Homme - anno I - n.52 - 22 novembre 1854

-SCIENCE.- ' _:_soLIDARITÉ.- ,JOURANljDELADEMOCRATIUENIVERSELLE.· N8 52. - MERC'REDl, 22 NOVEMBRE J 854. (:.- .Joui•na.l 1u\l•ait une fols 1uu· 8e111aine. Toutes lettres et correspondances ,toivc>ut être affranchies et dressées au bureau de, I' 1mprimerie Universelle à St-Hélier L'E:JPEREUR NICOLAS. I. Cet homme est, dans notre siècle si mêlé, le type et le dernier représentant .de ces vieilles autocraties qui ont laissé dans l'histoire uue si bPlle galerie de monstres. Il a cette terrible irr~spo11Së:1hilitéde lc1foree qui pousserait fatalement anx crimes lf's na1ures !·esplus tendres et les mieux douées elles-mêmes-: il est Pontife, il est César·; il a les âmPs comme les corps, et sa puissance ne connait <l'autrt>s limites que celles de sa folie. Daus ce rôle de dieu-tzar, il a pour le conseiller toute une série d'ancêtres, véritables Atrides, mâles ou femelles, et qui se complètant, l'un par l'au,re, réalisent, groupe sinistre, l'Olympe de la tyninnie. C'est Pierre qu'ils appellent le A-rand et qui tua son filspar le hourre;:iu, comme Heu ri VIII ses femmes.. C'est Ca1herine Il qui ne savait pas plus-. le nombre de ses amants que celui de ses crimes, t't q 11 'ils aJJpelleut la Gmnde aussi, pour avoir sans doute assassiné son mari, souillé cinquante ans l'histoire, égorgé la Pologne, et mêlé le sa11g aux fêtes, ainsi que le faisllient dans les tt>mps roml:linsles monstrueux aliénés de Suétone. C'est Paul III, la folie grotesque et taciturne, qui tomba -dans un guet-npens, et di-parut comme son père. C'est A.lexahdre, enfin, qui fut la mélancolie de cet antre impérial, et qui mourut comme les autres, ile la mort des dieux. Celui-ci, le dernier, a la cruauté froide de Pinre, l'ambition insatiable de Catherine, l'esprit minutieux de Paul, et toutes les ténacités, tout«·s les superbes de l'orgueil :)l y a vingt-huit ans qu'il organise ses disciplines de fer, qu'il fait de son vaste Empire une chiourme, et qu'il prépare sa graude camp,1gne, ouvtrte, aujourd'hui, contre l'Orient. Trouvë.1it-ildevant lui les résistances de la conspiration oude l'idée! il les supprimait violemment ; et cela a duré plus d'un quart de siècle, et toutes ses citadelles sont pe,uplées de martyrs, comme ses Sihéries. Il n'a jamais pardonné! Des peuples se levaient-ils à l'appel iles Révolutions, do11tle souille passë:1ict omme une brise sur leurs tombes? il les fcras:-iit sous ses armées, et faisait une guerre sans trève ni merci, même pour les rnfants. Ainsi de la Pologne tomhée depùis viilgt-qu.-1tre ans, et que l'Europe è.llais~ée sl:l11secours comme sans veng·eance, tandis que le tyran-bourreau la fouillait aux entrailles tout à son aise et lui arrach,iit jnsqu'à sa langue, la langue mère de la vie et des souvenirs ! Ainsi de. la Hongrie victorieuse de la maison d'Autriche et q11'il a remise aux fers, frappant en elle, sa graude, son éternelle ennemie, la Révolution. Cherchez da11sses actes, dans ses ukas<.>sd, ans ses gu«-'1Tes,dans toute la vif' de cet homme, et vous n'y trouven"Z pas un écart du cœur ou de la pensée, u11moment de compa~s:ou, de miséricorde, d'oubli dans l'œuvrt-> sinistre. Ce Philippe II de l'Escurial-palais d'hiver a tot11es les log-iqm·s de son rôle, celle du tourrnt:'nt, celle dt> l'i,,quisitio11, celle de la mort. Le sourire ou le r.ri de l'e11fo11t, le désespoir de la mère, les p1eurs et les agonies de fam1lle,il ne sent rien ; il ne comprendrait pas même les secrets atte11drissements qui mouillent parfois les, paupières du bourreau, quand le glaivf' tombe! Et par nature et par tradition il est le tyran-modèle : c'est le pape, le grand pape de la force implacable, et ceux d'Allemugne ou de France ne sont que ses v,:1lets. II. L'Europe des rois, clt-"sdiplomaties et des gouvernements a laissé cette umbitio11s'étendre depuis cinyua11teans et g·agner sur toutes ses frontières: ses iuflnenct>s domineut en Allt>magne, jusqu'au Rlun ; elle a des provinces méridionales qui tou- (Jersey), 19, Dorset Street. - Les manuscrits d6posés ne seront I ANOLE'rERll.E ET CoLONTEs: pas rendus. - ÜN s' ABONNE: A Jersey, 19, Dorset street. - A I Un an, 8 shillings ou· 10 fran es. Londres, chez M. Zmichowski, 28, Greek-street, Soho Square.-A Six mois, 4 sh. ou 5 fr. Genè~e (Suisse), chez .M. C?rsa_t, libraire, rue G;uillaume-Tel!· -:-1 Trois mois, 2 sh. ou 2 fr. 50 c. Poua L'ÉTRANO&lt. : Un an, 12 fr. 50. Six mois, 6 fr. 25. Trois mois, 3 fr. 50 c. Belgique, chez tous les hbraires. - Â. Madrid, chez Casmur CHAQUENUMÉRO: 'l'ou8 le• abo11ne111en■ llile1•aient dtavanee. Monnier, libraire. S pence ou 6 &ous. chent presque à Constantinople: du côté du nord, lt's petites puissanc, s, Suède, Norwège et Dane• mark tremblent sous le vent de ses forces; ses intri_gues flnfin, entrent partout comme ses polices, à Paris, à Lond,res, à Vienne, et l'esprit ue sa croisë.1deest sur tous les points aux prises avec l'esprit de liberté qui est la grande iuspiration moderne. Voilà lPs faits: oril l:lrrive,aujourd'hui, que les puissnnces menacées s'inquiètent et veulent fermer l'ûrie11t à cette ë.1mbitionqu'elles avaient jusques là servie. La guerre, la grande gnerre éclatt=>, ayant pom complices, cette fois, la peste et les tempêtes : de nouveau, le monde est en feu et dans le sang: mais à qui la faute? Est-ce la Révolution qui disait à Paris, il y a vingt-quatre ans., après la bulletin de la graude mort : l'ordre règne à Varsovie! - Est-ce la révolution qui recevait Nicolas au palais de Windsor, il y a quelques années à peine ! Est-ce la révolutiqn qui faissait plus tard enchainer la Hongrie échappée des maius de l'Autriche? Est-ce la révolution qui depuis 48, l'année du réveil, saluait, glorifiait le 'rzar, comme l'homme-vengeur et la dernière espérance des maisons royales '? La Révolution et le tzar vivant en famille .... la Révolution faisant fête au bourreau sous les gibets de la Pologne 1et de la HongTie, la Révolution passant devè.lnt l'échafaud de Pestel, pour aller faire sa cour 1m palais d'hiver..... Quelle pauvre et misérable calomnie ! Entre nous et les empernurs, ceux de Pétersbourg comme ceux de Paris ou de Vienne, il y a des fleuves de sang, il y a des tombes larges comme des patries: il y a <les haines acharnées et qui jamais ne s'étei11dront tant qu'un serf, nn seul, jettera sa plainte ous le ciel glacé des Russies. Nous sommes la justice et la souffrance, les empereurs sont le privilége et le crime. Nous sommes la science et nous cherchons la lumière, les empereurs fout l'ombre et vivent du silence. Nous voulons les tribunes hautes, les voix libres, les consciences honorées, l'éternelle recherche et l'universel épanouissement, - les empereurs n'aiment que les casernes, les bastilles, les échafauds, et leurs chefs de propagande sont des geôliers, des tortionnaires, des 'juges. Quel touchant accord entre .les empereurs et la Révolution! Ah! la guerre sera sans trève, implacable, jusqu'au dernier sang, contre ces grands ennemis publies, quand nous aurons retrouvé nos armes ; m,tis ce qui est crime à Saint-Petersbourg ne saurait s'appeler Providence à Paris, et, pour nous, tous les empereurs se valent ! Charles R1 BRYROLLES. BU I tETINU~:LAS~JlAlNt Les dépêches télégraphiques, en confirmant le rapport du général Caqrobert, indiquent pourtant