DISCOUR D 1 PRONONCÉ LE 27 SEP'l'EMBRE 185-1, 'SU-LRATOMDBUECITOYFENLIBXONY, ·N ons avons à Jersey, dans la .campagne, un ,coiude terre isolé pour enterrer nos morts : quelques fosses au cimetière <les Indépendants, voilà notre ,v estminster, notre Saint-Denis. Nous y avons porté, mercredi dernier, notre ami Bony, sans autre faste, sans autre guipure que notre cher drapeau d'exil.. Mais si nos tombes sont modestes et, bien pauvres nos funérailles, nous avons pour honorer nos morts <les paroles d'adieu, comme il n'èn tombera jamais sur le cercueil des rois! C1TOYENS, Eneore un condamn€ il mort par 1'"xil qui vient <le snliir sa p1,ine! Encore un qui meurt tout jeune, comme Hél:n, comme Ilons11uet,comme Louise Julien, comme Gaffoey, comme Iz<lehski, comme Cauvct ! F~lix Bony, qni est dans cette bière, avait vingtneuf ans. Et, chose poignante! les enfants tombent aussi! Avant ,l'arriver à cette sépulture, tont à l'heure, nous nous sommes arrêtés devant une autre fosse, fraîchement ouverte comme celle-ci, o·ù nous avons déposé le fils de notre compagnon d'exil Eugène Hcanvais, pauvre enfant mort des douleurs de sa mère et mort hélas! presque avant d'avoir vécu l ' ' Ainsi, clans la douloureuse étape que nous faisons, le jeune homme et l'enfant roulent pêle-mêle sous nos pieds dans ]'ombre! Félix Bony avait été soldat; il avait subi cette monstrueuse loi du sang qù' on appelle ·conscription et qui arrache l'homme à la charme, pour le donner au glaive. , Il avait été ouvrier; et, chômao·e, maladie, travail au rahaiR, exploitation, marchandage, parasITisme, misère, il avait traversé les sept-cercles de l'enfer ckt prolétaire. Comme vous le voyez, ect homme, si jeune encore, avait été éprouvé de tous les côtés et l'infortune 1'avait trouvé solide. ' Depuis le 2 décembre, il était proscrit. i'ourquoi? pour quel crime ? Son crime, c'était le mien à moi qni vons par!P., c'était le vôtre -àvous .qui m'écoutez. Il était républicain dans une république; il croyait que celui qui a prêté un s1:;rment doit le tenir, que, parce qu'on est ou qû'on se croit prince, on n'est pas dispensé d'être honnête homme, que les soldats doivent obéir aux Constitutions, que les magistrats doivent respecter les lois; il avait ces idées étranges, et il s'est levé pour les sontenir; il a pris les armes, comme nous l'avons tons fait, pour défendre les lois; il a fait de sa poitrine le bouclier de la Constitution; il a accompli son devoir, en nn mot. C'est pour cela qu'il a été frappé; c'est pour cela qu'il a été banni; c'est pour cela qu'il a été " condamné," comme parlent lesjnges infâmes qui rendent la justice au nom de l'accusé Louis Ilona parte. Il ~s~ mort; mort_ de nostalgie ·con:me les autres qui l'ont précé<lé1c1,mort d'épuisement, mort lom de s-a ville natale, mort loin de sa vieille mère, mort loin tle son petit enfaut. Tl a a"onisé, car l'agonie commence avec l'exil, il a agonisé trois ans~ il n'a pas fléchi une heure. Yous l'avez tous connu, vons rous en eonvenez. Ah! c'était un vaillant et ferme cœur ! Qu'il repose dans cette paix sombre! et qu'il trouve du moins dans le sépulcre b réalisation sereine de C•! qni fut son i:léal pentlant la vie. La mo1·r, c'est la grande fraternité. 