Homme - anno II - n.01 - 6 dicembre 1854

-SCIENCE.- ' -SOLIDARITÉ.- JOURNALDELADEMOCRATIUENIVERSELLE. N' 1. MERCREDI, 6 DÉCEMBRE 185(-2e Année ('«- .1uu~•11al 11111•ait une tel8 1•0.r 8e111aine. Toutes lettres et correspondances doivent être affranchies et dressées au bureau de I' r mprimerie Uni,erselle à St-Hélier AVIS AUX ABONNÉS • N 011spréveno11s les personnes qui se sont abonnées au journal l'Homme, soit pour trois mois, soit pour six mois, soit pour un an, et qui n'ont pas encm·e \ ersé le montant de leur abonnement .jusqu'au Ier Décembre 1854, qu'elles so11t instamment priées de s' AC(~UITTERSANS RETARD entre les mains de M. Stanislas 'rcHORZWSKI, QS, Greek-stn et, Soho Squure, London, ou bien de l'envoyer directement à l'admiuistration du journal, à Saint-Hélier (Île de J er!ô,ey), l9, Dorset Street. Da,1s ce dernin cas, il suffira d'adresser soit un mandat sur la poste, ou en stamps, au nom de M. Zeno SwIETOSLA WSKI. Les souscripteurs an journal !' flomme sont avertis que la SECONDE ANNEE du journal a commencé le 1er Décembre 1854; partélnt, l'Admi;iistratio11prie les personnes qui désireraient renouveler leur abounement, d'en envoyer immédiatement le prix d'avant·e à l'adrPsse indiquée, AFIN D'ÉVITEl-t TOU"r RE,.rARD dans l'f'nvoi du journal ponr le nouveau terme. - Les conditions ci-dessus sont i11dispt11sahleset doivent être remplie1;, - autrement les Abon11és s'exposeraient à la cessation de l'envoi du journal-. L'ARMÉE FRANCAISE. 5 L'Angleterre n'a pns une g-rande estime, au fond, poûr son allié de France, mais elle croit qu·' l'Empire est inépuisable e11lég·io11sde g-uerre, et, dans le besoin qui la presse, elle lui sacrifie la Révolution, qui 11'a ui les budgets, ni les armées, ni le _g-ouvernement. Cette opinion~ accréditée par les souvenirs de notre histoire militaire-, n'est point particulière à ce pays ; elle est dans l'esprit de tout~ l'Europe, et le Cmnediante <les Tuileries e:xploite habilement cette erreur qni don11edu poids et du prix à sa politique, comme à ses alliances. Voyons, µourtant, ce qu'il y a au fond de cette puissance formidable, et dénomb- ons les forces de Darius. • L'i,,fanterie est, en Fra11ce, la lrnse fondamentale de la puissance militaire- : cette infanterie se diviseeu deux sections org-a11isées,l'une en bataillons, et l'autre en régiments : La première sPction se compose ainsi qu'il suit : 20 ha ail!ons de Chasseurs de Vincennes, 3 bataillons d'infanterie Légère d'Afrique, soit : 23 bataillons. La deuxième section compte 75 régiments de Ligne, ~5 <l'Infanterie Légère, ;J rég·iments de Zrmwes, 2 de Légion étrangère, 1 de rfirailleurs Turcs d'Alger. To al : 106 régimPnts. Voilà da11slt•ur Pnsemble toutes les forces militaires de l'Empire : voyons, maintenant, comment CPS forces sont distribuées. En Orient, il y a 7 bataillons de Chasseurs de Vi11ce1111;eisl y en aura bientôt 9, si les deux divisions qu'on annoncf' dev<1irfaire campagne avec Omer-Pad1a, dans la Bessarabie, sont véritablemeut expéùiées. li y a de plus 19 régiments de Ligne, 7 d'infanterie Légère, les 3 ég·iments de Zouaves, les Q de la Légion Etrangère et le régiment des Turcs Algériei1s. Pour l'expédition en Bessarabie, 8 autres partiront. ll faut donc compter 40 régiments, plus 9 bataillo11sde l'autre Infanterie. Mais l'Afrique et Rome ont leurs coutingents .commela Ct·imée : défalquons encore. En Afrique, 3 bataillons d'infanterie Légère, 7 régime11tsd'infanterie de Ligne. A Rome, 2 régimP-nts de Ligne et 2 d'infanterie Légère', ce qui donne, avec les 40 de l'Orient, .54 réiimefits hors de France .! (Jersey), 19, Dorset Street. - Les manuscrits 1léposés ne seront I ANOLETER_R~ET CoLONTEs: pas rendus.- ON s'AnoNNE: A Jersey, 19, Dorset street. -· A Un an, 8 sh1lh11gs ou 10 francs. Londres, chez M. STANISLAS2, 8, Greek-street, Soho Square.-A Six mois, 4 sh. ou 5 fr. Genève (Suisse), chez M. Corsat, libraire, rue Guillaume-Tell. -1 Trois mois, 2 sh. ou 2 fr. 50 c. PouR L'.&TR.lKo•a : Un an, 12 fr. 50. Six mois, 6 fr. 25. Trois mois, 3 fr. 50 a. Belgique, chez tous les libraires. - A Madrid, chez Casimir CHAQUENUMÉRO: Monnier, libraire. ' 3 pence ou 6 sous. Tous le• abo11neme11• •e paient d'avanee. D'après ces calculs, et nous ~léfionsqu'ils soient contestés, il ne reste à l'Empire pour toute force active disponible que 9 bataillons de Vincennes ou d'Afrique et52 régiments. Voilà les armées i1111ombrables du grao<l allié de l'Angleterre! • Nous n'avons fait e11trer en ligne df' compte ni la Garde ,lmpérialf', qui en est encore à la poupée, ni les troisièmes bataillons 'de chaque régiment, qui forment les dépôts et qui ne sorte11t guère. Est-il besoin, maintenant, d'expliquer ce q u disent ces chiffres, et la statistique n'a-t-elle pas en 1•lle-même son éloquence? ✓ . Mais le bilan ne serait pas complet s'il n'était suivi du bulletin militaire de l'Orient, indiquant les forces, les manœu vres, les pertes. En comptant au rab,1is de-s chiffres officiels, il est déjà parti pour l'Orient 64,000 hommes d'lnfo11t~ric,5,000 de C,n-alerie, 10,000 d' Artillerie, 2,000 Sapeurs du Géni,•, 1,800 soldats d'infanterie de Marine, et 2,000 marins débarqués: ajoutez 20,000 hommes au moins, empruntés à toutes les Rendez la France à la République, à la Révolution, et vous, Angleterre, vous pourrez dormir sur vos ballots : en trois mois, les propagandes et les armées de la voisine auront fait la besogne. Il ne s'agira plus de Sébastopol, mais bien de Varsovie, de Moscou, de Saint-Pétersbourg, et si les premières phalanges venaient à tomber comme celles de 92, vous vetriez encore, sans Conscriµtion, sans loi; sans gendarmes, se renouveler, au seul appel de la Lihnté saiute, les levé.es en masse de 93. Mais dans l'Empire-Caverne et sous la LoiCrime qui voàlez-vous donc qui se lève ? Non, vous u'aurez que le recrutement de César, des es• claves et des vendus: vous n'aurez que les généraux de César, des caporaux, des prétoriens, des Varu~. et, lorsque -vous vous éveillerez dans la calamité dernière, il ne sera plus temps! Ch. Rru. armPs, pour combler les vides, et vous aurez pour effectif de guerre 105,000 cumbattants ! En publia .. t, dans notre dernier numéro, le proDans sa première campagne d'Italie et clans gramme du Comité de Londres, pour l'anniversaire celle d'Egypte, l'autre Bon2parte avait à peine de la Pologne, nous espérions qu'il serait permis à .1ve-clui le tiers de cette armée: il en avait ln moitié • toutes les proscriptions d'aller à cette fête de la faqua11d il fit Marengo! mille univer~elle et de s'y faire entendre, chacune Eh bien, avec des forces si considérables, qu'ont sous son drapeau, sans diminuer ni la voix ni l'idée. su faire et qu'ont fait, jusqu'ici, les grands capi- Il n'en a pas été aiusi dans ce meeting: La Rétaines de Décembre? Il y a 1111 tel ordre, unf' telle volution française a été passée-sous silence, comme suite dans leurs combinaisons et leurs mouvemeuts, un~ vieille tragédie qui a fait son temps. Pas un que l'armée française n'avait que Q3,000 hommes symbole, pas une devise, pac;;un souvenir en son sur le champ de bataille d' Alma ! honneur. Aussi ceux de ses soldats qui sont proscrit, Et où étaient donc les autres, où étaient ees à Londres, la voyant bannie, se sont exclus eux- . ai,,ôes de l'Empire, dont on parle tant? mêmes, et M. Louis Bonaparte n'a pas eu sa jourDemandez anx hôpitaux, demandez