-SCIENCE.- -SOLIDAltITBJO-URNADLELAD:EMOCRATUIENIVERSELLE. N° 20. - MERCREDI, 12 AVRIL 1854. LAR:ÈVOLUTIOENT LA RUSSIE. Voici ce que nous lisons dans la Correspondance-Ifm:as, vaste entreprise de calomnies, créditée, patronée, dotée par le gouvernement bonapartiste, et chargée par brevet spécial de fournir d'idées la France des Baroche : '' La Russie a une alliée, dans la guerre inique .,,,,qu'elle vient de déclarer à l'Europe : cette al- " liée, de tous points digne de la cause qu'elle "défend, c'est la Révolution. Les organes de la "démagogie socialiste, répandus à l'étranger, ne "s'en cachent pas. Ils applaudissent à une guerre " qui les venge de leur défaite, en apportant le "trouble au milieu de ces sociétés régulières de " l'Europe qu'il ne leur est plus donné de boule- " verser,et ils font des vœux pour le triomphe de "l'absolutisme mos0ovite. Etrange renversement " d'idées, qui se produit ouvertement, comme "pour prouver le sens profond du vieil axiôme: les " extr~messe touchent." Où sont ces organes de la démagogie socialiste qui font des vœux pour le triomphe de l'absolutisme moscovite ? Nous avons connu des journaux qui, sous la protectionlarge et ~énéreuse de la loi républicaine, conspiraientautrefois avec la bande de Décembre pourle triomphede l'absolutisme chez nous: abrités sous la liberté générale, contr' eux conquise, ils appelaientpubliquement les Cosaques de l'intérieur ou ceux du dehors au sac d'une civilisation qui laissaittrop de lumière; ils promenaient leur Spectre rouge à travers la Frnnce indécise, troublée : ils invoquaient les glaives, ils chantaient la force, et quandl'hommedtl guet-apens ent fait sa nuit, ils l'adorèrent. Eh bien ! ce sont ces hommes, ces mêmes hommesqui reprochent aujourd'hui à la Révolution d'ètre l'alliée de la Russie,-qui nous dénoncent,nous les proscrits de tous les despotismes, commele_;:;c:~rviteurset les adhérens du plus misérabledespoi.ismede la terre.! Eh! malheureux qui tremblez la peur au premier souffiedes guerres, est-ce notre faute à nous, si l'Aigle moscovite étend ses ailes vers l'Orient, et si l'ambition d'un seul peut encore bouleverser le monde? Est-ce la République assassinée par vous et pour laquelle nous souffrons, qui permettrait à ces tentatives individuelles, à ces folies irresponsables, monstreuses, d'éclater tout à coup, comme des orages, et d'épouvanter les sociétés réglées '? Est-ce nous qui avons fait ou relevé le despotisme à Vienne, à Paris, à Rome, à Berlin; et si la grande civilisation du dix-neuvième siècle, si riche d'études et de sciences, dépend aujourd'hui d'un orgueil, d'une colère ou d'un caprice, est-ce nous qui avons créé cette situation redoutable qui porte toutes les crises? Nicolas, aujourd'hui, vous désole et vous épouvante; demain, ce sera le tour de Bonaparte; après demain, celui du petit empereur d'Autriche qui a, commevous savez, ses épilepsies de famille. Propriétaires, industriels, rentiers, riches marchands!bourgeois et nobles vom, ne dormirez plus tranquilles dans cette Europe que vous avez livrée à quatre ou cinq Césars : en trahissant, partout, les républiques, les nationalités, les libertés, vous avez perdu les véritables forces qui pouvaient lutter contre les sauvages à tiare ou à couronne, et désormaisvous appartenez à toutes les fantaisies : on vousmènera bien plus loin que Constantinople! Quand la Pologne luttait, il y a vingt-trois ans, héroïque et seule, coutre toutes les forces de la Russie, qui voulait la secourir? La Révolution, - et qui refusa son concours en disant : La Pologne est trop loin ! La politique bourgeoise. Lorsque, vingt ans plus tard, la Hong-rie~luttant tQQ..tre l'Autriche déjà vaincue, vit t,n1t à coup les Toutes lettres et correspondances doivent être affranchies et adressées au bureau de ]'Imprimerie Universelle à SaintHélier (Jersey), 19, Dorset Street.-Les manuscrits déposés ne seront pas rendus. armées russes se ruer sur ses plaines, qui voulait la défendre'? La Révolution,-et qui l'abandonna lâchement ? .La politique bourgeoise de Paris et de Londres. Sèctateurs de la force, vous qui acceptez un Bonaparte et qui allez à tous les despotismes, ne nous reprochez donc pas vos crimes. Ce sout vos lâchetés qui ont ouvert au Russe le chemin de Constantinople et la Révolution seule pourrait le barrer. Nous applaudissons, dite11-vous,à cette g·uerre qui nous venge de notre défaite en apportant le trouble au milieu des sociétes régulières de l'Europe. Insensés! notre défaite c'est la vôtre, c'est la défaite de la civilisation. Que vous reste-t-il au milieu de vos sociétés régulières de l'Europe? Pas une institution, pas une tribune, pas un droit, et des prisons, des gibets, des échafauds par milliers ; Eh bien, vous verrez ce qui peut naître ei croître à l'ombre des potences; âmes vassales qui avez tué la grande nourrice - la liberté - vous ne trouverez autour de vous que des mercenaires ; vous serez trahis, vous serez vendus. La Révolution seule sauvera l'Europe, sauvera la civilisation, mais à son heure et selon l'esprit qui la pousse ; il ne faut pas plus d'autocrate à Paris qu'à Berlin, à Vienne, à St.