrnmme, et nous nous devons à ln propagande. - Un mot sur le fond. J,a cause de notre chûte momentanée est plus haute et plus sérieuse qne les fautes des hommes et des partis. Nous étions, en Février, entre deux sociétés, celle du pttssé qni voulait garder tous ses priviléges, celle de l'avenir qui voulait tout renouveler. Il y eut là, la rencontre de deux mondes. Si les socialistes préoccupés de la question du . travail ont trop oublié la politique de la Révolntion générale, et si les bourgeois, inquiets sur leurs intérêts, l'ont tout à fait méconnue, de ce grand.mou- ·rnment aujourd'hui compromis, mais nun perdu, deux choses restent pourtant: - d'mrn part, le suffrage universel, premier rudiment et premier essai d,e la Souveraineté publique, - et <le l'autre, une étude approfondie de la q nestion sociale. - 1:'instrument et la loi, c'est quelque chose, et vienne un nouveau Février, on ne travaillera plus dans l'ombr(>. C. R. LETTRE AUX PROSCRITS. Londres, le U F,hricr 1835. Cn·oY.»Ni, li y a !ept ans déjb, en 1848, date q'<-tc:rnclle mémoire, lc11 _porte-couronnes g:rands et p"!lits tomb~ient les uns rnr }e~ au~res eomme des capucms de carte, au premier souffle de la Rc·,olut1on. A l:\ suite du roi Louis Philippe qui CO!lJmençait le branle en fuyant de Paris, l'emperenr Ferdinand chassé de Milan, disait adieu à l'Italie; le roi de Prusse en faillite, <léposait son bilan dans nne charte ù Ilerlin; le grand duc de Bade se sauvait comme un voleur; Rome destituait le pape; Fiorcnce et Veni~e proclamaient la République; la Hongrie brisait sa chaîne; la Polog-ne gecouait la sienne; et le Czar lui-même, 8·abritant dans st-~~laces eontre les feux de la trorfibe, chantait aux rois bn11és : Chacun pour soi ! Bref, des rives de la Seine aux bords du Danube, toute i•Europc se réveillait au cri de Liberté poussé par la France et riipondait comme un écho vivant au coup de tonnerre de Février. C'en était fait. Les enfants de la terre, les Titans avaient escaladé le ciel, pris la foudre et chassé les dieux. Puis tout à coup, feux et foudres s'éteignirent. Tremblements cle trônes, chûtes de rois, soulèvements de peuples, tout se calma, tout cessa, tout rentra dans le silence, la nuit et le nêant. Ossa et Pélion furent remis sur le corps des géants; ]'Olympe des rois 1·edcvint plus bleu, l'enfer des peuples plus noir; l'ordre régna partout comme à Varsovie; le deuil, le désespoir et la mort remplacèrent partout l'allégresse l'espérance, et la vie. Les rebelles ilésarmés reJ>rircnt le joug ; et l'on n'entendit plus que le rire des bourreanx et le soupir des victimes; et la Liberté vaincue pleura et saigna comme l'antique Tell us sur ses fils massacrés. . Et maintenant, les rois ra~surés contre les peuple~ guerroient ensemble, se battent entr'eux pour la prééminence, versant le ~ang humain comme la pluie ctjouant avec la ,ie d.e leurs sujet~ à qui présidera le chao~ ! . . , Jupiter sera-t-il Russe Oil Corse, knout ou pm;nnrcl? Voila eù nou~ en sommes aujourd'hui, en 1855, au septième anniversaire ele la Révolution. C'est un rêve! Pourquoi cette fin affr.euse? Comment un chanrement si brusque? Comment et pourquoi cette pleine réaction ? C'est la question. Pourquoi la victoire est-elle devenue la défaite! Commenl il!s vaincus se sont-ils retrouvés vainqueurs! Comment une oppression nouvPlle, plus cruelle et·pl11~ dure, e~t-clle sortie de l'insurrection? Pourquoi l'Europe libre est-elle rctomhée Mclave? Pourquoi rois à terre et papes à pied sont-ils remontés sur mules et leurs peuples? Pourquoi nous ont-ils remis la ùricle au cou, la selle ail dos, l'éperon- au flanc, le mors aux dents? J>omquoi de citoyrns que n?us étions hier, so1nmes-nou~ aujourd'hui, multitude, sujets, pts encore, serfs, nèg.re.