Homme - anno II - n.06 - 10 gennaio 1855

marcher vers la plage de Berck - Devinez pourquoi? - poitrrepousscr une attaque des rffu_qiés de d'An,qleterre. -Voici ce qui se passait dans la nuit du 19 au 20 : vers les 10 heures du soir, les douaniers de Berk jetèrent l'alarme dans la commune en tirant de nombreux coups de fusil; ils disaient qu'un bâtiment voulait gagner furtivement la côte et qu'il avait échangé des signaux avec les hauteurs clans la direction de Montreuil. Le commissaire de police eut à peine entendu le rapport des douaniers qu'il se mit à crier partout : armez-vous! Ce sont les réfugiés qni viennent mettre tout à feu et à sang. Il engagea les habitants à prendre leurs fusils pour repousser ces forcenés. Il leur disait que ses amis Jes Anglais (la police) arnient prévenu M. le Préfet que les réfugiés de Jersey avaient frêté un bateau <Jecinquante tonneaux pour opérer une invasion. Mais les marins de Berk, moins effrayés et phis sr:m,és que ceux de Saint-1\lalo, riaient beaur.oup rle la peur de U. le commissaire, et bravant sa colère, ils mirent leurs bateaux à la mer pour secourir non les réfugiés, mais les naufragés. Telle fut la cause dP.ht veillée qu'on nous fit tenir pendant toute la nuit. Le journal de la préfecture inséra le fait suivant sans ajouter d'autres commentaires : "Bi::RCK. -Dans la nuit du W au 20 de cc mois, un "brick anglais a touché à un demi kilomètre de la Côte. Le "capitaine de ce bâtiment ne sachant pas bien où il se "trou mit, a lancé plu;,ieurs fusées à la congrève. Les "douaniers de la côte ont alors répondu par des coups de "fusil. Le lendemain, vers l O heures, ce brick fut remis "en pleine eau par la mer, et put reprendre le large sans "aucune avarie. "Des b~teaux pècheurs de Berck avaie_nt offert leurs se- "'conrs au brick qu'ils croyaient en danger; mais le "capitaine assuré qu'il n'avait rien à craindre, les avait "refusés." Les gens sérieux savent parfaitement que vous n'avez j:imais eu de ces manies pareille~ à celles du policbinelle qui vint sauter sur la plage de Boulogne ; vous n'avez guère besoin de ces niaiseries là, l'heure du clénouement marche assez vite. Ce n'est donc q1 1'une complaisance de police à police, une gracieuseté de Lonl Palmerstou, qui f.ait toujours sa cour à Bonaparte. Les pauvres habitants de l\Iontreuil en voient de grises! La majesté ies régale de soldats : le l:?c Chasseurs à cheval passe le 31, le 2c de ligne le leç. jam·ier, le 29e et nn nouveau détachement du ] 2e Chasseurs le 3, le 13e de ligne le 5, le 4 le le 7, le 12e léger le 8, le 22e le 9, le 1er léger le lü, le 53e de ligne le 11, le 23e le 12, le 15e léger le 13, le 56e de ligne le 14. En.fin, le 3e léger et le 5Se le 20 et le 23. En tout, quinze régiments ayr;nt droit an lit, a1tfeu et à la chandelle, et cela, dans l'espace de vin,qt-trois .f~urs. Les habitants n'ont droit qu'à la prison, s'ils réclament; c'est aiusi qu'on corrige les réea'citrants. l7u grand scandale vient d'éclater au camp: par ordre •<le sa :tiiajesté. on vient de distribuer à presque tous les régiments des bibles anglaises. Les aumôniers ont beaucoup crie, surtout le nôtre. Depuis il s'est radouci; l'empereur leur a fait rlire que c'était un compliment payé à ses gnlcieux alliés, et qu'ils n'a va.ieut rien à craindr.e puisque ses soldats se servaicn t seulement des livres, pour envelopper leur savon et leur tabac. La soutane et l'épinarrl sont enthousiasmés de ce grand homme. L'un dit que c'est un être plein de piété, d'habileté et ri<-' grâces; l'autre, que c'est un malin qui connait tons les tours. Le sous-préfet ùe Montrenil, ce magistrat qui porte si dignement son écharpe, seconde habilement les efforts du Pacha Dn Tanlav: il veut forcer la commission municipale à mettre ~ne imposition nouvelle sur les denrées alimentaires, pour faire face à toutes les dépenses