0 proscrits, puisque c'est vrai que cet ami est mort, et qne voilà encore un de!' nôtres qui s'évanouit dans le cercncil, faisons l'appel dans nos rangs; serrons-nous devant la mort comme les soldats devant la mitraille; c'est le moment tic pleurer et c'est le moment de_ sourir:; c'_est_ ici la Pâque suprême. Retrempons ,notre conscience repubhcame, retrempons notre foi en Dieu et au progrès dans ces ténèbres où 0nous descendrons tous peut-être l'un après l'autre avant d'avoir revu la chère terre de la patrie ; asseyons-nous, côte à côte avec nos morts, à cette sainte cène de l'honneur, du dévouement et du sacrifice; faisons la communion de la tombe. Donc l'ai~ de la proscription tue. On meurt ici, on mr:nrt souvent, on meurt s;i.ns cesse. Le proscrit lutte, résiste tient tête s·a~sietl au bord de la mer et regarde du côté de 1'aFrance e~ meurt. Les autres après lni continuent le combat; xeulemen~ la brèche cle l'exil commence à s'encombrer de cadavres. Tout est bien. Et ceci (montrant la fosse) rachète cela (l'orateur étend le bras dtt côté de la France). Peudant que tant d'hom+ mes qni auraient la force s'il voulaient, acceptent la servitude et le_bât sur le~ cou, subi~se_nt le triomphe du guet-apens, litch~ tnomphe et !ache soum1ss10n, pendant que les foules s'en vont dans la honte, les proscrits s'en vont dans la tombe. - Tout est bit!n. 0 mes amis, quelle profonde douleur! Ah! qne dn moins, en attendant le jour où ils se lèveront en attendant le jour où ils auront pudeur, en attendant le jour oh ils auront horre~r, les pe_uplesn:aintenant à terre, les uns garottés, les, a~tre6 abrutis, ce qu1 est pire, les autres prosternés, ce qui est pire encore, regardent pa1>ser, le front haut dans les ténèbres, et ~•enfoncer en silence dans le désert de l'exil cette fière colonne de proscrits qui marche vers l'avenir, ayant en tête des cercueils! ~•avenir. Ce mot m'est venu. Savez-vous pouquoi? C'est qu'il sort natnrellement de la pensée <lans le lieu mystérieux où nou_ssommes; c'est que c'est un bon endroit pour regarder l'avenrr qne le bord des fosses. De cette hauteur on voit loin dans la profon_deur divine e~ loin dans l'horizon humain. Aujourd'hui que _laLiberté, la Vénté et la Justice ont les 111c1inlsiées derrière le _dos et soz:it battues de verges et sont fouettées en place publique, _la Liberté p~r les soldats, la Yérité par les prêtres, la Justice par les Juges; aujourd'hui que l' ldéc venue <le Dien est suppliciée, Dieu est sur l'h0rizon humain, Dieu e:;t PROSCRI'f FRA.NÇ'AIS, MORT A JERSEY. sur la place pnhlique où on /e fo~ettl', et l'on peut <lire, uni, l'on peu_t dire qu il souffre et 'Ill il saigne avec 11ous. On a donc le droit de sonder la plaie humaine d,ms ce lien des choi:es éternelles. D'aillC'ms on n'importune pas la tombe, et smtout la t~mhe <lesmartyrs, en parlant d'espérnnce. Eh bien! je v:it1s le d_1~e,_t t''cst smtout <'.u haut de cc tahis fünèhre qu'on le voit d1stmctement, espérez ! fi y a p,!rtout de~ lueurs dans la nuit, l~eur en .Esp1g11e, lueur