aux marais née d'assises. • de la Dobrudscha, à ce Varus qui a nom Espinasse, Il Y a des gens, beaucoup de gens, qui trouveà Verrès-Saint-Arnaud, et à ses petits lieutenants ront cela fort habile au point de vue de l'alliance dont l'impéritie gaspille, là-bas, le sang des héros et de l'opinion; mais nous qui savons que M. Boet les plus belles fortunes de guerre. naparte est, comme aventure couronnée, le plus Veut-on une preuve nouvelle et dernière de grand ennemi de la liberté des peuples, nous qui l'incapacité qui préside aux opérntions, dans cette savons que la Révolution seule veut et peut faire campagne qui nous épuise, mais où, grâce à nos les ,patries indépendantes, nous répudions et cette solduts, le lc1uriercroit dans le sang? tactique et ces expédients qui sacrifient aux peLes Ang'ais avaient, le 25, quand les Russes tites espérances la grande politique. étaient en déroute, 700 chevaux de cavalerie lé- Ah! l'on bannit ·l'ayeule, la Révolution frang-ère et leur division de g-rosse cavalerie, qui don- çaise de son foyer de famille, le meeting! On ne nait le même contingent.; les Fra11çais avaient. la veut ni de son drapeau, ni de ses devises, ni de ses brigade de Chasseurs d'Afrique, eu tout 2,000 divines formules, ni de ses haines qui sont trois fois cheva'ux à lancer sur unt armée brisée. Eh! bien, saintes et légitimes·••• le grand Maréchal Saiut-Arnaud a dit, dans son Pour des hommes grav~s, c~e~tà la fois un nonbulletin, qu'il n'avait pas de cavalerie ...... or sens e,t une monstrueuse 1 rngratttude. Kelrermann à Mareno·o fit avec 470 chevaux Qu on Y prenne garde• les temps sont austères ' 0 ' ' t I d • ' • Il f: d h • • seulement, cette ti-~rriblecharge qni décida presque , ,f ?s _evoirs_ser1~mc aut o?c c ?1s1r e?tre de la journée et, plus tard, avec ce même esca- e,s 1 ~ 1~ng~es tmpms~antes et la, R~vo~ut1on a~tive, dron qu'appuyaient 360 grenadiers de la Garde gener~le, 011peut etre appele bieutot à cemdre C 1 • ·1 h t d' ses rerns ! onsua1re,1 ac eva a eroute........ L d' , , L · K Les temµs changent et les capitaines aussi. e 1_scours, qu a prononce ~ms ossuth dans Un de· nier mot: De cette Hnde rapi:le mais sin- ce meetmg, est u_n~ œuvre ad~!rable, et dans. J_a cère sur l'armée française et sur les forces enga- for'!1e et pai: l~~ idees •. Il a voile souvent,. mais d gées en Orient que résulte-t-il '? deux faits qui por- a drt _des ver..tes terribles. Nous 1~ publions en tent enseignement. suppl~ment, et n??s ~onnons ~n meme te::mps ]a • • , • . magmfique Cattlmaire de Victor Hugo, dans .~1~s. 1, nou~ avo~s wo~ve que l~s. c?ntmgents notre réu11ion à Jersey; c'est là aussi urre page, ~il1_ta_1redse 1 _Empire etment très limites, et que une ~rande ·page d'histoire, ,et quand l'exil a de 1 opt~non pubhq ue ~n Angleterre, c.omme,.s~r l_è telles consolations, ou l'oublie arfois ..... . contrnent, se fourvoie, quan<l elle affirme l mepui- P sable fécondité des pépinières Bonapartistes. Nous Ch. R. avons établi, de plu-s, que les forces considérables mises en ligne dans cette .guerre étaient mal conduites, et que !',impéritie des généraux rendait stériles jusqu'aux plus éclatantes victoires. Est-ce à dire .que la France, aujourd'hui, ne pourrait .pas ,élargir ses cadres, multiplier ·ses légions, et jeter, comme autrefois, quatorze armées aux frontières ? Oui, la France poorrait renouveler les grands miracles de 93 : mais il faudrait qu'elle fut vivante et non morte, libre et non captive, engagée pour sa foi, pour son droit, pour elle-même, et non pour des ambitions de princes, pour des querelle; de i'Oll vernemente. Dans ce même meeting de Londres, divers in• cidents se sont produits, qui sont bons à signaler. Ai11si, une résolution, présentée par M. V. A. Taylor et secondée par M. le professeur Newman, a été adoptée par la réunion; elle avait pour but de déclarer: que la guerre actuelle ne saurait avoir de conclusion sériei,se, si ou ne rétablit pas la Pologne. Dans une lettre d'adhésion adressée par Mazzini, on a remarqué ce passage: " spealc the iruth boldly" (Dites la vérité hardiment.) Il est à rejretter que ·le .oneeil a'ait p•• it'it -SntVl . • •

24~ ANNIVERSAIRE DELAREVOLUTION P LONAISE. - 20 No,.emhre 1830. -- A cette fête mêlée <ledeuil que nous avons célébrée à Jersey, se trouvaient représentées tou fes les proscriptions de l'Europe: Italiens, Hong-rois, Polonais, Allemands et Français y étaient réunis en frères. C'est le citoyen Albert Schmitt que la, commission g-énérale des proscrits avait choisi pour parler en son non) et pour ouvrir la séance. Voici son discours : CtTOY&X8, Dhiiiné par votre oommission pour prendre la parole au début, . je tacherai de m'e1r acquitter ~elon mes force~. • Le malheur i,nplacahle veut que nous nous rassemblions encore i~i,-maiij pour la dernière fo!s, espérons-le,-afin de célébrer en oo.nmun, en frères, un des plus glorieux épisodes de notre histoire, celui de la ltévolution polonaise <lu 29 Novembr.e 1830. Quand les actions d'un homme aussi bien que c~lles d'une Nation repré- ~entent les tendances réTolutionnaire11,elles sont un pas <le plus vers le but permanent auquel tend l'Humanité dans ses évolutions sucoessivee. Or, un peuple comme le nôtre, qui a un tel passé histerique, est entraiué fatalement à servir jusqu'à. la mort le progrès fJ.uand même, et soyez certains qu'il n'abandonnera jamaiij le poste de combat avant qu'il n'ait atteint le but de sa missioH! Citoyens, l'auniversaire de la Révolution polonaise que noua f6tons aujou ~d'hui, porte évide:nment le cachet particulier du progrès élaboré par l'Humanité. Il n'est Pf!S•le résultat de l'éiroïsme individuel ou exclusivement national. - Croyez-moi, citoyens, qu~nd j'affirm'e que la Pologne n'est point une branche d.ltachl!e do l'arlxe s:>cialet universel, branche destinée à périr: non, elle y o!Stfortement attachée; la sè,e humaine nourrit toujours le peuple polonais. hier faiblement, aujourd'hui si ri:herncnt, qu'il est prêt, comme autrefois, à saisir la faux et à livrer bientôt, avec h D~mocratie européenne, une lutte décisive à la tyrannie repré~entée par les Czars de Pétersbourg, de Vienne et de Paris! Je vou3 le demande, citoy.ns, ne voyez-vous ·pas des preu'Ves évidentes <le la vitalité de cette Pologne qui, déchirée en lamheaux, mutilée et crucifiée par les trois bandits couronnés, donne toujoun dcBsigne3 éclatants de sa vie ? Ces trois vautours atroc3s ~spfraient l'épuiser, en s'acharnant à sucer ses forces vitales. Ontils réuesi ? Oh ! non, mille fois non! Le grand jour des comptes à, réglu avec ces bourreaux n'est pas loin, et les membres lacéré■ et pitlpibnts de la Pologne finiront par les enlacer et les étouffer! Il serait inutile de vou, démontrer par les faits accomplis, que l'eeprit du peuple polonais, en brisant ses chaînes en 1830, pour r<::eoaqufrir son indépendance et sé régénérer, n'était qu'un des agunt, de l'idée progre1sive universelle, de eette idée dont lee rranda symboles éclairèrent l'immortelle Révolution <le 1789, et q\li a inauguré une nouvelle vie dans l'Humanité, par cette grande dev;■e-lumière : Liberté, Egalité, Fratern:té ! Je n'ai paa besoin de vous faire remarquer qu'b. l'époque où nous combattions notre ennemi le plus acharné, ces symboles n'étaient -pas encore aussi bien compris qu'aujourd'hui. Un demi-siède de trayail incessant et de nouvelles révolutions n'est pas