Homme - anno I - n.26 - 24 maggio 1854

pendant des siècles et triomphe à la fin. Plus tard, le roi de Pologne, Ladislas, tombe à Varna, les armes à la .main, en 1444, et, neuf ans plus tard (1453), l'empire romain, eu Orient, av-ec sa capitale, rend le dernier soupir. Le Pélopon~se, l' Archipel, avec toutes les îles de la Grèce, l' l~gypte, la M oltlavie, la Valachie, la Servie, la Bosnie, la Transylvanie, la Hongrie peu à peu sont subjuguées par ]es Turcs. L'Autriche, et peut-être toute l'Europe, divisée commeelle l'était, allaient subir le même sort. Mais l'Occident, devenu plus éclairé que l'Orient, devait prévaloir et devenir maître et instituteur à son tour. La Pologne commence cette politique triomphante de l'Europe. Restée l'unique sauve-garde du monde de ce côté-là, elle arrêta le flux cleshordes asiatiriues. Ainsi, en 1683, Jean Sobieski refoula complètement les Turcs eri vue des bastions <leVienne, mais il ne pût profiter de cette victoire ; car sa patrie, plus libre ulors que tous les autres peuples de l'Europe, avait en horreur les conquêtes, qui donnent au gouvernement exécutif trop de pou voir contre la liberté. Les Polonais ne rêvaient pas la prise <le Constantinople. Ils ne voulaient• pas non plus garder sous la main la Russie, lorsque peu avant cette époque (en 1610), son czar avec toute sa famille furent amenés en triomphe par le héros Z11lkiewski. Au milieu des rapacités des autres puissances européennes, la Pologne ne volait pas. Elle épargnait les victimes, tandis que les autres la dévoraient. Mais la Pologne ayant été envahie rlepuis par la Russie, la Turquie et l'Europe se trouvent sans frontières (:,1 côté <les Barbares. Depuis lors, la Turquie, politiquement parlan~, n'existe plus, parce qu'elle n'est ni pour 11icontre ia civilisation européenne ; elle n'est encore debout que par l'intérêt des étrangers qui s'y querellent. ~ Potir faire voir combien le système de la bala~ce du pouvoir, --· base ùe la politique des cabinets depuis Charl_çs-Quint, - a pris une fausse voie, ·il suffit de dire que, destiné à mainte1ür la paix, il a banni la paix de l'Europe. Le faatôme de la PorLe-Otton1ane n'existe que pour son voisin le plus fort et le plus entreprenant. Aimi, la Russie, depuis plusieurs années, malgré la résistance partielle des puissances m:uitimes, avance toujours vers sa proie. Depuis sa prépondérance navale, l'Angleterre de son côté tient en qulqne sorte entre ses mains les dastinées cles·nations ;-la Russie, sa protégée, veut lui ravir cette suprématie par la possession exclusive de la mer Noire. L'Angleterre désire que ces eaux et les régions qu'elles baignent restent dans la po3session d'un faible état, afin qu'elle puisse continuer sa prépondérance maritime. C'est l'Othon et le Vitellius de l'empire rnmain qui se disputent la domination du monùe ! Peuples qui aspirez à Ja liberté, n':1idez ùe cœur ni l'un ni l'autre de ces grands lutteurs. Ce sont deux ennemis des peuples qui se déchirent ; car, en réalité, ce ne sont p,ts les Anglais contre le Russes, mais bien le despotisme aristo(;ratique et mercantile <le i' Angleterre qui est aux prises avec le despotisme pur de la Russie. Le peuple anglais et ie peuple russe gagneront par l'affaiblissement mutuel de ces deux antagonistes. Quand l'un d'eux :·éussira à terrasser l'autre, malheur à nous si nous ne sommes pas prêts à recouvrer nos droits. Mais pendant leur lutte mortelle n'intervenons pas ! . L. L. SAWASZKIEWICZ. LA FRANCE DEV ANrr L'EUROPE.(*) Après ce discours, chacun des représentants est invité à adhérer à la politique formulée par le tzar; l'Autriche et la Prusse y souscrivent sa11s autres observations. Le délé. ué de la Fran~e, M. A., exprime son assentiment aveile plus vif enthousiasme, en songeant à l'avènement prochain de son royal maître au trône <le France.