Homme - anno I - n.25 - 17 maggio 1854

M. Montalembert n'ira pas à Cayemrn, et son procès est à peu près éteint, gràce an concile des évêques, qui a men:~cé d'agiter la conscience religieuse du pays, si l'on touc!iait à l'un de ses .,aiuts. Le gouvernement de M. Bonaparte a eu pem ; le prêtre- est une nécessité, comme le policier, comme le soldat: il faut les subir ou périr. Vous avez ronnu M. Baroche, ce nauséabond du vice, cettè espèce d'eunuque-avoué qui est plus hideux que le crime : dans ces derniers temps on voulait l'enlever à sa grasse fonction pour lui donner nn ministère, et <;lenouveau l'emôler dans le service a~tif; mais maître Baroche a refusé sous le charmant prét"xte qu~ voici : • " Sire, d<tns les temps del! ::e, quand il fallait sauver " la société, nous avons tous ll-s deux vaillamment corn- ." battu, moi par la parole et vo1:: par l'épée : a11jourd'hui, " tout est tranquille; laissez-;r.oi donc à1'écart : il faut " garder les bons serviteurs f( nr les crises.'' Tout ceci voulait dire, en L<•. normand: j'ai uue grasse siné-:ure, de riches loi~irs, d, ., grandeurs magnifiques et certaines, je ne veux pas les , , mpromettre, et m'atteler, comme un sot, au provisoire ! Autre comédien ! Billault, notre ex-ami du socialisme, le président Billault, 6Ul' pareille invitation, répondit à son .çire: "Majesté, si vous renrnyez M. de Persigny, c'E·st que vous voulez, sans doute, changer votre politique intérieure. Eh bien! je serai votre serviteur de l'aile gauche; accordez-moi quelques libertés et quelqur,s proscrits. Renouvelez Auguste !" On remercia le Billault, 'qui reste un en cas, pour les temps où la petite miséricorde sera nécessaire, et cdui-d, qui sait très-bien son rôle, se retira tout joyeux, e8pérant , qu'on lui saurait gré, dans certains coins de l'exil, de son intervention généreuse, et qu'il pourrait sauver. sa tête et sa caisse si, de nouveau, se lève et passe la trombe révolutionnaire. Le camp de Boulogne sera commandé par le Sire en personne, et pour celui des Alpes, on parle de M. Murat, le prince-monument qui voudrait bien faire sa première étape vers N apl~s ! La campagne est désolée: les diverses cultures ne promettent rien de bon, comme récoltes, et dans les villes, le ' orérlit_et>tsi llas que les 30 jours pour le meilleur papier, stnü la r~gle des échéances. Ajoutez à cela la gnerre qui dévore les finances, inquiète les intérêts et paralyse le commerce. Voilà le bilan! Rien de nouveai"tdu Danube, ni de la Baltique, ni de la mer Noire. XXX. CORRESPONDANCE DE LONDRES. Londres, 15 mai 1854. DERNIÈRES NOUVELLES. Il y a six ans, aujourd'hui, une imposante manifestation populaire demandait à l' As!!emblée Constituante rle France "l'indépendance de la Pologne, " c'est-à-dire la réiiurrection des nationalités et l'anéantissement de l'empire russe. Détournée de s◊n but, cette manifestation conduisit d'abord à la dissolution de l'Assemblée constituante par Huber (depuis grâcié par son heureux émule L. ·Bona11arte~,pnis, par une réaction facile à prévoir, l'incarcération de Barbès, Albert (dont la santé affaiblie vient d'exiger le transfert dans les prisons de Tours), Raspail, Blanqui, etc., et, successivement, à la défaite et à l'expulsion des Révolutionnaires ...... . Aujourd'hui, la France est contrainte par les évènements d'entreprendre tette lutte fatale, décisive, qui doit laisser l'Europe républicaine ou cosaque, a dit l'autre. Pourquoi la République n'a-t-elle pas accompli son œuvre, si facile alors que les insurrections populaires triomphaient dans to1ites les Capitales ? Je le regrette sans en examiner la cause; mais je n'ai pu m'empêcher d'un amer retour vers le passé en écrivant c·ette date : Quinze Mai! Aucun fait militaire, ni dans la mer Noire, ni sur le Danube (sauf la c.ontinuation du bombardemeut de Silistrie \)ar les batteries russes établies sur la rive opposée <lu fleuve), ni dans la Bal tique, ne vient satisfaire l'impatience des badauds et des cockneys, lesquels croient à une prochaine victoire et à une pàix triomphale! Lorà Raglan et le général Napoléon Bonaparte sont à Constantinople. Le maréchal St.