~, cluens; car nous avo11sdes maîtres! Honte et mall1eur ! Est-ce has.ard, fatalité, diablerie? Non. Il n'y a que de la logi1p1e au monde. Toute peine suppose 1111 crime. Eh bien !_confe~son.s I,c, c'est not~e faute ( Q,ue la leçon nous serve au morns ! Nous n avons pas fait nl)trc devoir. Nous n'al'ons pas ét~ solidai;res dans la Rél'olution, et les rois l'ont été dans la réaction. Oui, c'est notre faute, et il faut le dire aujourd'hui, non pour le 1'tupide plaisir de récriminer, Dieu nou!' en !l'anle ! mais pour l'a.vanta.,.e g.'apprendre, pour savoir mieux ce qui est à faire par ee qui n°été (ait. Ceux qui regardent en arrière avec l'œil_ du r_eproche et du regret, ressemb~ent à cette commère de ln B1~le; ils ~e pétrifient dans leur res~e!ltnnent. Retournons donc la tet~ vers le passé, non comme la vieille femme de Loth, par dése_spo1r du prése,it, mais au profit de l'avenir, afin de marcher ensuite, ~l'un pas ·plus prompt et pins sûr, guidés par une colonne de lumière, 'fers la terre promise, malgré les sabl~s, les flots et l_esPharaons. bui c'est notre faute à tous. Que chacun exammc sa conseiencc' et nul ne sera sans péch6 pour jeter la première pierre ; et 11 ous verrons qne nous nou~ sommes ~ou~ trom_pés plus ou mo\ns. IJ ne sied à personne de faire la confession des autres et ce n est pas à la France surtout de dire les torts del' Italie, del' Allemagne, de la Jion.,.rie. Le~ Italiens diront eux-mêmes qu'au lie•J deg Républiques 0 Romaine, Toscane, Lombanle, ils devaient avoir la ll,épubliqne Italienne; les Alle1;1ands qne _le~arlement de Francfort, ne devait pas, au contraire, ~oulo1r 1 .~llemagne partout jusqu'en Italie; les Hongrois .... Mais non ... 11. chacun s~n aven! Voici Je nôtre: avadt et plus que les autres. 11011sFrançais, nous s-ommes noupables de la Contre .•Révolution ! _ . , Oui encore une fois, c'est notre faute a tous, mais a nous, Franç,:is, ~urtont. Car la responsabilité est proportionnelle à la tl 11 hc; la tâche à la force. Force oblige. Nons avons eu po~voir, par eonséquent devoir, de délivrer les autres. Et pou: n'avoir p~s rempli notre devoir, il nous II fallu commettre un cnme et su ?1r une peine. Pour n'avoir pas délivré les autres, nous avons rt\'é Jeurs fors d'abord, puis les nôtres, nous e11clrnî1H1ntnous-mêmes après eux~ tyrans à R?me, ~claves à Paris, 1 fuisant partout ln serv1tude, n'ayant pas fait la liberté partout. C est notre très grande faute et notre peine e8tjuste. Voyez! Nous affirmons la Rép.ublique le2+ Février et nou!'I h I\ÏtA• Je 5 Mafs. J.tappcJez-T'tJU:; I, manifest~ da i Man, si,n6 Lamartine-. Ce manifeste, ou plutj3t cette lettre tic faire part ·qui annonçait a.umonde la venue ou plutôt l:i. mort de la Révolution. Rappelez-vous ce fameux dithyr:imbc contenant la ppliti'.1ue, non, la démis~ion de la République. Rappelez-vo_us le bien! Car c'est là l'erreur principale, capitale, fatale qui a précedé, amené, décidé to1,1t€Sles :i.utres et qui d tout perdu. Ce manifeste hél11s ! réduisait la Révolution à la France. Il enferrnait la flamme dans le foyer pour l'éteindre; il étouffait le droit en le bornant. Il n'aclmettitit pas la propagande armée; il ne l'OU1:iit que la force et l'effet de l'exemple; il s'en tenait à l'idée pure, comme si l'hcmmc était un pur esprit, comme s'il n'.1vait pas un corps avec'une âme, comme s'il ne devait pas agir après avoir pemé. Il aboutissait à la non-intervention, ;t la politique déti·ônée dn juste-milieu· chacun chez soi ! Vrai Philinte, il était l':1mi de tout le monde et l'ennemi de personne; il saluait les peuples, mais il reconnai~sait les rois; il déclarait qnc les cieux principes, Démocratie et Royauté, étaient d'humeur compatible, que le droit pouvait \'ivre en paix à côté du fait, la Liberté voisiner tranquillement avec la Tyrnnnie, et la République s'accorder en lionne fille avec le~ honnêtes souverains On ne pouvait pous~er plus loin l'amour de l'accord; et l'auteur des Harmonies devait être le poète de cette politique ou le politique de cette poésie. Que ce digne troubadour ait voulu marier l'eau et le feu, oui et non, bien et mal, République et Monarchie; deux principes vraiment manichéens, contradictoires, inconciliables. tont est permis aux !