· Lord B., représentant du gouvernement ang1ais, de.:. mande ht parole et s'exprime ainsi : Je n'aurais pils pris la parole dans cette circonstance, si nvtre honorable président n'avait cherché à ét~blir une différence entre la manière de voir de notre bien aimée souveraine et son gouvernement: au fond nous sommes <ia' rcord. Je ferai observer que la politique suivie par l'Angleterre est en tous points conforme aux vœux <leson altésse sérénissime l'empereur des Rmsies. L'alliauce del' Angleterre avec le gouvernement <leNapoléon lll a pour but de maintenir les flottes françaises que l'Angleterre peut redouter lorsque le plus grand ennemi . de ses intérêts, Napoléon II r, gouverne la }?rance. Supposons une rupture entre l'Angleterre et la France, dans les conjectures présentes, la révolution peut reparaître! Napoléon Ill, isolé, aurait l'avantage <le conserver ses forces et d'en dispos·er à son gr6; d'ailleurs, lll France ne doit-elle pas concourir, comme toutes les autres puissances de l'Europe, à la conquête de l'Orient? La France isolée est plus forte quand l'Angleterre a ses vaisseaux dans la Baltique et d:ms la mer Noire, et pour éviter un coup-d'Etat eu faveur <le l'empire napolénien d'Occident ou de la rtpublique, cette tactique était nécessaire. Les 11oldatsanglais mêlés aux soldats français main- (*) Voir, pour le commencement de cet article, le numéro 25 ,du17 mai. parte aura cessé de vivre. Déjà, au mom(~nt où nous écrivons, il n'est pas même général en chef des :11 mées du roi, il n'est qu'un pauvre Monk ; rien de pÎus, rien de moins. tiennent rordra, et s'opp~sent à toute tentative révolutionnaire, à. tonte velléité de conquêtes au profit fle la France impl!rialc, car là est le danger commun! ... Saus la politique révolutionnaire, la France est comparativement la plus faible, attendu que Napoléon III ne réussira jamais à o1itenir l'a1liance sincère des cours légitimes. La de~truction des flottes anglaises permt-:ttrnit à Napoléon III d'ab:tisser la fort.une de l'Angleterre; mais alors la France domine et la rc;volntion est en permanence! Puissance maritÏmP. et territoriale tout lui donne la suprématie en Occident ; s:rns les flottes anglaises, la coalition Malheureuse France! Ùvrée pieds et poings liés à la réaction par M. Buonaparte, te voilà ruiJ.1ée,morte pour un demi-siècle: car il n'y a qu'un moyen de te sauver, i faut révolutionner l'Europe, et rien ne me dit que cela :se fasse?, du Nord ne pourrait la vaincre ; et tandis que les troupes françaises s'avanceraient sur le Rhin et sur l'Italie, la Russie ne pourrait se maintenir dans la Turquie d'Europe. Au contraire, la. snpré:natit'! de ] 'Angleterre bieu établie dans la Méditerranée rassure l'ordre, _attendu que le Royaume-URi ne peut devenir puissance territoriale, et qn'î'l n'est poi1:t révolutionnaire comme la France. Que la. France maritime ne gêne poi11tle gouvernenient de sa Majé.sté notre bien-aimée Victori«, nous n'avons pas à b redouter comme puissance terrestre, car jamais un monarque français ne parvte:idra à pousse{ l'Allemagne monarchique contre l'Empire russe ou contre: l' Angleterre ; de même quel' Angleterre n'ayant que ses forces navales ne pourra non plus lutter avec avantage contre la France. L'équilibre européeH n'a qu'une force monJrchique à redouter : c'est l'Empire d'Occident; l'Angleterre qu'une puissance maritime : celle de la France dirigée par un ambitiP.ux:. Dès que nos flottes seront hors de danger, nous ces,ons toutes coalitions, même apparentes contre le tzar. D'~illeurs, nous aussi, nous avous pris nos mei:;nres. La flotte anglaise est dans la Baltique, celle <lela France d:.rns la mer Noire; les forces anglaises sont près du Royaume-Uni, ('.elles ùe la France sont divisées : armée e11 Afrique, armée à Rome, armée à CoustantinoplP, armée dans la Baltique ; et ces armées, chargées de maintenir l'ordre et de comprimer tout