mieux ciue cel11;nous r!isons: "Les embarras <les rois sont l'opportunit!l des pruplfs." Sachons profiter de cette opportunité puisqu'ils nous la présentent, et surtout soyons persuadés qu'ils ne se donneront jamais er.tre enx tant d'embarras que ceux que nous pouvons leur dom.er. Agréez mon salut fraternel. Jersey, 30 mai 1854-. ' DEL'INFLUENCE EXTERIEURE OESPROSCRIPTIONS. Chaque fo\s qu'une idée contenant la ba!Ee d'une rénovation sociale apparaissait dans Je monde, elle rencontrait sur son chemin une résistance ac1rnrn{'ede la part cles oppressenrs de la socit>tf. Quand, malgré les efforts de ces rlerniers, .:-rtte idée; mûrie par l'étude, trouvait dans les masses un acweil sympathique, précisait les vagues ·aspirations qui dorment dans le cœur du prolétaire, la résistance de ~es ennemis deYenait une persécution ardente. Il y avait des bourreaux, il y avait dt!s martyrs. A tontes les grandes époques de lutte~ qui sillonnent d'un trait sanglant la 'vie collective de chaque peuple, la principale tendance ùu tyran était d'expatrier ceux que n'avaient atteint ni le fer ni le feu. Alors on voyait des familles entières quitter tristement la cité, le bourg où elles Tivaient heureuses et traînant sur les chemins une vie mi~érable, elles allaient sous des cieux. plus hospitaliers demander nne place au soleil. Il n'est pas un coin de terre où ces lamentables migrations ne se soient accomplies. Si les hommes forts savaient trouver da11s leurs convictions une male énergie pour secouer la douleur et invoquer l'a\·enir, les eSJ)rits doux, ti-. micles, les femmes, le~ enfants jettaient un regard désolé sar l'âtre éteint, sur le toit abandonné qu'ils laissaient derrière e11x. Et cependant il n·est pas une seule de ces proscriptions qui n'ait eu une iuflueuce réelle sur les nations qui accueillaient ces paµvres bannis. En effet, ces déshérités représentaient toujours l'esprit d'examen, soit qu'il s'exerçât ·sur les actes d'un gou\ferneJRent politique, ioit qu'il repoussàt les e11seigneme11t!': d'l!n gouvernement religieux : et e,cgerme, u~e fois semé dans une terre libre, }lroduisait dans un temps donné sa tige et sa floraison. Depuis les grandœ crises religieuses yui se .,ont produites en Xsia, ce berceau des croyance divines ; et en Europe, creuset où ces croyances sont venues se modifier ; depuis les luttes politiques qui ont remué profondément la Grèce, le Pays latin, l'Italie du moyep-âge et les nations occidentales de l'Europe, il se· déroule de longues et funèbres listes de proscriptions. Eh biei1, sur toutes les routes du monde, parto11t où passèrent ces processions de proscrits, de bannis, d'expatriés, elles y laissèreut un rayon de la foi qui les animait, un mot de J'idéP. qu'elles portaient dans leur sein et une aspiration vers l'avenir ! . L'histoire livre plus d'un enseignement à ce sujet. Le Boudhisme né dans un coin perdu del' Asie, reculant devant la barbarie dn fétichisme et du sabéisme, entraîne ses afleptes et va dans }'Hindoustan. Il y trouve une population ardentP., impressionna.ble. Cette doctrine, jufiniment supérieure aux cnltes grossiers qu'elle devait renverser, est accueillie. Peu :\ peu il se fonde, 1lans cette partie de l'Asie, une puissante organisation politique et religieuse. La persécntion cl' Aménophis, _p}rnraond'Egypte. pousse les Juifs dans des contrées inconnues, où ces derniers apportent leur civilisation. Après la mort de Jésus-Christ, les douze apôtres, fu,-ant devant la haine des Idolâtres de Jérusalem, traversent les mers et enseignent la doctrine du maître. Les proscriptions de Scylla jettent un grand nombre de famil1es romaines dans la Gaul~ mlridion:ile, où elles importent l'art romain. L'expulsion des Maures, par Philippe III, en privant l'Espagne de son élément le plus vivace, le plus productif, enrichit les contrées voisines de ces grands commerçants, de