qne les Alliés ont beaucoup souffert dans la bataille livrée le 5 Novembre et sont dans une situation fort périlleuse, entre une forteresse défendue par une armée et deux autres armées manœuvrant sur leurs flancs. . Le feu de Sébastopol ne faiblit pas sous le feu des assiégeants ; les pièces démontées sont promptement remplacées, les retranchements endommagés sont répë.1résla nuit suivante; les munitions sont inépuisables, la place étant l'arsenal maritime russe sur la Mer Noire Le courage des Russes - cela n'est pas nouveau pour qu;couque a lu l'histoire des grandes guerres - ne le cède en rien au courage des Français ou <lesAnglais; leur discipline, leur armement, leur état-major valent ceux des alliés. Leur nombre est presque·double. , Les Alliés ne se laissent pas décourager ; les renf<~rtsleur arrivent; l'Angleterre envoie 7 régirn(•nts et 5,000 cavaliers, ce qui portera à 15,000 hommes les renforts expédiés d~p,ui, le commen- .. cernent de l'expédition. Les divisions Dulac et De S,alles, plusieurs régiments d'Algérie et de Rome ont reçu l'ordre de partir pour la Crimée· des vapeurs anglais sont en mer poul' les embar: quer. Les généraux Kiriakoff et Soymonoff et l'amiral Skoropaczy ont été tués. - Les A no-lais ont perdu le général de division Catheart et l~s brio-adiers Goldie et Strangways, 102 officiers et 2,500 soldats. Les généraux Ilrowu et Lacy Evans. -hlessés, sont forcés de quitter leurs divisions· Lord Raglan n'a donc plus près de lui que le du~ de Cambridge. Le g_énéral Canrobert, lui-même blessé, a perdu 48 officiers et 1,300 soldats; le prince Napoléon, malade de la dyssenterie, est parti pour Constantinople. - Suliman Pacha est déo-radé pour la mauvaise conduite de ses Turcs, 1: 25, à Baiaclava. Mentschikoff avoue une perte <le 4,000 hommes; mais il annonce que la double sortie de la garnison de Sébastopol, effectuée pendant la bataille, a e11 pour résultat d'enclouer une batterie française de 15 canons ( division Napoléon) et d'enlever une redo11te, que la division Forey reprit bientôt d'ailleurs; mais en poursuivant les· Russes, les Français aurnient essayé· de s'emparer d'assaut du bastion No. 6 et auraient perdu beaucoup de monde dans cette tentative téméraire. - Les Russes se considèrent comme vainqueurs dans cette bataille. • Une dépêche du 9 annonce que les Alliés, ayant reçu des renforts, avaient menacé l'aile gauche des Russes, vers Balacla va ; le général Liprandi, blessé le 5, anrait battu en retraite. - Les Assiégeants ont complété leur troisième parallèle ; on se prépare à l'assaut, qui aurait eu lieu le 5 sans l'attaque des Russes. - Le Times évalue les forces disponibles des assiégeants à 50,000 hommes seulement! Des combats d'avant-postes ont eu lieu dans la Dobrudja où les lieutenants d'Omer Pacha obser• vent l'avant-garde de Gortschakoff. Nous avons reçu de Londres, samedi dernier, un placard imprimé portant appel au peuple anglais, à propos de la visite au~uste projetée par le Bonaparte du Deux-Décembre. Cete pièce est signée par plusieurs citoyens réunis en comité pour cette propagande d'honneur, et dans son dernier No, le journal hebdomadaire le Leader en cite plusieurs fragments. Etrangers et proscrits, nous n'intervenons que rarement dans les débats del' Angleterre, et jamais dans sa politique. Mais cette fois, nous sommes entraînés forcément par cette initiative vengeresse. et 11ousvoulons faire deux réflexi0ns en l'honneur de ce pays. La liberté de l'esprit public, en Angleterre. n'est pas_un mensonge, comme ailleurs; car si la presse et le Parlement ont retenti d'acclamations en l'honneur du parjure couronné, l'énergique texte qui suit prouve combien reste entier et sacré le droit des opinions contraires. Avec de pareilles habitudes de liberté pratique, l'Angleterre ne périra jamais : elle aura toujours du vent dans ses voiles ! En second lieu, les ouvriers anglais qui neveulent point amnistier le crime, quelles que soient les crises et les difficultés du temps, les ouvriers anglais témoignent par là d'un sentiment profond de la moralité humaine, et cela nous console des apostasies misérables que nous avons vues s'étaler sur le continent. Gardons la foi, grrdons l'honneur, ouvrie_rs des deux pays, et l'Angleterre et la France seront bientôt sœurs. C'es.t là, dans la justice quandmême, qu'est la véritable,. .la grande communion de l'av6nir.

Voici cette pièce remarquable qui restera comme gra~cl tén1oignage dans l'histoire du peuple anglais : QU'Efff-CE QUE NAPOLEON? Une O'rande honte se prépare pour la Nation Britannique~ une des plus grandes qu'on puisse lui infli~~r: L'Association avec l'I11famie - l'hommage rendn au crime triomphant. Louis Napoléon Bonaparte vient dans 'notre pays, hôte nation'al de la Royauté, pour y être reçu, ac- ,cneilli, honoré par le Souveraiu an nom du Peuple. Permettrez-vous que le nom du peuple soit ainsi déshfn,,ré? Quel est cet homme qui vient? Cet homme, est un pa,jure. Ecolltez: - Le 20 Décembre 1848, il prêtait serment devant 900 Représentants du peuple. - " En présence de Dieu et devant le Peuple "français représenté par l'Assemblée nationale, je jure " de rester fidèle à la République démocratique une et in- " divisible et de remplir tous les devoirs que m'impose la " Constitution. " - Il ajouta spontanément ces paroles : - " Je verrai des ennemis de la patrie daus tous ceux "qui tenteraient de chauger, par des voies illégales, ce " que la France entière a établi. " Cet homme est un meurtrier. Ecoutez - voici comment il a tenu son serment ; écoutez - voici comment il a traité ceux qui essayaient de faire respecter la Loi ! - Le 4 Décembre 1851, dans l'après-midi, tout-àcoup les Boulevards se couvrent de cavalerie, d'i11fanterie, d'artillerie. Les soldats sont ivres, furieusement ivre:s: Bonaparte les a fait boire toute la nuit. Des masses nombreuses de peuple rempiissent les rues - Napoléon combine un massacre pour écrasP.r le peuple: à deux heures et demi, l'infanterie fait front aux deux côtés des Boulevards, et nn fleuve de feu inonde la multitude accumulée. Ecoutez les paroles du grand historien de ces journées, Victor Hugo : ................................... I>.................................... . L'armée se mit à fusiller le peuple à bout portant. Ce fut un moment sinistre et inexprimable; les cris, les bras levés au ciel, la surprise, l'épouvante, la foule fuyant dans t~utes les directions, une grêle de balle pleavant et remontant depms les pivés jusqu'aux toits, en une mi1~ute les morts jonchant la chaussée, des jeunes gens tombant le c1garrc à l_a b?uchc, de~ ~em~es en robes ùc velours, tuées roides par les b1sca1ens, deux lihraires arquebusés au seuil de leurs boutiques, sans avoir su ce qu'on leur voulait, des cor.ps de fusil tirés par les soupiraux des caves et y tu~nt n'importe qui, le bazar c~iblé d'obus _et .de, bo~lets, 1:hôt~l Sallandrouze bombardé, la Maison d'Or m1tra1llee, 'I orton~ pris d'assaut, des cen' aines de cadavres sur le Boulevard, un ruisseau de sang rue de Richelieu. ................... , .............. On voyait bs geHdarmes mobiles, dit un témoin, dans le bout de ma rue, et je sais qu'il en était de même dans Je voisinae:e, tenant !euro fusils et se tenant eux-mêmes dans la position d1t cha8seur qui attend le gibi:r, c'est-~-dire le fusil près de J'épaule pour être plus prompt à aJUStcr et tirer, ••p•~~·t·~~· •ai ~i~-i~;~i·~m~i~·;~ - ~·~· ~-i~~;~~~-·i~~ir~~~ir;·~~; ·1~~-; ·d~~ mandaien't protection. A cette parole ceux-ci s'éloignaient bien vite et avec confiance; m11iscc n·était là qu un mot d'ordre qui ~ignifiait :-MORT; et, en effet, à peine avaient-ils fait quelques pas 4u'ils tombaient à la renvers;- , , . Des jeux effroyables se.mela1ent au massac_re. Les t1ra1lleurs de Vincennes s'étaient établis sur une Ùe3 barricades du Boulevard qu'ils avaient pri$e à la bayonnette, et _delà ils s'.exerçai~n_tau tir sur les pass9nts éloignés. On ente?da1t des ma,so?s _vo1smes c~s dialoo-ues hideux : - Je gage que Je descen<ls colm-c1.