perdu! Cepentlant toutes les nations, remuées par les journées de Juillet, tressaillirent de joie et de sympathie en voyadt leur sœur, la PolognP, lutter ai héroïquement pour la conquête non seulement de sa propre liberté, mais aussi de la liberté du monde.. Vaincus, mais non conquis, jetés par la trahison et la force brutale en dehors de nos foyers, nous sommes venus avertir l'Occideut fle la défaite de la grand- garde de la f'ivilisation, et du danger imminent qui le menace si, pour le combattre et détruire l'ennemi, tou~ les peuples ne se préparent à une lutte suprême et décisive. c;toyens, Tous faut-il des preuves irrécusables que ce premier avertissement n'aboutit qu'à de nouvelles calamités plus terrible, et plus écrasant '8 que jamais ? Après la sublime et trop généreuse RéTolution de Février 1848, la commotion spontanée a ébranlJe l'univers; le bras du peuple 11 partout châtié le despotisme immonde, avilissant pour la dignité }m:naine, et quelques jours après la réaction unie nous a désarmés et jetés sous les pieds de nos ancief\S oppresseurs. Hélas 1 nous combattions isolément, - voilà l'énigme dti l'avortement momentan~ de cet orage révolntionna:re qui a passé avec la rapidité électrique sur tous les peuples 1 Le, despotes ont largement profité de ce manque d'enter.te eerdiale au sein de fa Démocratie militante; aussi s'empressèrentile de faire drc3ser des gibets à. Naples, à Home, à Milan, à Bre■- cia, à Arad, a Pesth, à Varsovie, à Baden, gibets qui, fonctionBant nuit et jour, versèrent par torrents le sang le plus précieux de •es martyrs. Citoyens, retrempons donc notre foi et notre énergie dans le &entiment d'unité pour déraciner le principe oppresseur qui écrase l'Hum,nité souffrante! Citoyens, le s'.lrt implacable nous a-t-il dispersé sur toute la fü!'face du glob~ pour gémir seulement sur les malheurs de l'IIu111anit~ ? Je ne le crnis pas. - 0 enfants de l'Italie, de la Hon- •~rie, do la Pologne et de la France, réunis tous autour de cette table, proscrits pour la cause sacrée de la Démocratie, nous somrnes la protest11~ionv;vante cle l'idée, de la justice et des tendances eommunes; nous avoua adopté pour devise : " Solidarib des peuples·,, Dos devoirs immenses pbcnt sur nou5, et le premier c'est d'aeeélérer le moment où nous pourrons proclamer la déch~ance du àespotisme, quoi qu'il soit; à la suite 1 abolition de l'explo:tation de l'homme par I homme, le d~oit au travail, l'enseignement commun, gntuit par la so~iété, voilà les po:ntR principaux de la régénération foture des peuples. Donc, les hommes pfoétrés de cette con- • vietion, aoivent, sans retard ni trève, se constituer en une intime io:tuniverselle famille, reliée dans l'espace par le lien invisible, maie 1&Ul rê l de l'esprit e~ du cœur. La nccessité-dcvoir de l'Union et fll' la Solid.,rité posit:ve des peuples est trop évidente pour avoir besoin de la moindre démonstration. L'influence de ces peuples, ~ur le monde extérieur, sera toujours e,1 raison de l'étendue et de l'intimité morale et matérielle de leur associat:on. Or, citoyens, 11ousnnélns Mjn. de réali11er en partie celte conséquence rigoureuse de nos principes! • - Je vous le ùemande, peut-il y avoir un plus ravifsant spectacle '{Ue eelui que nous présentons ici, nous, Français, Italiens, HonlJt'O:s, Polonais, Allemands, Â.nglais et Jersiais, confondus en une famille ùe frères, animés du même dée;r et travaillant, avec nos Mrce~ réunies, à l'avènement de la République démocratique et soeinle ( c1r ch:icun de nous, sans distinction de race, apporte sa piene li. ]' œuvre commune) ? Laissons tomber les vo:Ies 6ur le pis~é digne <l'admiration, mais qui ne doit que nous servir de guide indicateur. Comment éviterons-nous les écueils contre lesqueh nos efforts pourraient encor~ se briser? Yoifa ·quelle doit être la commune recherche. L'HOMME. dans ~on flanc le germe destructif du despotisme, et elle annonce un:! tempête qui va bientôt écraser ceux qui l'ont provoquée. Ce n'est pa~ en Crimée qu'on étouffera ce Czar, protecteur de l'ordre. ce sauveur de b famille et de la propriété: l'Attila de Saint-Petersbourg est seulement vulnérable par la Pologne. La diplomatie des grandes puissances recule encore devant !>-emploi de ce seul et unique moyen dont l'idée lui fait peur; mais l' Occident, poussé à bout, sera forcé d'y avoir recours. Alors le combat ùcviendra sérieux, combat entre le despotisme et la liberté féconde! Les Polonais qui ne vivent que pour reconquérir leur patrie, pour la voir grande, régénérée, et pour aider les autres à foudroyer le mal, attendent avec impatience le moment où ils pourront accomplir la sainte mission qu'ils ont acceptée, celfo de sacrifier leur vie à la défens!' de tous les peuples opprimés et à leur propre salut. Or, le moment me paraît bien près d'arriver où nous pourrons • pousser notre cri retentissant : Yiwt la République universelle, démocratique ,t sociale! Le citoyen L. Pianciani, proscrit italien, s'est exprimé en ces termes CITOYilllNS, Gloire à la Pologne! .... Quand je parle de la Pologne, ce n'est pas seulement à son passé glorieux que je songe, c~ n'est ;in~ seulement pour son avenir que je fais des vœux, dans la Pologne je vois l'humanité. La Pologne a toujours été pour moi un symbole du sort que l'injustice fait aux nations. Je regarde la Pologne comme un monument sur lequel tous les rois sont venus écrire leurs crimes en lettus de sang. , Ce n'est pas seulement cette femme qui cherchait, dans se~ crimes, les plai~irs de l'amour nt dont chaque amour fut un crinie ; ce n'est pas seulement Catherine la maudite qui fut le bourreau de la Pologne; cet homme qui s'appelait un philosophe, tt qui n'était qu'un roi, se fit la chevi.Je ouvrière de cette œuvre de spolia1ion et de sang; et une autre femme auMsi.... non, une autre reine, qu'on appelait la magnanime, Marie Thérwso-dont les Hongrois doivent se souvenir_ profita du partage. l~t les autres ~ouveraius de l'Europe que firent-ils? Si on nv·1it insulté un de ces valets à livrée dorée qu'on appelle ambas~adeurs ou ministres, TOUii auriez vu un grand émoi ; les armées auraient été en mouvement, les millions dépensJs et les centaines de milliers d'homrr.es peut-être tués dans les batailles. Cela aurait paru juste, c:ar on doit défendre la domesticité; mais il ne ~•agis;;ait dans ce cas que de l'as~assinat d'une nation, ils ont laissé faire ! Et qu'a-t-on fait de cette terre de penseurs, de bra,·es, d'hommes libres? La Russitt en a fait une prison, la Pru~se une caserne, l'Autriche une boucherie, Quand on a eu besoin d'elle, on lui a promis une nationalité et on ne lui a donné qu'une Constitution dont le dernier résultat pour c.: peuple a été la Sibérie. Les nations se sont émues du sort de la Pologne ; mai ■ quand la France lui promettait aide et secours, le ~ouvernement-mensonge de la Toyauté de Juillet osa parler d'ordre; alors que la mitrai1le avait décimé Varsovie et que les gibets portaient encore ses enfants. • Aussi je ne puis concevoir qu'un Polonais réserve exclusivement sa haine au Tzar. Pour ma part je ne puis serrer la main à un seul des fils de cette vaillante nation sans répéter : anathème à toutu le, monarchi,a ! Malgré cela on a espéré à propos de cette guerre dont on parle tant et où on fait si peu, séparer les Polonais de la cause des peuples. On a d~terré le vieux rêve de couronne d'un