-SCIENCE.- ' -SOLIDARITÉ.- JOURNALDELADEMOCRATIUENIVERSELLE. N' 15. MERCREDI, 14 MARS 1855.-2e Année Ce Journal pau•alt nue fols 1•ar •e111alne.· Toutes lettrég et correspondances rloivent être affranchie~ et adressées au bureau de l' Imprimerie Universelle à St-Hélier AVIS. Nous prévenons les personnes qui se sont abon-' nées au journal l'Homme, soit pour un an, pour six mois ou pour trois mois, et qui n'ont pas encore versé le montant de leur abonnement, qu'elles sont instamment priées de s'acquitter sans retard entre les mains de MM. les agents chez lesquels l'abo:1nement a été contracté, ou bien de l'envoyer direr.tement à l'administration du journal, à SaintHélier ( île de Jersey ), 19, Dorset Street. Dans ce dernier cas, il suffira d'adresser soit un mandat sur la poste ou un billet de change sur un des banquiers de la, ville de Londres, à l'adresse de M. LOUIS PIA.NCIANI. On prie également les personnes qui renouvelleront leur abonnement, d'en envoyer le prix d'avance à l'adresse indiquée, afin d'éviter tout retard dans l'envoi du journal. .LAFAUSASELLIANCE. I. Lorsque l'alliance entre l'Angleterre et le neveu de l'empereur Napoléon vint étonner le monde, les quelques voix libres qui pouvaient se faire entendre en exil la dénoncèrent, non seulement comme en scandale co1üre les morts, mais comme une trahison-. L'histoire fut appelée en témoignage, et les sept coalitions répondirent) comme l'agonie <leSainteHélène: "Ceci est nn mensonge qui cache un g-uet-apens. " Les souvenirs du Denx-Décembre furent évoqués, et le cadavre de la République se leva disant: " Prenez garde à cet homme; il est l'assassinat. et le faux serment. " - La foi publiquP, enfin, dit nu peuple anglais, en lui montrant ses plaies : '' Avaut de mettre ta main dans cette main, compte ces coups de poignards! " 'rout fut inutile ; l' Ang·leterre, effrayée par la subite invasion des Russes en Orient, n'écouta rien ni les enseignements de l'histoire, ni la voix ,de l'honneur qui ne vajamais au crime, ni les preuve~ de mensonge et de trahison accumulées dans la vie de cet homme. Les Communes applaudirent -commela grande presse; la bourgeoisie se livra tout entière à l'assassin <leslibertés publiques, et le gouvernement signa. On voyait partout, encadrées, ses aigles et sa tête de vautour! Les mêmes voix de l'exil se firent encore entendre, mais les folles acclamations les couvraient, et les proscrits, confesseurs du droit, étaient pres- ·que regardés comme des ennemis publics. " Que nous font à nous, disaient les plus libé- " raux, que nous font à nous anglais, les crimes " de cet homme, ses trahisons, ses violences, ses " pa1jures? - N c-msn'avious pas à garder la li- " berté française. Que nous veulent donc ces " étrangers? Nous ne connaissons pas de proscrits " et nous ne voulons rien savoir, ni les serments ~•prêtés et violés, ni les domiciles envahis, ni les u tribunes renversées, ni les citoyens égorgés, on " transportés, ni les institutions à bas, ni la bas- ,, sesse, ni la conspiration, ni le guet-apens .. " Cet homme nons sert: Vive l'empereur! " II. 11 n'y a pas long-temps encore, l'Angleterre en €tait là, toujours là. Les victoires si difficiles et si ,cruelles d'Inkerman et de l'Alma l'avaient eniV!ée: le malheur qui avertissait avait tort, c'était fa voix importune des colères aigries et des ambiiions tombées: le succès était Dieu ! Mais la peste -est venue, et puis l'hiver portant la neige et les ,vents. L'armée andaise, toujours placée aux postes du péril, _a été profondémfmt entamée ; des phalanges entières ont disparu : les sinistres et les (Jersey), 19, Dorset Street. - Lei manuscrits dtlpo~t!s rte seront I ANGLETERRE ET CoLONTES: pas rendus. - ON s' ADONNE: A Jersey, 19, Dorset street. - A Un an, 8 shillings ou 10 fran es. Londres, chez M. STANISLAS, 10, Greek-street, Soho Squarc,-A Six mois, 4 sh. ou 5 fr. Genève (Suisse),· chez M. Corsat, librai_re, ru~ ~uillaume-Tell. -1 Trois mois, 2 sh. ou 2 fr. 50 c. PouR L'ÉTRANGER: Unau, 12fr.50. Six mois, 6 fr. 25. Belgique, chez tous les libraires. - A Madrid, chPZ Casimir CHAQUENUMÉRO: Trois mois, 3 fr. 50 c. 1-'ous les al,onnc111e11■ •e 1•aie11t d'an•anee. Monnier, libraire. • 3 pence ou 6 sous. maladies l'ont accablée t.ou'r à tour, ~t. aujourd'hui, elle n'est plps que l'ombre d'elle-même, une espèce d'avant-garde pour des funérailles! Et comment cela s'est-il fait? D'où vient, et pourquoi cette irréparable catastrophe:? L'homme des Tuileries étant à Biaritz, imagina la campagne de Crimée, et, fantaisie monstrueuse, cette expédition mal étudiée fut _,p1tifiée. par l'Angleterre et son gouvernement, Au conseil de guerre <le Varna, que disaient pourtant Lord Raglan et l'amiral Dundas? - " Cette campagne est une aventure pleine d'ombres; on ne doit pas tenter l'inconnu. Nous pouvons y laisser nos armées et nos flottes ; mieux vaut s'abstenir et combattre sur le vnlÏ terrain qui est le chemin des Balkans. " Mais le projet-folie émanait d'un g-rand génie de gue~re; le neveu de Napoléon en avait luimême arrêté le plan, et le vieux Lord Raglan céda, pour ne pas cornpromettre l'alliance. Quant à Bonaparte qui prenait ses bains, il était bien certain de ne risquer qu'une campagne heu·- rnuse : ou Sébastopol tomberait, et c'était la gloire; on l'armée anglaise disparaîtrait, et c'était profit: C'est ainsi qu'en Décembre, la veille du coupd'Etat, il avait enipru.nt,~ 25 millions ù la Banque, pour ses fourgons d'exil, s'il y avait échec. - Ou l'empire ou l'argent. Il a toujours deux voies ouvertes 1 Cette fois, c'est la seconde chance rêvée, c'est la destruction de l'armée anglaise qui lui est échue, ce n'est certes pas là mauvaise alternative, . L'Angleterre, il le sait bien, ne peut pas, comme la France, refaire en deux mois ses armées ! , III. Une armée détruite, une administration sanitaire convaincue d'ineptie, un état-major impotent, les armes humiliées, les familles en deuil, la puissance diminuée, le prestige perdu, voilà les résultats de la première campagne ouverîe et tentée par l'Angleterre en alliance avec M. Bonaparte. Au temps de la grande guerre contre la France, elle n'en e:ut jamais de plrts désastreuse pour ses drapeaux, ses forces et son nom: il est vrai qu'elle peut étoiler son blason de deux victoires nouvelles, mais quels terri hies revers et quelles' tristes funérailles après si petite g-loire ! Eh bien, cela ne suffit pas à la fraternelle ambition de M. Bonaparte : l'Angleterre, blessée matériellement peut se relever par ses énergies natives, par sa discussion, par ses enquêtes, qui cherchent le mal et qui portent le remède : elle peut, armée