-Arnaud ne tardera pas à venir y prendre les fonctions d'ambassadeur laissées vacantes par le rappel du général Baraguay d'Hilliers . Mais le maréchal St.-Arnaud, plus dévot encore que son prédécesseur, ne tardera pas d'entrer eu lutte avec la tliplomatie anglaise, très attentive à ne pas laisser prédominer le catholicisme en Orient ; et d'ailleurs, le maréchal devra bientôt se rendre sur le Danube, et il faudra bien uommer un ambassadeur à Constantinople. L'insurrection grecque, vaiucue, dispersée, va recevoir des xenforts envoyés par le roi Othon, dont les généraux et les ministres se mettent ostensiblement à la tête du mou- \'ement. Les conséquences de cette lutte pouvaient être la conquête de la Grèce par les Turcs : les puissances occidentales vont pourvoir à ce péril en occupant le territoire Hellénique et, probablement, en déposant le roi Othon. Le Moniteur lance contre ce produit des congrès une diatribe violente, rappelant les services pécuniers et diploL'HO~l }l E. mutiques rendus par la France à h cause des Hellènes (il y a quatre ans il y eut rupture entre la France et l' Angleterre pour le blocus d'Athènes); et les IO à 12 mille hommes du général Forey s'embarquent à Tou10n pour. " le Pyrée. " Que dira l'empereur d'Autriche qui vient d'épouser une cousine d'Othon? La Cour de Vienne adresse au Czar une note réclamrmt encore une fois l'évacuation de~ Principautés; mais elle ne menace pas encore d'entrer en campagne ; et son alliée, la Cour de Berlin, se 1nononce de plus en plus pour la Russie. Le Prince de Prusse a quitté le commandement des Provinces rhénanes, où il s'était distino-ué contre la Révolution en 1849, de colère de voir 0 . triompher le parti russe par la destitution dn ministre de • Bonin. L'Angleterre commence à s'inquiéter ; et le camp de Boulogne parait être formé contre la Prusse et, sans doute aussi, contre la Belgique. -La Suède est vivement pressée d'entrer C'n ligne contre la Russie et de ressaisir la Finlande; l'opinion p11bliqueet même l'influence de l'héritier du trône est pour l'alliance avec Londres et Paris. Les élections pour le renouvellement de la représentation nationale dans le canton de Berne donnent une majo- •rité, décidée aux radicaux qui vont ainsi rentrer au Pouvoir après 4 ans d'efforts. - Garibaldi, aujourd'hui capitaine d'un navire marcharnl américain ( commonwealth ), est arrivé à Gènes pour ses affaires. - Une préteudue amnistie partielle a été donnée par l'empereur d'Autriche à l'occasion de son mariage; la duchesse de Parme vient (sur les consei'l.sde M. Berryer, dit-011) de lever le séquestre sut les biens des révolutionnaires de 1848. Toutes ces apparentes concessions, dont bien peu profitent, font du bruit dans les journaux étrangers, mais ne peuvent réconcilier en rien l'Ita1ie avec ses conquérans. Mais, d'où viendra là délivrance-, et ql'land? ..... . -Salut fraternel, Ph. FAURE. , . ·LBS PAQUES RUSSES. . Le rescrÎt de l;e~pere~r Nicplas au gé~éral Osten Sacken, gouverneur d'.Odessa, et les articles du .Journal de St.-Petersbourg racontent avec une hypocrite indignation , que le bombardement d'Odessa a eu lieu le Samedi-Saint. (D'après 111_ calendrier e_rroné, conservé par l'Eglise grecque, •malgré les rectifications des astronomes du XVI ·siècle.) A cet endroit l'Homme pourrait citer: 1° Le 16 avril 1831,-jour de Samedi Saint, selon le calendrier russe, où les troupes de Nicolas entrèrent à Oszmiana et en massacrèrent les habitans. 