ces grands artistes, repoussés du sol que leur intelligence vivifiait. En Allemagne, les fougueuses prédications du moine de Wittemberg, Martin Luther, lui attirènt les persécutions de Léon X ; il est poursuivi, traqué; tantôt il se réingie dans les palais des princes, tantôt il se cache dans les chaumières des paysans. Toujours il écrit, il parle, il enseigne; il fait une propagande active, quoique dans son pays son existence soie celle d'un proscrit. Des princes, des ducs, des margraYes étudient les paroles de Luther. Philippe :Melanckton rédige la confession du moine. Une assemblée fédérale est. convoquée ; lès villes libres délèguent des députés. Cette diète se réunit à Augsbourg : Charles-Quint la préside. Il y fait une opposition systématique; mais qu'importe, le vent de la réforme a soufflé : l'Allemagne se fait luthérienne. En France, le clergé attaque furieusement J ehan Calvin de Noyon, brüle ses amis en place de Grève. Calvin passe heureusemellt en Suisse. Enfin, partout, en Angleterre, sous le coup de ses révolutions successives, en France, par l'oppression combinée fies rois et des prêtres ; en Italie, au milieu des dissensions des Républiques du moyen-âge, les routes sont couvertes de proscrits qui s'éloignent d'un pays maudit pour eux. Pélerins de l'Idée, propagateurs de l'esprit <l'examen, ils portent avec eux le flambeau qui doit jeter un reflet sur le siècle gui passe et qui devra éclairer le siècle à venir. Ces prémisses une fois poséQs, on est amené naturellement à jeter un regard vers la France contemporaine, vers la Fr:i.nce que nous avions rêvée s'épanouissant librement sous le chaud rayon de l'Idée républicaine. .A.h ! si quel,1ue sentiment peut aujourtl'hui comoler le banni dans la douleur amère q11ile dévore, il le trouvera seul~mcnt clans la conviction profonde que sou séjour au ,milieu des populations qui l'entour~nt ne restera point impro<lnctif et stérile. Verbwn caro jactum est, ont dit les chrétiens : nous pouvons nous approprier cette maxime. Chez les nations où notre Verbe était inconnu ou mépr;sé, notre anfrfe au miliea d'elles l'ont constaté, l"'ont débarrassé des calomnies semées à dessein snr lui, et lui ont ren<lu ,sa Ji l'pidité, sa sincérité et sa praticabilité. Ici même, 1fons cette .Angkterre si attachée à ses coutumes, à ses traditions, si rebelle a11xrénovations, nous trouverions plus d'un- exemple affirmatif. )fous n'en citerons qu'1rn. Il est probant, c'est 1m fait d'tine importance • 'l rncontesta:i,r . .Depuis quelques mois il se publie à Londres une brochure périodique rédigée par des Angl:lis et ayant pour titre-la République anglaise,-avec un sous-titre-Dieu et le penple.- Le numéro qui parùt en jailVier ] 854-, contenait la profession de foi du prine,ipal réc1acteui', M. Liuton. Nous en donnons un extrait et nos lecteurs l'apprécieront. M. Linton commence ainsi : '' Il y a deux cents ans, la Ri'.:ruBJ.IQUE ANGLAISE était lill ~ait. " Depuis trois ans, invité par la proclamation du comité central -<lémocratique européen, j'osais lever la banni~re clu RéJ>ublicanisme en Angleterre, engageant énergiquement mes compatriotes à marcher dans la voie de leurs glorieux ancêtres, ces avant-coureurs de la liberté européenne. Cet appel n'était pas le mien, mais j'étais comme un indicateur vigilaut des endroits où reposent ces héros. Je voyais clans le lviutain vaporenx, incertain, les esprits de nos ainés, j"entendais leurs voix ordonnant au temps de réveiller notre 110nncur e1hlorrni, et je ne devais pas, au risque cle ma vie, refuser d'apporter leur message au monde. " Ces messages étaient les prophéties d' Eliot, de Vane et de i\'lilton... ... , " ... Le meilleur ouvrier pent attend~e le succès avec calme et patience; cependant nous faisons tous des calculs sur le~ résultats d'une œuvre entreprise : mon csp~rance a été rlépassée, je ne suis