qu'entraîne le passage des troupes ; puis, il fait courir le bruit qu'il s'oppose formellement à cette mauvaise idée qui s'élève au sein de la commission municipale. Provocations, crimes, peste, disette, tout est bon à ce gouvernemed brutal. La bourgeoisie est effrayée, elle sent tous les jours que ce pouvoir i,r;noble,né de la.force, doit irrévocablement périr par la force. Tout à vous, Un suspect du camp de Boulogne. Note du Rédacteur. - Nous connaissons, depuis longtemps, la célèbre version de notre débarquement sur les côtes <leFrance. Cette chronique stupide inventée et servie par les polices alliées a couru, depuis Jeux mois, tous les ports de la Manche, depuis Saint-Malo jusqu'à Boulogne. , Pauvre 1\1. Bonaparte! Il n'aura jamais que <lesdrôles qui le voleront à qui mieux mieux! Quan<l notre pays sortira dt sa léthargie profonde, nous saurons bien y rentrer pour y pratiquer le devoir : mais nous ne sommes ni de l'école de Coblentz, ni de l'école de Boulogne, ni de l'école ile Quiberon. Lïl O~l~lE. CORRESPONDANCEPARISIENNE. 7 janvier 1855. Je ne vous envoie que peu de lignes, mais les quelques nouvelles sont bonnes. L'emprunt des 500 millions n'arrivera pas à moitié caisse. Malgré les menaces et les :ippels, on ne veut pas débourser pour les victoires-problèmes de là-bqs. La campagne ne donne jamais eu ces sortes d'affaires ; les villes, grandes et petites, sont minées par l'impôt et et lt prix des subsistances. La bourgeoisie moyenne, qui a quclqttes sous, les garde, et il ne reste à l'empereur, pour couvrir son gouvernement, en cette triste campag1,e financière, que d'envoyer sa garde contre les hôpitaux et contre les banques. Il est malade, le César-hibou. L'épiue dorsale profondément entamée, menace de ne plus porter tant de grandeurs, et lors des réceptions officiE:lles, le jour de l'an, aux Tuileries, ThLBonaparte s'appuyait sur la canne bourgeoise et mélancolique des '.valétudinaires. Il n'a pas paru, le soir, au diner de famille! Le vieux Jérôme est tout hilare : il rêve succession. Dans plusieurs départements, des trnnbles partiels ont eu lieu. Les journaux de Décembre déclarent qu'il n'y .a point là de réveil politique. Souvenez-vous de Buzançais. C'était six mois à peine avant la Révolution de Février. C. C. LA FRANCE ET LA RÉVOLUTION. , Les questions que j'aborde sont graves, considérables, et bien au-dessus de mes faibles talents; mais je me plais à espérer que le lecteur me pard(,nnera mu témérité, par un double motif : d'abord, en raison des circonstances étranges, extraordinaires où nous sommes; ensuite, eu égard et à l'intention qui me dirige et au but que je me propose. Je m'explique. Combi~n l'univers est varié, divers, ondoyant, si on le consi<lère dans sa vaste étendue! Rien ne s'y tient immobile ; toutes choses, au coutrairc, y changent sa11scesse et sans cesse, les unes déclinant peu à peu, puis finalement tombant eu ruines et disparaissaut, tandis qu'à leur place s'en élèvent d'autres qui, après avoir crû, grandi, atteint leur suprême apogée, subissent à leur tour le sor.t de celles qui les avaient précédées sur l t scène du monde. Et cette scène étonnante, gran(liose, sublime, le philosophe la trouve à tous les àges de l'humanité. • ivlême avant l'antiquité gr2cque et romaine, quel passé immense, profond, et par malheur presque insondable ! que de peuples, de nations, d'empires, d'iclées, de religions, d'organisations sociales ! et, dans ces peuples, ces nations, ces empires, ces idées, ces religions, ces organisations sociales, que de révolutions se succédant les unes aux autres par un mouvement qui ne s'arrête point ! L'Inde, la Chine, la Chaldée, l'Egypte, l'Assyrie, la Babylonie, etc., etc., les systèmes religieux ou philosophiques des Védas, de Boudha, de Las-Tseu, de Khoung-Tseu ( Confucius), du Zend-Avesta (attribué à Zoroastre), etc., etc., les