mouvement révolutionnaire, ne sont que ,les armées d'occupation! Il me semble que sa Sainteté toute puissante l'empereur des Russ1es, ne se serait péts servi p1us habilement des forces de b France pour rétablir l'ordre, empêcher l'empire ou la Ré'rolution ! Ceci bien compris, l'Angleterre n'ayant rien à crninclre d'un envahissement ultérieur, l'amour qu'elle porte ù Napoléon III s'explique: l'a1liance anglo-française sert l'ordre et la couronne <l'Angleterre. Je vote comme mes collègues. La séance est levée aux c:ris de vive l'ordre! vive le tzar! mort aux révolutionnaires! mort à l'usurpateur! Voilà donc comment se règlent les destinées <les peuples; quatre têtes couronnées disposent de l'Europe, et toute leur science consiste à trouver des hommes qui les servent dans leurs projets; ils commandent! Voil\ la question d'Orient dans toute sa crudité; elle a pour objet le partage de l'empire ottoman au profit des grantks couronnes de l'Europe et l'abaissement ùe la France, au. pr:>fit d'une restauration monaréhique, au profit <leC!1a:nbord et des jésuites, de l'Ordre enfin ! L'Europe coalisée peut de nouveau se ruer sur la Frau.ce ! sur la Fraucc ruinée par la guerre d'Orient, ruinée par les ùilapidations des bandits de décembre, r•1inée par l'agiotage; sur la France livrée aux Jésuites, empoi~ sonnée par leurs f.rnY('S doctrines, sur la France passée à l'état d'invalicle . .-\ujo1ud'hui, elle est trop vivace encore, il faut ruser et ,:ttcllflre : Mais patience, Dieu le veut, rien ne saurait la snuver d'·1J,11resta.i,ration. Sera-t-elle partagée? Non, un partage est inutile : la France, ruinée et limitée comme puissance maritime, ne peut lutter ni contre le Tzar sur terre, ni contre l'.i-L1glP.-. terre sur mer, et a.vcc Henri V, allié des familles dn Nord, la France r,e compte plns parmi les nations il craindre. La réaction domine; le Tzar étend ses bras sur l'Océan et la TIIëditerranée : ses vaisseaux feront le tour <lela Méditerranée, comme ceux des Anglais flotteront dans la mer Noire. L'alliance anglo-1~apoléonnienne n'est pas utile à la France; l'Empire avec les frontières du Rhin n'est. pas utile à la France : la Suisse est ponr elle un meilleur rempart ! Tout cou&pire rn perte. L'Allemagne, l' Argleterre et la .France unies peu vent arrêter le Tzar, résister, mais elles ne démembreront pas l'empire russe. L'Allemagne redouterait la perte des frontières du Rhin et la coalition du Nor<l se reformerait. La France, alli6e avec les monarqtws, est eu contradiction avec tous seJ intérêts ; elle est dans la même situation que la rép11l11ique romaine acceptant les secours de Charles-Albert : comme l'Italie, elle sera envahie et privée de sa liberté.· Tous les despotes, tous les hommes d'état ont dit: "La France est ingouvernable ! " Oui, mille fois oui, ~lle est ingouvernable; car plus elle est gouvernée, plus elle languit, plus elle s'étiole, plus elle approche de la mort : la France, c'est la vie humaine, c'est la Révolution, ou elle • n'est rien ! Allons, bourgeois, cirez les bottes de leurs majestés : Napoléon ou Chambord, c'est tout un; le masque est différent, voilà tout. ' On nous dira que Napoléon III, se voyant perdu, fera la_ Révolution. Erreur funeste ! Il est trop ta.rd ! La réaction a pris ses mesures ; elle occupe l'administration, et quand 11 lle se croira assez sftre de garder la position, M.. BuonaL'Angleterre dit à 1-'Italie: "Ne bouge pas!" L'Angleterre comprime la Révolution, et M. Buonaparte l'accompagne, • L'Angleterre veut Chambord et l'abaissement de la France; l'Allemagne, la Russie, Rome même veulent Chambord et l'abaissement.de la France! Qui te délivrera? la Révolution ! ' B.,...... VARIÉTÉS. LESMÈMOIRES DEJEANBAISIN. -SuiteC'était hier la fête de la reine, et j'ai vu passer toute une armée de chtvaux en gran<l appareil, <leladies en diamants, de laquais