-Je pane que 1~on.-Je parie que si. - Et le coup,partait. ~uand l'homme tombait cela se devmait à un grand eclat de rire. Lorsqu une femme ;assait : - tirez à la femme, criaient les officiers l tirez aux femmes l Un vieillard de quatre-vingts ans, trouvé hlotti on ne sait où, fut amené devant le perron du Prophète et. fusillé. Il tomba. -Il né safera p, s de bosse à la têti:, <l:t un so_ldat. Le viei_llardétait tombé sur un monceau de cadwres, Deax Jeunes gens d Issy, mariés depuis un mois et ayant ép?usé les <leu~sœurs, trav,ersaie_nt le Boulevard ven,int de leurs afünres, Ils se virent couches en JOUe, Ils se ,ietè;ent à genoux, ils criaient : nous avons épousé les deux 1œurs ! on les tua.,,. Un enfant de treize ans, apprenti seJlier, passait ~ur le_ B~ulevard devant le cafë Vachette; on l'ajuste, Il pousse des cris desespérés ; ·1tenait à la main une bride de che,val ! il l'agita:~ en disant : Je fais une commission. On le tua, rro1s balles lui trouèrent la poitrine. Tout le long du Boulevard on cnten<la't les hurlements et les soubresn1ts des b.essés que les soldats lardaient à coups de bayonnette et laiss~ient là sans même los achever. Sous prétexte de coups <lefusil tirés sur la_troupe, on entra dans dix ou douze ma:sons çà et là et l'on pass:t a la bayonnette tous ceux qu'o:1 y trouv~. Il y a à toutes les maison~ du Boul~vard des conduits de fome par où les eaux sales d1is maisons se <leg?rgent au dehors dans le ruisseau, Les sold,,tR. sans savoir pourquoi, prena' ent en défiance ou en haine telle maison fermée du haut en bas, muette. m0rne, et qui, comme toutes les mai~ons du Boulevard, senbla t inhabitée ta~t elle ét~it sileacieuse, Ih frapp~ient à la p<;>rte,la porte s' ouvra :t, i1s e~traien,t. Un moment après on voyait ~ortir <le la houche des conduits de fonte un flot rouge et fumant. C'ét ,it du sang. •••L;.. t·~~~-i·~ ~·;~;~~;:· ~ -~~~-;~~à~di;~· ii: ·1 . ~~·i;·;;~. ;;~:·~· ~·;~:~; i c~m.nencé en plein jour, on n'enleva pas les cadavres_; ils étaient tellement pressés que rien que de"ant une seul~ boutique, la b?utique de Barhed1enne. on ea compta trente-tro·s. Chaque carre de terre dé~oupé dans l'asphalte au pied <lesarbres du Boulevard, était un réservoir de sang. " Les morts, dit 111t1émoin, étaien; entassés en monceaux, les uns sur les autres, vieillards, e11fa!1tSb, l •uses et paletots réunis dans un indescriptible pêle-mêle, têtes, bras. jambes c0nfonclns.'' Une femme était arr~tée à l'angle de h rue Rj,chelieu, Elle retarda, t. Tout à coup elh! s'aperç:ù qu'ell? ~ les, pieds m?uillés : _ Tiens, dit-elle. il a cloue llJ~n plu; J'ai ks pieds dans 1eau. --: Non, mali 1mc, lui dit un passant, ce n est pas de l'eau, - Elle avait les pieds dans une mare <lesang .. :· . . _ ✓ 1:>e la ·rnl:!Montmartre à ln rue du Sent-1er, on ma rcho'it lttten,- L'll Q li il ~ . lame,,t dans le sang : il couvrait le trottoir dans certains cndr0its . , d'une épaisseur de quelques lignes, et, sans hyperbole, san, ,,xagé- . ration, il fallait des précautions pour ne pas y mettre -les }'le h. Les cadavres isolés étaient rares, on les remarquait plus que les autreij, Un jeune homme bien vêtu était assis, adossé à un mur, les jambes écartées, les bras à demi croisés, nn jonc de Verdier dans la main droite, et semblait regarder; il était mort. Un peu plus loin les balles avaient cloné contre une bout:que un adolescent en pantalon de velours de coton, qui ten~it à la man des épreuves d'imprimerie. Le vent agitait ces feuilles sanglmtes sur lesqu~lles le poignet du mort s'était crispé. Un pauvre vieux, à cheveux blancs, éta,t étendu au milieu de la chaussée, avec son parapluie à cfté de lui. Il touchait presque du coude un jeune homme en bottes vernies. en gant•:jaunes qui g sait ayant encore le lorg-non dans l'œil. A quelques pas était couchée, la tête sur le trott:>ir. les pieds sur le pavé, u11efemme du peuple qui s'enfuyait son enfant dans ses bras. La mère et l'lmfant ét'.l ent morts, mais la mère n'avait pas liché l'enfant, Rue Grauge-Batt>lièrc on voyait dans un coin trois cadavres entièrement nus. A deux pas du théâtre des Variétés, la foule s'arrêtait devant une casquette pleine de cervelle et <lesang accrochée à une branche d'arbre. On ne permit pas d'enlever les morts, pendant vingtquatre heures, pour frapper de terreur la population. Vers onze heures du soir, quand les bivouacs furent allumé~ partout, M. Bonaparte perm;t qu'on s'amusât JI y eut sur le Boulevard comme une fète de nuit. Les soldats riaient et chantaient en jetant au feu les débris de~ barri,·ades, puis, comme à Strasbourg et à Boulogne, vinrent les distributions d'argent, Ecoutons ce que r:iconte un témoin : " J'ai vu, à la Porte-Saint- Denis, un officier d'état-major remettre deux cents franc~ au chef d'un détachement <levmgt hommes tm lui disant: le prince m'a ch:irgé de vous remettre cet argent pour être distribué à vos braves soldats. Il ne bornera pas là les témoignages de sa sat,sfaction, - Chaque soldat a reçu dix francs," Le soir d'Austerlitz, l'empereur disait : soldats, je suis content de vous. Un autre ajoute: "les soldats, le c;garre à la bouche, narguaient les passants et faisaient sonner l'argent ,qu' ls avaient d,ms la poche.'' Un autre <lit : " les officiers cassa eut les rouleaux di louis com1,1ed~s ùâtnns de chocolat.•' .... , .... Des tables étaient dressées dans les bivouacs; officiers t!t soldat11 y buvaient. La fi 1mrne des bras:ers se reflétait sur tous ces visages joyeux. Les bouchons et les Côpsules blanches du vin de Champagne surnageaient sur les ruisseaux rouges de ~ang, De bivouac il bivou~c on s'appelait a\'eC de grands cri$ et <lesplaisanteries obscènes, On S!' saluait ; Vivent les gendarmes! vivent lt•s lanciers l et tous ajoutaient : vive Louis-N;,poléon ! On entt>nda•t le choc des verres et le bruit des bouteilles brisées, Çà et là, dans l'ombre. une bougie de cire jaune ou une lanterne à la main, des femmes rôchient parmi les cadavres, regardant l'une après l'autre ces faces pûles et cherchant celle-ci son fils, celle-ci son père, celle-là son mari. •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••·•····•···················· Le lendema;n 5, au cimetière Montmartre, on vit une chose épouvantable. Un vaste espace resté vague jusqu'à ce jour, fut " ut'! sé '' p,,ur l'inhumation proviso re de quelques-uns <les massacrés. Ils é.aient ensevelis la tête hors du terre, afin que leurs fctmilJes pus~ent les reconnaître La plupart, les pie<ls dehors, avec un peu de terre sur la poitrine, La foule allôit là, le flot des curieux vous poussa ·t, on errait au milieu des