du libre examen, découvrir les vices cachés, les misères intérieures qui la paralysent ,et se régénérer en épurant son organisme vital qu'atrophient depuis des siècles, les aristocraties et les priviléges. Non~ M. Bonaparte qui a peur de la • lumière, peur de la discussion et peur de la liberté, M. Bonaparte intervient, alors, et lui signifie qu'il ne donnera plus concours, si la presse ne fait pas silence, si les tribunes ne sont fermées~ si les enquêtes ouvertes se continuent. L'allié des 'ruileries affirme que de tels débats sout le péril suprême dans les guerres, comme si les Russes ne savaient pas à quoi s'en tenir sur les armées alliées et les systèmes suivis dans les deux camps, depuis cinq mois que dure le siège de Sébastopol! La vérité n'est pas là, mais bien l'embache. C'est une trahison mas'luée: M. Bonaparte veut démanteler, veut abattre l'Angleterre moralement -et matériellement. Il sait que tout pays armé de l'esprit d'analyse et du libre raisonnement est invincible aux forces aveugles, il cherche donc à tuer l'esprit libre d'Angleterre. et il l'a tâté dans sa commission d'enquête, à propos des derniers revers. En principe, d'ailleurs, il a la haine, une haine absolue de la parole et de l'idée. Les institutions qui s'inspirent du droit souverain, et qui servent la conscience humaine, lui sont, à la fois, obstacle, outrag~ et remords. • Donc, gtterre à la commission d'enquête, guerre aux débats libres, à la presse, à la tribune; guerre à tontes les voix qui parlent, à toutes les têtes qui pensent; guerre aux âmes pour avoir les corps ! Telle est la secrète pensée et l'espérance ténébreuse de ce forban yui n'a laissé, sous le ciel de France, que les lanternes de ses polices. L'Angleterre avec ses journaux, ses assemblées, ses meetings, lui est une injure et 'lui est un châtiment. Il veut, le rodeur de nuit, que les ténèbres s'étendent, et qu'on n'entende en Occident que le pas de ses patrouilles. César-hibou, il rêve la nuit comme d1m.ttres rêvent la gloire, et, parce qu'il bégaie, ce Mandrin de l'histoire, il faudrait que toute la terre fît silence ! L3 gouvernement anglais va céder, dit-on, t'!t pour enterrer la commission d'enquête il dissoudra le Parlement. C'est un drnit acquis, nous le savons, un droit qu'on exerce pour dénouer les crises intérieures. Mais cette fois, la crise n'est pas à Londres, n'est pas à Birmingham, ou bien à Manchester, comme au temps de la Ligu.e : la crise est extérieure et hien graves seront les responsabilités eng·agées ! Si l'Angleterre cède, entraînée par son gouvernement, si les Communes renouvelées laissent tomber la commission d'enquête objet et cause des colères napoléoniennes, les institutions comme les libertés de l'Angleterre ne résisteront pas lono-- temps, et sa souveraineté ne sera plus qu'un no~. C'est là le rêve des 'ruileries. Ph.J.stard on envahira le cimetière ! Charles RlBRYROLLE8. LArETITGEUERRE M. Pietri, l'ex-répuhlicaih de 184~, aujourd'hui préfet <lepolice, a demandé une audience particulière à M. Bonaparte, comme le faisait autrefois Fouché, dans les jours de crise, et il a déclaré qu'il avait besoin, si la ,Majesté s'en allait en Crimée, d'un ordre d'arrestation en blanc. ( lettre de cachet, s'il vous plait ! ), contre le cousin, prince Napoléon. D'aprè.s ce d' Artagnan de la rue de Jérusalem, M. Jérôme fils serait une intrigue permanente contre l'empire, et le plus clangereax des conspirateurs. A cela, César a répondu qu'il emmènerait avec lui. son héritier présomptif, et qu'on n'aurait qu'à surveiller les comparses. Une autre rumeur a circulé dans Paris, et; cette fois, 011 a pris peur à la Cour. La ville de Chartres, depuis longtemps agitée, comme on sait, aurait fait, à propos de la cherté du pain, une quasi-révolution. Sa petite garnison aurait prêté concours à l'émeute et livré ses armes: on a, dit-on, envoyé des troupes de ,la 1re division mlitaire; et, la lutte terminée, les fusillades ont eu leur tour, comme en Décembre. ' Voilà. les derniers bruits du jour. Le gouvernement se tait; la presse n'ose parler, et l'opinion flotte, inquiète, au hasard des chroniques. Mais ce que l'on sait bien, c'est que la France est lasse et que les départements du centre pourraient bien, d'un jour à l'autre, se lever. M. Bonaparte et sa cour ont daigné retarder un concert-festival qui devait avoir lieu dans les salons des Tuileries, lorsqu'est arrivée la dépêche officielle annonçant la mort de Nicolas. On hésite encore à prendre le grand deuil, ainsi que cela se pratique entre monarchies, quand il y a quelque sinistres de majestés: mais on s'interdit les spectacles, les bals et les grandes réceptions. On fait même la chasse aux colporteurs de complaintes qui voulaient exploiter la grande mort. 0 touchante fraternité des royales hypocrisies ! J. J.
8 mars 1855. Malgré la police, les portiers affilliés et les ciuq Jn six mille coquins qui font ù tant par jour le triste service <les délations, on a célébré l'anniversaire <lela. Révolution de Février dans uos faul)Ourgs. Réunis en familles de huit ou dix citoyen~, les ouvriers ont fêté la grande date, qui est ponr eux un sonYeni_r de relicrion, et si les démonstrations publiques ont fait ,défaut,bles catacombes ont prouvé que tous les républicains ne sont pas en exil ou morts. Les funérailles de Dupont (de l'Eure) ont été une occasion nouvelle de manifestation quoi qu'il n'y ait pas eu de discours sur la tombe. Cette fois, c'étaient les politiques du parti qui passaient leur revue, et s'il y avait, à ce convoi, bien des fautes représentées et de criminelles erreurs, on n'y comptait pas du moins d'apostasies au nrofit de Déce'Ilbre. Le gouvernement s'est f 1rt inquiété de cette démonstration funèbre, ainsi que <les réunions civiques organisées dans les quartiers rle Paris. Il a même fait arrêter, dans un département, dix-huit ouvriers qui avaient commis ce o-r:ind crime de célébrer cntr'eux l'anniversaire de la b catastrophe. Tout ce qui ra1)pelle cette date n'est-il pas en effet une injure pour l'hommi; qui a trahi l'honneur, la loi, le ~erment, et qui écrivait, il y a six années, cette déclaration, devenue sa tache éternelle : " Sans autre ambition que " celle de servir mon pays, je ne puis et ne veux reven- " cliquer que mes droits et ma qualité de citoyen français. " l\Ia vie entière sera co11sacrée à l'affermissement de la ·" République ! " On ne parle plus du départ <le M. Bonaparte pour la Crimée. Depuis que Nicolas est mort, toutes les espéran- .ces sont à la paix, (une paix problème !) mais d'un autre côté, l'on craint beaucoup pour la fragile alliance entre la France et