octo. génaire et on a cru faire peur 4 la Russie de cette ambitionsq,ie)ette, et prendre les Polonais à cet appât de monarchie nationale qui sentait le 11épulc!e! Napoléon-le-Petit s'e1t dit: puisque mon oncle faisait des rois, ne pourrais-je pas, moi, en faire aussi ? feulement l'autre les cherchait sur le champ de bataille, lui les demande aux Invalides. La Russie a souri de cette mise en scêne, et les peuples laissant la diplomatie à ses mensongères promes:;es lni ont tourné le dos pour venir à nous, à nous qui sommes le droit et la vérité, à nous qui sommes la justice et l'avenir, à nous la Démocratie de tous les pays, les proscrits de toutes les nations. Tandis que les gouvernements promettaient aux Polonais un meilleur sort pour l'avenir, se proposant comme toujours de faus8er leur:1 p, omesses, le peuple polonais a compris que c'était à lui-même à assuro:r son sort, s'unissant de cœur, d'âme et de bras à la Démocratie militante européenne, Il a compris que ce but ne pouvait êta assuré autrement que par la solida1ité. Nous avions eu toujours da11s les Polonais des amis, depuis le commencement de la guerre nous avons en eux des alliés. L'année dernière, à pareil jour, je me trouvais à Loudres à {,'ter l'anniversaire de la Révolution polonaise; alorR, comme ici aujourd'hui, tontes les nationalités étaient représentées ; aujuurd' huî comme à Londres, on célèbre cette fête de la überté, Et ce ne sont plus seulement les proscrits de toutes les nations, ce ne sont plus des ind1viclualités généreuses qui viennent faire acte de sympathie à la cause de la liberté, les députatious des villes d'Angleterre y concourent; le peuple anglais, 1 ui-rn4me, prend uue part active à cette démonstration. C'est que l'idée marche. Malheureusemeut les faits ne la suivent pas encore assez. Ce qu'on disait l'année dernière, on doit encore Je dire aejoord'hui. Nos p11roles qui ont été répétées par tous les écrh·ains, par tous les orateurs du progrès, depuis ée.temp8, out été deHprophétit:s; mais comme pre~que toutes les 1,rophéties, elles ont été d'abord méconnues. Nous avion, déclaré cettc guerre inpuissante; Nous avions dit à l'Angleterre de se défier de son allié parjure, de son allié qui o~ait tendre à. la libre Angleterre une main rouge encore du saug de Décembre. Nous avertissions les peuples de n'avoir aucu11e confiance dans les promesses qui leur étaient faites par cette alliance monstrueust Voilà ce que nous disions, nous le répétons aujourd'hui, mais avec nous, c'est aussi l'expérience qui le dit. Quels ont é é les r~suhats de cette guerre! Une flotte, la p:us granàe peut-être dor,t puisse parler l'histoire, n'a fait au Nord, que sonder la Baltique ....... , j'oubliai~ Bomarsund l Au Sud, deux tlottes et deux armées; qu'ont-elles fait? Si je lis les journaux, je n'y vois que des pertes, et Louis-Napoléon, luimême, disait récemment qu'il fallait envoyer des forces au .général Canrobert pour qu'il puisse reprendre l'ini.tiative. L'initiative I une armée as1Mgeante si considérnble que celle qui est à Sébastopol ! Est-elle donc sur la défensive? Craindraitelle d'être à la merci de la garnison, ou serait-elle assiégée à son tour? Vous n'a,•ez qu'à lire le Tim1• pour en être convaincus, et \'oiià les résultats des guerres des rois! Tournons maintenant nos yeux Yen les régions oli se joue à rette heure un drame des plus sanglants. L'Occident e,t aux prises avee le Czar, ce pil'er de la tyrnnn·e fuoucbe. La question ~ricnt:.ilé, ~nvisa~e sous quclqne _point de vue ~ue ce so\ porte , . L'Angleterre, qu'a-t-elle gagné à sa confiance dans ce crimeempereur, son a1lié? en suivant les relations de la campagne, je •ois, clèdle commencement, les Français par(aitement casernés, penda11t que les Anglais étaient au bivouac; les premier!! pour- \'US même du supeTfl.u, qual\d le 1uleessaire fitleait dbl'aut aux • autres. Cea pauvres soldats nnglais durent s'appercevoir a,lor.;<le ia frA.ternité du M11réchaldu Deux-Décembre ! EL après, quand 011 s'est trou~é en pré~ence de l'ennemi, est-ce que les choses se &ontpan1'es différemment? Pourquoi donc les positions des Anglais sont-elles toujours les premières attaquées? Pourquoi est-ce sur leurs batteries que tombent les sortie~, et sur leurs retranchements les troupe~ russes qui b<1.ttentla campagne? Ne dirait-on pas que les deux em1>ereur~s'entendent entr'eux et tiennent à se faire courtoiai,? Trois généraux anglais mort~, cinq blessés, des milliers d'offi. ciers et de soldatY hors cle combat; et les Français donc! 011 dit que le général Canrobert est blessé, et le prince Napoléon, après s'être lai~sé enclouer ses batteries, est parti pour Constantinople, parce qu'après la bataille, il ~ouffrait ...... (pas~cz-moi le mot) d'une dyssenterie. Les peuples ont dû YOirquel compte ils pouvaie11t faire de~ promesses qu'on leur prodiguait. Car, il ne faut pas l'oublier: on a commencé cette guerre en disaut qu'on entrait en campagne dans l'intérét dn droit et de la. liberté, pour défendre les nationalités men,tcées pa~ la Rus:;ic, Eh bien, Citoyens, est-ce que le droit a é.é mieux respect~ depuis, quelque part? Est-ce que la liberté a été moins foulée aux piedil, moins étouffée dans le sang, en Italie, en Hongrie, en France, partout? On a recherché l'alli,rnce de l'Autriche, la négation la plus complète de toute nationalité, l'ennemie la pins achnrnée de toute liberté; et tandia qu'on promettait de rétablir la Pologue, on tendait la main à la Prusse, une des puissances qui s'enrichissent de ses dépouilles. Vuilà comment nos prophéties se sont vérifiées. Seront-el!Ps mieux écou1écs aujourd'hn~? On nous accusait alors de parler dans un intérêt iadividuel, on doit reconnaître à présent que noua parlions dans celui de la véri1é et et de l'humanité. L'Angleterre se persuadera-t-elle qu'étant la seule qui représente en Europe quelque liberté, elle ne peut trouver aillears que daus la liberté u11ealliance sflre et efficace et qu'elle sera tou. jours haïe par le;; autres gouvernements, à moins qu'el!e ne des• cendej:1sq11'à les imiter? Le peuple à ce qu'il semble en est déjà persuadé. La sympathie qu'il montre à toutes les nationalités opprimées le prouve assez, e~ nous en avons un éclatant témoignage dans la démarche qu'on fait pour 13arbès. Pendant que Louis Bonaparte est appelé pour être fêté aux châteaux de la Cour, aux palais de l'aristocratie, c'est dans ]C'~ rues que le peuple fêtera le proscrit; le monde officiel applaudira peut-être au crime, mais le peuple assurément saluera la vertu. Barbès, c'est le représentant du progrès, c'est la victime de la réaction, c'est le prisonnier de toute• les monarchies; c'est la loyauté que le peuple anglais veut opposer au parjure couronné. Le Parlement va se réunir bientôt et je ~uis prêt à parier qne cet enthousiasme pour l'alliance qui éclatait dans ses dernières séances ne se retrouvera pas ; les législateurs d'Angleterre ne peuvent pas manquer de réfléchir à ceci que, pencant que leur puissar.ce s'u~e en Oric•nt, le camp de Boulogne eijt bieu pri:, d'eux, et que leur allié est un tralcre. Et le cabinet que fcra-t-il? la majorité Je;i hommes qui le com, posent ne saurait à coup sftr ;nspirer confiance. Peut-êtr, enfermés da.us leura palais il~ méprbt:ront ce qui se dit sur la place; qu'ils prennent garde pourtant ; quand les grands de la terre ne veulent pas descendre jusqu'au