Homme - anno I - n.38 - 16 agosto 1854

LA SESSIODNUPAilLl:MENT ANGLAIS. Ouverte au mois de février 1854, la session <lu Parlement anglais se ferme au mois d'août de la même année: 1[ aura duré six mois ce coucile, au milieu de la crise la plus formidable qu'ait vue notre part de siècle, - celle <l'une grnnde guerre, - et des plus sinistres fléaux qui puissent frapper Je_., peuples - la disette et le choléra, la peste et la faim. Quand des hommes libres qui représ~ntent une grande nation , se réuuissent pour délibérer en de si graves circonstances, quand ils out eu six mois pour étudier et pour conclure, - au· nom de la famille humaine qui n'accepte et ne compre.ud ni l'étranger ni le proscrit, - chacun a le droit de leùr demander compte. Ce droit est d'autant plus sacré, dans les jours que nous traversons, qu'il n'y a pas en Europe une autre consciPnce libre, une autre tribune ouverte, et que le Parlement anglais est la seule responsabilité, la seule dignité qui reste à la civilisation publique tombée, partout, esclave et baillonnée. La France ne peut pas parler: elle n'a plus que ~es trétea_ux où <les laquais, paradent, _quelques Jours à peme, et parlent entr eux, à voix basse, dans la note qu'a marquée le maître. - Dernier et s~nglant outi:age qui vient frapper. ce puissant g-éme, rebelle, 1l y a quatre ans à perne, à toutes les disciplines! L'Italie ne parle pas, ne peut pas parler, livrée qu'elle e1;t à tous les vaut,)Urs qui s'appellent des aigles ; l'Allemagne est une poussière d'idées, et l'Amérique est trop loin. Il n'v avait .donc, il u'y a doue que l'Angleterre. ~ Eh bien, qu'y a-t-il au registre, après six mois de séance et quand les intérêrs · les plus chers sollicitaient inquiets, alarmés, cette surveillance active, ces résolutions hardies qui étaient autre- .fois la relig·ion de Rome et qui tant de fois la · sauvère11t? Nous ne parlerons pas de la·chambre ·dei:Lords: c'est pr_esque une sinécure, comme la royauté dans les affaires de ce pays: on l'honore, ou la glorifié comme les statues: on respecte ses priviléges, ses pourpres,, ses sï,,stes, ses rhumatismes illustres, et on laisse courir les ·-petits Irlandais derrière ses •-voitures ; mais elle ne oompte pa3, elle ne compte plus, comme au temps de Pitt, quanèl, véritable Sénat patricien, elle était l'homme ·d'Etat, l'oraiteur et le banqn-ier des coalitions géantes contre la Ré\·o:ution française. Dans la période qui· vient de s'ouvrir, période • étrange, période nouvelle et par les alliances et par les dangers et par ies ennemis,-comme direction politique et comme conseil, elle s'est effacée. Qu'avait-elle à dire et que pouvait-elle faire? tous ses souvenirs étaient renversés, troublés comme ses sentiments. - On faisait alliance avec un Bonaparte, avec cet empire qui fut, pendant quinze ans, l'insulte, la guerre, la menace de mort, et qui rPvenait après le grand meurtre de SainteHélène ! On tendait la main à cette aventure, héritière des longs ressentiments, et l'on entrait en campagne contre qui? Contre la grande, la véritable armée des oligarchies et des couronnes sur le continent, contre la Russie, corps d'armée <le la vieille Sainte-Alliance! !.tes pairs ang·lais, hommes de la tradition, ne pouvaient suivre ces nouveautés dans lesquelles !!'engageait assez témérairement la politique du pouvoir, et s'ils ue se sont pas abstenus jusqu'au vote, s'ils n'ont refusé ni la confiance officielle ni les subsides, il n'en est pas moins vrai que leur attitude est toujours restôe froide, impassible, inquiète souvent. Nous parlons ici de cette majorité silencieuse qui ne fait ni l'excentricité ni le discours, mais. qui, par son poids ·et son nombre, gouverne les Assemblée::;, tandis que d'nutres font merveille sur les aîles et s'illustrent par la harangue ou l'épigramme. Y a-t-il, après tout, à s'étonner de ces résistances habiles et prudentes qui, s'adossant aux traditions, ne se laissent jamais entraîner dans lïnconnu des rélations et des affaires ? Les corps •politiques de forte expérience et de date ancienne • connaissent trop bien les retours rapides des révoJutions et les nécessités changeantes des fortunes mal assises, pour se Jivrer à la première aventure t>t ne pas réserver l'avenir. L' HOi\l!l E. Voilà 'po~rquoi l'aristocratie et la royauté britanniques ont été suspectées et même dénoncées, au commencement de cette guerre : voilà pourquoi l'on peut encore à bon droit douter de leur coïdial assentiment. - C'est une loi de la vie que de se défendre, et, la faute est au peuple qui garde certaines institutions, quand il les trouve eu travers de ses vœux et de ses destinées. Mais la Chambre des communes qui vient <le l'électiori et qui a tous les contrôles, la Chambre des communes, tutrice du peuple, aura du moins rempli sa