plus seul dans ma tentative, je pais compter de nombreux amis et compagnons ..... . '' ... Ce~ mots-La Républjque anglaise-sont à présent une espérance et un but pour plusieurs ... " ... Depuis trois ans un seul homme a soutenu une bannière négligée ; aujourd'hui, uue · partie, non• <l'une seule classe, mais ,le toutes les classes, se rallie aut0ur de ce drapeau et marche au triomphe de son principe. " . !)lus loin M. Linton s'exprime ainsi·: " Par une R.;publique anglaise nous entendons une nation anglaise, nn peuple libre réglant sa propre existence, faisant ses propres lois ..... . " ... Nous enten<lons une nation dont les enfants seront élevés par elle-même,-et par éducation-nous entendons un systrme d'enseignement qui les forme pour la liberté, qui developpe en eux toutes leurs facultés natun:lles et qui pousse à s L plus grande puissance la sève qui sommeille en eux. Nous entendons une nation qui ne souffrira pas qu'une fractioR monopolise la terre et le crédit : la terre doit former le . patrimoine dù pays, et le crédit devra fournir à quiconque en a besoin, les moyens de travailler ... " ... Nous voulons en un mot q11ela nation instruise, crédite et assure chacun de ses enfants ... " l\L Linton termine ainsi son article : " Quand un parti est poussé vers un b:it élevé par une direction franche et loyale capable d'inspirer cle la co::- fiance à ses membres, il saura toujours placer sa tête au dessus des rangs vulgaires formés par ceux qui n'ont ni convictions ni espérances. Un jour ce parti réglera les destinéc.s de l'_\.ngleterre. Là est notre tftche. Soyons fermes, sincères, no~s ne pouvons pas faillir." N011sle tlemandons à nos compagnons <l'exil, aux p:-emiers proscrits qn.i mirent le pied sur le sol anglais , qui d'entr'eux aurait espéré' la manifestation d'une telle OJJinion? qui d'entr'cux aurait pensé qu'une série d'idées aussi avancées serait émise un jour par un <les enfants de l'Angleterre que la dynastie de Hanovre avait rendue si monarchiqne '? Non, per:-onne 11'aurait pu pressentir ce mouvement révolutionnaire, perso11ne n'aurait pu deviner que sous ce grand conrant qui entraîne toutes les intelligences vers les opérations commerciales, il allait sourdre un jet d'idées démocratiques et sociales, c'est-à-dire d'abnégation et de déYouement. Cette citation, les faits historiques qui la précèdent ont produit en nous une opinion bien ferme et bien arrêtée. Notre passage a creusé ici un sillon! Et si nous avons perdu nos plus douces espérances, si nous sommes condamnés à ne plus revoir li foyer près duquel nos mères nous ont élevés, si nous ne <levons plus respirer les fraîches senteurs qui parfument en mai nos chères campagnes de Fi ancr, que cette pense e ~oit une consolation pour r.ous ! L'avenir fera ]e. r~ste. H. DELESCLUZE. VARIBTÉS. LES MÈMOIRES DEJEANBAJ.SII. -SuitrSi j'étais roi d'Angleterre, miloril, j'ajout;rais un dernier article à la (Jrande chat·te, pour consacrer l'inviohbilité de ma tombe, et je défendrais à tous les croque-mo~ts en beaux-arts, mouleurs, statuaires, ciseleurs, fondeurs, cle me couler en bronze ou de me tailler en marbre, soit à pied, soit à cheval, pour m'exposer, rommc une bornefontaine, au grand air de vos places 1rnhl:qnes. • .. En effet, j'ai vu toute la série des Jacqttes, des George, des Guillaume, qui peupleut vos squares, vos musées, vos avenues, et quelles tristes figures, milord! ils sont là sur leur socle, sans geste, sans regard, sans vie, méchamment drapés dans la pourpre ou le paletot, et voyant passer à leurs pieds tout un peuple affairé qui s'en rn, rapide, sous ses parapluies, sans les honorer jamais d'un salut ni d'un regard. Je c-0mprends l'art chez les Grecs, q11itravaillaient sous un ciel plein de soleil, et qui traduisaient sur la toile ou par le cisean la force, le génie, la beauté, l:i grâce ; ainsi