en Italie, en Orient clarté; ineen<lie, <lisent les myopes de la politique, et moi je dis, aurore! Cette clarté de l'Orient, si fail,le encore, c'est lit lî:iconuu, ?'est là le myslèïe. Proscrits, ne la quittez pas des yeux u11 seui rnstant. C•e~r lù que va se lever l'ave11ir. Lais~·ez-111oi, avec la graYité qui sied ('11 pré,enrc cl~ l'auditeur funèhrc qni est hl (/'oraf1,11r 111011/re le l'e,-. uril). lai;i~cZ-!t10i rous parler tles évé11ernc11tsqui s'accomplis,e11t et d(•s événements q1:Î se prrpare11t, librl'lllent, à cœur ouvert, comme il convient à ce;1x 'J1~isont sùrs de l'an'nir ..étant sîi:·s du clroit. On nous dit , 1nelq11elo1s: - prenez garde. los paroles sont tron hanlies. Y ons llHlllqn_cz d; prn,_le11ce.- E~t-ce qu'il est q0urstion de pru,lt>n't'e a11,1011rlc1l111?il est qnestl()ll de courage. Aux heures de latte à corps perclu, gloire à ceux qui ont ,]es paroles sans p1écautio11~ et des sabres sans fonrrea11 ! D'aillC'ms lê's mis sont entraîné~. S'.lyn trnnqnillcs. li y a deux faits dans la situation préae11te: une alliance et ~ne g·ucrre. Q;,e uous veulent ces t!eux faits? -L'alliance? -_j'enco1Hiens, nonsJregardons pour l'instant sans cnthou~iasme cette apparente intimité entre Fontenoy rt '\Vatcrloo <~'oùil se'.nhl~ qu'.il.soit sorti une espèce cl'A:!glÔ-Fr:rnce; nous, la1~s_ons,.temoms froids _et muets <)ecc spectacle, Je chœnr haua I q111suit tous les cortegcs et qm se g-ronpe 11la pottc (1e ,tous f('S succès, chanter des deux côtés de la 1fanch~, en se renyo_y:,nt les stroph0s de P:iris à Londres, cette alliance admirable grâce à laquelle se promèaent aujounl'hui au soleil le chasseur de :-7 mce1~nes b, as dessus bras dessous avec le rifle-guard, le marin !ranç:11s bras dessns bras dessous avec le marin auglais, la capote hlcu~ bras dessus bras des.:-ons avec l'habit rouge, et sans cloute aussi, dans le sépulcre, :::,a.;poléon bras dessus bras dessous avec Hudson Lowe. Nous s0111mesc~lme~ devant cela. :\fais ']11'011 ne se méprenne pas sur no~re peusee. ::'\ous, ~omme_s de France, nous ~.imons les hbon:!1 1 cs 1 • clAngleterre d; les ,li~ncs J111llles011vertes tlout 011 bar1 ol_t111_ C er mappemon e~\l~Iex1stt!nt pas pour nous; no11s répuJ 1cams-c e1!1ocrates-soc1< 1stes, nou, répudions en rnêrne tem s que 1 les clo_turc 1 s dc 1 caste_~ caste ces pr(jugés de peuple\ pcnp e sort1_s ( es p as 1111serables ténèbres <lù vieil aveugle1'.1ent hn_ma111; nous h?11?1:ons eu particulier cette noble C't !!br~ nation ?ng-la1s~Jn1 fa,t dans le labeur commun de la civi- ,!J<;at1do11 un 1 s1 m'.1g1:1111· 8 ti 1 ck'tra1"ail; nous savons ce que vaut ce gran peup e 1 _qlm a eu i_a-:spcare, Cromwell et Newton; nou~ -:sommes con 1a emcnt assis a son fof"r, sans !ni rien devoir . , , . ,. . , cai c est 11otrc presence <p11,a:t son honnenr; en fait ,le conco J, . . t 1• l • rc e, p111~q;1e e~ :i _ a ques~1on, n-0us allons bien au delà cl-e tout cc 'lue re,·ent h•g_d1plomaties, nous ne voulons pas seulement ]'al1,an,c~ de la l• rance ave,c l'Angleterre; nous voulons ]'alliance t1c I l•,mope avec elle-mcme, et de l'Europe avec ]'Amérique, et chi monde avec le monel<::!11oussommes le~ ennemis <lela o-nerre; nous ~.ornm~s les scmffre-douleurs de la fraternité; nous FOm~iie~les ao·it,~tems cl~ h lumière et de !a vi:; nous combattons la mort qui \at1,t lesdeèch~fau~lset la 1,n11qt ui trace les frontières; pour nous 1 _il y ~ s ,, prescnt qu un peuple• comme il n'y aura dans l'ave111.q- u un homm~; nous voulons l'harmonie universelle tl!lns le rayo11n:rnent mrn·er~el; et nous tous qui sommes ici, tou~ ! 