l'Angleterre. Les bourgeois redoutent une scission qui nou" livrerait à toutes les aventures, et le p<-mple rit volontiers de ces alarmes qui agitent la caisse et les ventres. Le fils cle M. Jérôme, le grand coupable de la brochure ôelge; est, t0ujours, aux: arrêts forcés. Ces façons- là sont cle la pure tradition impériale, et M. Bonaparte troisième a grand soin de garder intactes toutes ces pré- -rogatives de chef de dynastie, surtout quand il s'agit de pénalités. Il n'a pas encore son Lucien, l'exilé <leRome,• les fils de ce dernier qui se disaient républicains n'étant j>lus que poussière; mais il se venge sur le cousin-héritier et il le chàtie pour faire l'empereur. Cette- petite comédie amuse les salons et divertit les casernes. Hélas! quel temps! Dans sa dernière visite an camp de Boulogne, M. Bo11aparte voulait adresser une allocution de guerre à son armée du Nord : mais il a gardé le silence, et pour cause. L'Ano-leterre n'étant pas encore décidée à rompre ouverteme~t avec la Prusse, lord Clarendon a prié le grand allié des Tuileries de retenir ses phrases et ses aigles contre la monarchie du grand Frédéric. En revanche, M. BoHaparte a parlé de la presse et de la tribune anglaises en termes du dernier mépris,. et il a déclaré que si l'on ne baillonnait pas ces bavardes, il serait obligé de refuser concours et d'opérer seul en Crimée. la presse et la tribune sont les deux grandes ennemies de tous les malfaiteurs. Un fait s'est passé au camp d'Helfaut qu'il est bon de signaler comme e:xemple et preuve de la prospérité publique sous le Bonaparte. Les pauvres tr.ivailleurs de la campagne, poussés par la faim, encombraient chaque jour les avenues, et les ·soldats leur donnaient, sans trop se cacher, une part de leur ratiorl. M. Bonaparte, apprenant le crime, a donné ordre q11eces fainéants fussent chassés, et qu'il n'y eût à l'avenir aucune relation entre la campagne et le camp. :l\'[. Bonaparte a peur de tout contact entre le peuple et l'armée. Qu'arriverait-il, en effet, si les uniform(ls et les blouses venaient à s'entendre? L'empereur d'Autriche a fait dire à son cousin des Tuileries que s'il allait guerroyer en Crimée, lui, François-Joseph, se trou\·erait en grande perplex_ité. - "La " République peut se lever derrière vous, écnt le Cheva- " leresque, et alors mes plus ~elles pro~inces, It~lie, " Hongrie, tombent en Révolut1cn, ou bien Henn V, " Yous étant mort, remonte sur le trône de ses pères, "fait alliance intime avec la Russie, et l'Autriche, alors, " se trouve seule dans le monde avec l'Angleterre épui- " sée. Sire, ne partez pas ! " De ces deux revenants, il y en a un, en effet, qui pourrait bi':!n faire son app~rition, que M. Bonàparte aille ou n'aille pas en Crimée: mais l'autre u:est qu.e l'ombre ~es ombres ; il faudrait, pour le.galvamsor, deux: cent mille Cosaques dans Paris. L'IlO111\1E. .,-------------- MEE'rING DU 24 F:èVRIER A LONDRES. Nous publions, ainsi que nous l'avons anuoncé, le discours qu citoyen Alfred rra landier et la lettre du citoyen Safü. Ces de~x piè~es diffèrent_ profondément, quoique la meme tribune les ait accueillies. l\Iê:}isle grand devoir <le l'exil ne s'appe11e-t-il pas Liberté ? C'est ainsi, <lu moins, que nous le comprenons, laissant aux consciences souveraines le soin d'apprécier et de ju·ger. Lettre du citoyen Saffi J'ai reçu votre invitation d'assister et de parler au meeting, qui aura Iieu le 27 prochain, en commémoration du mouvement ré - volutionnaire de 1848. Je suis tâché ùe ne pas pouvoir m' y rendre personucllement; Mais, puisque vous. ave~ b!en voul u me faire l'honneur de m y appeler comme patriote italien, ayan t pris une part quelconque à la cau_se de l'émancip_ation_ de ma patrie, et, par elle, à la caus~ umversellc de la hbertc et de l a civilisation; c'est mon devon· envers mo11 pays et envers me s propres convictions, d'exposer, dans cette circonstance, que_l le est ma ma11ière d'envisager la Révolution, quels sont les prmcipes, les vœux, les espérances, qui_ ~n~ment ma vie, d~vant 1 ~ grande lutte du siècle contre les pnvileges et les pouvoirs qm empêche11t le développement normal de la société chez les na - tions < urnpéennes. . . Je ne me poserai pas comme représentant,. ou fa1sa,nt_part!e d'une représentation quelconque de ma patne dani I exil. Ce n'est pas un individu, ni quelques individus, loi~ de }eurs foyers , qlli pourraient représenter à notre époque,_ les mtérets- vastes et compliqués, les _as~irations, rn _grande pa~t1e encore latentes, d e la vie d'une nation ou des nations travaillant à se dégager de s liens du passé. Les mdividus peuvent, suivant le~r C~J!acité in - tellectuelle lenr force sympathique, leur bonne foi, sa1s1r plus o u moins exa~tement, d'un côté quelquf.s lignes générales, d e l'autre, quelques tendances particulièr~s du gran~ mouvement d e l'histoire vivante des peuples; étudier et suivre, chacun dan s leur sphère, les lois et les exigences du véritable progrès d e cette histoire; contribuer de leur part d'expérirnce au grand travail commun; faire jaillir sttrtout du fond de leur âme, e n présence de lems concitoyens, de leurs frères, la sainte flamme du dévoûment pour tout ce <JUiest beau_,noble, g~n~renx, dans l _a souffrance comme clans la lutte; mais leur 1111ss1one saui;,a it aller plu; loin. Quiconque. prétendrait à présent extraire de son intellio-ence individuelle, et imposer aux problêmes qu i agitent la so~iété, des formule,s d~fini;s, ab~?lues, s,e tr_ouv~ra it bientôt renfermé dans le cercle etro1t qu d aurait trace lm-meme , impuissant à co,nprendre, à agir, démenti par les faits, dépassé par les lois inexorables du mouvement! e~1 un m?t, _hors d e J'œuvre de la vie. Le temps des orgamsat10ns ,arb1tra1res, de s systèmes tout faits, des f~rmules qui mutilent !es énergi_es in - times, spontanées, nécessaires de la nature humaine, au l icu ~ e les laisser s'oro-aniser d'elles-mêmes, suivant leurs propres 10 1s individuelles 0 et sociales, est heureusement à jamais passé. Comme, dans les sciences physiques, l'obser~ation ~dèle de s phénomènes et des harmonies réelles d 7 la vie a pns la place des à priori de 1.avieille école, et 1 p:1r ce simple moyen, le grand mystère de l'ancien Fatum a disparu, e~ l'horreu~ des forces de la nature a cédé au libre et fécond emploi de ces forces au profi t de l'humanité; ainsi, dans les questions politiques et sociales, c'est par l'expérience et 1:t science ~ositive, ~ar !a décou~erte prorrressive des lois véritables et pratiques, qm doivent régir le s rclationg mutuelles des hommes et des nations, d'après la nature même des choses, qu'on pourra résouclr~ véritablement l e grand problè 1:e du bien-être et du perfect1onneme11t de notr e espèce. ✓ • Il n'est pas vrai que ces_lois, ces tend~nce~ de la vie de l'huioanité, soient aujourd'hm, dans leur d1rect~on, en dehors de c e qu'elles ont été, indépendante~ du p_assé,.