peuplP., il arrive quel. quefois que le peuple monte jusqu'à eux et se met à leur place: l'aristocratie anglaise sait bien cela; on se moquait des réclamations nasi!lardes des tétes ronde,, on méprisait leurs simples cou• turnes, et, peu de mois aprè~, elles siégeaient seule~ au Parlement et les brillants Cavaliers étaient à la Tour. Je qe crois pas qu'on veui,le une fois encore tomb.:r dans la même faute, Et si ou peut espérer de la part de l'Angleterre comment douterait-on des peuples? Les peuples qui ne se sont pas lai,;sé prenJre à ces promesses dont j'ai pari,, qui $e wnt toujours avec nous défiés de cette alliance, ~'ils ontjusqu'ici retardé leur action, ne la retarderont pas encore longtemp~; je le crois. On leur a dit: l'Empire c'est la paix! rnilà la paix que l'empir11 donne- la guerre avec toutes seJ horreurs, l'esclavage avec toute!! ses injustices, la misère anc toutes ses douleurs. La seule garantie de l:i. paix, c'e.;t l:1 Hévolution. Car ce n'est qu'aprt>I avoir assuré le triomphe de la Révolutio1t qu'on pei..t en finir pour jamais avec la guerre, avec l'échafaud, avec la misère; c'est à elle à garantir tou~ le~ droits et tous 1~~· in1érêts; c'est à la République universelle, démocratique et sociale d'en finir avec l'aritagouisme, en se débarrassant de tous le, maitres, qu'ils soient sur le trône, à l'autel ou à la BourRe. li e~t des gens qui prétendent que le Chauvinisme empêcherait la France de faire une Hévolution, tant que la guerre durera; j'honore tn•p un pays <lans lequel je compte t,int de frère:i en ~ouf. france et tant d'amis ,le eœur, pour admettre un iustant ce11e accusation; mais j'ajoute, s'il y a encore en France des Chauvin~. ils doivent être au~~i Républicains. C'est b drapeau de la Hépubliquc qui flottait à LoJi, à Ma, reugo, aux Pyramides, et l'Empire '{ui parle si souveut d'Ans terlit.i: et d'léna, ne devrait pa:1 oublier Moscou et \Vaterloo. Ce fut la Hépublique q11ipurge11.le so\. sacré de la patrie des armées de l' Eurrpe liguées contre elle; ce fut l'Empire qui laissa ces mêmes armées bivouaqller deux fois dans Paris. • Et toi, mon Itali<', ma mè:c chérie, toi à laquelle sont particulièremet,t adressés les soupirs de mon i'tme, souffriras-tu lonir• temps e11coreta honte et ton servage ? Si malgré la double haie de douaniers et dl:lgendarmes qne tes maitres t'ont faite, ma voix peut arriver jusqu'à toi, si tu peux m'eutendre à travers la robe d'un j~suite et sous l'escopette d'un sbire, écoute la voix d'un de tes enfants ! Il y a quelques mois, tout le monde se disait qu'une révolu, tion allait éclater dans ton sein: les journaux de ia réaction euxmême::; aôsuraient que tu étais décidée à secouer le joug ; à ces nouvelles, mon cœur bondissait de joie, je me sentais entraîné vers toi, espérant pouvoir, l'un des premiers, offrir ma vie pour ta cause. Cet espoir a été déçu. Voudra-t-on t'accuser de lâchetr 1 N ou, personne n'osera appeler lâche le peuple qu'on a vu~ l'œuv, e en 1848, ~9 et 53 à Milan, à Palerme, à Brescia, à Gênes, à Venise, à Home. Non, tu n'as pas à te reprocher une lacheté, mais peut-être tu sentiras un remord~; car toutes les fois qu'un peuple peut lever l'êtendard de la Révolution et qu'il ue le lèTe pas, il manque non rnulement à ses deToirs envers lui-mêml', mais encore à ceux de la solidarité envers les autres, Je le sais, ô ma patrie! tu craignais que ce même devoir ne fôt pas compris par les autres peuples, tu craignais de rester seule sur la brèche ; il n'en eût pas été ainsi ; cette solidarité qui a toujours été un droit et un devoir est aujourd'hui reconnue par tous, comme un intérêt et comme un besoin. Banniij donc toute hésitation, lève-toi avec cette énergie dont tu as donné tant de preuv11s: sois encore une foi~ l'Italie de Legnago, l'Italie de Balilla, de Procida, de Muaniello, d' Arnaldo, de Cola di Rienzo. Lève-toi, è.ébarrasse-toi de tous tes ennemis, et sois en sûre, les nations, tes sœurs eu souffrances, suivront ton exemple ! Et en te IPvant, pousse ce cri qui fait trembler lts monarqu,s, sous leur pourpre, et frémir les magistrat!!. sous leur toge, ,ce tri 41ui est Us<;>z pui&s,uit pour faire pâlir ln traîneur, cl.e

-·-------------------------------------------------------------------------------------------- sabre et les privilégiés ùt1 capital po11sse le <:ri de la d!:livrance et de l'uenir ...... . Vive la République universelle, démocratique et sociale! Après .ce discours, la parole est au citoyen Victor Hugo, proscrit français: PROSCRITS, L'anniversaire glorieux que nous célébrons en ce moment ramène la Pologue d:rns toutes les mémoires ; la 1,ituation de l'Europe la ramène également dans les évènements. Comment? je vais essayer de vous le dire. :Maisd'abord, cette situation, examinons-la. Au point où elle en est, et en présence des choses décisives ~ui se préparent, il importe de préciser les faits. Commençons par faire justice d'une erreur presque universelle. Grâce aux nuages astucieusement jetés sur l'origine de l'affaire par le gouvernement_ frança!s, et, co_mplaisamment épaissis par le gou\'ernement anglais, auJonrd ht11, en .Anglet.erre comme en France, on attribue généralement la guerre d'Orient, ce désastre continental, à l'empereur Nicolas. On se trompe. La guerre d'Orient e~t un crime; mais ce n'est point le crime de Nicolas. Ne prêtons pas à ce riche. Rétablissona la vérité. Nous conclurons ensuite. Citoyens le 2 Décembre 1851,-car il faut toujours remonter ' ' là, et, tant que M. Donaparte sera debout, c est de cette source horrible que sortiront tous les événements, et tous les événements, <JUelsqu'ils soient, ayant ce poison dans les veines, seront malsains et vénéneux et se gangrèneront rapidement; - le 2 Décembre donc, M. Bonaparte fait ce que vous savez. Il commet un crime, érige ce crime en trône, et s'assied dessus. Schinderhannes se déclare César. Mais à César il faut Pierre. Quand on est empereur, le Oui dn peuple, c'est peu de chose; ce qui importe c'est le Oui du pape. Ce n'est p:is tout d'être parjure, Îra1trc et meurtrier, il faut encore être sacré. Donaparte-lcUrand avait été sacré. Bonaparte-le-Petit voulut l'êtrl'. Li\ était la question Le pape consentirait-il? Un aide-de-camp, nommé de Cotte, un cles hommes religieux du jour, fut envoyé à An~onel!i, ~e Con_salvi ~l'à présent. L'aide--de-camp eut peu de succes. Pie VII avait sacre Marengo; Pie IX hésita. à sacrer le boulevard :'.