-Pétersbourg: il faut une levée en masse des peuples, il faut une guerre de religion et non pas une guerre d'équilibres ou d'équilibristes: La liberté du monde vous rendra seule les clets de Constantinople ! Ch. RIBEYROLLES. L'EMPIREET LA SACRISTIE. Toute l'Europe connaît M. de Montalembert, ex-pair de France, académicien-doublure, membre des dernières assemblées libres, chef des jésuites dans la province de France, et l'un des hommes qui ont le plus marqué dans les intrigues, les conspirations et les guet-apens ourdis contre la République avant Décembre. M. de Montalembert avait alors des relations intimes avec l'Elysée qui le caressait: l'aig·le et le hibou travaillaient ensemble, vivaient de la même haine et guettaient la pauvre Liberté, colombe qui ne battait plus que d'une aile. Quand elle fut morte, M. de Montalembert chanta l'hosannah des victoires, glorifia le crimesauveur et vint s'asseoir sur les bas gradins du corps Législatif, entre Messieurs Belmontet et J ubinal, ces deux illustres de l'ère impériale. La conscience humaine était vaincue, la souveraineté perdue, la pensée sans voix : toutes les libertés pendaient aux crocs de Décembre, et la Révolution assassinée marquait toutes les routes de son sang, depuis le seuil des Tuileriesjnsqu'au seuil des dernières chaumières. M. de Montalembert devait donc ~tre content ! Hélas! le jésmte est comme l'usurier, comme Shylloch, il a la soif inextinguible; il boirait la vie humaine jusqu'au dernier souffle, et, tant qu'autour de lui tout n'est pas cadavre, il est inquiet et remuant : il voudrait tarir le soleil et les i<lée". 'l1ant il est vrai, qu'après deux ans de silence et de repos dans le corps-de-garde de l'empire, M. de Montalembert en sort tout-à-conp, oar la porte de . ' derrière, comme tont bon fils d'Ignace, et le voilà qui, dans une lettre particttlière, publiée par indiscrétion, déclare que ce gouvernement de son choix est le plus misérable, le plus infâme des gouvernemens ! . Sur ce, le procureur impérial d'accourir et de requérir, an nom <leson maître outragé, du repos public mena~é, c.le.slois iwrnJtée~et de la civilisaOl( s'ABOMNE ; 1 PRIX DE L'ABONNEMENT : A Jersey, 19, Dor!et st. Un an, 8 shillings ou 10 fran es. A Londres, 50¼, Great Queen st. Six mois, 4 sh. ou 5 fr. Linooln's-I?Ü-Fields. . 1 Trois m@is,2 sh. ott 2 fr. S0 c. A Genih.ie(Smsse),chez M. Corsat, CHAQUE NUM:ÉliW : libraire, rue Guillaume-Tell. 3 pences ou 6 sous. tion en larmes ! Le Corps Législatif nomm~ une commission qui fait à buis-clos une espèce de rési~tance et vote à la majorité contre les prétentent10ns du procureur; mais César furienx fait sonner ses éperons, et tout rentre dans l'ordre au petit parlement : on livî'e le frère Montalembert à 184 voix contre 51. A quelle sauce mettra-t-on le turbot et qu'adviendra-t-il de cette petite o-uerre • I o qm commence entre a caserne et l'église? La police correctionnelle condamnera M. de· Montalembert : en souvenir des services passés, et pour le dégrader, les Tuileries l'amnistieront: mais,. soyez certain que la sacristie ne pardonnPra pas,. qu'on ne brtHera plus que de l'encens frelaté <lans les fêtes officielles, et que de ses deux prétoril'ns, le sol_datet 1~,pr~tre, M. .Bonaparte en perd nn; la hame des Jesmtes est comme leur ambition : elle ne· sait pas mourir! Ch. R. LES RACOLEURS. Tandis qne dans sa correspondance générale de police le gouvernement français, qui parle seul, nous dénonce à notre pays comme les alliés de Nicolas, dans la guerre contre les Turcs, voilà que ce même gouvernement cherche à pratiquer l'em- , bauchage dans les rangs de la proscription. Au nom de Bonaparte et dans l'intérêt de Czartoriski, l'éternel prétendant, des émissaires dela politique impériale et royale ont déjà sondé les Polonais qui sont les aînés de l'exil. • Mais on leur a répondu que les proscriptions étaient solidaires, comme les peuples qu'elles représentent, que les Polonais n'entendaient pas s'allier au despotisme qui écrase la France, coutre le despotisme qui écrase le Nord ; qu'ils ne voulaient point engager leur honneur, leur foi, leurpat~·ieau service d'une double intrigue, et que la politique <lela Révolution générale resterait pour eux la seule vraie politique de l'affranchissement. Ailleurs, comme ici, nous en sommes certains,. ces tentatives renouvelées avorteront. Les proscriptions n'ont rien à faire dans ces intrio-ues princières <les dynasties sans place et <lesgouvernenemens à coups d'Etat: elles n'y trouveraient que déceptions amères ! C. R. CORRESPONDANCE DE LONDRES. Lundi 10 avril 1854. Les llusses ont franchi le Danube près de l'embouchure, et, après avoir occupé la Dabrudja, ils ont attaqui- les Turcs à Rassow:i. Le résultat de la bataille, que i'on dit favorable aux Turcs, n'est pas officiellement connu. Une autre bataille a eu lien à Silistric, entre