~m~an~ un _cot~rs_tou t- à-fait nouveau, devant lequel 1! n'y ait qua detru1re md1stmcte - ment. Il n'est pas vrai que tout ce <jui nous vient.~e nos_p~res , tout ce qui existe clans la forme actuelle de la societé, _soit_Jau x, iucompatible avec les nouvelles tendanc_es. Au cont~·a1re, 11y ~ continuation liaison intime entre ce q111a été, ce qm est, ce qu i sera. Il n'y~ pas contradiction dans la_mar~he de l'espr!t hu - main, il y a développement. La Révolutl?n n. est pa~ une !nven - tion de nos jours; - elle a été la force historique, 11npuls1ve d e }'humanité à travers les siècles. Elle a fait déjà de grandes con .- quêtes; il ne faut pas les mé~onnaître, !es repou_s,ser. Ce serai t méconnaître, repousser la réalité; ce qu ?n a déJa gagnli.! p 1 o~r le rêve, pour ce qu'on ne pourrait pas attemdre, sans se preva,01 r des forces déjà acquises au progr~s. , . Citoyeng ! il y a deux forces immenses que la Revolu:10n a déjà gagnée; au pr?grès de l'humanité. ~•u~e est. le _sennmen t de l'initiative in1lividuelle, de la personna!tté libre. mdependante, dans la conscience de l'homme; l'autre est ce même sentiment dans la conscience collective des nations. . 1:\ Révolution des domaine~ de l'homme extérieur dans ceux de l'lwmmc intérieur. La Réf,,rme et la Philosophie s'1.•nsuivire11t . Le Pape et l'empereur furent à jamais tués comme ùroit; -ils restèrent dtbout commi; des fantômes, répandant la terreur par la force des arnws que les r~stes dispersés des anciens privilégiés groupèrent autour d'eux. C.:efut en Espagne et en Italie surtout qu'ils purent s'enivrer pendant trois siècles rncore dans l'orgie <le la mort. l\Iais, malgré leurs efforts, ce qui avait (té con,1uis i la civilisation, resta. L'homme ne fut plus la proie de l'homme, le bourgeois ne fut plus ùépos~éùé par le seignc.ur, le laboureur lui-même demeura libre, malgré sa pauvreté. La science fit des progrès étonnants, même à la lueur sinistre J.es büchers. Galilée prononça à la faca des inquisiteurs la formule inexorable du mouvement - eppur- si muoue. Vico appliqua la même formule à l'histoire des nations. L'imprimerie sauva pour toujours des .Auto.-da-Pè de la Papauté les produits sacrés ùe l'intelligE·nce. :Elle mina da11stous les sens et fit crouler les vieilles murailles du despotisme spirituel et politique, comllle la poudre ouvre le roc. Cc fut ,e grand œuvre de la pensée dans le XVlleetXVIIIe siècles en Angleterre, en France, en Allemagne. - L'individualité libre, l' i111cllige11ce émancipée organisèrent la liberté politique et religi:!use en Angleterre; créèrent un nouveau monde en Amérique, pour une civilisation indépem!ante de toutes le5 formes traditionnelles de Ja vieille Europe; popularisèrent en Europe, par Ja Rérnlution de 89, la Charte des Droits de l'Homme mise à la place des priviléges dès castes. Citoyens ! l'un des résultats de tous ces efforts de nos pères, l'un des 6léments de l'héritage qu'ils nous ont tr:rnsmis, c•e~ t, comme je l'ai dit d'abord, la conscience dans l'individu qu'i l n'est, dans l'exercice de ses facultés morales, intellectuelles e t industrielles, l'eselave ù'aucun <leses semblables ;-qu'il est maî - tre de sa destinée: qu'il a le droit et le devoir de la régler, de l a développer de lui-même et pour lui-même, sauf les loix uni - verselles de la moralité, de la justice, de l'association. L'autre élément, c'est la conscience de l'individualitll nationale s'élevant contre la confusion et l'arbitraire de la conquête , et des fausses unités. Une fois l'esprit individuel émancipé de s lieng de rimpérialirn1P. et du Papisme cosmop·olites, il était im- possible que l'esprit national ne s'affranchît pas de même de s liens rie la conquête, des systêmes politiques imposés par les Cas - tes, contre toute relation primitive et naturelle des nationalités . Comme la Révolution avait proclamé l'égalité de droits entre les hommes, elle proclama aussi, comme conséquence nécessaire , l'égalité cle droits entre ces gr<!ndes associations d'hommes qu'on appelle des Nations. Chaque nation sent maintenant qu'elle n'es t pas matière à vente et achat, au gré dP.susurpateurs ùu pouvoir ; que la conquête, clequel~ titres qu'elle se pare et qnels que soien t les traités qui l'ont ratifiée, est un crime; que chaque nation a u n droit primitif, imprescriptible, à régler, par ses représentants lé - gitimes et librement élus, ses propres intérêts; - voilà l'autre grande do1111ée légi.ée par les efforts du passé à la conscience actuelle de l'Humanité. C'est un des principaux caractères de cette époque, que l'esprit de conquête soit devenu. impossible. Le dernier des conquérants, malgré tout son génii;, malgré toute la force que lui donnait l'en - thousiasme d'une grande nation, est mort, comme s'il eût été l e derni~r des hommes, dans une île déserte de I' Océan. Il ne tomb a pas sous les coups des roi~: il les avait vaincus-il tomba sous les coups des Peuples qu'il avait méconnus. Les nations s e levèrent au nom de leur vie, de leurs droits. Ce fut le premie r acte du drame de leur émancipation. Elles furent trahies. Leu r noble élan ne pro~ta qu'aux anciens pouvoirs, aux fragments en - core debout des conquêtes antérieures. Mais de ce jo•n-Jà, l a question fut posée. L'immense iniquité clu Traité de Vienne, l a Sainte-Allia11ce des despotes, ne fut qu'une faible digue contr e laquelle chaque vague de la vie nouvelle vint essayer son poids . Comme toute négation arbitraire et violente, elle ne fit qu'aider, clans la conscience de ces nations opprimées, l'affirmation plu s exacte, plus nette de Jeurs droits, des lois naturelles de leur vi e intérieure. Après de longs frémissements, des essais inachevés , locaux, en 1848 les peuples, poussés par les mêmes causes, s e levèrent partuut en même temps. Les armées de l'absolutisme furent désorga11isées au premier choc. Il ne tenait qu'à l a volonté, à la sagesse des insurgés, d'en finir pour toujours ave c l'arbitraire dans Je gouvernement intérieur, comme da11sles rela - tions internationales; de substituer au Droit public des diplo - mates, le Droit public des peuples; à la confusion dt:s états, constitués pour le bon plaisir de quelques familles issnes •d e voleurs barbares du Moyen-Age, la confédération des nationalités libres et indépendantes; aux lois prohibitives de l'économie de l a conquête, les lois scientifiques de l'économie de la liberté; d'ouvrir, par là, une route triomphale à la éivifüation, à la paix, à l a régénération des classes souffrante~. Il était encore trop tôt. On ne se comprit pas. En France, l'antagonisme irrationnel de l a bourgeoisie et des travailleurs, traversaut des luttes à jamais dé - plorables, aboutit, comme dans les H.