\fontmartrr. i\fêler à ce sang et à ce1te boue la vieille huile romaine, c'était grave. Le Pape fit le dégoûté. Embarras de M. Bonaparte. Que faire? de quelle manière s'y prendre pour décider Pie IX? Comment déeicle-t-on une •:lille? comment décide-t-on •un pape? par un cadeau. Cela est l'histoire. Un Pro:.crit (le citoyen Bianchi) : Ce wnt les mœnrs ucerdotares. Victor Hugo, s'iiitèrro111pa11: t Vous avez raison. Il y a longtemps que Jérémie a crié il Jérusalem et q,ue Luther a crié à Rome : Prostituée ! L'orateur 1·eprend: M. Bonaparte ·donc résolut de faire un eaùeau à M. MasLaï. Quel cadeau? Ceci est toute l'aventure actuelle. Citoyens, il y a deux papes en ce monde : le pape latin et le pape grec. Le pape grec, qui s'appelle aussi le Czar, pèse gur le sultan du poids de toutes les Russies. Or le sultan, possédant la Judée, possède le tombeau du Christ. Faites attention ;\ ceci. Depuis des sièclei la grande ambition des deux catholicismes, grec et romain, serait de pouvoir pénétrer librement dans ce tombeau et d'y officier, non côte à côte et fraternellement, mais l'un excluant l'autre, le latin excluant le grec ou le grec excluant le latin. Entre ces deux prétentions opposées que faisait l'islamisme? il tenait la balance égale, c'est-à-dire la porte fermée, et n~ lais_sait e~trer dans le_tombeau ni b croix grecque, ni la croix latme, 111 Moscou, 111 Rome. Grand crèveoœur surtout pour le pape latin qui affecte la suprématie. Donc, en thèse génér:i.le et en dehors même de M. Bonaparte, quel présent offrir au pape de Rome pour le déterminer à sacrer et couronner n'importe 'lue! bandit? Posez la question à Machiavel, il vous répondra: - Rien de plus simple. Faire pencher à Jéru11alemla balance du côté de Rome ; rompre devant le tombeau du Christ l'humiliante égalité des deux croix; mettre l'église d'Orient. s0us les pieds de l'église d'Occident; ouvrir la sainte porte à l'une et la ferrner à l'autre ; faire ùne avanie au pape grec; en un mot, donner an pape latin la clef du sépulcre. - C'est ce que Machiavel répondrait. C'est ce que M. Bonaparte a compris ; c'est ce qu'il a fait. On a appelé cela, von, vous en souvenez, l'affaire des Lieux-Saints. _ L'intriaue a été nouée. D'abord secrètement. L'agent de M. Bonaparte à''constantinople, M. de Lavalette, a denundé de la part de son maître, au sultan, la clef du tombeau de Jésus pour le pape de Rome. Le sultan, faible, troublé, ayant déjà les vertiges de la fin de l'islamisme, tiraillé en deux sens contraires, ayant peur de Nicolas, ayant peur de M. Bonaparte, ne sachant à quel empereur entendre, a lâché prise et a donné la clef. M. Bo. 11aparte a rt!mercié, Nicolas s'est ~ché. Le pape grec a envoyé _au ~érail son. légat a latere, Mensch1koff, une cravache à la mam. Il a exio-é, en compensation de la clef donnée à M. Bonaparte pour le 0pape de Rome, des choses plus solides, à peu près tout ce qui pouvait rester de souveraineté au sultan ; le sultan a refusé; la Fcance et l'Angleterre. ont appuyé le sultan, et vous savez le reste. La guerre d'Orient a éclaté. Voilà les faits. Rendons à César ce qui est à César et ne donnons pas à Nicolas ce qui est au, Deux-Décembre. La prétention de M. Bonaparte à être sacré a tout fait. L'affaire des Lieux-Saint, et la clef, c'est là l'origine de tout.. Maintenant, ce qui est sorti de cette clef, le voici: A l'heure qu'il est, l'Asie Mineure, les îles d'Aland, le Danube, ]a Tchernaïa, la Mer Blanche et la Mer Noire, le Nord et le Midi, voient des villes, florissantes il y a quelques mois encore, s'en aller en cendre et en fumée. A l'heure qu'il 'est, Sinope est brûlée, Bomarsund est brûlée, Silistrie est brûlée, Varna est brûlée, Kola est brûlée, Sébastopol brûle. A l'heure qu'il est, par milliers, bientôt par cent mille, les Français, les Anglais, les Turcs, les Rmses, s'entr'égorgent en Orient devant un monceau de ruines. L'Arabe vient du Nil pour se faire tuer par le Tartare qui vient du Volga; le Cos:ique vient des steppes pour se faire tuer pàr l' Ecossais qui vient des highlands. Les batteries foudroient les batteries, les poudrières sautent, les bastions s'écroulent, les redoutes s'effondrent, les boulets trouent les vaisseaux; les tranchées sont sous les bombes, les bivouacs sont sous les pluies; le typhus, la peste et le choléra s'abattent avec la mitraille sur les assiégeants, sur les assiégés, sur les camps, sur les flottes, sur la garnison, sur la ville, où toute une population, femmes, enfants, vieiilards, agonise. Les àbus écrasent les hôpitaux : un hôpital prend feu, et deux mille malades sont •• cl\lcinés'' dit un bulletin. Et la tempête s'en mêle, c'est la saison; la frégate turque Bahira gombre sous voiles, le deux ponts é~ypticn Abttd-i-Dji>.rul s'englourit pr~ d'Eniada avee • sept cents hommes, les coupi. de Yent dfmlltent la flotte, le navire il hélice le Prince, la frégate la Nymphe des mers, quatre autres steamers Lle guerre, coulent bas, le Sans-Pareil, Je Samson, l' Âgamemném, se brisent aux bas-fonds dans l'ouragan, la Rétribution n'échappe qu'en jetant ses canons à la mer, le vaisseau de cent canons le Henri IV périt près cl' Eupatoria, l'a,iso à roues le Pluton est désemparé, trente-deux tramports chargés d'hommes font c6te, et se perdent. Sur terre, le!! mêlées deviennent chaque jour plus sauvages : les Russes assomment les blessés à coups <le ()fosse ; à la fin des journées, les tas <le morts et de mourants empêchent l'infanterie de manœuvrer; le soir, les champs de bataille font frissonner les géuéraux. Les cadavres anglais et français et les cadavres russes y sont mêlés comme s'ils se mordaient. - Je 11'aijamai:. rûm vu de pareil, ( 1) s'écrie le vieux lord Raglan, qui a vu ·w aterloo. Et cependant on ira plus loin encore : on annonce qu'on va employer contre la malheureuse ville les moyens "nouveaux" qu'on tenait "en réserve" et dont on frémissait. Extermination, c'est le cri de cette guerre. La tranchée seule coûte cent hommes par jour. De$ rivières de sang humain coulent ; une rivière de sang à Alma, une rivière de sang à Balaklava, une rivière de sang à Inkermann; cinq mille hommes tués le 20 septembre, six mille le 25 octobre, quinze mille le 5 novembre. Et cela ne fait que commencer. On envoie des armées, elles fondent. C'est bien. Allons, envoyez-en d'autres! Louis Bonaparte redit à l'ex-général Canrobert le mot imbécile de Philippe lV à Spinola : marquis, prends Breda. Sébastopol était hier une plaie, aujourd'hui c'est un ulcère, de. main ce sera un cancer; et ce caucer dévore la France, l' Angleterre, la Turquie et la Russie. Voilà l'Europe des rois. 0 avenir'. q11andnous donneras-tu l'Europe des peuples! Je continue. Sur les navires, après chaque affaire, des chargements de blessés qui font horreur. Pour ne citer que les chiffres que je sais, et je n'en sais pas la dixième partie, quatre cents hlessés sur le Panama, quatre cent quarante-neuf sur le Colombo qui remorquait deux transports également chargés et <lontj'ignore les chiffres, quatre cent soixante-dix sur le Vulcain, quinze cents sur le Kangui·oo. On est blessé en Crimée, on est pansé à Constantinople. Denx cents lieues de mer, huit jonrs, entre la blessure et le pansement. Chemin faisant, pendant la traversée, hs plaies abandonnées deviennent effroyables; les mutilés qu'on transporte sans assistance, sans secoms, misérablement entassés les uns s,,r l€s autres, voient les lombrics, cette vermine tlu sépulcre, sortir cle leurs jambes brisées, de leur~ côtes enfoncées, de leurs crânes fendus, de leurs ,entres ouverts ; et, ~ous ce fommillement horrible, ils pourrisse)lt avant d'être morts dans les entreponts pestilc11tiels des steamers-ambulances, immenses fosse~ communes pleines de vivants mangés des vers. ( Victor Hugo s'interrompant : )- Je n'exagère point. J'ai là les ,journaux anglais, lesjournaux ministériels. Lisez vous mêmes (L'orateur agite 1111e tinsse de journrmx) (:1) - Oui, j'insiste, pas de secours. Quatre (1) "Je n'ai jamais ,·n antérieurement <le~p,•ctach> JHtreil à celui qu'uffrait le champ de bataille." (LOllD lL~ULAN, - l,a1,port c.l11 l no\'embrc.) (i) ~:xtTait <l',me !P.ttre du 16 Septembre 18~,4 ~ '"U11 é,6ncme11t tr~l!lc-xtraor<li11airc qui mérite une sévè1·e censure a eu lien hier vendœc.li. Signal f,,t fait du vaisseau L'Rmpenu,· l to,1s les navires d'c11"Voyelreurs malades à bord du K1m,u1'00, Da11ri le cours cle laj,,11rné ,. ce dernier fut e11to,iré par <les cen,ai11cs <le bateaux chargés tl'hvmmcs m:,l:\dis et promptemcut rcmpliju~'{tt'i,. 