sépultures et par instants on senta;t la terre plier sous soi ; on marchait sur le ventre d'un cadavre, On se retournait, on voyait sortir de terre des hottes, des sabots ou des brodequins de femmes; de l'autre côté était la tête que votre pression sur le corp~ faisait remuer, Un témoin illustre, le grand statua7re D•vid, aujourd'hui proscrit et erraut hors ~e France, dit : "J'ai vu au cimetière .Montmartre une quarantaine de cadavres encore vêtus de leurs habits ; on les avait placés à côté l'un de l'autre; quelques pelletées de terre les cachaient jusqu'à la tête qu'on avair laii.sée découverte, afin que les parents les reconnussent. Il y avait si peu de terre qu'on voyait les pieds encore à découvert, et le public marchait sur ces corps, ce qui était horrible. Il y avait là de nobles tltes de jeunes hommes tout empreinte~ de courage; au milieu était une pauvre femme, la domestique d'un boulanger, qui avait été tuée en portant le pain aux pratiques de son maître, et à côté upe bdle jeune fille, marchande de fleurs sur le Boulevard, Ceux qui cherchaient des personnes disparues étaient obligées de fouler aux pieds les corps afin de pouvoir regarder <leprès les té.tes. J';-ii entendu un homme du peuple dire avec uue expression d'horreur : On marche comme sur un tremplin," Le lendemain 5, les troupes victorieuses paradaient sur les Boulevards. On vit un génénl montrer son sabre nu au peuple et crier : La Républiqtte, la voilà I La nuit suivante - un bmit affreux réveillait Paris - il ébranlait les fenêtres, et se prolongeait en lourds echos dans tontes les maisons. C'était la fusillade du Champrle Mars : 1200 hommes étaient fusillés, de sang-froid, à la lueur inceitaine et ténébreuse des lant "rnes. Ces massacres se renouvelèrent: nul ne peut dire •t nombre des victimes de ces boucheries. Anglais, tel est l'homrne qui vient, l'hôte honoré de la Reine, des Pairs, des Evêques, dts Lords du Coffre-fort. Les épithètes que nous lui donnons sont les mêmes qu'amoncelaient sur sa tête, à ret1P. époque, le Times, le Chronicle, le Daily News, l'Advertiser, et presque tous les journaux quotidiens ou hebdomadaires de la GrandeBretagne. Ils ont changé de langage, le Crime est triomphànt. Nous n'avons pas changé. - On dit au Monde qu'il sera le bie11-venu chez vous, - que vous saluez sa visite a·vec délices : Nous vous appelons à flétrir cette accusation,' - et il vous en. est offert une glorieuse opportunité. Uu noble exilé vient chez nous - Barbès, prisonnier pendant ] 6 ans! - l'un des plus sincères républicains de l'Europe. Emprisonné par Louis-Philippe eu 1839, il a toujours L ngui, depuis, dans les cachots, sauf pendant les trop courtes semaines de liberté que lui rendit L Révolution de 1848. No11S l'attendons en même temps que Lo1_1isNapol6on. -- Un comité, composé des soussignés, se forme pour l'appeler et l'accueil.ir sur nos rivages. Qu'il soit l'hôte du peuple, tandis qu'un parj1tre, un assassin sera l'hôte de la Pairie, de l'Eglise, de la Coui-onne ! On vous pr~pose <l'honorer,, en lui, ses Principe!! èt la • Nation française, par un grand banquet, au moment même où le tyran usurpateur sera fêté au Palais ; de faire tonner dans nos rues, chanté par des myriades de voix, l'hymne de la Marseillaise, défendu en France, de le faire retenlir jusqu'aux oreille3 de Buonaparte et de donner aux oppresseurs de tous pays, de toutes classes, une leçon qu'ils ne puissent jamais oublier, dussent-ils prolonger lenr existence au-delà du terme ordinaire ... Hommes d'Angleterre ? - Soyez à la hauteur d,-s Evénements ! Ralliez-vous autour du Comité - ce n'est pas un mouvement de parti - c·est u11appel à tons les Amis du Peuple. La Pologne s'agiterait dans ses fers, la Hongrie tressaillerait de joie, l'Italie se lèverait, enthousiaste, si elles apprenaient que les Ouvriers d'Angleterre ont fié. tri le Parjure et le Meurtre couronnés - ont poussé de nouveau le cri de gunre de la République française, et l'ont jeté à la face effrontée du Tyran. Chaque homme a la _garde de son honneur - aussi chaque Nation. Sauvez le vôtre, Hommes d'Angleterre! Quïl ne soit pas vendu à !'Iniquité victorieuse par vos privilé.9iés politiques. Que le monde sache bien que, si Napoléon vient, il sera l'hôte de la Reine, non pas du Peupl,~ ; que si l'Eglise prie pour lui, le Peuple le mau. dit; que si !'Aristocratie le courtise, le Peuple le méprise; que si les usuriers trainent leur vil hommage sous ses pieds teints de sang, il n'y a pas un honnête travailleur - un honnête artisa11 - en Angleterre, qui ne se crût infâme ,s'il touchait sa main avec amitié ! Signé: CHAPMAN,-GEORGE TAYLOR,-WILLIAM SLOMBE,- LOMBARD. LENO, -E .J, MORING, - SEARLE,- SAMUEL FERDINANDO, - DEAN TAYLOR, - W. y ATES, - 131.ACKLER-, ,r OOD, SoUTHWOOD-, ISAAC LITTLEBURY, - GEORGE L!TTLEBURY, - D1xoN,-JAMEs,-Poo1.E, KN1G11T,- BEATTIE,- HE)IMETT, - THOMl'SON,- HARRIS, - SAVAGE,- ADLl:-.GTON,- PoTTER, WoRKMAN,- SuTTON,- VERDEILLE,- .MARSHALL-, H1rnRY JEFFERJES,- TOVEL.- VlmTJ::HAIR,-JAMES B1.1ou, - GEORGE Bnow:-i, KERNS,- MoRGAN,-HINDLE, STEVENS, -VwoRs,-EDwi:, GrLL,-Jvfc LAUGIILAN,-PIKE, -EVANs,-STEVENSON, -- R. H, SrnE, - NAsn, - HARRis,-EvANs,-WRIGHT, - GRoss,-GARRARD, RunEREY,-8KINNER.-LoDGE, et 1\1.A, HEATH et LODGE. GEORGE HARRTSSON, Président. ROBERT CHAP:VlAN, Secrétaire. • ERNEST JO'\fE", Secrétaire, JAMES F, NLEN T ésorier. N. B.-Répandez cet appel autalll q~1(•po~::.ible. - Le Comité s'assemble le soir, tou~ les M rd1s. a 8 heurt's, t't tous les Dima11ches, à 6 heures. Beil Tavern, Newton Street, Holborn. Ralliez-vous autour du Comité, aidez-le cle votre présence et de vos contributiolls. Préparez-vous pour cttle grande démonstration. L'émigration polonaise reste, depuis 24 ans, fidèle à sa coutu111e tr<1ditio11nelle et sacrée de célébrer l'anniversaire de la IH·volntion d1• 18!30. Jusqu'ici, chacun de ces ;.u1ni\ersaires a é1é une solennité religiP,use; le proch,iin doit être 1111 a('te politique, la propaga11de pure d1wa11tcilder le pas à l'action. C'est dans ce but que la Centralisation de la démocratique polonaise a résolu d'inviter à la réunion publique du 29 Novembre prochain, à Londres, des députations de toutes les vil les d' Angleterre qui, par des meetings publics ou la formation de comités, ont manifesté leur sympathie pour la cause polonaise, et qui maintenant sont appelés, non seulement à confirmer lt>urs déclarations précédentes, mais e11core à rna11ifester leur opinion sur la politique à suivre, aujourd'hui, re~ativement à la Pologne. La Centralisation a, pour cet objet, choisi l'auniversaire de la Révolution polonaise de 1830, parce que celle-ci e1,t la plus évidente et la plus irrésistible preuve de vitalité de lc1 nation polonaise: ur,i peuple qui, e111830 et 31. abandonné à lui-même, .a tant fait et rt>mporté de si glorieuses victoires, ne pourrc1it, dans les circonstances présentes, manquer ni du dévouement ni des forces nécessaires pour entreprendre et mener à fin une lutte contre le principal et le plus cruel ennemi de la Pologne, de la Pologne, aujourd'hui, nécessaire à I Europe. En conséquence, la Centralisation prépare en ce moment un programme que bientôt elle publiera. Sir J oshua Walmsley, membre radical du Parlement, est apnelé par elle à présider la réunion, et de 11omhre11xamis de la cause polonaise en Angleterre, ainsi que les représentants f'xilés cle tous les peuples opprimés du continent, ont promis leur concours. Parmi eux, 11011psouvons déjà nommer L. KosSUTH et L1mRu-RoLLIN. La réunion aura lieu à St.-1\1 artin's Hall, Lo~g Âcre, -à 7 heures du soir> le 29 Novembre 1854. 1