épubli,1ues italiennes d u -fl-loyen-Age, à la tyrannie personnelle; partout ailleurs, on s'arrêta, en suspens, entre les tra,litions du passé et les aspirations encore vagues de l'avenir. On disputa sur des formes au lieu d e fonder des intérêts; on transigea avec les pouvoirs louvoy:mt s qu'on avait abaissés, au lie11 dP s'allier entre peuples pour la cause commune; et quand ces ponvoirs, sortant de leur mensonge à demi- libéral, relevèrent leurs prétentions clespotiq ues, il étai t trop tard pour la protJstation de la liberté. Cependant, citoyens, dans cette catastrophe étonnante, ce ne sont que deHhommes, - des erreurs peut-être, qui sont tombés . Les idées vraies, organiques, éternrlles du progrès de l'humanité, restent debout. Elles se purifient, elles s'élaborent, elles se déter - minent toujours mieux, d'une manière plus scientifique, plu s pratique, dans l'intelligence et la vie intérieure des peuples. Un fait moral nouve.au, plein d'avenir, commence à poindre à l'horizon. Jusqu'à pré~ent, on l'avait pressenti, on l'avait essay é d'une manière tr\ls incompiè1e, partiellement, comme moyen d e défense des faibles contre les forts, des i11térêts exclusifs d'un e corporation contre les interêts exclusifs d'une autre. C'étai t e11cored~ l'individualisme, de l'égoïsme organisé par associations d'arts et métiers, par petites confréries, par sectes, en lutte le s unrs contre les autres. Fraternité au dedans, guerre au dehors . C'était uni' application du principe catholique de la grâce aux ordres de la société. Les associations partielles, privilégiées, rendaient impossible la grande, la vraie, _la Jibr_e association •. Au - jourd'hui, au contraire, c'est de, la d!ssoluuon des orgai:i1~mes antagonistes détruits par la Revolut1on, que la nécessite d e l'harmonisation véritable, nniverseile, des intérêts et des aspirations humaines surgit et se répand partout, avec une force et un e Les D'Orléans seraient bien un autre danger que le Monsieur de .:'rohsdorff. Il y a à peine cinq siècles, les plus nob_les n~tions ùe l'Europe étaient régies par la conquête, par la se1g1~eune _re:·s01111elli; de , l'homme sur l'homme. La terre appartenait exciu~1vement a1 '.x chefs des conquérants; - le reste cle_sho1:1mes é~a1e11tdes s 7rfs, des esclaves, des parias. Les populat1oi1s mdustnelles des v11l cs d'Italie, sur une large échelle, les communes d' All~mag·ne, d e France, d'Angleterre, dans des sphères plus restrcrntes, se le - vèrent contre les s:?igneurs, délièrent la terre des entraves de la féodalité affranchirent les labonreurs, donnèrent, par leur tra - vail, par'leur commerce, un développement immen~e ~ux pr_o~u i~s du sol et de l'industrie manufacturière. La propnéte, q111_e_t a1t d'abord un vol, devint clans leiv:s mains le résultat, !'.effet lég1t11 ne de leurs efforts de leur travail. L'homme, qu~ était auparavant un instrument 'passif, une chose dans la main du maître, devin t une énergie intelligente, libre, active. Le déve,lopp~meut de l a richesse donna l'essor au développement de I espnt. Dante e t Michel-Ange, Machiavelli et Colomb surgirent com~e des géants des entrailles de i'humanité, réveillée à la conscience d'ellemême. Ils furent comme de grands flambeau_x entre, le p~ssé e t l'avenir, les précurseurs do cette marche sublime de 1esprit hu - main dans l'émancipation de ses plus nobles facultés - tle ~ett e marche de la civilisation, qui n'est encore qu'à ses premières étapes, et de laquelle personne ne peut prévoir l'évo):utior~défi - nitive, parce qu'elle se cache dans les pro~oncleurs 1e l mfim. rapidité qui éblouit nos regards, qu~ncl de _l'œuvre lent~ du pass é nous les tournons à ces grandes voies qm nous entrarnent ver s l'avenir- machines, bâteaux à vapeur, chemins de fer, télégraphes électriques. Com~uent don_c? bâteau:' à vapeur, chemin s de fer, télég-raphes électriques, m~s ,a~ service de la ~ensée, ù e l'imprimerie, du journalisme, des mte!·ets, .des ex_pai:is1onsde l a vie d'un hémisphère à l'autre! La hber!é améncame. placée à <JUelquesheures de distance de tout ce qui demande à vivre dan s le continent européen? - Est-ce que cette pauvre, aveugle diplomatie, qui n'a d'autre Credo, ni d' ,rntre 11;1o_yende ménag~r les destinées qui Iui échappent, que cette vieille balance poliIl est vrai de <lire, pourtant, que la force, au service du «:rime et de la ruse, peut tout produire et tout ramener. Que n'a rnns-nous pas vu.,déjà.,-sous cet Empire ? Y... Une fois la conscience humaine émancipée de l esclavage ma.- tériel et de l'ignorance, elle devait bientôt s'~mancip,er ~e i'esclavaO'e moral et du mensonge. Les Républiques cl It_alie commen~èrent l'œuvrc par la séparation del' Etat et de l'Eglise! elles se jouèrent des excommunications papales dans tout ce qm regardait leurs intérêts politi4ues; mais elles n'allèrent pa_s]?lu s loin. Ce fut leur faute et loor perte. Ce fut la grande m1ss10 n, !.: ~lo:re de la race allt'mande et anglo-saxonne, de transporter tique d'il y a deux cents ans, pourrait se soutenir plus longtemps
L• Jl O~l ME. .,,.,~·-~-------------------,---------------------------------,---------------"--'-------------'----.., encore sur l'onde immense qui nous porte tous, ,oulant ou ne voulant pas, vers un monde nouveau? - Et Bonaparte, et le Pape, et les cinq cent mille bayonnettes de l'Autriche, et les ignorantins, et les jésuites? - Laissez faire à la vague absorbante; elle monte, elle monte, elle redouble de vélocité à chaque heure, à chaque minute. L'avenir est à nous. Ainsi l'individualité, sortie des corporations privilégiées, agissant d'elle-même; la nationalité, débrouillée de la centralisation despotique, 'tlemandant à recevoir et à répandre les brises fécondes de la vie, d'après les loix de la vie elle-même; - tendent spontanément à l'Association; - à l'Association libre, universelle, qui mettra de plus en plus en corrélation d'intérêts et de devoirs, entrepreneurs d'i11dustrie, ouvriers, peuples divers, d'un bout du monde à l'autre; qui fera du patrimoine intellectuel et matériel de chaque nation un élément de richesse, rle joui$sance, de perfectio:mement pour toute~ les autres. L'individualite reste : seulement, elle se répand toujours plus hors d'elle-même, pour embrasser, dans ses activités, avec