charge dignement, éoergiq uement, et laissé denière elle le:1 grands actes qu'appellent les temps de Cïise ? Il y avmt, à son progr:-imme de cette année, des questions plaidées depuis villgt ans : on les a passées s01.s silence, pour ne pas troubler le travail ides diplomaties et I.Ps méditations guerrières des lords Pi:llmerston et Russeil. Ainsi, la réforme financière et commerciale, qui sous Peel marchait si vite et si hie11, ou n'en a point parlé pendant les six mois, sauf en un point, celui du cabotage. La réforme électorale dort avec monsieur H urne, son :vénérable président, et le juif Rotschild n'aura point l'heur encore cette année, d'aller s'asseoir aux Communes. rrout le mouvement intérieur des améliorations t d 'e ' t "t' • 'à 1 e es reiormes s es arre e : on ne pensait qu • a guerre! Mais, cette guerre, du moins, la Chambre des communes l'a-t-elle comprise, l'a-t-elle poussée vigoureusement, et comme savent le faire les assemblées qui out un sentiment profond du .péril et de l'honneur? On a parlé bas, très ·bas, sur cette questio::i de la guerre, dans la Chambre des communes : les ministres st'uls ont eu le verbe haut, et leur éloquence a rempli la sessioQ d'innocens anathèmes contre les ambitions du Nord. En fait, on a réalisé des armemens puissans, expédié des flottes formidables; mais on a perdu quatrP mois en négociations plus qu'inutiles; on a dépemé trois ou quatre cent millions, et l'on n'a pas encore ouvert la lutte! Après les négociations, "les temporisations ... et, puis viendra l'hiver... et puis, on se retirera, sauf à rf'commencer l'an prochain cette admirable campaglle qni pourra s'appeler dans l'histoire: Les promenades sur mer. La Chambre des communes a tout accepté, tout ratifié, tout voté sans débattre. Elle a douné les millions sans compter, et l'on peut dire que le gouvernement a11glai.;est aujourd'hui libre de tout contrôle, comme celui de France, où rien du moins, ni tribune ni presse, n'est resté debout pour jetP.r le cri d'alarme. En donnant,. ainsi, blanc-seing et pleins pouvoir.,, en se laissant proroger au milreu de la crise, la Chambre des communes, dit-on, a fait acte de patriotisme: nous disons-nous, que la Chambre des communes a trompé les espérallces de l'Europe. 1:,on silence au mil1e11du silence forcé des autres nations est plus qu·une faute : il ne s'agissait pas de discuter des plans de guerre, mais bien cle surveiller e. de_diriger la politique du gouvernement: on n'est une Assemblée sérieuse qn'à ce prix, et le peuple d'Angleterre s'apercevra bientôt, mais trop tard, qu'on l'a très mal engagé. Quand les peuples feront-ils eux-mêmes et par eux-mêmes • Ch. Rrn. Dans l'appel que vient de faire Mazzini, et dont nous avons rendu compte, il y u de tout un peu. Voici quelques lignes qui sont bonnes à méditer et que nous recommandons aux divers partis nationaux engagés dans la sainte cause de la République universelle. La France a ses royalistes qui se disent libéraux, comme l'Italie; la Pologne a son Czartoriskiprétend,rnt, et la Hongrie ses constitutionnels. - Tenons-nous en g-arde contre tous ces rôdeurs, et défions-nous des 'fausses alliances! Par suite du principe qui le gouverne , des traités qui consùuent son existence politique, de la diplomatie qui dirige ses mouvements, le gouverneme11t du Piémont est déshérité de toutP. initiative. La monarchie piémontaise peut, suivant ses desseins, aider et non provoquer 1me insurrection. Placé entre une insurrection Lombarde qui , abandonnée à elle-même , deviendrait républicaine et une agitation intérieure menaçante suscitée en Piémont par cette insurrection, le roi peut dire, comme, en 1S48 Charles-Albert, aux gouvernements européens : Je vais, appelé, en combattant l'Autriche, vous sauver, vous et moi, de la victoire d'un principe qui nous condamne; il ne peut dire : Je me constitue em·ahisseur par amour de conquêtes, sans déchirer les trait~s qui forment le droit public de l'Europe et gouvernent, prétend-on, même la guerre qui se fait aujonrd'hui. Le Piémont royal n'a que deux v6'ies à suivre ; ou s'ap. puyer sur le droit révoluiiom1aire, invoquer le principe national que nous invoquons nous-mêmes, déchirer la carte d'Europe, appeler à l'insurrection tous les peuples d'Italie contre quiconque s'y opposerait, renoncer à toute entente fraternelle avec les rois de l'Europe, affronter à la fois l'excommunication pontificale et les armes des pe. tits tyrans Italiens réunis, substituer notre drapeau au drapeau savoyard - ou s'appnyer sur les circonstances, sur la nécC:.'ssitéde mettre fin à une lutte qui brûle ses frontières, sur le frémissemrnt de ses snjets, sur le cri d'un pe11ple qui dit: venez, je suis ù v011s. Et qui peut, sans se déclarer insensé ou complice, affirmer que la monarchie Piémontaise