Véuus, Apollon, Hercule, Jupiter, J>rométhée, sont des types qui parlent aux yeux et qui disent le sens humain des grandes fables primitives ; tout cé graud art oiympien est pour ceux qui l'étudient une puissante révélation, et l'on s'attache:\ ces divines ébauches, qui, restées modèles, le long des siècles, marquent le premier réveil et le plus riche épanouissement. Je comprends encore les masses, gigantesques de l'Egypte, les trava..x babylonieJl.S, les pyramides colossale6;. les montagnes-tombeaux, las aiguilles, les ol.iélisqH~, é( toutes ces créations monstrueuses qui témoignaient, ,au début des sociétés, de la puissance humaine. C"était, en effet, la force qui s'affirmait, comme en Grèce, plus tard, éclata le sentiment. Je comprends enfin, et j'aime surtout l'art historique,. monumental, ,ivant, l'art qui signale et qui rappelle, au milieu des générations en marche, les épopées antérieures ou les têtes sacrées par la gloire; mais fonder l'immortalité snr des extraits <lebaptême, hucher sur des socles et sur des pyramides d'illustres parasites, qui n'ont laissé leur empreinte que sur des pièces de monnaie, c'est réduire l'liistoire à de fa<les légendes, c'est dégrader l'art, milord, et perdre cette grande langue -<leshéroïques traditions qui doit parler aux foules du haut des monuments! Aussi qu'arrive.,t-il quand un grand pays s'amuse, co1-nme le vôtre, à ireupler ses rues avec l'almanach des cours, tandis qu'il laisse dans l'ombre ses Milton, ~esŒyron, ses Shakspearc ? C'est q11e le pe\Jple passe indifférent au pied de ces marbres, er que les statues elles-mémcs semblent greloter dans la gloire. Il y en a quelques-unes, pol:trtaut, d'uue exécutioR •puissa11te et ù 'un vrai mérite. Ainsi la statue de Guillaume IV, à l'extrémité nord du pont de Londres, est remarquable ·non seulement par ses proportions colossales (elle a 40 pieds de l1aut), mais par l'omeme11tation du piédestal, et les fines sculptures dont sa base est enrichie. La statue équestre de George III, entre Haymarket et Pall Mail, est de même très vivante et d'une belle physionomie, quant au cheval du moim, car le roi de 89 est monté là, sur son coursier, en habit de ville, comme un bourgeois du Strand, et l'on ne se douteniit guêre, à voir cette figure de héros endormi, des grands drames que son règne avait ouverts. •J'aime mieux, milord, vos vieux monuments que les jeunes ; j'aime mieux votre abbaye de Westminster que vos palais de St.-J ames ou de Buckingham, et que les cent églises que vous avez élevées à la guerre des dieux, y compris St.-Paul, votre magnifique et froide métropole. Voilà, m'avait-on dit, le monument par excellence ; voilà la rh:ale de St.-Pierre de Rome; voilà St.-Paul. A l'intérieur, de l'est à l'ouest, on compte en longueur cinq cent<;pieds anglais, et sa circonférence extérieure en mesure plus de deux mille, tandis qne, de la 1Jase au faite, il y a 616 marches à monter! Voyez cc dôme qui s'élève au-dessus de la charpente en croix grecque, et qui s'étage à p1usicurs rangs de colonnes, jusqu'au sommet. Voyez cette lanterne-monnffent portée sur des corinthiennes et couronnét:: d'une boule en cuivre d'où la croix s'élance. La calotte et la croix pèsent près de dix mille livres, et le tout est doré ! C'est merveilleux, j'en conviens. Les constructions sont savantes, bien assises ; la masse impose, et les détails sont riches. Il y a surtout un beau portique à la grande façade du monument, et les deux entrées lat~rales, s'ouvrant, comme la première; sous deux étages de colonnes superposées, sont d'un assez grand style. L'aspect intétj_eur surtout est d'un puissant effet. Sa voQte est très hardle ; les piliers s'échelonnent comme des géants ,qui portent !'Olympe ; les masses sépulcrales sont couchées dans l'8mbre; et il y a de belles profondeurs. Mais tout cela. •
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