1nffuution ( 3p•c.til,11crowd"d to s:1fl'ucatiutl J. Avant la soirée, il contenait environ quinze cents invalides de tout rang ~(ntffrnnt à bord. Le spectacle q,ii s'otrro.it était épou\'antàble ( appallit1g) et les détails en sont trop e'ffn,yants pour que j'y insiste. C~uand l'heure d'appareiller fut \'CllUP. le lù111g11roo. en replique à l'ordre de parth·. hiss~ le ~hp1a1:" c•èst 1111e tentath·e dangereuse •· ( /t is a da11gero111,.xparimc11t. 1 L' E111pere11r répondit· par signal : h Que voulez-\'nl1~ dire 'l " - Le K.Jnvur ,0 ripotïta ! "Le na\'ire ne peut pas ma11œuvrer." ( The ship ts w1ma1wgeablc. J To111e la journée, le Kanguroo retta à l'ancre av,•c CP si!(nal:" Envoyez des bateaux au secours," A la fin, des ordres forent donné• pour transporter une partie <le cc triste chargement sur d'autres navires, partant aus&i pour Con•tantinopie. Bea11coup 'de morts ont eu lieu l l:mnl~ il y a Pli bien <les scènu déchirantes, mais, hélas! il ne sert à rien de les décrin•. Il e,t èvident, toutefois, lpte ni il.boni ni i< terrt•, le service m~dical n'est auffisant. J'ai ""• de mu yeux, des hon,mes nwurirsur le rivage, sur la lig-ne <lem:,rche et au bivouac, sans aucun s~ronrs n,édirl\l; et cela, 'à la portée d'une flotte <le ci11q cents voiles, en ,·ne d,• s quartiers gé11éra11x! :-< ons avons be~oin d'un plus grand nombre <le chirurgiens, et snr la flotte et dans l'armlle; sotl\'ent, trop sr,nvent, le secoure médical fait entièrc111cnt défaut, et il arrive fréquemment trop tard." ( 1'imcs du samedi 30 septembre 185-1.) Fxlrait d'une fot.tre de Constantinople. dn 28 Septembre 1851 : " Il est i1111Jos,iblcponr pt'rs<mne d'assister aux tri~Les scènee de ces derniers junrs, sans ~trl' surpris et indigné Lie l'insuffisance df not1e @ntême médical. La manière dont nos blessé, et :101 ma,a<les s011t traités, n'est digne que des sau"ages de Dahomey. Les ~onffrances à boni <ln Vulcaia ont été cruelle!, Il y avait là trois cents bles~és et cent soixante-dix cholériq nes, et tout ee n,nnde était assieté par quatre cllir11rgiens ! (.;'-était 1111 spectacle effrayant. Les blessés prenaient les chirurgiens par le pa11de leur habit q11and ceux-ci se frayaient leitr chemin il. travers les monceanx de morts et de mourants; mais les <chirurgiens leur faisaient lâcher prise ! On devait s'attendre, avec raison peut-être, à ee que les officiers recevraient ,es principaux soins et absorberaieut san! doute à eux settls l'assistance des qnatre hommes <le l'art; c'éLait clone néces•airement se mettre en défaut qne d'~mbarqul'r. des masses de blessés sans avoir per~onne pour leur donner lea secours de la chirurgie et pour suflire m0mc il. leurs besoins les plu a pressa11ts. Un grand nombre sont arrb és il. Scutad sans avoir été tottchés par le chirnrgien, depuis qu'ils étaieut tombés, frappés des balles rnsses, sur les hauteurs <le l'Alma.. Leurs bleasures étaient tendues (stij/) et leurs forces épnisées quand 011 les a. hissés des bâteanx ponr les transporter il. l'hôpital où heureusement ils ont pu obtenir les secou1·s de l'art. " Mais toutes ces horreurs s'effacent, compa1-ée1à l'état des malheureux passagers du Colombo. Ce nadrc partit <le la Crimée le lH septembre. Les blessés avaient été embarqués deux joun avant de mettre à la voile; et quand on leva l'ancre, le bâtea11 emportait vingt-sept officiers blessés, quatre cent vingt-deux soldats blessés et cent quatre prisonnier$ russes : en tout, cinq cent cinquantt-trois personnes. La moitié environ des blessés avaient été pansés avant ,l'~tre tttis à bord. Pour inbvenir aux besoins de cette masse de douleurs, il y avait quatre médecins dont le chirnrgien du b11.timc,,t,déjà suffisamment occupG il. ,·eiller u,1 équi• page qui dunne presque toujours des malades dans cette saison et dans ces parages. Le navire était littéralement couvert <le Jo,·m•s couchées à terre. 11 était impossilile de manœnuer. Les officiers ne pouvaient se baisser pour trou,·cr kt11s sextants et le navire mnrchait à l'aventure. On est rei;té douze heures de plus en mer à cause de cet empfohement. Les plus malades étaient mis sur la dunette et, au bout d'un jour ou de deux, ils n'litaient plus qu'un tas de pourritures! Les coups de feu négligés rendaient des ,·en qui couraient dans toutes les directions et empoisotmaient la nourriture des malheureux passagers. La matière animale pourrie e1halait une odeur si nauséal>onde que les officiers et l'équipage manquaient de se trouver mal et que le capitaine est aujourd'hui malade des suites de ces cinq jours de misères. Tous les draps de lit, .i.uuombre <lequiuze cenLS, avaient éléjetés il. la mer. Trente hommes sont morts pendant la traversée. Les chirurgiens travaillaient aussi fort que possible, mais ils pouvaient bien peu parmi taut d,1 malades; aussi beaucoup de ces malheureux ont passé • pour la première fois entre les mains du médecin il. Scutari, six jours après la bataille! "C'est une pénible tâche que de signaler les fautes et de parler tle l'insuffisance d'hommes qui 'font de leur mieux; mais une d4plorable uégli!(cnce a eu lieu depuis l'arrivée du steamer. Quarante-six hommes ont été laissés à bord deux jours de plus, quand av~c quelque surcroît d'effurts on aurait pu les mettre en lieu sdr à l'hôpital. Le nadre est tout à fait infecté; un grand nombre d'hommes vont l\tre immédiatement employés à le nettoyer et à le fnmiger, pour éviter le danger du typhus qui se décb.re génénlement dant cle pareilles conditions. Deux transports étaient remorquês par le C'olombo, et leur état était presque au•ei <l•- s.i.strenx." (7'1md8, No tlu Te11drcdi 13 Ocwbre lSM.) , chirurgiens sur le Yulcafo, quatre chirurgiens ~ur le Colombo, pour neuf cent dix-neuf mourants ! Quant aux Turcs, on ne . les pans~ pas du tout. Ils deviennent ce qu'ils peuvent. (1 )- Je ne 11u1squ'un démagogue et un buveur de sang, je le sais bien, mais j'aimNais mieux moins de caisses de médailles bénites au camp de Boulogne, et plus de m/ldecins an camp de Crimée. Poursuivons. En Europe, en Angleterre, en France, le contrc-coun est terrible. Faillites sur faillites, toutes les transactions su~pendues, le commerce agonisant, l' inùustrie morte. Les folie& de la guerre s'étalent, les trophées présentent leur bilan. Pour oe qui est de la Daltique seulement, et en calculant ce qui a été dépensé_ rien que pour cette campagne, chactm des <leux: mille pnson111ers russes ramenés de Bomarsund coûte à la France et à l'Angleterre trois cents trente-six mille francs par tête. Eu France, la misère. Le paysan vend sa vache pour payer l'impôt et donne son fils pour nourrir la guerre, :.....s.on fils! sa chair!, Comment se nomme cette chair, vous le savez, l'oncle l'a baptisée. Chaque régime voit l'homme à son point de vue. La République dit chair du peuple : l'Empire dit chair à canon. - Et. la famine complète la misère. Comme c'est avec la Russie qn'on se bat, plus de blé d'Odessa. Le pain manque. Une esp~ce de Buzançais couve sous la cendre populaire et jette ses étmcelles çà et là. A Boulogne, l'émeute de la faim, réprimée par les gendarmes. A Saint-Brieuc les femmes s'arrachent les cheveux et crèvent les sacs de grains à coups de ciseaux. Et levées sur levées. Emprunts sur emp.