1101, 1 tl~1111cnonsn?t.re sang: avec ~oie pour avancer <l'une heure Je jour 011sera donne le sub,111iebaiser <lepaix des nations! Donc. que les amis de l'alliance anglo-française ne pre 11nent p_asle cnange_sur n!esyaroles. Pins que qui que ce soit, j'y i1Js1_st!, n~us. republ 1c;'.ms, nous voulo11s ces alliances; car, je le rcpcte, 1 union parmi les peuples, et, plus encore l'unité dans l'h ·t, ' l' ' umalll c, c ~st. a notre ·symbole; mais ces unions, nous les vo~iloas pures, rnt1m~s, profondes, fécondes; morales pour qu'elles soient redle~, honnetes_ P?t~r qu'elles soient dmables; nous les ·voulons fondees sur les rnter_et_sans nul doute, mais fondées pim encore sur !outcs le~ fratcrn1tes du progrès et de la liberté; no, 1 s voulons quelles soient en quelque rnrte la résultante <l'une majestu:~1se_marche an;icale dans la lumière; nous les voulons sans humd1at1on d'un coté, sans abdication de l'antre, sans arrièrepensées P?ur_ l' aYenir, sans spectres d:ins le passé; nous trouvons <jlle le_ 11'.cpn_s~ntre les g?uvernements, même difsinrnlé, est un mauvais mgre(Î!ent pour cimenter Pestime entre les nations; en un mot, nous Yotdons sur les frontons radieux ,le ces alliancC's ile peuple à peuple cles statues de marbre et non cles hommes de fange. ~ oas voulons <les fédérations signées '\\'ashington et non <les _plii.trag<'ssignés îlonaparte. • • Les ,t!liances co1rpne celles 'Ille nons voyons en ce moment 1 • ' ·nou\ es croyons manv_a1scspour les deux parties, ponr les deux penpws que nous ad1n1rons et que nous aimons, pour les deux gouvernements dont nous prenons moins de so11ci. Sait-on bien ce qu'on veut :ci, et sait-on bien ce qu'on fera là ? Nous disons qu'au !'one!,des <l~nx côtés. 011se cléfie quelqne pcn, et qu·on n'a pas tort;_ nons '.lisons à ceux-ci qu'il y a toujours dn côté d'un • marc~and l'affai~e- commerc~ale, et nous disons à ce~1x--làqu'il y a IOUJOUrsdu cote d'un traitre la tra11ison. Comprend-on maintenant? Autant l'alliance bâclée nons laisse froids, autant la o-uerre penrlantc nom émeut. Oui, nous considérons avec un in~xprimable mé!an~e <l'espérance et d'angoisse cette dernière aventure des m?n~rch!~> ce coup cl~ _tête pour une clef qui a déjà coÎJfé 1ks n11ll101~s u. or et tle~5_m11liers <l'l!?mmes. Guerre <l'intrigues 1 pins .. encDJe que <lemelei::s, oi\ les I ures sonr de pins en plus };éro1q_ues, où le Deux-Dccemhre est de plus en plus lâche, où 1 ,\utrwhc est <le pins en plus rn~sr: p:uerre menrtrièrt snns coups de can.0:1, où ?ior.vapl:mt~ sold:1ts, f:ls dr l'atelier et de la ch:mmÎL're, m<:'nrent mi,érahlemcnt, hélas! ~ans même qu'il sor:e <le l~urs pauvres ea<lnvres la Jimèbre au:-(•ole des b:1tailles ; g'.1erre où d n'y a pas encore _eu <l'autre vainq,1~ur que 1'1pes:e, ?n le .