l'aide de ses sœurs, la Terre, l'U1,ivers, Voilà le développement, la véritable révolution <l'après nature. Je ne rève pas. Les nouvelles tendances peuvent être saisies, même sous l'ombre <le'la réaction actuelle. D'un côté, l'esprit individuel qui a caractérisé jusqu'à présent la marche des Bourgeoisies, qui a même fait leur force dans la lutte contre' les cla~ses privilégiées, commence à s'appercevoir qu'il ne pourrait pas conserver, augmenter ses acquisitions, s'opposer avec succès aux nouvelles tentatives d'organi.rntion despotique, en continuant à procéder d'une m:rnière exclusive, égoïste, à l'égard des classes inférieures; -de l'autre, ces classes, s'élevant rapidement aux lumières de l'intelligence, guidées, par l'instinct de leur vie, vers une compréhension plus pratique du problème social, ch~rchent à progresser vers leur émancipation par des moyens organiques. La lutte entre le capital et le travail tend à trouver une solution dans une association spontanée d'intérêts, que des doctrines exclll~ives ont jusqu'à présent représentés connue nécessairement antagonistes, mais qui ne 1~ sont pas en réalité. Ce qu'il y a eu d'absorbant, d'injuste jusqu'ici, dans le sentiment de la propriété individuelle, cédera de plus en plus au sentiment de la solid;uité sociale; ce qu'il y a eu de menaçant, dans le cri de douleur des masses indigente·.;, contre des institutions nécessaires dans leur principe et issues de la nature même de l'homme, fera place à une nouvelle impulsion vers le progrès. au dévèloppement de ces mêmes in,titut.ons, au bénéfice de tous les agents qui contribuent à la création de la richesse. Lr. jour que l'antagonisme du capital et du travail, du bourgeois et du prolétaire trouvera sa formule d'assimilation sur la grande voie de l'association libre et équitable, - ce jour-là, les dictatures personnelles et les despotismes héréditaires disparaîtront à jamais du sol européen. La belle, la pure, la féconde. liberté sor- :tir<1, co.nme une condition néce,saire, comme une garantie unive~sells du progrès, de l'âme même de l'association, et autour de la sainte bannière, l'égalité morale des hommes et la frater- .nité ne seront plus de cruell<>sironies. C'est à ce grand·œu r ~ de concilia:ion entre les forces actives de 1a R6vo:.utiGn.et du progrès - à cette immense conquête de la raison ,et de la science, que toutes les démocraties enropéenues doivent tra-vàiller~ C'est là un de nos grands devoirs, au milieu des épreu-ves, que les erreurs du passé nous font subir à present; - c'est un des ëléments de ma foi, de mon espoir dans l'avenir. L'autre, c'-est l'associatiim des nationalités, soit dans la lutte contre lenrs oppre~seurs, soit dans leur coopération, à se garantir mutuellement, a-près la victoire, leur liberté et leur indépendance, à protéger en commun les institutions, que chacun~ d'el\es choisira comme plus coll'l/è11ablesau dé,velop-pement de ses propres vocations dans l'œuvre du progrès général. Toutes les aspirations essentielles de la civilisation e11ropéenné, malgré la pression des conditions politiques qui la dominent a11jo,1rd'hui, tendent déjà it constituer une grande Ligue ou Fédération iadustrielle et commerciale des Etats. Non seulement la vie matérielle, mais la vie morale et intellectuelle aussi, étend irrésistiblement ses ramifications solidaires d'une nation à l'autre. C'e.,t la loi rationnelle de l'histoire, qui se manifeste même à travers le5 entraves d'une politique arbitraire. C'est au génie des peuples libres d'ouvrir complètement la route à l'évolution de cette loi tle solidarité universelle. Citoyens! je vous ai dit ce que je pense, ce qne j'espère de ]•avenir. Je ne vous ai pas parlé des questions du jour, des occasions plus ou moins favorables qu'elles pourraient ofli-ir à la résurrection des peuples. C'est que je suis intimcmmt convaincu que les véritables opportunités pour leur émancipation, ne dépendent pas des accidents extérieurs de la politique. Que l'Autriche s:>itavec lès puissances occidentales, ou qu'e!ie soit contre elles; que Louis Napoléon gagne des bataille~ en Crimée ou qu'il n'en gagne pas, tout ça ne veut rien clire, jusqn'à ce que le mouvement unitaire des forces de la liberté, le sentiment, le besoin <le relever la nature humaine, abaissée par la conquê e·étrangère ou par la tyrannie i11térieure, soit parvenu à ce point, que •toutes les classes qui aspirent au progrès politique et social dans une nation se lèvent, comme un seul homme, contre le pouvoir arbitraire <J_,pUèise sur toutes. Bt pour que cela arrive, il faut que chacune d elles n'ait pas à craindre une nouvelle tyrannfe, ou des crises violentes clans le st'in même de la liberté. Je vous dis cela, moi italieu, d'après une triste expérience nationale. Les Républiques italiennes tombèrenl sous le joug des tyrans, et l'Italie toute entière sous un servage de trois siècles, parce que bourgeois et ouvriers de ces jours là, ne surent pas trouver une formule économi'lue progressive, qui conciliât leurs intérê:s; et au lieu de se fo1Hlreensemble, rle s:entraider dans l'élaboration de leurs aptitudes sociales, ne travaillèrent qu'à s'exclure mutuellement des droits de cité par la vi9l~nce et la terreur. Heureusement les progrès de la civilisation, l'expérience des malheurs soufferts, a préparé le terrain à une entente pratique. Que chacun de nous travaille à féconder ce terrain, à rapprocher les théories abstraites de la pratique réelle, les aspirations vagues -de l'étude austère des éléments de la vie sociale, dans leurs exiirences individuel1es, comme dans leurs devoirs collectifs, et l'heure de la délivrance ne tardera pas à sonner. Citoyens, je vc>usai dit, sans art et sans éloquence, ce que je pense, - mais sincérement, librement; ne m'emportant pas contre le présent, parce que j'ai foi dans l'avenir; parce que je sais que toutes les forces réunies de la réaction ne peuvent pas empêcher la marche du progrès, et que, tanrlis que hommes, ~ystèmes, formes de gouvernement, tombent les uns après les autres, un,eforce insurmontable reste toujours debout - le Peuple. Discours du citoyen Talandier : CITOYENS, Louis-Napoléon Bonaparte, le parricide du Deux-Décembre, le neveu et l'héritier du parricide ·au 18 Brumaire, avait à venger sur l' Aristocratie anglaise la défaite de Waterloo et la tombe de Sainte-Hélène ...