-unts. Cent quar11nte mille hommes cette année seulement, pour commencer. Le, millions s'engouffrent après les r6gime11ts. Le crédit sombre avec le11 flottes. Telle est la situation. Tout ceci sort du Deux-Décembre. Nous, proscrits, <lont le cœur saigne de toutes les plaies de la patrie et de toutes les douleurs de l'humanité, 1101111 considérons cet ét~t cle choses lamentable avec une angoisse croissant11. Insistons-y, répétons-le, crions-le, et qu'on le sache et qu'oa ne l'oublie pins désormais, je viens <le le démontrer les faits 11 la main, et cela est incontestable, et l'histoire le dira, et je défie qui ,1ue cc soit soit de le nier, tout ceci sort <luDeux-Décembre ! Ott!z ]'intrigue, dite affaire des Lieux-Saints, ôtez la clef, Ôtez l'envie de sacre, Ôtez le cade1u II faire au pane, ôtez le Deux~ J.?écembre, ôtez )!. Doua parte; vous n'avez JHI~ la guerre d' 0nent. Oui, ces flottes, les plm~ magnifiques qu'il y ait au monde, son_tlrnmiliées et amoindries; oui, cette généreuse cav;'llerie anglaise est exterminée; oui, les Ecossais gris, ce5 lions de la montagne, oui, nos zouaves, nos spahis, nos chasseurs de Vincennes, nos admirables et irrép:trables régiments d' :\frique sont· sabrés, hachés, aué~ntis: oni, ~Ls populations _innocentci;,-et dont nous sommes les frères, car il n y a pas cl'etrangers pour nous, -~ont. 6crasécs; oui, parmi tant d'autres, ce vieux g·énéral CaLheart et ce jeune capitaine Kolan, l'honneur de l'uniforme anglais, sont sacrifiés ; oui, le~ entrailles et les cervelles, arrachée~ et dispersées par la mitraille, pendent nux broussailles de Balaklava ou s'écrasent aux murs de Séb:istopol; 'oui, la nuit, les champs de bataille pleins de mourants hurlent comme des liêtes fauves; oui, la lime éclaire cet épouvantable charnier cl' Inkermann où des femmes, une lanterne à la mnin, errent cà et lil. parmi les morts, chl•rchant leurs frères ou leurs maris, absolumen~ comme ces ~utres femmes qui, il y a trois ans, dnns la najt du 4 décembre, regardaient ]'un après l'autre les cadavres. du boulevard Montmartre (2) ; oui, ces calamités couvrent l'Europe, oui, ce sang, tout ce :.ang ruisselle en Crimée; oui, ces veuves pleurent, oui, ces mères se tordent les bras, parce qu'il Il pris fantaisie à M. Bon~parte 1 l'a!sassin <leParis, de se faire bénir et sacrer par M. Mast:iï, l'étouffeur de Rome 1 Et maintenant, ml!<liton&un moment, cela en vaut la peine. (l) " ...... Les Turcs ont r~ncl11de bon!I senices clans l~s retranchements. Les pauvres dial,lcs souffrent de la dyss~nterie. du lèvre~, du typhuij. Leur service mutlical est llul, et nos chirnrgiouo n'ont pas le loilir <le s'uccuper d't:ux."- Timts, corrc•poud1Lt1ce calée du :JO octobre. (2} Ce qui s\iit est extrnit d'une correspondance a<lreesh au Mo,·ni,19 Jicmld et datte de llalaklava, 8 novcn,l,re 1854 : ••:•:?d~i~. i j O ;;t i;; ~ tîi~' 0 éi,;·;;~ l ~~-;•;• ~~~" ;Î(!t;iÏ•~ i~~i;;~•~;; t ';' "(l•l; ;ii 1uffise de dire q uc parmi l•·s carcasses d'c1wiron d,·ux cents che~ vaux tués ou bfossé~, sont conchés les cadaHes de nos brans &r• tilleurs anglais et français, tous plus ou moius horrib ttment mutilé~. Quelqucij-uns ont la tHe détachée du cou, comme par 11ne hact,e; d'antres ont la ja111bcséparée de la hanche, cl'autrce, lea brai e111porté•: 1l'a11trrs encore, frappés à la poitrine ou d1rns l'ij&• tomac, ont ôté littérnlen,ent broyé• comme s'ils avaient été écrasés par une machine. ~lais ce ne sont pao;les alliés seulement qui sont étendus là: 11.ucontraire, il y a dix cadavres russes pour un du nôtres, avec cette ditréreuce qne lei; Russes ont tous élé tué~ par li\ mousqueterie nvanWj11e l'artillerie ait donné. St1r cette place, l'ennemi a mo.ilite11ucon~tamment une pluie de bombes pendant toute la nuit, mais les bombes n'éclataient que sur des morts. •• En tra,·ersant la route qui mi;ne à Sébastopol, entre des monceaux <lemorts russes, on arrive à la place où les Gardes ont 6t~ obligés d'abandonner la défcnsv cltl retrauchement qui domine la ,-allée d'lnkermann. 1.il nos morts sont aussi nombreux que ceu'lt. de l'ennemi. En travers du sentier, côte à côte, sont étcndud cinq Gardes qui ont été tués par le même boulet en chargeant l'ennemi. Ils sont couchés dans la même attitude, serrant leur mousquet de leurs mains criepé~s, ayant tous sur le visage le même froncement douloureux et ternbl<!, Au-delà de cc gwupe, le• fantassins de la li~ne et de la (l'arde russe sont couchés ~pai!i comme des feuilles au milieu des cadavres. "Sur la droite du retranchement, est la route qui mêne l la Batterie <les Deux-C.i.nons. Le sentier passe à trarnrs un fourr6 épais, mais le seutier est glissant de sang, et le founé ~st couchE contre terre et encombré de morts. La scè11evue de la batterie est terrible, terribl<! au-delà de toute deecription. Je me suis tenu ,ur le parapet vers neuf heures du soir, et j'ai senti mon cœur s'enfoncer comme si j'assistais à l.i. scèue mê111edu carnage. La lune était à son plein et éclairait toute chose presque comme de jour. En face de n,oi était la vallée d'l nkermann avec la l'chernayY. 1erpentant gracieusement, entre les hauteurs, comme une bande d'argent. C'était une ,·ue @plenditlequi, pour la variété et le pittoresque, pouvait lutter avec les plus belles du monde. Pourtaat j~ ne me rappellerai jamais la vallée d'Inkermann qu'avec un sentiment de 1·épulsiou _et d'horreur; car autour de la place d'où je regardais étaient couchés plus de cinq mille cadavres. Beaucoup dl\ blessés a•Jssi étaient lil.: et les lents et pénibles gémisseme111i8 de leur agonie frappaient mon oreille avec une.précision sinistre, et, ce qui est plus douloureux encore, j'entendais les cris enroués et le r&.ledésespéré de ceux qui se débat~aient avant d'expirer. " Les ambulances, aussi vite qu'elles pouvaient 'l'enir, recevaient leur charge do souffrante, i,t on employait jusqu'à des couvertures pour transporter les blessés. " En dehors de la batterie, les Russe, sont couchés par deux ou trois les uns rnr les autres. En dedans, la place est littéra• lement encombrée des Gardes russes, <lu5je et du 20e régiments. Les belles et hautes formes <lenoii pauvres compatriotes pouvaient être distinguées d'un coup-d'œil, quoique les grands habits gris tachés de sang leur fussent devenu11semblables à l'extérieur. Lts hommts sont couchés comme ils 80nt tombés, en tas; ici un des nôtres sur trois ou quatre Russes, lil. un Russe sur trois on quatre des nôtres. Quélqnes-uns s'en sont allés avec le sourire aux lèvres et semblent comme endormis ; d'autres gont horriblement contractés : leurs yeux hors de tête et leurs traita enfül~ an• noncent qu'ils sont morts agonisants, mai11.menaçants jusqu'a1.1 bout. Quelques-uns reposent comme s'ils ,taient préparés pour l'ensevelis6ement et comme si la main d'un parent avait arrang6 leurs membres mutilés. tandis que d'autres ,sont encore dans dea positions de combat, à moitié debout 011 à demi-agenouilMs, s..rrant leur arme ou déchirant une cartouche. Beaucoup sont étendus, les mains levées vers le ciel, comme pour détoûrner uu coup ou pour proftrer une prière, tandis que d'autres ont le frono.e- • meut hostile de la crainte ou de la haine,, comme. si vraiment ils étaient mort~ d~.5e!plrt~. ta clarté de la I,i!_ncréi,u,d~i~ ~ur cea

RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==