2° Le lendemain,·le 1.7 avril, premier jour de Pâquts, le général Kreutz fort de i2,000 hommes et de plus de 40 canons, enveloppa 5,000 Polonais à peine armés, commandés par le général Sierawski, et le extermina complétement. - Le lundi de Pâques, 18 avril, continuant la célébration de la résurrection de Jésus-Christ, les soldats russes forcèrent la ville de Kazimierz et jettèrent dans la Vistule les insurgés en retraite. 3° Pour prouver quelle façon de célébrer les Pâques ont messieurs les princes de la maison germano-orthodoxe de Gottrop, il suffira de rappeler que l'impératrice Catherine II ordonna au général Igelstrom de préparer un massacre à Varsovie; pour le 4 avril 1794, Samedi Saint, lorsque le peuple s'asseml1lait dans les églises ((out-à-fait comme le dit le czar à propos d'Odessa); heureusement, ce projet fut déjoué et les Polonais s'insurgèrent le nndredi et chassèrent Igelstrom. Et maintenant, le czar se récrie contre les obus sacrilèges lancés le samedi saint de son calendrier, par des amiraux, d'ailleurs très dévots, trop dévots selon nous; mais, en tous cas, trop savants en astronomie pour transposer l'équinoxe et observer la Pâques au gré de l'ignorant fanatisme de S. M. et. en dépit de la science et des lois du mécanisme céleste ! En publiant le travail qui suit nous n'acceptons pas toutes les appréciations de l•anteur, mais les faits qu'il expose peuvent se réaliser et nous devons travailler à ce que ia situation s'éclaire. LA FRANCE' DEVANT L'EUROPE. C'en est fait : encore quelques mois, et l'empire ottoman sera réduit à ses possessions d'Asie : la Turquie d'Europe, conquise par les armes du Tzar et par l'occupation anglo-française, ne se -relèvera pas. Le Sultan, perdu, ruiné par les concessions successives qu'il a faites à ses alliés, et par les pertes qu'il a éprouvées, en soutenant la guerre contre les Russes, n'a plus qu'à traiter sous le patronage de la coalition anglo-française : rien ne saurait le sauver, rien, pas même la révolte de ses sujets. La guerre doit prendre une forme nouvelle. Chacun des partis belligérants ayant à conserver sa position va manœuvrer en co11séqucnce. C'est dans un congrès des cours que doft se régler le sort des états européens, o'est-à-dire dans un congrès réactionnaire, -russe. Le partage de l'empire ottoman était nécessité par la situation faite aux puissances monarchiques de l'Europe dans la lutte qu'elles ont soutenue contre la révolution, car n'ayant plus rien à prendre à l'intérieur, les têtes couronnées devaient porter la ;;ucrre à l'extérieur, 2fin de préoccuper les esprits et de faire mou.rir ou enrégimenter ce qu'il y avait de trop vivace 1lans la jeunesse nourrie des idées révolutionnaires. La Révolution comprimée par les bras les plus robustes, enchaînés par la discipline, et la c0nquête de la Turquie d'Europe, voilà le rlisultat des positions prises jusqu'à ce jour par les intérêts coalisés des cours d'Europe. Pour tout homme qui a mllrement réfléchi à la guerre d'Orient, il est évident qu'elle a été méditée et préparée de longue date par les premières puissances réactionnaires d'Europe, et principalement par l'empereur des Russies et par la cour de Rome. Celle-ci voulant un.évêque souverain à Constantinople, celui-là des vaisseaux de g11erre dans les Dardanelles, to11s deux ne s'unirent-ils pas momentaném<::ntpourécraser la Révolution en France? Tandis que M. de Montalemhert proclamait la guerre de Rome à l'intérieur, le Tzar occupait la Hongrie, la Moldavie, la Valachie, e~ la trahison donnait la victoire à leur alliée l'Autriche. M. Buonaparte acheva de rétablir l'ordre par le coup d'état du deux décembre : Cayenne et Lambessa rétablissent le silence. Tout dort ; la réaction triomphe. C'est bien: mais ce n'est pas pour rieu q11ele pouvoir se centralise ; devenu fort, il veut se l"Qainteniret s'agran.