suivra le premier parti ? Reste donc la guerre fondée sur les circonstances. Mais ces circonstances, il faut les créer. Il n'y a qu'un moyen, l'insurrection. Provoquez a\'ec nous l'insurrection Lombarde; provoquez en Piémont une agitation qui menace le trône, si le trône ne donne la maiu à l'insurrection ; moi Italien et non partisan de la famille de Savoie, je me tiendrai ~ l'écart, mais je vons comprendrai; sans cela, souffrez, ô fauteurs <le l'initiative royale, que je vous déclare insensés ou cornplices. Et cette initiative royale que pPut-on en espérer? Je parle aux hommes, républicains ou non, pe,u importe, qui réclament 1rne Patrie Italienne et non un simple agrandissement de la mon ..rchie Sarde. Espèrent-ils que le Piémont r0yal va se lever et combattre pour l'Italie? Espèrent-ils que le roi va, dans le même moment, rléclarer la guerre à l' Autriche, à Naples, aux petits gouvernements des Duchés, au Pape? L'initiative royale permise sous l'instigation et la clixcction presqu'inévitable des cabinets de France et d'Anglcter:·e - sans quoi crtte initiative royale est imposioible- n'aurait pour but, dans l'esprit de ces deux cabinets, qne de contrai1:dre l'Autriche, encore hésitante, à les seconder dans leur guerre contre le Tzar; dans l'esprit du roi de Piémont, elle n'aurait pour objet qu'un agrandissement de son territoire. Et l'Autriche·; ou elle serait victorieuse - ce qui n'est pas difficile -- dans une seconde bataille de Novarre; ou, Yaincue, elle ferait des propositions d'arrangement qui seraient - cela est certain - immédiatement acceptée1'. Le Piémont obtiendrait peut-être un partie de la Lombardie, plus probablement encore les Duchés. La Vénétie et les passages des Alpes resteraient dans tons les cas entre les mains de l'Autriche, et les pauves populations .insu, gées seraient encore une fois livrées en victimes trahies aux vengeances impériales. Est-ce là ce que veulent les Lombards partisans de l'initiative monarchique? Trahir ainsi bassement l'Italie dont ils invoquent le nom? Vendre leurs frères? Signer, eux peuple, un nouveau traité de Campo-Formf'J ou quelque chose de pire? Se couvrir d'infamie, eux et le;ur patrie à la face de l'Europe? A Dien ne plaise que je puisse un seul moment admettre la possibilité d'une telle honte. Et pourtant ;--our l'empêcher- pour empêcher qu'une dynastie bâtarde française vienne s'implanter dans le Royaume de Naples - pour empêcher un protectorat anglais en Sicile, destiné à équilibrer cette implantation française - pour empêcher les six Italies projetées - pour empêther une nouvelle <liv;sion mille fois pire que celle qui existe aujourd'hui, minée et rouillée rlans l'opinion, tandis que la création de nouveaux intérêts, résultat de tout changement et la nouvelle sanction des gouvernemens européens, donneraient à celle-là une force que le temps seul pourrait détruire - quelJe voie nous reste, sinon une seule l'insurrection ? L'insurrection de la nation qui, levant la première son drapeau, s'emparant de l'arène politique, puisse tlonner de plus grandes espéranres, pl11s de résolution aux desseins du Piémont, et par sa conduite durant la guerrP-, garantisse ses destinées à venir. Que d'autres pensent qu'on doit attendre pour agir que l'Autriche se soit jointe en armes à l'un ou l'autre des combattans. C'est malheureusement l'opinion la plus répandue et la moins raisonnable. L'Autriche est lâche P.t astucieu1'e. Elle ne s'alliera décidément qu'avec celui à qui la victoire sera assurée. Et alors il sera trop tard pour nous. Tant que lé succès sera incertain elle restera hésitante. Elle caressera officiellement les puissances occidentales; mais ses armées ne livreront point bataille à celle <lu Tzar; elle se préYaudra probablement des troubles de la Grèce pour occuper les provinces contigues, afin de les joindre à ses domaines quand sonnera pour la Turquie l'heure du démembrement ; mais elle n'opèrera point sur les voies de communication des Russes, seul rôle qui lui conviendrait; comme aujourd'hui elle laissera, suivant la promesse secrète qui en a été faite, les troupes envahissantes libres d'avancer sans crainte ; elle n'attaquera pas ou vertement les forces anglo-françaises. Pourquoi d'ailleurs le ferait-elle? L'inaction assurée, c'est tout ce qne la Russie peut demander à l'Autriche. Mais à s11pposer que l'Autriche, oubliant les tenclances traditionnelles de sa propre politique et sacrifiant sans but ses propres intérêts, risque résolument le sort des batailles, où serait l'avantage pour nous? Si elle clioisit de s'allier à la Russie; la Hongrie, Vienne et l'Allemagne sont perdues pour nous ; notre insurrection périt tôt ou tard dans l'isolement. Si elle réunit ses armes ;\ celle&,

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