\!uses! Mais en outre, par une contradic.tion et une licence plus que poétiques, lui pur esprit, lui ange, lui aîlé, éthfaé, il subordonnait l'it!Pe au fait, soumettait le droit à des conditions matérielles et paiennes de temps et cle lieux, faisait d'une question de droit et de principe, une question de géographie et de chronologie, comme si le droit dépendait de l'heure et de l'espace, comme si le principe avait affaire aux arpetiteurs et aux horloger~. comme fi le principr avait des montres et le droit des frontières; comme si le droit enfin, n'était pas quand même, en tous lieux, en tous temps, éternel, universel, antérieur et supérieur, souverain et absolu comme Dieu tiu'il est! . L'unité de droit, voilà l'idée pure qu'il fallait proclamer de gré ou de force le 5 Mars! Voilà la vérité qu il fallait prêcher et prêcher aux sourdes 0reilles, à coups de canon ; vérité ,,ieille comme le monde, assurée par les testaments anciens et nouveanx, par les évangiles d'autrefois et d'aujourd'hui, par les religions pt les philosophies, par la Bible et le Contrat social, par l\loïse eomme par Roussc:iu; vérité qui a toutes les preuves requises pour la certitude humaine, le sentiment, la r;i.ison, l'expérience, tout, jusqu'à la tradition et que le manifeste du G .Mars a mi::;e sous le boisseau ! L'nnité de droit, c'est, eu effet, le premier peuple proscrit, !'aîné de l'exil, celui qui a erré avant les autres et qui erre encore sur les rives des Babyloncs, e,'est le peuple juif, qui ~e disait pourtant peuple de privilège, c'est lui, peuple (Hu, qui l'a écrite en tête de son vieux !ivre, il y a quelques mille am. Sous le voile des mythes primitifs de la Genèse, nous voyons poindre au commencement celte vérité sup1&me. Nous voyons Dieu qni fait l'homme à son image, et qui le fait libre. La Liberté est donc le droit divin de l'homme. Or, qui dit Liberté dit Souveraineté. Qui dit l'homme, dit pe11plc ; qui dit Souveraintté du peuple, dit Ri:publique; qui dit République, dit République universelle. Yuilà le droit primordial, 1111 comme Dieu et l'humanité, un et commun pour tous! Tous les hommes ayant Dieu pour auteur et Adam pour père, sont donc enfants de la rn&me famille, partant égaux et frères, comme ils sont libre~, Liberté, Egalité, :Fraternité, toute la République ! Voilà ce que nous donne h vieille foi. Vpici pour l'accompli!' ce qu'ajoute la nouvelle, c'estù-dire la Science: Tous les hommes étant libres, égaux et frères, sont solidaires, parce qu'ils sont nés sociables, parce qu'ils sont collectifs autant qn'individuels, p11rcequ'ils sont de leur nature un et cliver~, parce qu'ils sont di!Iërents quoiqu'ég:iux, parce qu'ils ont be~oin les uns des autres, parce qu'ils sont les parties d'un tout les membres d'un corps, les voix d'un ehœnr, parce que leurs facultés spéciales et leurs fonctions multiples se suppll:cnt et se complètent réciproquement. Pas un homme si faible et si hnmble qui n'apporte son grain de sable à la pyramide; pas un peuple si terne et si obscur qui ne représente une facette du diamant. 