sociétés di ven,es correspondant à ces systèmes religieux ou philosophiques, tout cela a eu ses jours de grandeur, de puissance, de lumière; ensuite, tout cela s'est affaibli graduellement, et a eu sa fin. _Après la vieille antiquité, si je puis l'appeler ainsi, c'est l'antiquité grecque et romaine qui est descendue dans la fosse commune. . Et pourtant quelles civilisations vivaces qu':! la civilisation grecque et la romaine ! La première, plus intellectuelle, plus morale, plus brillante, plus élevée. La seconde, plns solide, plus robuste, plus forte. Mais ni les chants divins d'Homère, ni les hautes conceptions des Platon et Aristote, ni les drames profonds des Eschyle, Sophocle et Eurypide, ni les toiles dE:sAppelles et des Zeuxis, ni les marbres de Phidias, ni les vertus simples des Cincinnatus et Publius Agricola, ni celles plus mâles et héroïques des Brutus et Caton d'Utique, les qerniers des Romains, ni le génie politique et militaire des Camille, Scipion, Marius, rien n'a pu enrayer le temps. Notre civilisation a son origine dans le Christianisme ; c'est dire, en autres termes, qu'elle date d'hier, car qu'est-ce que 18 siècles dans l'océan des âges du genre humain ? Néanmoins, qui pourrait nombrer et classer les événements de toutes sortes qui s'y sont accomplis dans l'ordre religieux, philosophique, politique, économiquE:depuis les premières sectes jusqu'au grand schisme de }.!Occident, depuis les. scholastiques jusqu'aux hardis penseurs du XVIIIe siècle, depuis la conquête et la Féodalité jusqu'à la Révolution française, depuis le régime du servage jusqu'à celui de l'égalité civile ? De, la série indéfinie de ces mutations, le Progrès ressort comme loi du développement de l'humanité. L'humanité d'aujourd'hui n'est point. celle d'hier, pas plus que celle de demain ne sera celle d'aujcurd'hui : il se fait dans son cœur, son intelligence et sa con<lition extérieure une transformation et un aYancement continuels. Toutefois, quel spBctacle désolant s'offre aux yeux du véritable philosophe, de celui qui perce la poussière des év6nements, et va au fond des choses ! Hélas ! il est visible, en dépit des apparences contraires, que le ProgrèS: n'a touché que l'épiderme de l'Homme, ne l'a point pénétré intus et in cute. Comme preuve, voyez la France et l'Angleterre. Elles s'intitulent, elles se proclament les nations civilisées pat· excellence. Prétentions fondées, je l'accorde ; mais j'ajoute : quelles civilisations que des civilisations où l'immense majorité des hommes est la proie de l'ignorance, du vice et de la faim! que des civilisations qut renferment dans leur sein le prolétariat et la prostitution ! En vérité, l'humanité n'est-elle pas toujours plongée dans la barbarie? En 1789, la France se ·leva et s'efforca de l'en arracher. Mais entravée dans sa marche, détournée de sa voie par de fatales circonstances, elle n'accomplit son œuvre qu'à moitié. Reprise en 1830 et en 1848, la grande œuvre 2st interrompue Je nouveau. Il y a plus même. Le silence et la nuit se sont faits au seiu de la Patrie, et la liberté de la pensée, Je la parole et de la plume s'est réfugiée à l'étra11ger. Dans une pareille situation, c'est le droit, que dis-je ? c'est le devoir, même des plus humbles, de ,lire, d'écrire, d'imprimer ce qu'ils croient bon, juste, utile, afin que l'Avenir s'éclaire par l'enseignement du Passé et clu Présent, que la ciYilisation se continue, et que la Révolution s'achève. Là est le premier motif qui m'a mis la main à la plume, D'un autre côté, quelle est mon intention? quel est mon but? Je cherche le vrai, le juste, le bien-être général, sans acception de systèmes, de sectes, de coteries. n'intrigues, de personnes, avec les seulocs forces de mon cœur et de ma raison; et, dans tout ce que j'ai écrit, j'écris et j'écrirai, j'emench ne tracer que des indications, ne présenter