~yphn_sseul a_ pu puhh~r des bulletins, et où il n'y :t <'ll ,1u•qu 1c1 e)':\u~_terlitz eiue pour le choléra; guerre ténéhn:use. oh~cur;, ~lhjllWt_a, reculant<', fotale; guerre mystéricu~c 11ue ~eiix-~1 me-me qui la font ne co1~1prcnncnt p,ts, ta1i1 clic <'~t. pkinl' He_la 1~rov1de11c:; re<_loutahle cnigmc a.vcuglé111e11pio,C-,·p.1r leti 1·013et dont la rerolutwn seule sait le ~Hot! i A i'heurc où__nous ~0111mcs, il. l'instant préc-is ci\ je r,1r:e. "Il ee 111ome1itme;ue, cltoyrns, Li pér:pétie de cette s0mbrc ln::e s'ac·co!1iplit; l'avorte,11t·11t ,lt· la Haltique semhle n1·oir en soii etJ11trC'-coup de honte dans la 111er-:\Joire, et comme, aprè,: tou:, '.le ~e!syenples <1~1lea France et l'Angleterre ne pcn-,ent p11sêtre 111defin1m('nt et mipnnément humil;és dans leurs armées, 1~ <ll'- 110'.1emeut ?: ri~qne, la tentative ~e fait. Citoyens, cctlc guerre. qui a gante son secret devant Cronstadt, se déma,qrcra-t-.:11" devant Sébastopol? fi qui sera la chûte? à qni sera le Tc J)~um? personne ne le sait encore; mais quoi qu'il aJriw. proscrits· q1:•I q~e _soit l'é_1·énement, c'est le despotisme qui s'écronle, ·soit sm :-i 1colas, s;llt sur Bona_parte. C'est, je répète mes p:,roles d'il y ~ 111a1n, c est le ·supplice de ]' Emope qui finit. Le couµ qui s,· frappe dans cette mi1Plte même jettera h:is néces~airement dans 1111temps 1lo11néon l'emp2reur de la Sibérie, ou l'emnereur ,t~--- c ' ' 1· 1 ' • ayenne; .~ est. a < tre tous es cieux; car l nn de ces <lcux po-- t;aux clc I cchalaud des peuples ne peut pas tomber sans entraîner 1 autre. Cepenchnt que font les deux despotes ? Ils -somient dans le c~lme imbécile <le la misérable 'Omnipotence humaine; ils sou1;1ent à i':1~enir terrible ! ils s'endorment clans la plénitude diffo;·me et l11deuse de leur absolutis1-ne S3tisfait ; iis n'ont mêm(• p'.1sla fanta)sie des tristes gloires personnelles de la g·u~rre, si fa" ciles aux prmce'!.; ils n'ont pas même souci cks souffrances <le ces donloureuses multitudes qu'ils app<:llent leurs années. Pl'n. chut que, JJour eux et-par eux, des milliers d'hommes agonisent dan~ les ambulances sur les grabats du choléra, pendant que Varna b.-ule, pendant qu·?n écrase de boulets et de bon,bcs Silistrie, pendant que 1es s:1urngtmes de Bomanmncl répli:jue11t aux f~rocités de Sinope, taa<l1s que les tours sautent, tnnllis que les vaissraux ilamhoient et s'ahl,nent, tandis q•1e les "magasins de cadavres" des hôpi. taux russes rl'gorgcut, pendant les marches forcées de hi Doh1:u'.lscha, 1Jen_dant_les désastres de Kustendji, pendant qne de;; rc,.;1ments entiers tondent et s'évanouissent dans le hwuhrc hiYouac de Karvalik, qne font les deux czars? L'un prcn:l lc frai~ à son palais d'été; l'autre prenel les bains de mer à ·Biarritz. Troublons ces joies. V Peuples, au dessns des combinaisons, des intri,;ne~ et des -entente~, au <!essns <le-s <liplom,üies, au dessus cles 'gul:rrcs, an des~u~ de toutes les questions, que,tio!l turque, tpiestion grecque, q,uestion n:sse, au de~sus. de tout ce que les monarchies fout ou