11 n'est pas jusqu'à la H.ussie qui n'offre sa parcelle de lmuière dans l'embryon de la Commune. Certes, et sans recourir aux temps bibliques, sans remonter à i'ancien monde qui nous révèle les mystères de la vie collective par le panthéisme indien et de la vie personnelle par le polyth~isuie grec, pour nous en tenir aux e11seig1wments du mon1h· moderne, chaque peuple faible ou fort a fait sa part de l'œnv,re. Chacun, p:n r~emple, a fourni son te.rme 1lans l'ample formule républicaôuc co,11pos6ep:ir la France pour les relier tou,s. Toi, Allemag-ne, tu as donné la Liucrté pnr le génie de Luther. Toi, Suisse, l'égalité parie génie de Jcan-Jacqu-,s. Toi, Pologne, tu ns le mieux prnliqué la fraternité, donnant ton sang, ta vie, tes plus nobles enfants, Ilem et. ses p:ireils, à tous les champs de bataille de l'Europe, partout où il y a tyrannie à combattre et liberté à défendre, tes enfants, vrais chevaliers errants du droit, nobles v,1ga.bonds clispersl!s par le monde, con1me s'ils ne devaient avoir de patrie, 11u'11prèsen avoir fait une aux autres. Toi, Italie, aujourd'hui si divisée, si morcelée par tes princes et tes pr&tres, tu as donné deux fois aux hommes l'id6c cl'unité, par le glaive de tes Papes et celui de tes Césars. Et toi, vieille Angleterre, tu as bu la première du sang de rni, et par la grande voix de Cromwell, tu att porté v.n toast aux Républiques à venir! Qui peut donc méconnaître la Solidarité ? C'est la loi de nature, non seulem~nt entre ceux du présent, ma~s encore entre tons ceux du présent, du passé et de l'avenir. C'est le droit et le devoir, le besoin et l'intérêt. Tous ces mots sont synallagmatiques, synonymes ; to11sdisent et redisent: S.oli<larité. Si nous avons omis ce principe de vie et de salut, les rois, eux, n'y ont pas manqué. Rendons-leur cette justice qu'ils l'ont compris et pratiqué depuis un demi-siècle. lis nous IP. prouvent dès la première Révolution. Le 21 décembre 92, l'empereur d'Allemagne, Léopold, commence ainsi sa déclaration à la France : " Les souverains 1·J1m,isen co11ctrt pvur lé 1nai11tie11de la paix pu- " bliq11eet la silreté de leurs couronnes, etc." C'est <léjà, vous voyez, la sainte-alliance des rois pour Louis XV l. - ]~n 1815, il;; la co11tinuent pour Louis XV li I. Bn 1848, ils l'exercent pour tou~ les déchus. Et comme les rois ne sont pas des pnrs esprits, p;1s si poètGS ! ils joignent la force à l'idée; et Nicolas rétablit, à main armée, l'empereur cl' Autr;che, Guillau.r:nc redresse ,Je grand-duc de Tiacle er Bonaparte re~taure le pape. Partout les gros secou1,ent lei,;petits. Voilà comme tous les faillis ont rouvert bouiiq\1e dans le temple, l'un portant l'autre. Ainsi la tyr111:nica été plus solidaire et plus logique que la Liberté. Les rois ensei- ~nP.nt les peuplc:1. Instruisons.npus /i leur exemple. Le llliil démontre le bien. Depuis la chûtc le diable est le maîttc d'école du gt>nre huiuai11. JI fallait donc, au 5 ~fars, parler et agir comme les rois, proclamer l'unité ou la solidarité d/'IS Républiques et 3ppuycr le.droit par la force. Le peuple de Pilris, dont l'instinct révolutionnaire n'a jamais faibli, le voulait. li le pronva an moi11s deux fois. Son premier mou1·cmcnt, et le premier mou\'ement est toujours le bon, cnr les diplQlll:Ltes <lisent de s'en défü,r, son premier rnouvement l'ut d' aller 1111x frontières et de porter la Liberté aux Alpes tt 11u H,hin. , Mais eomm!'., par m:illtcur, il u'.1v11itni les annes ni le dr~Jit'au, sa tentatiTe ~choua tristement contre un poste de dounnirs. C'est que la Liberté ne p,,sse pas· en fraude :comme un bailot ;de contrebande, comme un~ marchandise prohibét>, au moyen d'une échauffourée ou d'une surprise, mais de vive farce, u grand jour, les armes hautes et le drapeau déployé. Le second moul'emcnt fut l'invasion de la Constituante, le 15 1fai. Le p~uple pétitiouna la guerre en faveur de la Pologne. Par malhen encore. il dispersa l'Assemblée sans la remplacer elle revint plu~ p,us r~ac. tionnairc qu'avant, se co11tenta11tde décr~er, sans au .une sanction, l'iudépend:mcc de la Polog-ue et l'affranchis.,ement de I'). talie. Ver/J(tet voces... ... Ainsi, le peuple 11ni voulait n'a pa~ pu, et le gouvernement qui pouvait n'a pas voulu. De là le mal. ~lais pour quelle raison le gouvernement n'a-t-il pas voulu ce que voulait le Peuple? 