les deux généraux en chef, dit-on: rien d'officiel non plus sur le résultat, qu'on (lit également favorable aux Turcs. - Rien de nouveau à Kalafat. Mais l'avant-ga~de de l'aile droite rnsse a franchi le D:mube, au-dessus de Widdin, et envahi la Servie. L' ARMi:iE AUTRICHIENNE EST A US.SITÔT ENTRÉE EN SERVIE. L'Autriche va donc, du consentement d,t sultan, avec l'approba. tion de la France et de l'Angleterre, et prohablemén~ à la grande satisfaction du czar, occuper, sans coup férir, uue province turque ... <lont elle se fera plus tard un gage contre tomes les puissances. Qui donc trompe-t-on ici? L' AUTRICi!E E1' LA PRUSSE ONT SIGNÉ UN TRAITJ~ D' A.LLT,\NCE DÉFE::-ISIVE B1' OFFENSIVE. Les Russes dans 1.s Principautés, les Autricl11cns en Servie les Grecs ( r.ar la rupture est définitive entre la (hèce et la 'fur~ quie) en Epire et en Thessalie, voilà clone le commencement du démembrement de l'Empire Turc, sans parler de l'onéreux appui que lui prê,erout 7,5,000 Anglo-français, au prix de conccs ;ions-- équitables, mais odieuses pour lt•s musulmaas - faites au., &ujets. chrétiens-et mêm~jnifs-de la Porte. • L'avant garde française (4,000 hommes) et les généraux Ca-n.:.. robPrt et liousquet sent arrivés à G!tllipoli. A Malte, de~ ré<>'imens français, fraternellement accueillis par le~ /nu-raits angl~E;• ont répondu au God savo tlle Queen par la Mo.TSeillai•·e; en dépit de . tout. c'est Je chant national, et la Révolutiou marche sous nos dm-· peaux, malgré l.es de•i~'it <a_u.i lei décQroo.t et Jes mains qüi lès •. p,Qrtetlt.. , .._, •
L'insurrection grecque est loin d'être comprimée, et Je petit royaume grec envoie des reuforts et de l'ar 6en.t malgré les menaces des puissances. Le roi Othon ne fait-il pas acheter à Trieste trois vaisseaux russe~ abandonnés là par leurs équipagt!s qui ont regagné la Russie par terre? C'est une déplorable et dangereuse complication de la question d'Orient que cette insurrection des Hellène~; mais que les Itaiiens ou les Hongrois se soulèvent, et les partisans de l'alliance autrichienne ne blâmcront-ih pas ces muuvemens comme inopp9rtuns ? Les flottes ont fait voile pour Odessa, pour en retirer } 50 vaisseaux chargés de grains et retenus par les Russes qui ont coulé un navire qui cherchait à gagner Constantinople. L'amiral· Napier a reçu ordre d'agir : les glaces fondent, la Baltique s'ouvre. L'amiral est à Copenhague pour régler les difficultés relatives à l'entrée des flottes dans les ports danois malgré la NEUTRALITÉ.- Le ministère danois (partisan d'un coup d'état) a donné sa démission Le prince N apo!éon eet parti hier avec le général P,·im (ex libéral espagnol). Le Duc de Cambridge et Lord Raglan partent aujourd'hui; ils passeront l'armée française en r2vue pendant leur séjour à Paris où les attend le maréchrrl St.-Arnaud ; 6 régiments de cavalerie angla:se traverseront la France, Je reste suivra direc. temcnt la voie de nrnr. Une grève d'ouvriers à Barcelone (Esp:ignc) s'est terminée par une manifestation populaire formidable, contre laquelle le général a fait marcher les troupes. Un-combat a eu lieu; les ouvriers, sans armes, ont été promptement décimés et dispersés.; L'état de siège règne donc paisiblement à Barcelone ...... jusqu'à. nouvel ordre. On cherche à jeier sur le parti Carliste l'initiative <le ce mouvement; mais Barcelone est plus socialiste que réactionnaire; et nul complot politique ne paràît se r:itt:icher ~ cette émeute. Vous avez sans doute lu l'affaire Montalembert l'autorisation de poursuites par 184 voix contre 51, l'apostrophe de .M. de Chas-. seloup-Laub,it à )fM. Baroche et Bi!laut; " On ne p,ut m'accuser de faire de l'opposition quand mfmi, moi qui ai -toujQnrs vot~ avec les Couservateur~, et qn-i ne me .suis jamais perdu dans les bas-fonds des banquets .ou du Droi_t au trarail ... '' et celle de l\Iontalembert: "J•avai~ c/u ser~·ir un goU\·ernement honnête eA modéré, Jr. :'IIE SUIS TROMPÉ," puii-, sa réponse à l'étonn<::nent de M. ]hrochc : '' Oui, je me suis trompé, car je ne peux trouver " honnête le gouvernement qui remplit ses caisses avec les fouds " de la famil1e d'Oriéans, ni m0déré celui dont la persécutio:1 s'ê- " tend jusques à moi!" . Eh! mon Di~u, M. de Montalembert, ce gouvernement ne fait pourtant que contînuer, à l'intérieur et à l'e.