•.. Pour se venger, jl s'est allié à elle. Maintenant, laissons passer la vengeance de Bonaparte. D'autres orateurs vous ont parlé et vous parleront encore de la guerre. Ils vous clé voileront les mystère!t des diplomaties. Ils vous montreront dans leur stupéfhnte horreur ces alliances impies où, sons l'égide de Bo11ap:1rte,l'Angleterre et l'Autriche se donnent la main. Ils exposero1it à vos regards ce tableau, où le ridicule le dispute à. l'iufàme, du petit roi de Piémont apportant sa petite épée au faisceau d'armes des empereurs, et du roi Bomba y glissant sou couteau sanglant d'égorgeur Ils vous décrieront le commencement et la suite de cette grande déb!icle p;édite par les poètes, et qui arrive en vérité plutôt encore qu'il, ne l'avaient prévu. Pour moi, je vous demande de le prendre sur un ton moins héroïque. Je vous demande de détourner avec moi vos regards des champs de bataille où la mort fauche _lamoisson des rois, et dans cette nuit obscurcie encore par la fumée de la poudre et du sang, au milieu du bruit assourdissant <les armées qui s'ébranlent, des canons qui tonnent, <les fortifications qui croulent, de regarder vers ce coin du ciel où se lève l'étoile du matin ; la Sainte-Alliance des Peuples. Et d'abord, merci à nos amis anglais, merci. Plus que l'hospitalité du ciel, plus que l'hospitalité du foyer, plus que l'hospitalité du pain, Cil qu'il nous faut : c'est l'hospitalité de la pensée. Vous l'avez compris .. , merci. La vie est diffieile aux proscrits : le travail les fuit, la défiance les repousse, la calomnie les poursuit, la misère les traque. Cependant, hommes de conviction, nous savons que nous .remplissons une mission nécessaire, et comml! le germe des plantes emporté au loin par les venta du ciel, nous savons qu'il n'y a pas vraiment de terre étrangère, et que partout dans le monde l'homme est chez soi. Mais tout le monde ne sait plus cela. Sous le ciel de la civilisation, les hommes se jettent encore à la face ce mot plein <le haine : Etranger. Vous ! vous nous avez appelés frères. Frères, merci ! merci ! Nous tenons plus à notre foi qu'à notre vie. Plutôt que d'abandonner la Révolution, nous nous envelopperions üans notre drapeau, et, en tombant, nous crierions encore: LIBERTÉ, EGALITÉ, FRATERNITÉ .. , ou LA MORT ! Epuisés par mille fatigues, blessés dans mille combats, tout ce que nous pouvions faire éta:t de maintenir intact l'honneur du drapeau. A ce drapeau assailli par toutes les tempêtes de la tyrannie vous avez apporté, pour le maintenir debout dans le monde, le secours de votre bras ... C'est tout ce que vous pouviez faire de mieux pour nous. C'est le plus grand bonheur que vous puissiez nous donner. l\,lerci ! amis, merci! Et maintenant un mot du passé. Oui, les Révolutions de I 818, clont nous célébrons aujourd'hui la commémoration, ont failli parce que la solidarité entre les peupl-:s n'a pas été pratiquée. Auj:iurd'hui, en vertu de cette solidarité, nous souffrons tou.s le châtiment de fautes que tous ceper.ùant nous n'avons pas commises. Et cc qu'il y a de plus curieux, c'est que ceux-là précisément qui ue trouvent rien à commémorer dans la Hévolution de 184.•8,et qui, au jour où ce drapeau de la solidarité des Peuples est solennellement rekvé, s'abstiennent de. puraître, sont ceux qui, ayant eu le gouvernement en 184•8,devraient être seuls accusés des fautes commises, si on ne devait accuser accuser en même temps l'ignorance de tous et la misère du plus grand nombre. Eh bien, nous qui avons soutenu la solidarité des Peuples en Mai, la solidarité des homme~ c11Juin 18·1·8,nous trouvons qu'il y a cle grandes choses à céiébrer dans ces Révolutions. C'est en Mai 1848, c'est à la suite d'une manifestation qui avait ponr but de soutenir, à propos rle la Pologne, ce principe de la ~oliclarité des Peuples, que nos amis Barbès, fütspail, lllanqui, et tant d'autres, ont vu s'ouvrir devant eux les cachots de Vincenne~. C'est à la suite du mouvement victorieux de Février que les idées, accumulées durant des années par les penseurs les plus éminents, se sont répandues sur le monde comme une semence féconde. C'est sur les barricades de Juin que le Socialisme a reçu le baptême de feu. Cela pour Paris seulement. Mais Vienne, Berlin, 13ade, Pesth, Rome, Venise n'ont-elles pas des victoires et des défaites plus dignes que les vicbires de rester dans la mémoire des hommes, et pour héros des martyrs ? Oui, nous célébrons les Révolutions de 1848 ! Nou~ en gardons la mémoire; et, instruits par les fautes de cette époque, nous y puisons un fort enseignement pour l'avenir. 'Cet en5eignement est celui-ci : Les peuples sont solidaires comme les hommes, et s'il n'y a pas liberté pour tous, égalité entre tous, il n'y a <leliberté et d'é- !!alité pour personne. Cette alliance que nons cherchons à fonder aujourd'hui n'est pas seulement juste et utile, elle est nécessaire; et, pour elle, nous pouvons dire que les temps sont venus. Aujourd'hui, les camps sont tranchés. Il n'y a plus que deux partis dans le monde, et ces deux partis se retrouvent partout en présence et prêts à en venir aux mains. Ils font deux famille dans chaque famille, deux nations dans chaque nation, deux humanités dans l'humanité, Que me parlez-vous de familles et de nationalité ? Mon frère n'est mon frère que s'il est avec moi pour l'égalité contre l'injustice. Mon pays n'est mun pays que s'il combat, au dedans et au dehors, pour la liberté et pour le droit. J ~ ne suis plus Français ou Anglais, Russe ou Polonais, Allemand ou Italien. Je suis homme libre. et ceux-là seuls sont mes frères dans l'humanité qui sont RépubÙcains socialistes. Ne voyez-vous pas l'universelle raison qu'il y a à ne plns être étroitement d'une caste, d'une famille, d'une nation ? Les deux partis qui se disputent le monde combattent au nom de principes qui ont des prétentions égales à l'universalisme. - Domination universelle, <lit l'un. - République universelle, dit l'autre. Le principe de son pouvoir, dit Hertzen en parlant du Czar, n'est pas national, et l'absolutisme est plus cosmopolite que la révolution. Plus, ami, c'est trop dire. La révolution est aussi cosmopolite que l'absolutisme, et, en outre, immense avantage, elle est nationale pour chaque nation, individuelle pour ·chaque homme. Cela est nécessaire : et lorsque l'absolutisme nous dispute le monde dans le monde entier, il serait étrange que nous fussions moins cosmopolites que lui. Une nation, comme un homme, a, dit-on, une mission, et une individualité nécessaire à l'accomplissement de cette mission. Eh! qui le nie ? Mais le moyen de grandir son individualité est-il de borner son horizon ? LA PATRIE EST OÙ L'ON AIME, Une nation est véritablement où est son amour, où est son génie. Pour nous, Français, où est le génie de la France ? dans la Révolution, dans le Socialisme moderne. Où est son amour? dans la République universelle, démocratique et sociale, ' Hors de ce cosmopolitisme de la liherté et de l'égalité, on manque également, comme homme, à l'Humanité qui est supérieure à toutes les nations, et, comme Français, à la France qui •n'a d'autre raison d'avoir une mission que celle de servir au bien de l'Humanité. Mais le Socialisme, dit-on, n'est pas l'esprit de la France : il n'en est que la fièvre chaude. Fièvre chaude, soit : lorsqu'une nation a dans le corps des rois, des empereurs, des usuriers et autres bêtes vénimeuses de ce genre, elle doit s'estimer fort heureuse d'avoir la fièvre; car si elle ne l'avait pas, c'est qu'elle serait morte. Bénie soit donc cette fièvre française ! . 