que des aperçus, espérant que mon appel trouvera de l'écho dans les fo::tes inteiligences du parti, lesque 1;es, creu:sant pins profo11d, serviront mieux que moi la sainte ca11sedu Peuple et de la Démocratie. Ici sont les autres motifs de ma conduite présente. Je tQnais à clire ceci et en ce lieu ; si, en effet, l'indulgenc.;edn lecteur n'a jamais cessé de m'être utile, ells m'est devenue maintf'nant indic;pcnsablc. Le lPcteur va me comprendre. Méditant sur la Rérnlutioa de Février 184S, j'ai pensé que, pour la constituer et la rP.ndre inébranlabh·, il fallait 1° l'umté de pouvoir et de gouvernement - une Convention, 2° la Cc,mmune libre et forte, 3° la suppression de l'armée, et, à ~a place, le Peuple armé et delwut. • Pins j~ réfléchis sur ces idées, plus je m'y confirme; car l'unité de pouvoir et de gouvetnement, c'est l'unité française conservée et consoiidée, c'est l'unité de la YOlonté et de la direction, et, par ,:011séquent, le levier nfcessaire p•mr les réformes de toute nature à accomplir; car la commune libre et forte, é'est le paysan entrant dans la cité, c'est la vie politique circulant dans tous les membres rlu corps social, et répandant partout la sauté, la vigneu:.- et la force: ~ar la suppression de l'Armée, c'est la Tyrannie tuée dans son œuf, le Peuple sans ennemi, pleinement souverain et maitre, - la Démocratie sans obstacle, - la fin des luttes sanglantes et l'inaugnratiou du règne pé!.- cifique de la Pensée, de ra science et de l'amélioration sociale ; car c'est, si on e11visage ces diverses inslitutions dans leur ensemble et leurs rapports. la solution du problème de la Concilin.tion de l'Autorité et de la Liberté, problème poursuivi par les Sages de toutes les Epoque1-, - et cela par des déductions tirées de ls philosophie de l'hi:,toire de notre nationalité, de notre caractère de peuple, de la nature et de l'esprit de la Démocratie, <le la raison, de la morale et de l'intérêt général et commun; car c'est le Passé enterré à jamais et !'Avenir assuré et triomphant. Mais la Liberté politique et la Démocratie sont effets et non causes, sont l'homme extérieur et non l'homme intérieur. Tout vient de l'homme intérieur. Pour que ·1a Liberté politique 12tla Démocratie soient réelles et effectives, que faut-il donc ? que l'homme soit maître au-dedans de soi, souverain de soi ; or cela peut-H être si, auliett d'avoir la conscience de la souveraineté de la raison humaine, l'homme se laisse dominer et asservir par une ·autorité placée en dehors de lui? Telle est précisément la dépendance où il se trouve par rapport au Catholicisme, et géuéralement par rapport à toutes les religions dites révélées. Et, c'e:;t pourquoi, au nom de la Liberté et de la Démocratie, j'attaque formellement et énergiquement le Catholicisme comme principe premier de tyrannie et servitude, j'en sollicite la suppression, et le remplacement par la raison et la rhilosophie. Cependant jamais ma tàch:: n'a été ni anssi difficile ni aussi délicate qu'en ce moment. Si on y réfléchit, on verra en effet qu'il s'agit ici, pour moi, de traiter des questions les plus hautes de la métaphysique, de la morale et de la philosophie de l'histoire ; de déterminer, dans leur source même, les devoirs et les droits de l'homme, afin d'en déduire les corditions du bonheur des individ11s et des peuples ; que je me lève contre un Golosse immense, que jusqu'à ce jour rien' n'a pu abattr~, et qui couvre et domine encore le monde.; que par une singularité étrange faite aux adversaires du Catholicisme, tout en démasquant les charlatans et les scélérats qui l'exploitent à leur profit, je risque de blesser les âmes simples et tendres pour lesquelles il est une consolation et un appui. Que de motifs pour redouter la lutte! Je l'entreprendrai néanm,oins sans hésiter, parce qµ~,

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