1ous allons J\,xpliquer. Le gouvernement cle J:'i;vrier était composé cle trois éléments distincts; majorité bourgeoise, minorité révolutiounairc et appoint socialiste. Les révolutionn3ires, héritiers de 93, élèves de la Convention, ne croyaient pas devoir alier pfos loin que leurs pères et leurs maîtres. Or, il faut savoir qu'a11cun des grands partis de la Convention, ni Gironde, ni l\'lontagne n'avait voulu la République universelle. La Gironde qui, la première, avait demandé la guerre, l'avait demaudée pour ~e défendre de l'en11emi, pour rcpou~~erles attaques, pour sauver la Liberté me11acéc par les émitrrés et leurs allié~ les rois. Que disait-elle par la bouche de Ve;gniaud, sou oraele? " Les émigrés persistent dans leur rébellion, les rois " persistent à ll!s soutenir; il f:mt nons venger ! Abhorrons la "guerre, car elle est le plus grand flé,m de l'humanité; mais •· enfin, puisqu'on nous y force, suivons le cours clcJtos deijtiuées. " Qui pt!Ut prévoir jusq11'oit ira la pwiition dcu tyra11~q11iuous au- " ro11tmis les armes à la 1nai11? '• ~ue disai~ la .l\lontagne p:ir i.o~ plus ~udacicux et son plus logique rcprcsenlant, Danton ! " S1 ll'S rois envoient 1a guerre~ '' la .France, la l~rancc leur r~nverra la Liberté.'' • Ainsi, même pour Danton, il s·agit de renvoyer et non d'envoyer la Liberté : des cieux côtés l'idée de défense, <lerennche, rlcreprésailles, nulle part la guerre de solidarité, d'initiative el de propagande. La République ,.rnivcrsellc n'est pas le principe, la cause et l'inspiral!on de la lutte; elle n'a pour elle que le sort des conséquences et la ch:ince des conclu~iefns. Si les peuples se délivrent à la suite de la guerre, :ant pis pour les rois qui )·auront faite. Cc sera la peinP. des tyrans qui nous auron_t mis les armes à, 1~ m:lÎ1~. ~a, République universelle peut arriver comme un chat1111cntmf!tge aux artaq ues des rois, mais non comme une nécessité du droit des peuples. Prenez ainsi toute la politique de la Convention, discours, déclarations, constitution, à p:irt une ou deux aspiratious sans portée, l'idée de Solidarité ne ressort pas. Les actes sont conséquents avec les paroles. La Convention reconnaît les rois: elle traite avec le roi d'Espagne. Elle proclame le droit d'insurrection, mais non le devon· <ledélivrer les esclaves ou de secourir le~ rebelles. Que veut-elle dans &a Constitution même de 9a, sou idéal, au ch,ipitrc spécial intitulé: Rapport~ de la R.épul)tiqu~ fra~1çais~ avec les. nations __étrangères? Art. l 18 : '' Le r~up 1c " français est l'ami et l'allw naturel des peuples libres." Pas un mot des peuples esclaves. Art. 119:" li ne s'immisce pas rla11s " le gouvernement des aulrl's peuples. " Art. 120 : "JI " donne asil_caux étrange,·s bannis de leur patrie pour la cause de "la Liberté;' il le refuse aux tyrans." Voilà tout ce qu'il y 1. pour la Solidarité. Que dit la Jlfurscillaise, la chanson, cette opinion du peuple: .Allons eufants de lei Patrie ..... . Que veut Robespierre enfin? Il guillotine Anacharsis Olootz, !