revent, planent les crnnes. Ne lai~sons pas prescrire la protestation vengeresse; ne non~ laissons pas distraire du but formidable. C'est toujours l'heure d~ <l(re : Néron est là! On prétend que les générations oublient. E1J l>1en! po_ur b sainteté 11,ême du droit, pour l'honuem même de la co11sc1encc humaine, les l'it:times noug le demandent, les martyrs no 11s ic "rient du foncl ile leurs tomhea.ux, ravivons Ici sou- .vcnirs, et foiso11sde tonte~ les .mémoirrs tics ulcèr~s ! 0 Peuples, le lugubre et ;nen,çant acte d'a<'cus:1tion, non ! ~1e novs la~sons jamais de le redire! En ce mome!lt ics an- ~ocrates et les _tyr~us th contimrnt triomphent; ils ont mitraillé ~ ~_:llerme, 1:11t1;J1lléà B_resc(a, mitraillé à Be1·liu, 1u-i-::rnil!~ a \ 1enne, milradlé à 1>ans; ils ont ful->iliéà Ancônt> fusillé ii Uolog11C•f,usillé ,l Rome, fusillé à Aracl, fusillé il Vi11een;1es, fn- ':ill~_au C·ham~-de~:i1ars; ils ont dressé le gibet à Pesth, le garote a :\ula;i, la guillotine il Ue!ley; ils ont expédié les pontons, en- ~·omlire les cachots, peupié l.,s casemate~, ouvert le~ onbliettes: ils on~ <lo'.wé au désert l11f~nction de bagne; ils ont app"lé ;l leur a1<l~fobolsk et ses neiges, Lamhessa et ses fièvres, l'îlot de !a :.[ère et soi? typhus ; ils ont confisqué, ruiné, seq11estré, spolié: 1!~ont pros~nt, bauni, exilé, expulsé, déporté; quand cela a été fait, q1~a11dils ont eu bien mis le pied ,rnr la gorge de l'hnmanitc, quand ils ont entendu son dernier râle, ils ont dit tout joyeux: c'est fini. Servez ! -- Et maintenant les voilà dans la 'salle <lu banquet. L;s y :voil_à,rninquems, enivrés, tout-puissants, cou .ronne en tete, lauriers au front. C'est le festin d2 la gr:incl noce. C'est le mariage rle la monarchie et du guet-apens,' de i royaut~ n _clel'assassinat, du droit rlivin ei <lu faux ~ermcnt, cl, ~01'.,ct e qu'd_s appe_llent auguste avec tout .ce qne nous appclon i_nfame; mar~age ]ll(l_euxet splendide; sous lems pieds est la fanfare ; to1tt_esles trahisons ~t tontes les lâchetés chantent l'épith, - lai~e. Oui, les despotes triomphent; oui, les despo'cs rayonnent; om, e_ux et leurs sbires, eux et leurs complices, eux et leur~ courtisans, eux et leurs courtisanes, ils sont fiers, heurenx, ~~nt<'_!1ts,~org~s, repus, glorieux; mais qu'est-ce que c~la fan a la .1ust1ec éternelle ? Nation& opprimées,· l'hcnre approchP. Rcg-anle~ bien cette ff:te; les lampions et les lustres s,>nt allumés, 1or~hestre ne s'inte!-rompt pas; les panaches et l'or et le~ cha111antshnllent; la valetaille en uniforme, en ~outJne ou en ~11~1~n·cse pr?sterne; les princes vêtus de pourpre rient C't se .fel1c1tent ;_ m~1s l'heure va sonner, vous clis-j,~; Je fond de h salle est ple,u d ombre; et, voyez, dans cette ombre. <lan, cet:c ?m bre fo1:midable, la Rérolution, coul'erte de ,plai~~- 1~a'.s ':1v~:ntc, batllonnée, mais terrible, ee dresse derrière e11x, 1 œd fixe sur vous, peuples, et agite dans ses deux nHins sangla_ntes au dessus de ieurs têtes des poignées de haillons arrnchees aux liaceuls de..~ morts ! '\'IVE LA RtPUBLWlJE C~,îVEilSELLI!\ !
RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==