-rti':ri!'1!r, so:-1 expédition J de Rome. La persécution vous atteint, mais pourquoi avez-vous • ait à autrui çe que vous ne voudrie::-pas qui vo1,s f,1t j1it l Salut fraternel. Ph. FAURE. Les lettres du citoyèn Hertzen, outre la valeur et l'originalité du fonds, ont •un mérite. rare, dans les circonstances actuelles ; elles répaudent la lumière jusqu'au fonds de ce monde presque nouveau, resté, jusqu'ici, mystérieux, inconnu. La Révolution trouvera 1ù des forces qu'elle ne connaissait pas et qu'elle pourra mettre à profit, quand les vieux empires et les pouvoirs caducs seront morts impuissants . De la Finlande aux dernières steppes d'Asie on saura, désormais, comment battre le rappel et rallier les phalanges ! LA RUSSIE ET LE VIEUX MONDE. (Troisième lettre à W. LINTON, E~q.) Cher Linton, Le monde Slave est l)eaucoup plus jeune que l'Europe. Il est plus jeune politiquement parlant, comme l'Australie est plus jeune géologiquement. Il s'est organisé plus lentement, il ne s'E:st pas cléveloppé, il eH plus récent et ne fait qu'entrer dans le grnncl courant <le l'histoire. • Le nombre connu des siècles d'existence n'y fait rir.n. L'enfance des peuples peut durer <les milliers d'années, ausJi bien qne leur vieillesse. Les peuples Slaves en fournissent un exemple, et ceux àe l'Asie-un autre. Mais sur quoi peut-on baser l'affirmation que l'état actuel des Slaves est la jeune,-se et non la décrépitucle, que c'est le commencement et non l'incapacité du développ(.- ment? Ne voyons-nous pas <lesJJCuples qui disparaissent sanl, avoir eu une histoire, et même des peuples qui avaie1,t fait preuve de quelques facultés, comme les finnois ? Il suffit de regarder l'existence de la Russie: pour ne conserver aucun doute sur ce sujet. L'influence terrible qu'elle exerce sur l'Europe n'est pas un signe <lemarasme ni d'iucapacité, mais bien d'une force demi-sauvage, d'une jeunesse non réglée, mais vigourelise. C'est avec cc caractère qu'elle a aprarn peur la prl:!- mi 'rc- fois dans le monde civi:isé. Dans ce temps-là, il y aYait h rGgerce à Paris et quelque chose de pire en Allemagne. Partout la dissolution, la mollesse, h débau~he b plus énervante, la plus dégradée, vulgaire en Allemagne, raffinée à Paris. Dans cette atmosphère malsaine, où les parfums cachent à peine les miasmer, - dans ce monde ae petites maitresses, de filles illégitimes, de courtisane~; gouvernant les Etats, de nerfs affaiblis, de princes crétins-vous respirez enfin en rencontrant la tail:e <::olossalede Pierre Ier, de ce barbare en simple uniforme de gros drap, de cet homme du Nord, robuste, musculeux, plein <l'énergie et de force. C'était le premier Russe qui prenait ainsi sa place au milieu de souvuains de l'Europe. Il venait pour apprendre,-mais il apprit beaucoup de choses auxquelles L'HO]îTuIE. il ne s'attendait pas. Il comprit trop bien la vieillesse des Etdts de l'Occident et la dégénérescence des gouvernans. Alors on ne prévoyait encore la Révolution - qui allait sauver ce monde ! on prévoyait seulement la dissolution. -Avec cela, il comprit donc le rôle possible <lela Rusiiie vis-à-vis de l'Asie et vis-à-vis de l'Europe. Faux ou non, son testament contient ses idées, qu'il a, du reste, exprimées maintes fois dans des notes, des mémoires. Le gouvernement russe est fidèle à la tradition de Pierre Ier jusqu'à Nicolas, et Nicolas lui-même la continue au moins dans la politique extérieure. On peut la blâmer, la maudire. - Mais comment prétendre qu'elle: soit sénile, stationnaire, décrépite? On dit que le peuple russe 1>f: tient à l'écart et reste immobile, tandis qu'un gonvernemant presque étranger règne comnee il veut à Pétersbourg. Des auteurs allemands eu concluent qne le peuple russe, stationnaire et asiatique, n'a rien de commun avec l'action de son gouvernemen.t, que c'est une race de demi-sauvages, diplomatiquement conquise par les Allemands, qui la mènent où bon leur semb1e. Les couquêtes de l'Allemagne, il faut l'avouer, sont les plus grandes et les plus pacifiques du monde. Les Allemands ne se contentent pas de b parenté del' Angleterre et de l'Amérique t Stamverwand . 1), ils ont encore toute la Russie, soumise par les chevaliers des provinces baltiques, par une famille de Holstein-Gottorp, par une nuée de généraux, de diplomates, d'espions et autres dignitaires d'origine allemande. Il est vrai que le gouvernement de Pétersbourg n'est pas national. La dénationalisailon de la Russie moscovite, tel était le but de la Révolntion de Pierre Ier. L'opposition passive et une certaine immobilité du peuple est aussi un fait exact. 11Iais,d'un autre côté, le peuple donne involontairement une lJa~e colossale et vivante au gouvernement. 11 forme lm chorus immense qui impri:.:e un caractère sui r1eneris an despotisme allemancl-(puisqu'on le veut) - de l)étcr/jbourg. Le peuple, qui ne l'aime p ,s, voit pourtant en lui le représentant de son unité nationale et de sa force. . Rien en Russie ne porte ce caractère de stagnation et de mort que nous voyons dans ces répétitions invariables, monotones, de générations en générations, chez les vieux peuples de l'Orient. De l'incapacité d'un peuple pour certaines formes de transition, il serait injuste cle conclure à son incapacité absolue de développement. Les peuples Slaves n'aiment ni l'i1li:e de l'Etat, ni l'idée de la Centralisation. Ils aiment ~ vine dans des communes éparpillées, qu'ils seraient bien contents de mettre à l'abri de toute intervention gouvernem~ntale. Ils détestent l'état de soldat,-ils détestent la J)olice. La fédération serait peut-être la forme la plus nationale pour les Slaws ; lè régime tout opposé de Pétersbourg n'est qu'une dure 6preuve, qu'une :forme provisoire, qui, certes, a produit aussi du bien, en soudant, par force, les <liYerses parties de l'Empire, et en leur imposant l'U1lité. Le peuple russe est un peuple cultivateur. L'amélioration de l'état social de la minorité propriétaire en Europe, s'est faite au profit des Citadins. Quant aux paysaus, la Révolution ne leur apporta que l'abolition du servage et la division des terres. Or, vous savez que la division <les terres serait un coup mortel pour l'organisation <lela Commune r-usse. Rien n'e;,t pétrifié ~n Russie; tout y est encore E-nétat de·liqui<lité, de préparation. Haxthausen a très bien remarqué - que partout en Russie on voit "le non-achevé, fa croissance, le commencement." Oui, on sent la chaux, 1a scie et la hache.... et avec ce1a on reste serf p:lisible ùu seigneur, fidèle sujet ùu Tzar? . . . . . . 1.Tnedes questions les plus naturelles, serait de se demander si la Russie doit p;isRer par toutes les phases du développement européen, ou si elle doit avoir un tout autre déYeloppement révolutiounaire ? - Moi, je nie complètement h nécessi_té de ces répétitions. Les diverses phases douloureuses, difficiles, du développement historique de nos prédécesseurs, peuvent et cloi\·ent être parcourues p,u nous, mais de la même m:rnière dont le fœtus pRsse par les degrés inférieUt's de l'existence zoologique. l:'n travail foit, mi r0su1tat obtenu, est fait et obtenu pour tons ccu'{ qui le eomprennent; - c'est la solidarité du progrts, c'est le i1,rj:Jrat humanitaire. Je sais très Lien que !e rJ,:;ultat à hi seul e.,. iutrr,nsmissible, au moins inuti:c,-le résultat n'est ré, 1, ne s'assimile qu'ayec toute fa genèse logique. Cl·aque écolier découvre encore une fois les })r◊11ositio 1s d'Euclide, -- mais quelle <lifl'érence entre le t..;,:n.il d.' !~uelide et eelui Je l'en~,rnt de nos . . ' • JOurS ... , La Russie a fait son embryogénie révolutiorq1dre dans sa classe Europi:rnne. IA noblesse avec le gouvernement forme l'état Européen da,1s l'état Slave. ( 1) Nous avons , passé par toutes les vhase:; du libéralisme, depuis le constitutior.alisrr.e ui1 6 lais jusqu'au culle de 93. Nous l'avons fait, je l'ai <lit ailleurs, comme l'aberration des étoiles répéte en petit le C::heminparcouru par la terre dans son orbite. . Le peuple n'a pas besoin ùe refaire ce trjste travail. Pourquoi verserait-il son sang pour parvenir à ces demisolutions, auxquelles nous sommes parvenus nous autres, (1) Elle n'est pas du tout gerr.1anisée, elle est plutôt gallicanisée, et si le gouvl.'rr.ement aime les Allemands, la noblesse les déteste. dont }a seule importance est d'avoir posé d'autres questions, d'avoir éveillé d'autres aspirations. Nous avons fait ce service pénible, lourcl, -- pour le peuple ; nous l'avons payé par les gibets, les trnvaux forcés, les c.isemates, les exils, et par une existence mandite oui ! par une existence maudite. • ' On ne se doute pas en Europe de ce l[Ue nous avons souffert depuis deux générations. La compression devenait de jour en jour plus grande, plus lourde, plus blessante ; il fallait cacher sa peHsée, étouffer les battements du cœur ... et au mi lieu de ce silence morne, pour tonte consolation. on e11trernynit avec terreur l'insuffisance de lïùée révolutionnaire et l'indifférence du peuple 11ourelle. . Voilà la source de cette noire. tristesse, de ce scepticJSme navrant, de cette) ironie accab}ante, qui fut !e caractère de la poésie rns.0e. Tout ce qui est jeuec, tout ce qui a le cœur chaud, chercl1e à s'assoupir, à s'oubJ;er ; les hommes de talent rneü.rent à mi-chemin, sont exilés, ou s'exilent eux-mêmes. On parle de ces hommes et de leur terrible fin, parce qu'ils sont parvenus à briser cette voûte d'airain qni les entourait, parce qu'ils ont donné une preuve de leur force ... Mais des ceJttaines d'autres qui se sont croi,,és les bras par désespoir, qui se sont moralement suici<lés, qui sont allés au Caucase, q11i se sont perclus dans leurs terres, dans les m2-isous de jeu dans les cabarets,--tous ces foinéallts, que personne· n'; regrettés, n'ont pas moins souffert que les autr~s. Pour la noblesse, cette éducation a fait son terme. La Rnssie civi1isée n'a maintenant qu'à se fondre duns, le peuple. • La véritable découverte du peuple russe, pour la Rirnsie curopéennisée, ne date que depuis la révolution de 1830. On comprit enfin avec étonnement que k peuple russe, si indifférent, si incapable pour toutes les questions politiqucs,-tonchait par sa manière <l'être de beaucoup plus près à une nouvelle organisation sociale, que ne font les peuples d'Europe.