CAMP DE BOULOGNE. 18 Nov robre 1854. Le bruit court 11ueplusieurs régiments vont être détachés du camp pour en former un autre à St.-Maur. Depuis plusieurs jours, on nous fait des distributions extraordinaires de cartouches et de biscuits. Les régiments sont de piquet à tour de rôle. Nous flairons la guerre civile, c'est à cause de cela q 11e beaucoup de sous-officiers s'empressent de demander à rendre leurs galons pour aller en Crimée. Le général Renaud leur répond brutalement qu'on a besoin d'eux, qu'il y en a asstz pour se battre là bas et il les punit de prison et de _gardesdu camp pour avoir pétitionné, sans l'avis de leurs chefs. Tous ces vainqueurs tle Décembre, en général si prodigue:<du sang humain, font ce qu'ils peuvent pour -détruire l'enthousiasme qui travaille l'armée depuis 1e commencement rie la guerre. Nous •les entendons crier ,contre cet imbécile de peuple parisien qui s'avise de murmurer et de manifester son mécontentement depui!; la dépêche à la tartare. Mais ce n'est pas seulement le peuple qui murmure, c'est aussi l'armée. Nous avons raison de nous .inquiéter du sort de nos camarades qu'on sème comme des épis de blé dans les plaines d'Orient, ou qu'on sacrifie bêtement au caprice de traineurs de sabres tels qu'Espinasse, nom maurlit et méprisé par le dernier ries soldats. Le général Canrobert lui-même n'inspire pas plus de confiance. ~on éducat10n théorique s'est faite dans les écoles régimentaires modelées sur celles des frères ignorantins, et dans la pratique africaine, où nous l'avons vu souvent exposer nos vies fort étourdiment. J'ai toujours entendu dire qu'il était pins intrigaut que capable et comme c'est un homme ù grandes ressources, il ne s'est jamais trouvé dans l'embarras. Sous Louis Philippe, il se fit nommer colonel de gendarmerie, fonction dont il s'acquittait mer- •veilleusernent et sous lfl république, général de brigade. A.umois de mars 1850, il se trouvait à Paris sans commandement, ce qui lui valait cle maigres appointements. 'Une bonne occasion se présenta bientôt. Un soir qu'il jouait une partie rl'écarté a,vec le général Corbin dans . le salon d'une favorite de 1Elysée, une querelle survrnt entr'eux. Le lenrlerl}ain, il alla trouver son ami le Président et lui raconta l'affaire. Son intime lui donna entière sati faction en mettant le rival en disponibilité sous pré- ·texte qu'il ne surveilllait pas assez le 4le caserné au Mont-V lêrie11 et il le nomma à sa place. Depuis, son avancement a marché comm~ sur des roulettes. • Pour se battre coutre des armées d1sciplinees, il ne suffit pa~ de savoir mitrailler quelques sanvages dans une bi- •coqne ou des masses de gens clans la rue, il faut encore être initié à l'art des Vauban et de~ Paixhans. Presque •tous les géi,éraux rie l'empire No 2 ont fait leur apprentissage en Afrique, véritable guerrre où ils chassent l'Arabe de broussailles eu broussailles jusqu'à ce qu'ils tombent sur une malheureuse tribu qu'ils font piller ou égorger sans pitié. • Ces succès brillants les font parvenir au rang des Hoche ,et des Morrau et leur donnent du génie l On a donc raisou de ne pas se fier anx aides-dP-camp de notre maître. - lei, les nôtres sont jaloux les uns des autres, et avant la dissolution des états-majors, c'étaient autant de petits gouvernements, se chamaillant, se vexant, se disant des gros mots à propos ùe rien. Maintenant, le commandant en chef tranche du Bonaparte et du Fouché. Il espionne et frappe sans pitié tous ceux qu'il soupçonne. Les chefs de corps hli obéissent aveuglément, ils ne sont tranquilles qu'à cette condition là. Arrondir leur <tbdomen et leurs bourses, s'engraisser tant que cela durera, voilà toute leur ambition. On n'a donc pas à craindre des conspirateurs tels qu'O'Donnell, quand bien même il s'agirait de faire comme celui-ci une révolution pour leur propre compte. Pour les soldats, je ne vous en dirai pas autant: il pourr.dt bien se faire que les persécutions et les hommes de cœur aidant, l'idole des Ratapoils se trouvât subitement et sérieusement menacé par une conspiration à la "Bories.- Aux câlineries qu'on fait aux 34e et 55e de ligne, il est facile de voir qu'on compte beaucoup sur eux pour prêter main forte à la Garde, en cas de besoin, et former l'avant-garde <lunouveau camp. On a reçu la semaine dernière les grandes caisses à joujoux et à médailles ùe l'impératrice. Elles ont donné lieu à11uelques petites scènes de bassesse qui ne manqueront pas d'attirer l'attention ùe cette sainte créature et la bienveillance de son digne époux. - Il parait que la classe à libérer cette année ~era retenue sous les drapeaux. Les Ratapoils ne se gênent guère avec nous autres, ils ont toujours des procédés de sergents de ville. La chair à canon ne manque pourtant pas, nous recevons chaque jour des troupeaux de recrues, jeun, s paysans 'Pleins de vie et de fraicheur qui commencent à boire de l'eau-de-vie comme les vieu~ troupiers afin d'oublier leurs chaumières et leurs champs. Beaucoup de vehdus se trouvent mêlés parmi eux et nos chefs les préfèrent aux jeunes solda~s; ce sout, disent-ils, de~ hommes ractio? mieux constitués que ces méchants pierrots qu on voit ,toujours pleurer et manier le fusil de mauvaise grâce. Plusieurs de ces pauvres conscrits m'ont dit qu'ils avaient eu à peine le temps de faire leurs paquets et leurs adieux à leurs familles. Le préfet avait eu soin de les laite p~vnir par les genarme-s. Un paysan de l'.A.rdèehe L·HOil 1\1 E. est allé trouver le Pacha de son département et il a osé lui parler au nom de la loi pour que son fils ne partît pas si vite. Celui-ci lui a répondu au nom de la gendarmerie que le gendarme é{ait la loi. Tout ceci s'exécute au nom de l'empereur, la. loi et la justice! J'envie beaucoup le sort <les 41c et 4e de ligne qui font des briques et creusent des puits; si nons avions cette chance-là, nous n'aurions pas l'enniü d'aller fraterniser avec la Garde et de subir ses mépris. Tout à vous, Un suspect du camp de Boulogne. DE LA RÉVOLUTION ET DE L'ITALIE. On dit que l'Italie est divisée: c'est malheureusement vrai, et c'est peut-être à cela qu'on doit attribuer le retard Je la Ré'i.olution ~ elle ue peut l'accomplir qu'à la condition de s'unir; elle ue peut en profiter qu'en restant unie. Mais c'est une erreur que de vouloir trouver dans l'histoire uue preuve <l'antipathie nationale pour l'Union; c'est un crime de prendre acte du présent pour imposer une féd~ration au profit d'intérêts particuliers ; les premiers méconnaissent le passé, les seconds compromettent l'avenir. Il n'y a qu'à étudier l'histoire de l'Italie pour être certain que le penchant national a toujours été pour !'Unité. Les étrangers et les gouvt!rnements qui se sont imposés successivement à la nation en ont été les obstacles. L'Italie était presqu'unie, quand des hommes sortant de l'Asie. sont venus y planter leur tente, et ne pouvant la passéder tout entière, out cherché à s'y maintenir en poussant les populations les unes contre les autres. ~endant la