p~udrés, comme des archevêques et fleuris comme des rosières; c'était tout un monde de panaches, de broderies et de livrées bien nouveau pour moi! - je l'ai donc suivj ù,• tous mes regards. Quels sont ces hommes à la cUJrass~ étmcelante, au casque à cimier et tout caparaçonnés <l'or, sur leurs grands chevaux noirs, comme le:s beaux Romains du tf'mps de Pompée? Ce ~ont les horse-guards de la re_ine. Et ces autres qui jouent du fifre comme un chœur de bergers d'Arcadie égaré Jans le camp de Xerxès ? C'est lu. musique militaire de la reine. Et ceux-ci qui reluisent tant spus les tricornes empanachés, la perruque it marteaux et la veste e11 brocart? C'est la livrée de la reine. • ·Et ces derniers, enfiu, dorés sur toutes les coutures, en chapeaux festonnés, avec épée de parade, s'étalant ,.m fond. <les carrosses, entre des femmes, aux épaules nues dont 1a gorge et la poitrine étincellent comme un zodiaque? Ce sont les grands dignit:i.ircs de l'armée, les ofiiciers et les dames de la maison de la reine, la noblesse enfin ayant pied à la cour; c'est la \·ieille Angleterre féodale qui passe avec ses diadêmes, ses blasons, ses linécs historiques, toutes ses magnificences. • . Rien n'y manque, pas un nœu<l, pas .une écharpe, pas un pompon, pas même la canne aux mai-13 d:.i laquais, la canne insolente qui dit encore au manant, comme jadis : arrière au porte-fardeau ; place à la n:;blesse . 1 Il est bor1 d'ajouter, toutefois, que cette canne s'est un peu modérée depuis les véritables temps féodaux; elle· est devenue constitutionrit lle comme toutes les puissances du siècle, et dans les mains du laqnais elle n'est plus qu'un -signe, un attribut, une arme parlante. Elle ne fonctionne plus, la fière baronne ; et le court bâton du policeman, emmanché dans la )oi, ferait reeuler plus de monde que toutes les cannes fëodales des trois royaumes. Encore un sceptre qui tombe, une royauté qni s'éclipse, milord! Les ciefs <lu donjon sont depuis longtemps rouillées; la main de justice se fait moins lourde à chaque heure du temps ; le glaive lui-mêrne s'6mousse dans les fourreaux, et la canue s'en va. Que diraient les fiers bar0ns de Guillaume-le-Bâtard, que <liraient vos ancêtres, milord, s'ils revenaient dans leur armure de fer au milieu de vos carrousels ? • Ils reconnaitraient bien ça et la quelques pourpoints et quelques hauts-d~-ch:lusssPs de ieurs anciens tournois de guerre ou de cour; mais les cuissarils, les brassards, les gantelets, les casques fermés, les lances, et surtout les terribles discipli-Hes de la foule, s'écartant, s'inclinant jusqu'au pied du cheval, tout cela. milord,· a disparu; le moyen âge, le véritable moyen âge est bien mort, même dans vos palais et dans vos fêtrs, où l'on ne joue plus que des ballets. JYoù cela vient-il, milord ? Eh mon Dieu ! de la grande, de l'universelle contagion <lu temps. Depui,; deux siècles il pleut des idées en E,irop~, et partout les âmes sont travaillées, ici, par la liberté,· là par la science. Or, vous de la grande ile, vons ;:vez reçu vos rosées comme le continent, et voilà pourquoi, <laus Londres, votre capitale, j'ai déjà vu deux Angleterres, celle du travail et celle du fief, celle du privilège et celle de la liberté ; l' Augleterr~ du paquebot, de l'annonce et de l'afficlw, l'Angleterre de, perruques pouclrér.s, du pourpoint moyen âge et de la ca1.11,o.. Il est vrai de dire, cependant, que vous êtes le peuple de la terre le plus jaloux de vos trailitions, et le plus riche en vieilles culottes; votre garde-robe historique est un musée complet, et vos fonctionnaires, vos serviteurs, vos <lames de la cour, pourraient demain tenir tabouret chez la reine Anne, ou garder ses antichambres aussi bien que les fières ladies et les chevaliers qui dorment depuis cent ans et plus sous le marbre <levos tombeaux.

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