-Pcut-êtrc, dira-t-on, mais il touche aussi à l'organisation de qnelques peuples de l'Asie. Et on montre alors la commune rurale chez les Hindous, assez pareille à la nôtre. Je sais bien loin de uicr que les peuples de l'Asie n'aient pas d'éléments sociaux supérieurs r\ ceux que nous voyons chez les peuples <le l'Occident. Cc qui arrête les peuples de l'Asie, ce n'est pas la commune, mais leur immobilité, leur exclusivisme, leur impuissauce de s'arracher au patriarchalisme, à l'existence <lela race ; tout cela n'a pas de puissance chez nous. Les peuples slaves ont au contraire une grande flexibilité; leur facilité à tout s'approprier, langues, coutumes, arts et procédés mécaniqnes, est remarquable. Ils s'acclimatent aussi bien auprès de la mer glaciale qu'aux bord& de la mer K oire. Dans la Russie civilisée (toute détachée qu'elle soit du pe11ple, elle représente pourtant son caractère), on ne trouve· pas de ces incompatibilités de vieilles femrnc3 de . . . ' ces mcapac1tés serviles comme on en trouve i chaque pas dans le vieux monde. . ~ ou 5, ,~ommes stu~éfaits e1_v1oyant_ le mur chinois qui chv1sr 1 .ë;urop~ et qm paraît rnfranch1ssal11e. Est-ce oue l'Angleterre et la France connaissent quelque chos/ du mouvement intellectuel en Allemagne? Et ces deux grandes Chines de l'Europe se comprennent encore moins l'une l'autre. Eloignées de quelques heures l'une cle l'autre, faisant un n{>goce incessant, nécessaires l'uue à. l'autre,--les villes de Paris et de Londres sont plus séparées que celles de Londres et de )J ew-York. Un homme de peuple, Anglais, regarde uu Francais avec une haine sauvage, avec un air de-supériorité q~i le fait prendre en pitié. Le bourgeois anglais est pire encore, il vous assomme <le questio11s, moutrant une telle profondeur d'ignor,mce du pays ,,oisin qu'on ne sait que répondre. Le Ji'rançais de son côté a la faculté de rester cinq année~ dans Leicester Square, sans rien comprenclre à ce qui se fait autour de lui.-Commeut ce fait-il donc que la science de l'Allemagne, qui ne passe pns le Rhin, passe très bien le Volga, et que la poésie britannique qui s'all0re en pas~ant le canul, traverse saine et sauve la Baltique? Et cela, sous un gou\'ernement ombrageux et arbitraire, qui prend toutes les mesures pour nous séparer de l'Europe? Toute notre éducation prirée et pu blil1ue lJOrte Jécidéntent un caractère d'universalit6. Il n'y a pas cl'éclucation qui soit moins religieuse que: la nôtre et qlli soit plus polyglotte, surtout par rapport aux langues modcrnP.s. C'est la réforme <le Pierre Ier éminemment ré,diste, laïque et généralement européeüne qui a imprimé cc caractère i, l'éducation. Ce ne fut que sous l'empereur Alexandre et <l,ms les dernières am:ées <le son règne•, qu'on institua des chaires de théologie dans les Universités. Nicolas fait de grands efforts pour gâter l'éducation publique, -il l'a frapp..:e numériquement; mais quant à son orthodoxie policière, je ue peus~ pas que cela prenne racine ; pour les langues modernes, c'est déjà tellement nécessaire et habituel, que cela restera. La gazette officielle de Saint-Pétersbourg, parait en russe, en français et en allemand. , Notre éùucation n'a rien de commun avec le milieu pour lequel l'homme est destiné, et c'est pour cela qu'elle est bonne. L'éducation détach,e le jeune homme d'un sol immoral chez nous, l'lrumanise, en fait un être civilisé et le met en opposition avec la Russie officielle, Il en souffre beaucoup. C'est une expiation des fautes de
nos pères, et là est le germe réYolutionnaire. Les temps les plus durs sont passés; la petite minorité, jusque là complètement <létach~e de la nation, a rencontré le peuple, là où elle pcn:;ait être le plus loin <lelui. 1hec quel (:tonnement on écoutait nos récits sur la commune r'usse, sur le partage continuel des terres entre les•membres <lela commune sur la simple administration par nn Starosta électif, 1,ur le vote universel dans les affaires rle la commune! Quelquefois on nous traitait ea visionn'lire!', en hommes qui av·ücut perùu l'esprit à force ùe so..i:ili....mc ... I:11 bien ! voilà un homme qHi est médiocrement rGvolutio·maire, qui publie trois volumes sur la commune rurale c•n Russie,·- Haxthausen, Catholique, Prussien, agronome et monarchiste tellement rudical, qu'il trouve le roi de Prnssc trop lib6ral et l'empereur Nicolas trop philantropc ! Les faits r,chtés par nous sont débités in extenso par lui. Je ne répétc•ra.i pas encore une fois tout ce que j'ai dit sur cette org.misation rudimentaire rlu s'!lf-government ùes communu;, où tout e:::télectif, où tous sont propriétaires, quoi'lue la terre 11'.1ppartienneà personne, où le prolétaire est une anormité, une exception. Vous la conntiissez assez ponr comprendre que le pe: 1Jple russe, le malheureux qu ïl est, écrasé en partie 11arle servage et entièrement par le gouvernement qui le méprise et l'opprime, ne pouvait suivre l'exemple de:speuple:; de l'Europe clansleurs ph:iscs révolutionnaires complètemenf urbaineset qui aur:iicnt immédiat--ment attaqué par la base l'orgauisation communale. Au contraire, la révolution qui s'accomplit maintenant se trouve placée sur le même terrain-et nous verrons qu"I sera le résultat de cette rencontre, Conscr\'erla commune et 1e1~dre!'