domination romaine, ce fut un combat contmuel entre la nationalité italianne qui voulait Hre et le municipalisme romain qui ne voulait pas qu'.elle fût, qui ~e voulait, hors de ses murs, que des colomes ou des mumcipes. L'empire d'Orient craignait l'unité italienne comme une rivale, et il y laissa l'exarchat de Ravenne qui la coupait en deux; l'empire d'Occident la craignait de même et il y plaça le pape pour la rendre impossible. Toutes les guerres du moyen-âge montrent la tendance de l'Italie à s'unir, et les efforts de ses ennemis intérieurs et extérieurs pour la didser. Le tort des Italiens fut alors d'espérer trouver dans ta riva.lité de leurs ~nne~is, d~s forces pour la cause nationale, et dans leur plous1e réciproque, un point d'appui pour !'Unité. C'est, au reste. à peu près ce qui est arrivé en 1848 entre les partisans du Pape et ceux de Ch:1rles Albert. Les factions des Guelfes et des Gibelins, dans lesquelles on s'obstine à voir un symptôme de l'esprit de désunion des Italiens, n'ont été au contraire que deux expressions différentes d'une même idée, l: Unité nationale. Les uns, alléchés par des promesses de libertés municipales, espéraient dans le Pape; les autres exclusivement désireux de la puissance nationale, la réclamaient de l'empereur. Les uns comme les autres voulaient l'Italie Une: le but était le même et saint pour tous. La forme différait : les moyens étaient divers et mauvais chez les uns comme chez les autres, puisque le pape et l'empereur étaient les ennemis naturels de l'Italie ; l'un comme étranger, l'autre comme prêtre, tous les deux devaient h t'ir l'Italie comme nation, et nation essentiellemeut démocratique par ses traditions, par sa position, par ses penchants. L'histoire a prouvé du reste que dès qu'ils eurent arrangé leurs différents, grâce au concour des Italiens qui croyaient combattre pour leur unité, les Papes et les empereurs établirent de nouvelles barrières pour assurer la désunion. Cela a duré jusq11'à nos jours ; seulement, on peut dire que toutes les monarchies de l'Europe y ont participé. Il n'y a pe11t-être pas eu un seul arrangement diplomatique depuis le traité de Madrirl, entre Charles-Quint et François Ier, jusqu'à celui de Vienne, d ns lequel on n'ait ajouté une nouvP.lle division à celles déja qui morcellaient l'Italie; jamais non plus, les Italien_s n'ont négli~é u_n~ occasion de pr0tester contre ce fractionnement. L Unlte était si décidément le but constant de leurs efforts, leur idée fixe pourrais-je dire, qu'elle les a poussés à suivre tout Condottiere qui voulait se donner la peine de la promettre, de Arnaldo da Brescia à Giovanni Médici delle bande nere, de Cola di Rieuzo à Jules II, des Borgia à Pie IX. Bonaparte connaissait l'ancien esprit de l'Italie, quand il écrivait dans ses mémoires : " L'italie sera tonjonr~ prête à suivre celui qui lui criera: ltalia, ltalia ! " Seulement, il ne connaissait pas l'avenir de son sièele. Il ne savait pas que les peuples, après avoir suiv~ ceux. qui flattaient leurs instincts en les trompant, auraient mieux aimé marcher par eux-mêmes à leur volonté, sûrs dU moins de n'être pas trompés. Cependant les événements de 48 auraient donné raison au Corse , si Veni!e et Rome n'eussent montré au monde la différence entre l'Italie du XIXe siècle et celle des siècles précédents. Alors E:lleétait vraiment à ceux qui l'appelaient par son nom de Nation : aujourd'hui, elle veut être à elle et avoir son nom entre les nations. Elle était alors un instrument dans les mains de ses maitres, de nos jours elle a voulu se servir de ses maîtres comme d'un instrument fJU'elle a b.rieé dès qu'il ne servait pltts. Il a fallu une coalition européenne pour réunir les débris épars des trônes italiens et lee remettre à leur place. Que l'Italie ss lève encore une fois et elle en fera un feu di joie. La monarchie est une plante morte, soutenue par la force, elle fait ombre, mais n'a pas de racines. Une fois abattue, le sol en sera à jamais débarassé. Otez les princes, vous n'aurez qu'une Italie. A Rome, à Venise où il n'y avait plus de monarchie, ~tait-ce les Romains ou les Venitiens qui défendaient leurs clochers? non, c'était les Italiens de tout le pays qui combattaient ensemble pour leur cause à tous, c'est-à-dire l'unité nationale qui, basée sur le principe républicain, se rattachait ainsi à la solidarité humaine. Sous la monarchie piémontaise au contraire, les Toscans étaieut laissés sans secours à Curtatona, les Romains abandonnés à Vicenza, les Na poli tains se retiraient de la guerre, et lt-s Lombards eux-mêmes, qui nourissaient l'armée piémontaise, mouraient de faim dans les plaines de la Lombardie et sur les montagnes du Tyrol. Beaucoup de gens s'effraient de la jalousie des grandes villes italiennes qui aujourd'hui capitales d'Etats ne voudraient pas descendre au second rang ; c'est à tort seloa moi ; et il serait pins raisonnable de s'inquiéter de l'ambition de certains individus de ces villes qui dans uu cercle restreint peuvent espérer une influence à laquelle ils n'oseraient prétendre dans un rayon plus étendu. Après Londres et Paris n'y a-t-il donc pas de grandes villes en France et en Angleterre? Et ces villes ne sont. elles pas plus riches, plus heureuses que nos grandes cités d'Italie ? Nos capitales lilliputiennes et désertes comprennent cela parfaitement; elles tiennent peu à leur rang. Ce qu'elles ambitionnent, c'est la prospérité qui leur manque et qu'elles ne peuvent attendre que de l'unité nationale. Elles pourraient avoir peur d'une Capitale, monarchique, d'une capitale centralisatrice, d'une capitale dominatrice, et c'est pour cela que je ne crois pas à la possibilité de les tenir souwune monarchie quelle qu'elle puisse être; la République le peut, conservant à chaque commune sa vie particulière pour que chacune apporte sa' part d'action à la vie nationale. Et dans tous les cas, ces villes fussent-elles assez dépourvues de sens pour ne pas comprendre leur propre intérêt, de sentiment national pour ne pas servir l'intérêt général, de principes de justice pour nier le droit, que sont-elles donc ? Que représentent-elles ? Une partie minime de la population. Leur vote serait anéanti par celui de la grande majorité du pays, p:.tr le vote de ceux qui jusqu'ici ont souffert de l'oppression des petites capitales, qui n'ont qu'un désir, celui de reconquérir leur vie avec la vie de la Nation. Demandez aux Palermitains, aux Bolonais, aux Genois; ils vous répondront : nous ne voulons être ni Napolitains, ni Romains, ni Piémontais, si nous ne sommes pas une nation, qu'ou nous laisse être ùes municipes. Une révolution italienne qni n'arriverait pas jusqu'à l'unité tomberait dans le municipalisme, et nous recommencerions notre histoire à six siècles en arrière. - Il n'y a pas de milieu possible et le fédéralisme ne peut être que le rêve de quelques ambitieux. Je dirai plus : une révo. lution fédérale, une révolution girondine sera toujours impuis•sante; elle ne toucherait que la surface du pays quand c'est au fond que se trouvent ses forces vives. Que la. Commime prenne la place de la municipalité, et la Nation prendra la place des Etats ; que la Volonté Na.