·orateur du genre humain. La _Révolution, à cette époque, n'en était encore, comme tout ce qm commence, qu'à l'analyse, à l'élément, an germe du droit général, c'est-â-dire au droit simpie, au droit par1iculier, an droit national. Ce n'était qu'une questwn de patrie, de liberté locale de République fra1:çaisc; et Je parti républicain de 48 n•o~a rie~ de plus. Il n'élargit point Ja couception de U3, il s'en tint là et fit son manifeste et sa Constitution juste sur le patron conv1; 11. tionnel, répétant que la France n'emploie pa·s ses forces contre la Liberté des peuples, quand il ama1t dû dire: La ]/rance emploie ses forces pour la Liberté des peuples! .l\loins révolutionnaire en cela que les rois qui se soutenaient cntr;eux, il ne conclut pas d'un à ~ous, il ne vit pas que la llévolntio11 avait progressé de plu~ dt! CIIHiuantc ans, <1u'ctle a\'ait procéclé de 93 à 48 de l'analyse à la synthèse, du particulier au général, d'un pcupl; à tous les peuple~, de la France au mon,le, de la ltépubliquc indivisible à la ltépublique univcrsùlJe, <le la patrie à J'hunianité. VoiJ.)_ comment ce parti ne comprit pas ou n'osa pas. Voilà pourquoi il laissa faire le manifeste du 5 :'.\Jars, qu'il a du reste noblement racheté, le ]3 Juin. La Solidarité est l'œuvre et la gloire de cette journée. Le 13 Juin a expié le 5 l\lars, et s'il n'a pas réussi, c·cst que le peuple de P<1risavaiL été s,tigné à blanc, et avait perdu toute sa force <!UXterribles journées du mois dt Juin précédent. Si J'éléU1ent révolutionnaire n'osait pas dépasser la Convention, l'élément bourgeois ne voulait pas m&me la suivre, bien entendu. Il avait horreur de 93, lui, peur cl~ la guerre, rê~ant rourre, une mer de sang, la dictature et l'invasion au bout. Moins q~'aucun autre, il pouvait voir quelle différence il y avait e11tre la guerre de l'ancienne République, guerre défensive, guerre ortli11airc avec toutes ses com,éqnences de butin ou de conquête et la guerre de droit, de principe et de dévonen,e11t que devait faire la 11ouvelle.Disons-Ir, il était fatal que la convemion qui avait combattu pour elle et non pour les ai:tr~s, qui imposait et aunexait les pays vaincus, eùt <les fonctionnaire$ exacteurs, ries généraux ambitieux et aboutit à la dictature. Ceux qui voyaient la patrie elle-111ême s'adjoindre des territoires €t prélè'ver des tributs, prcuaient comme elle, l'argent d'abord, le pouvoir ensuite. La Bclgi, 1ue ajoutée bon gré malgré à la France, les millions enlevés aux villes <lu Rhin, engageaient tout le monde à us•Jrper. La Convention a fait Barras, Barras 11 fait 13onnpal'le. Les avides ont fait les despotes. :.13is supposons que la France eût attaqué en vertu du droit et qu'elle eût fait pour la Liberté ce que depuis elle a fait contre, à Rome par exemple, la guerre à ses frais. Quel chef eût o~é être avide et ambitieux, qua11d la France eût été gé11éreuse? Qui eût osé être égoïste, quand la France eût été désintéressée? D'ailleurs, il n'y eût pas eu de chef à craindre, pRrce qu'il n'y aurait pas eu de guerre. On l'~Îlt évitée en la voulant faire. Tout peuple eût été sauvé, tout roi fût tombé; et la Révclution s'opérait partout sans coup férir. M,~is nous n'avions pas d'armée, cli~ent-ils; nous n'étions pas prêts? ErrC'urs. Il n'y avait pas une bataille à livrer, pas u11e amorce à brûler, pas une goutte de sang à verser. li n'y avait, cette fois, ni attaque, 11irésistance, ni invasion à redouter. Il ~uffisait alors de la volonté, d'un mot, <l'un signe; tous les peuples attend:iil·nt la France; bien plus, ils se soulevaient tou~ sans l'attendre. En lta1ie, en Allemagne, en Hongrie, chaque peuple fais:iit sa rél'Olntiou de ~on côté et triomphait de chacun sou roi. li ne fali11itdonc que soutenir et maintenir le mouvement. La partie ét;tÎt g~gnée et fut reperdue par la politique bourgeoise du 5 .Hars, par cette S!:'ulcphrase du manifeste : •· Nous 11emarche. rons que :;iles prupie~ nous demandent." Ah'. les peuples n'ont p11sd' i1mbas~adc11rs. On ne les e11te11dp;1s dans les •11i11isth~s. Lc~:r~ :ippels wnt d:;)S insurrt'ctions, En attendant la dcma111«~
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