.individu libre, étenùre le se~Jgorernment de la com.. une et du c!i,trict (Volost) aux \'illcs et à l'Etat er1tier, et maintenir !'Unité nationale, dércloppcrles droits personnels et maintenir l'indivisibil:té de la terre-Yoilà la ques,ion révolutionnaire }>Our la Russie, la m 'me qne la grande aul anomie ~ociale dout la solutionincom11lèteagite tant l'Occident. L'Etat et l'inùividu-l't\.utorité et la Liberté--le Communismeet l'égoïsme (clans le sens large du mot), ce sont les colonnesherculéennes de 1...grande lutte, de la gra11de (popéerévolutionnairo. L'Europe oppos'e une solution tronquée et al1Straitc. L:iRussieune autre tronquée c:t s1.uva'ge. ~l synthèse sera faite var la Révolution. Les formules soc:alesne président jam,tis à leur réalisation que vaguement. Les peuples Anglo-Saxons sont parvenus à émanciper l'individu en niant l:::, commm:auté, en isolant l'homme. Le peupleru~se conserYe la ccmmunauté, en niant l'individu,en absorbant l'l1omme. Le ferment qui devait mettre en mo11vement la masse des forces inertes endormies par le patriarchalisme communal, c'est le principe de l'individualisme, de la volonté personnelle.Ce forment entre dans la vie russe par une miefüang~re, s'incarne dans un tzar révolufrrnnaire, qui • nie la tradition, la nationalité, qui divise le peuple en deux. L'empirerusse est une création du XVIIIe siècle, tout ce qui a été con~u dans ce temps portait Eë. ;,;oides ge:rmts réYolutionnaires. Le palais célibataire de Fr6dëric JI et la maison de correctionqui Servait ÙC f('.l l;S Ù S011 père, n'étaient nullementmonarchiques comme l' Escur;,11 ou le:; Tuileries. Il y a\'Jit un air âpre, matinal, dan~ le noJveau royaume; il y avait quelque choge de simple, de se', <lepositif, de rationnel,-ct c'est ce qui tue la religion et la monarchie. Demêmeen Russie. Pierre I rolilpit \iolcmment avec la trad'tion Bysantinomoscovite.Homme de génie, il aim üt le pouvoir brnucoup piu,que le trône, il a.;issait plutôt 1,ar la terreur que par la m~jesté, il détestait la mise en scène., cc qui est très importantpour la monarcl ie. L'or;pnisatiou de l'empire russe est de la plus h'llltc s;mplicité. C'est le gouverne•YJentdu docteur Francia. au Para~uayappliqt:é à un peHple de 50 millions d'hommes. C'e~tla réalisation de l'idéal bon aparti 1tc : le peuple muet,sans droits, sans défenseurs, hor:, la loi, et, Yis-r:.- YÎS ùelui un minorité entrainée, prot6gée, at:noblie par legourcrnement et qui forme l'adrr.iiiistration. La Russie est, ù h lettre, gouvernée par les aide-<leomps, les on1onn:rnces, les copi"tes et les esta~~,t.t;.s. Le !foat, le comeil d'Etnt (c:-{-,:tionpost~ric1,rc.), les mi,1isùes - ne l:.Ontque cles chancellcrirs, où on ne discute pas,m::isoù on exëcute; où on ne tldibère pas, mais où tn transcrit. Toute l'administration ne reprt'.-entc que les bras d'un tGlégraphc par lequel l'homme du Palais d'hiver an:ioncesa Yolonté. Cetteorganisation exp ~<lifr,e antonntitp1e, est beaucoup rnoi!lsatt~qu:i.blcpar la bas~ que par le crime. ' Jhns la monarchie, le roi tué - la monarchie reste. Chez nous, l'emprrrur tué, - la discip1ine reste, l'ordre bureaucratiquereste - pourvû que le télégraphe joue - il seraobéit.... On peut demain chas ;er Kicolas, mettre à sa place Or,offou je ne sais qui, sans la moiudrc secousse. Les affaires 'expédieront avec la même pr6cision, la machine continueraà fonctionner, à transcrire, à transmettre, à répondre,-les machinistes continueront à voler et à faire du z ~le. L'impératrice Catherine II a eu peur de cette terrible et muetteomnipotence, de cette obéissance illimitée d'a1' HO~I ii E. gents et a·esclaves qui servent celui qui ordon~e, dont l'obéiss·rnce survit mêmo au maître. Elle voulait appeler la noblesse à une existence plus indépendante, pour :woir nn entourage attaché librement à elle et à la couronne, Si:r lequel elle pût compter. Le silence <les copistes et des e.ll.écuteurs effraya la femme de Pierre III! C'est dans le même silence qu'Alexis Orloff étrangla son maitre emprisonn~, que les copistes écriv:i.ient : " S. M. daigna mourir," et les exécuteurs exécutaient quiconque ne le croyait pas. Ces 110:ivelles organisations étaient vraiment 6tranges, surpreauntes. On n'a jamais sérieusement réfléchi sur leur caractère excentriq;1e, mélange exotique de démocratie et d'aristocr:1tie, du despotisme le plus illimité et <le droits d'élection très étendus, de J ean-le-Tcrrib!e et de Montesquieu. Tontes ces institutions portent le double cachet de la périorlc <lePierre I et cl 'institutions 1w...ionales peu formulées, qui s'épanouissent par l'influence organisatrice <les idées de l'Occident et qui les modifier t à leur tour dans un sens qui leur est presque contradictoire. Des juges éligibles et éligibles pour 6 années, cles juJes ap~trfenant aux trois classes, à la noblesse, à la boL,rgcoisic et aux paysans, et point du tout d'état j11dicia ire! Chacun <le ceux qui ont le droit de prendre part aux élections l)CUt être C:lu juge. L'absence de l'ordre jJcliciaire est un des faits des plus graves. Un ennemi de moins-et quel ennemi ? l'autre homme noir, le pendant laïq11c du prGtre, et