- dir encore.... Les petits ~tats d'Europe durent céder devant la menace d'une invasion russe, ou d'un empire d'Occident, voire d'une révolution sociale. Comment n'auraient-ils par adhéré à uu.e politique qui portait la guerre en Orient? La guerre limitée assurait à nos bons bourgeois cinquante ans de paix! Les pauvres petits roitelets, les voilà pris au trébuchet: avant ou après la guerre d'Orient, ils sont menacés; avant ou après ils devront payer leur part de frais, mais sans profit aucun pour eux; car, bien que l'Asie soit vaste, que la Syrie, l'Egypte puissent à leur tour devenir provinces soumises et conquises, on n'en fera pas moins une halte forcée à Constantinople. Déjà, nos vaillans pala.dins sont essouflés et la caisse est effondrée! Il faut trait1:r. Or, 1es temps sent changeants ; le choc· en retour se faisant· sentir, la Révolution peut reparaître, car une armée inactive, t1 ompée dans ses espérances, se perd ou se révolte, et plus de soldats, plus de rois ·: la guerre ne se continuant pas e.n Orient reviendra· près de nous, à nos frontières : poussée à l'extrême, elle détruirait tout, il fau_µra s'arrêter, ou l'équilibre :serait l'épuisement, la mort.... • ., Mais, remarquons-le bien, la réaction poursuit un double but dans la guerre d'Orient : lo L'extension des forces européennes vers l'Asie; 2o La. hiérarchisation des pouvoirs ou l'équilibre gouvernemeutal, l'ordre monarchique, enfin, seul moyen qu'elle connaisse pour faire opposition à l'action révolutionnaire et vaincre les anarchistes qui osent rêver la liberté, l'ég ;lité, le bien-être des peuples. L'envahissement de la Turquie d'Europe, en rejetant sur un second plan les questions d'organisation ilitérieure, délivre momentanément les cours royales et impériales de la guerre civile; les diverses coalitions qui se forment pour s1Uvegarder des intérêts particuliers, concentrent le pouvoir en quelques maitis et étendent ainsi les forces et les attributions des grandes puissances de l'Europe au détriment des états secondaires d'Europe et d'Asie. Cette situation donne une tendance à une centralisation générale, à une monopolisation des forces, à l'absolutisme.' • La première partie de la guerre d'Orient a réalisé les projets des hommes d'ordre, il faut s'occuper de la seconde. ' CONGRÈS DES COURS EUROPÉENNES. Sont représentées : l'Angleterre, la Russié, l'Allemagne el la France ; il n'y a pas de place pour les petits... - La. Russie et l'Angleterre sont hiérarchiquement les premières ; l'Allemagne divisée en deux cours et la France· occupent le second rang. La Prusse et l'Autriche donnent de plein droit la pré.: sidence à la Russie : la France représentée par un délégué de la légitimité ( affilié à Napoléon III et à Jésus) accorde également la présidence à la Russie. Le bureau constitué, M. C. délégué partic11lier du c.omte de Chambord étant nommé secrétaire, le prince de M., président, prend la parole et dit : . " Sa Sainteté toute puissante, mon maître, Nicolas E mpereur de toutes les Russies, poursuivant. avec la haute sagesse qui le distingue entre tous, la mission civilisatrice que la providence lui a confiée, a bien voulu m'envoyer au milieu de vous, afin de témoigner à vos seigneuries de sa haute satisfaction pour les services que vous avez rendus à l'ordre et à la civilisation, en l'aidant à comprimer la révolution en Occident et en· servant ses projets dans laquestion de part'age de l'Empire ottoman. "La Turquie d'Europe, enlevée à l'empire des Russies; va rentrer dans son éta~ normal, et l'Asie reste à jamais conttuise au christianisme et tributaire de l'Europe. • " L'équilibre eurnpéen exigeait que la puissance des sultans ne s'étendit point sans partage sur la mer Noire et les Darc,lanelles. " La politique méticuleuse de l'Angleterre et de la gent qui gouverne la France, a retardé, de quelques jours seulement l'accomplissement des hauts projets de sa Sainteté toute puissante ; cat en prenant l'initiative d'une guerre qui a pour but de rendre la paix pour des siècles à

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