- tionale soit substituée à l'Autorité, et les intérêts des individus remplaceront ceux drs Capitales; qu'on détruise la Centralisation gouvernementale en fondant l'Union natio. nale, et on aura }'Accord au lieu de l'Antagonisme; que la Liberté, en un mot, succède à !'Oppression, et la prospérité remplacera la M1sère; et les intérêts de l' Avenir prendront la place dei; vaines gloires du Passé ! La Révolution Italienne est là, et elle ne peut être ailleurs ; u11itaire par sa nature, par instinct, par intérêt, elle ne pe11t être nationale qu'à cl'!tte condition. De tout ce que nous venons de dire il résulte que l'Italie est prête autant que toute autre nation, pins peut-être que bien d'autres, à apporter à la Révolntion son contingent 11ationalunitaire pour la formation de la grande famille européenne. Il serait au moins extraordinaire d'exclure l'Italie de la ligne des autres nationalités parce qu'elle n'a pas encore commis les mêmes fautes que les autres. C'est une loi de solidarité, une loi de justice à l'ace,omplissement de laquelle rien ne peut s'opposer, que les fautes ou les erreurs d'une partie quelconque de l'humanité profitent comme expérience non seulement à ceux qui les ont commises, mais aussi aux autres. Et croyez-vous que l'Italie ne sache pas aussi bien que l'Angleterre elle-même que l'époque la plus glorieuse clel'histoire de ce pays s'appelle la République et Cromwell? Croit-on que nous ne sachions pas ce qu'a été pour la France et pour l'Europe le régime constitutionnel des dix-huit ans ? Pourquoi condamner l'Italie à passer par ce régime bâtard, démoralisateur? Elle eu a goûté en 1848, elle sait ce que cela vaut, elle en go(He encore, A Naples, il s'appelle le 15 mai, à Rome l'inquisition, en Lombardie le bâton, et en Piémont la bataille de Novarre et le bombardement de Gênes. L'Italie sait ce que vaut le régime répnblicain formaliste, elle l'a vu aboutir aux journées de juin 1848 et à celles de décembre 1851 ; elle en a senti les griffes au siège tle Rome et ne l'oubliera pas, Oomme à la Franee, •

l'expérience lui a profité en théorie et, qnant au fait, quand toutes les deux sont martyres, il n'y a qu'à respecter le malheur! Ne redoutez donc point qu'une. révolution italienne puisse s'arrêter à un régime constitutionnel, à une République ùoctrinaire. Le premier pourrait lui être imposé par des combinaisons diplomatiques, mais n'aboutirait ni· à l'indépendance, ni à !'Unité; il n'aurait l'appui que des faiseurs du pays, et trouverait les masses i11différentes, antipathiques; ce ne serait pas une Révolution, ce serait un malheur pour l'Italie, peut-être un temps d'arrêt. L'avenir de la Révolution resterait le même par les besoins, les tendances, les résultats. Une République formaliste C'sttout simplement impossibl 1 1 en lialie. It n'est peut-être pas au m~nde un autre pays dans lequel le principe de l'a\ltorité soit plus antipathique, j'en appelle sur ce point même , ux étrangers qui la connaissent un peu, On y subit, comme partout ailleurs, !'.autorité, mais bien loin de la respecter on la rnt'.!\lrise, loin de la haïr en secret, on s'en moque publiquement, à Milan comme à Veuise, à Bologne comme à Rome, à Florence comme à Naples. La police elle-même n'ose pas poursui\Te les lazzis, les pasquinades. La satire court aussi bien les cafés des grandes villes que les petits cabarets <les villages : on la trouve au Corso comme aux champs, sous les portiques des prétoires et sous les porches des églises. Elle règne partout, et le monde officiel est obligé de la subir. C'est une pauvre vengeance,· dira-t-on. J'en conviens, mais, de là au re!'pect qu'on a ailleurs pour l'épaulette, la toge et l'habit brodé, il y bien loin. Dans CES pays-là, otez la force matérielle, et un gouvernement pourra se soutenir par la force morale, mais en Italie au contraire, otez la force m .téri~llc, et rien ne restera pour soutenir l'autorité, c'est pourquoi toute forme de gouvernem~nt qui ne serait pas une République vraie, c'est-à-dire l'expression de la volonté nationale, tomberait en moins de huit jours. • L. PrANCIANI. ( La suite att prochain numéro.) Mon cher ami, Londres, 20 novembre 1854. Votre journal, qui pi:épare des documents à l'histoire de ces jours malheureux, vient d'enregistrer l'humiliante rétractation exigée de .N apoléon III par un c1mbassadeur républicain. L'Europe a vu ce despote insolent plier le genou devant un citoyen libre, et courber l'échine sous le fouet. • C'est l'expiation qui commence! Les Peurs, filles du Crime, se sont emparées du livide empereur qui n'Qse franchir, dit-on, les grilles de Saint-Cloud; son âme troublée n'a plus de repos; son œil hagard voit, partout, flamboyer le. glaive d'un Harmodius; - et, une 'ferreur qui s'alimente de la sombre évocation <l'un passé toujours présent, marque <les victimes jusques dans les rangs d'un peuple voisin. Là, comme chez lui, Bonaparte fait exercer par de vils agents l'ignoble profession que créa, sous Tibère, Crispin us Cepio; - là, comme chez lui, l'homme de Décembre a trouvé, sous les toges noires et rouges, d{>s instruments dociles à ses haioes. C'est que le Jésuitisme, dont l(•s sinistres réseaux étreignent la Belg·ique peuplée de sduta11es et de capuchons, possède, au sein de la magistrature et des administrations belges, de nombreux affiliés, auxiliaires naturels de tout despotisme. L'histoire humaine proclame l'éternelle complicité des Religions et des 'ryrannies, deux lugubres s'œurs qui vivent de la sueur et du sang des Peuples. • L'llOilME. Afin d'assurer l'éphémère succès du Crime, Bonaparte favorise le triomphe impossible de l'ignor<1nceet de la superstition si chèrPs aux prêtres et à tous les parasite5-vampires d\mt f•lles soutiennent les grasst>'-rrébc>11df>est les priviléges homicides;- aussi, la Rt,lig-io11 convre-t-elle de son voile vlirial un complot qui ne dis-;i,nule pas so11but: l'anéml!isseme11tdes lulllières et de la Liberté, par le r0 nverseme11t de toute idée de momie Pt par la dPstruction de tout principe de justic('. Grâces au ténébreux eorieours de ses noirs alliés, Bonaparte rencontre, pa mi certains <lignitairf's <l'outre-Quiévrain, une si abjf-cte servilité, qu'il lt>urapplique, assure-Hm. comme à tous ses fonctionnairPs impériaux, ces paroles de Tibère ;..iu :-,énat romain : " Combien ces hommes-là so11t •· faits pour la servitude!" Mais un f>Xemple va prouver qu'en ohéissant à one émulation <le bassesse, t011 est sans.limites dans ses égan ments. Suivant les ordres, de César. -· Léopold venait d'expulser Charras; le Peuple belge protestait et s'indignait; l~s flots de l'indignation publique soulevée par ce nouvel acte de bas vasselage, montaient jusqu'au roi, et l'atteignaient malgré sa chimérique irresponsabilité. Il fallait donc appaiser les murmures, trouver I 't d une excuse, et se menager un pre exte e concession-. nouvelle; à l'insatiahilitb du maître. Or, la fü:•lgique, ci1 se réveillant, un matin, apprit qu'elle venait d'être sauvée : on a découvert une affrt>use conspirntion ; on a saisi des machines et des arsenaux mystérieux; les conspirateurs sont arrêtés. En même temps, on murmurait, à dPmi-voix, des noms de proscrits ; les journaux salarié:. rapprochaient de cette. conjuration terrible l'1·xpulsion de Charras, - et, se mêlant à cP.schœurs infâmes, le Moniteur-Calomnie demandait que tous les proscrits fussent éloignés du continent. Les jours s'écouleut, et