1\fai$ parlons plus sérieusement. Ce qu'on reproche ail Soci.t~ hsme, c'est d'être vague, inrléterminê, diffus sans raison et sans but précis ; amas de doctrines mal é:aborée;, inc:ipable de servir de terrain ~ une alli~nce qui doit reposer sur un foncis solide. Oertes, Je ne puis me permettre d'occuper les moments de l'assemblée en. l~i faisant un cours de Socialisme ; mais je demande la pern11ss10nde poser seulement, sous forme interroo-ative quelques-unes des affirmations du Socialisme. 0 ' Au point de vue r~ligieux, le plus vaste de tous, est-ce quelque chose de vague et d'rndétenniné que de nier un Dieu hors de la nature, et l'infaillibilité des ministres qui prétendent représenter ce surnaturalisme ? Au point de vue politique, est-cc quelque chose de vaaue et d'indéterminé qne d'.iffirmer qu1à l'idée d'un Dieu hors 0de la nature répond la notion' politique d'un gouvernement en dehors du peuple, tandis qu'au contraire à l'idée de Dieu dans la nature répond 1~notion politi~1ue du gouvernement dans le peuple ? Au ~0~1t de vue social, est-ce quelque chose de vague et <l'indétermrne que de substituer, dans le droit, le travail à la naissance et à la rich~sse, et de vouloir que l'instrument de travail appartienne au traw&illeur ? Au point de vue de ia femme, est-c·e quelque chos~ de vao-ue et d'indéterminé que de déclarer que messieurs les Démocr~te11 qui,, sans di_scussio11r,efusent à !a femme l'intelligence nécessaire à l'~l_aborat10nde la loi commune, et qui par là décident quej p_ol!t1quernent, la femme n'a pas d'âme, sont plus aveugles et aussi nd1cules que les Prélats chrétiens qui, dans certain concile, mirent en question l'âme de la fomme? Au point de vue du prolétariat, est-ce quelque chose de va(l'ue et ~•indéterminé que de dire que celui 'qui a part au travail (\oit avoir part au bénéfice dans la distributio1' des ridiesses et. à l'administration des intérêts communs dans le gouvernemet~t ? Au point de vue humain, est-ce quelque chose de vague et d'indéterminé que de dire que, de même qu'il n'y a pas d'étrang~rs dans la nature, il ne doit pas y avoir de déshérités dans la société, et que partant, sous le soleil, tout homme doit être libre et jouir de droits égaux à ceux des autres hommes ? , ~n vérité, si ces choses sont vagues et indéterminées, qu'est-ce qm, dans le monde de la pensée, est clair et intelligible? Ah ! sans doute, la réali,ation de ces idées dans la pratique sociale, e_st_difficile. Il e~t plus aisé d'aligner des phrases contre le m~1te~1ahsmed_u siècle, et, aux foule5 ivres de faim, de prêcher le rnepns des nche~ses et le sacrifice de soi ..même. :;:vlaisoù cela mène-t-il ? Nous pouvons nous tromper; mais on nous rendra cette justice que nous ne trompons persoune. Hommes de travail intellectuel et de piopagande, ce n'est pas nous qu'on verra jamais hlasphêmer l'Idéal. ~otre ,but est d'amener l'Homme au complet développement <letoutes ses facultés physiques, morales, iutellectuclle~, d'icléaliser même, de poëtise; l'espèce 111.pnaine-. i\Iai~ la nature a ses loix, et l'estomac ses exigences. Nous voulons nourrir le ventre de pain, pour avoir un p_erveaucapable de penser et uu cœur capable d'aimer, La Justice est le but: le be1:f~teak, la Science, et !'Enthousiasme, sont les moyens, Ceux-là sont les matérialistes qui n'ont à offrir aux: v_e:1tresaffamés que les restes des vieux préjugés religieux et poht1ques, aux cœurs ulcérés que de~ morales impossibles et à l'intelligence du Peuple hHiêtée r1uedu gin. ' Pour nous, aucune considération politiqne ne nous fera abandonner ce que nous croyous être la vérité et la justice. Tel est l'e~prit q~i nous a a1~i111éslorsqu'il s'est agi -des résolution~ que nous _de~1011~sou_sprescnter. Tel est le terrain sur lequel nous vous mv1tons a c11nenter la nouvelle alliance. On dit que ce terrain n'est pas solide. Il est solide et il est le seul. Vive l'alliance des Peuples l Vive la République universelle, démocratique et sociale ! LES COR'rÈS. Les Cortès espagnoles donnent, depuis quelque temps, nn étrange et triste spectacle au monde. Issues d'une Révolution qui pouvait. constituer ses pouvoirs, souverainement, elles n'ont su .rien fon~ der dans l'ordre politique, et, voilà que dans l'ordre moral elles violent la liberté des cultes, c'est-à-dire la conscience humaine au profit du Catholicisme. Le Catholicisme, relig·ionfondamentale, religion exclusive en Espagne! Hélas c'est à son ombre que l'Espagn@ est devenue ce qu'elle est aujourd'hui, une nation s,ms initiative, sans science, sans ressort, une nation qui bégaie à peine la grande langue de la civilisation moderne, et qui retombera, bientôt, pour ne plus se relever si de nouveau le Catholicisme étend sur elle sa main. . Les Cortès ont livré l'esprit de la Révolution et trahi.ses plus chers intérêts, pour ne pas se compromettre. C'est par ambition, et sans foi, qu'elles ont flatté l'ignorance fanatique des masses : eh ! bien, tôt ou tard elles seront brisées par cette domination jalouse qu'elles viennent de servir. Si le temps lui cède, l'Eglise sera plus forte que le temps. L'histoire est là qui le prouve. Les Cortès en reconnaissant la prédominance et l'autorité absolues du Catholicisme ont commis un excès de pouvoir contre la conscience humaine qui est plus haute, plus sacrée que toutes les majorités souveraines. Le peuple, lui-même, quand il agit directement dans les Assemblées, n'a pas droit contre les consciences. Tant que certaines lois morales, qui sont les droits de la vie, ne seront pas consenties et. respectées comme étant supérieures à tous les contrats particuliers, il ne faut pas espérer pour la civilisation humaine un développement continu, puissant et régulier. Le progrès aura toujours ses réactions, comme la mer ses reflu.x : la force élèvera ses . digues, et le sang du sacrifice coulera dans les sillons. Pauvre Espagne! au lieu de parler de liberté, fr
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