l'instruction se prolonge; l'embarras des juges-instructeurs est à son comble; - la conjuration s'est évanouie, et les conjurés sont quatre pères de famille, paisibles, jouissant de l'estime publique. Les arsenaux et les machines se réduisent. à huit boites pareilles à de gros œufs. La iustic~ du vieux monde, vous le savez, se déclare infaillible; elle n'a jamais tort. Impuissante à formuler une accusation contre les quatre victimes d'une délation affreuse, elle s'ingénie à transformer 'ces boites vissées et trouées, en armes que la loi prohibe. _ Notre grau<l moraliste aura éternellement raison: Rien n'est plus dangereux qu'un imprudent ami, Mieux vaudrait m1 sage ennemi. En effet, après de long-s essais, lt>s valets Bruxellois eurent une infei-nale pensée : ils hérissèrent <lepistons les imÎoce11teshoitf's, et soumirent à des expériences leur proprP invPntion. N ôn contents d'exposer à tous les regurds ce hérisson de foute, d'en glorifier la puissance et d'en indiquer l'emploi, les magistrats belges firent sav,Jir à leur empereur qu'ils avaient sauvé sa précieuse vîe. César envoya un de ses procureurs et un de aes policiers au pro~ès; ils y occupèrent les deux places d'honneur. Le réquisitoire ne sent que la nauséabonde apolog·ie de " l'auguste souverain à qui l'Europe doit '' le maintien si compromis de la religion et de la "famille."' Aimi, parlait, sans rougir, un substitut à la chevelure rousse, au cràno étroit, à l'œil fauve. Il se nomme Heudrick; il flatte ses chef.-;, cultive les prêtres, porte jusqu'au fanatisme la haine du prooTès ·, c'est lui qu'o11 choisit toujours pour soutenir i-, , ~ les causes recommandees. Da11scelle circonstunce, il a voulu, d'un seul hond, dépasser les Laubar<lPmont civils et les J Pffries éperonnés de Décemhre. Il a rfproché à M. I' Argentièrt>, l'un des prévenus, le crime de L'lw~pitalité; 011 noyait e11te11dreun arrêté signé Fririon ou Eynard, et daté des Busses Alpes ou de l'Allier, p<'11da.ulta ch-,sseaux hommes, dt; 1851. Le cléricclli~me voulait frapper aussi un homme qui, depuis vi11gt-ci11q ans. lutte pour réformer l'instruction publique empoisonnée dans sa source; Fourdrin voyait prospérer ses élèves, dans l'amour du bien, du b.-,au, du vrai, dans les pratiques de la moralt> h11ma11i1aire;- LPs p•·êtres out réclamé sa ruine : ils l'ont obtenue. Salut fraternel, Hipp?lyte MAGEN. L'Autriche, la PrussP et la Rnss:e ~chang-ent force N ot.=>dsiplomatiques. L' L\utriche est menacée en Italie par L.1 jeune Italie._ au dire des feuilles anglaises; - et Louis Bonaparte réduit sa garnison, à ltome, à 3,000 hommes. r,omme pour menacer l'Autriche si elle ne prend parti pour les Alliés. Lea Etats-Unis continuent à faire peser leur influence sur les gouvernements européens. Yoici que l'Ang-leterre abandonne, dit-on, son protectorat de l'Etat imag·inaire, dit Royaume de Mosquitos, vers !'Isthme de Punanrn; c'est céder la place à la puissunce républicaine. On prétend aussi que la France et l'Angleterre sont favorables à l'annexion de Cuba aux EtatsU nis, moyennant beaucoup de millions payés à l' Espao-ne, laquelle en ferait profiter ses créanciers. L'a~semblée Constituaute de Madrid a élu pour Président le vieux général San Miguel. Le parti progressiste domine dans l'Assemblée, mais il se• divise, la fraction radicale ayant voté contre le général San Miguel. - Une amnistie genérale a été . promulguée. Les tribunaux Danois ont acquitté les journaux mis en accusat.iou par le ministère. A l'occasion de l'anrâversaire 'de la Révolution polonaise (29 Novembre 1830), les proscrit~ républicains de toutes les Nations sont prévenus qu'une réunion aura lieu ce soir, 22 novembre 1854, à 8 heures précises, dans le local du citoyen E. Beauvais, 20, Don Htreet, à Jersey. Albert Sc111111Tz, Proscrit polonais. Les souscripteurs au journal !' Homn~e sont avertis que la SECONDE ANNEE du Journal commeucera le Ier Décembre 1854; partant, l'Admi.-istration prie les personnes qui désireraient reuouveler leur abonnement, d'en envoy.er immédiatement le prix d'av1-1nceà l'c1dresse indiquée, AFIN D'ÉVITER TOUT RETARD dans l'{>nvoi du journal pour le nouveau terme. - Les conditions ci-dessus sont i11dispt;11sahleset doivt:>nt être remplies, - autrement les Abon11és s'exposeraient à la cessation de l'envoi du journal. JERSEY, DIPRD1ERIE UNIVEllSELLE, 19, DORSETSTREFJI', POUR P ABA.11.TBE PilOCHA-INEJJIEN~~: 1 ILII 1 H DEL'EXILP.OUR 1855. Cet Almanach, formant un volume de denx cents pagPs, petit texte, paraîtra dans le dernier mois de l'année. Les articles déjà sous presse sont signés : -Victor Hugo, Louis Blanc, Félix Pyat, Charles Ribeyrolles, V. Hug·o fils,_ A. Vacquerie, Co_lont-1 Piaut:iani, Colo ..el 'l'elek1, A. Ruge, C,tha1g11e, Faure, Bi ..nchi, Berjeau, Duverdier,Karcher, etc. dans le mois, à la Librairie Uuiverselle de Jersey, 19, Dorset :5:reet, ~a,ut-Hélier, recevront, aussitôt I' Almanach paru, selon leurs demandes. Les libraires et les citoyens qui s'adresseront, PRIX : 1 8HILLING (l fr. 25 c.) AVIS. GUTEL PROSCRITDU 2 DÉCEMBRF., jale n:i~I: avantage d'unir l'élégance, la légerté et en plâtre, eu cire, en mastic et en gélatine sur 1n•oiess~11~· de t•ou1,e la sol!d1te. . . nature morte Oll ~ivante. Tailleur d' liabits.-'l.9, Belmont Itoacl, St.-Hél1er, Les semelles so~t- ~xé_es_a~~c d~1la1to)1_et, ne Il _monqe,aussi le,s orne1_nents, les statues et J laissent aucune aspenle n1 a l mténeur m a I ex- 1 fournit des epreuves a uu pnx modéré.--20, Don- ------------------ ersey. , 0 h ' I' . , 1 t .:, Hél' A. BIANCHI fi'.~ 0 :;:/:, ~t~~~1!~; térienr. - n peut marc er a eau sa11snuire a a s reet, ..,t.- 1er. LUD, KORDECKI, soltdité de la chaussure. J en chef pendant huit aas du journal quotidien le ltfessager du Nord. PTIOSCRITPOLITIQUE POLONAIS, paraissant à Lille ( Fran.ce), <1,on:icà ù_omicile, <~cs Don_ne à_domicile cles leç~ns Je langu_c _Allema11dt leçons de langue franç~1se, cl anthmét1quc, cl lus- ~t. Latine; il démont_re al:ss1 1~ Gym1rnst1q11;· . toire, de géographie, de littérature, etc. 1\1. Lud. Kordeck1 dés1reraJt ~rouvcr de I nnplo1 11 se charge également de toutes correspon- comme professeur dans une pcns1011. -61, N ewmall ,hnces, écritures commerciales et antres, et de~ Street, Oxford Street.-Lonclre~. ---------- ml!,noires dont on lui confie la rédaction. 15, COLù~lllERIE S';RCET, ST.-Hf.LIER, JERSEY. -------------- EDOUABRIDFFI, PROSCRIT ITALIEN, Donne des leçons de langue italienne. s•adresser, 20, Don Street, Saint-Hélier. S'adresser au professeur, 20, Don-strcet, St.. GUAY ) D' b f; • r Ué'ier (Ile de Jerse ) proscrit du ~ ecem re, a1seu ••• • I~Jé-enccs chez YÛM. Wellman, P. Aspic! • ,de HOTTES sans couture, pour AlPHONSE moulenren Elâtre, se charge Oee. \'îckery. ·:1ontnies et pom dante!. - Ce geare <te ehau~i1ure ' I , de tlJt'lte esI"'ee Ile moulare HOrrELDEL'ELROPE DON STREET, No 11, TENUPARG.ROUSSEL, G. RoussEL a l'honneur de prévenir MM. les voyageurs qui ·viennent visiter cette île, soit pour agrément, soit pour affaires, aussi bien qne les habitants de cette localité, qu'iis trouveront dans son Hôtel, bonne table, bons vins, et tous les soina, ainsi que tous renseignements possibles. ~ Table J'Hôte à 10, 1 et ~e1m~.-R~~s l foute .-t'nfr:--11 ~nt au~,i e• ville. ·'

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