le ganlien mystérieux de la loi humaine qui a le monopole de juger, de condamner, rle romprcndrc la rati.u scripta. Il est très drôle de voir des or.icicrs d,! ca.:alerie démissionnaires, devenir juges par é'cction, sans rien connaître aux lois et aux proc6dures; mais il est d'aut,·e part bien triste de déclarer tous les hommes incapables à st'ltuer sur un fait à l'exception des experts en robe, qu'on a élevés ad !toc. Si les juges élus sont mauvtis, t::nt pis pour les élnctcurs, - ils sont majeurs et savent ce qu'ils font. l\fais, élit-on, la jurisprudence ne vient pas avec la barbe, les lois sont si compliquées, qu'il faut de longues annéc-i, de grandes études, pour se rccomrnitrc dans le <léllale judici~ire ... C'est nai -pourtant il ne s'en s11it pas qu'il faille préparer Ù;}s l'enfance une classe entière à comprendre ces lois, mais bien qu'il faut jeter ces lois au feu. Les rapports des hommes sont très simples. Ce sont les formalités, les r6miniscences, c'est la poésie de la robe, les fiorituri de la jurisprudence qui embrouillent les questions. • En Russie, le tribunal est composé d'un membre élu par la noblesse, d'un autre élu par les bourgeois, d'un troisième élu par lès paysans libres. Denx candidats sont élus par la noblcsso 1>ourl'emploi <luprésident. Le gouvernement choisit l'un des deux et envoie de son côt6 un procureur investi du droit <lesuspendre chaque décision et d'en référer au sénat. Si on se rappelle que les procureurs appartiennent aussi à la nobk sse, on voit ch irement que l'actioll du jubeassesseur bourgeois et du juge-assesseur paysan est paralysée dans tous les ras <l'opposition. Pourtant ils ont le plein droit de protester et <le faire passer l'affaire au .sénat. Cela ne se foit 11ue bie11rarement. La raison en est simple: c'est que le sénat, qui n'a aucun élément ni popu 1airc, ni électif, e.;t tonjoura d'accord e.vec le parti nobiliaire et gouvernemental. Ce que nous occupe à préseut, c'est la norme et noa l'abus. Pensez au cadre, à la puissance possible dans l'aveni,, et non à l'application actuelle. Il y a une dizaine d'années, un homme intègre, austère, un vi'cux négocbnt de Moscou fut élu maire de cette ville. Le rn:;.ire des villes est chargé de la surveillance des affaires financières de la citE:, il administre les revenus, les dépenses. Ordinairement c'est un millionnaire qnclco1111uc,aimant à poser dans les fêtes officielles,-qui est élu, il donne des dîners monstres, des bals monstrueux et signe tout ce que le gouvernement veut et tout ce que les employ~s désirent. Le mafrc de l\Ioscou, Chcstafî, comrrit r,utrcment ses fonctions. 11 cou1Ja tellement les a·1 •s ,!nx Yolc1:rs officiel~, que le gr-:nd maitre de police lui déchrn une i;•1errc aclw.rn6e. Le 11égoci,,mt l'accepta, la lutte finit par la c:rnte compl~tc du général de la police, _. ]lais cc ne rn:1t pa:. seulemeut les juges qui sont électifs. La ;,o7ice d:.-sdistricts est élective. Le capit::iinP. de rolice, e:t en rartie ses as..,csscurs, sont élus p:n la noblesse. Li où finit la police du district, commence la commune rurnle,- avec Sùll ù parle: son staroste élu, sa police élue; aYcc son absorption de l'individu au nom d'un commnnis ·1e trn<litionnel et natio1,al. Là où commence de l'autre ctté la centralisation gouvenlt'mentale, c\:st-à-11ire, ::iu-dcssns de l'admi,1istratio:1 locale tles provinces, là finit trntc trace tlu choit imli"i<lnel,- l'i111lividuest complètement ab~orbé, anéanti par la dict·•t1,re <lePétcrsbourg, au ncm de l'autocratie la plus absolue et la moins slave clu rn0nde. Le seul milieu où les idées cl11nroit personnel et les idées révolutionnaires puissent se produire, se sont la noblesse et la bourgeoisie. L'influence de la bouri;eoisie est moindre en Russie qu'en Europe,-non seulement parce que le développement industriel a été moindre, mais encore parce que la haute bourgeoisie passe facilement dans la noblesse (les employés <lel'état, les négocians les plus riches, les artistes, les décor~s, etc.~ 1 Nous :ne connaissons pas encore 11otre bourgeoisie comme force morale. Elle s'est montrée dans tous les cas extrêmement rétrograde, conservatrice, orthodoxe, servile et patriotique plus que de besoin. Opprimée, cachant sa richesse et se cachant à elle-même, elle reste muette, elle s'efface, bàtit des églises, distribue des secours aux pauvres et aux prisonniers, donne des cadeaux à tous les employés ... et accumule des :-:iillions. Ce n'est que la nouvelle génération qui, ayant reçu mie éducation tout-à-fait europ6enne, p'trtagera nos idées révolutionnaires. La noblesse chez nous est plutôt une administration qu'une aristocratie. La naissance, les titres de prince et de comte, l'ancienneté du nom, l'éteudue des possessions ne donnent absolument aucun privilège. C'est le rang de service qui les donne. Lorsqne deux générations des nobles n'ont pas servi, b gouvernement peut ôter la no)Jlcsscaux héritiers. Cette universalité des services en change le sens. Ser- \'Îr le gouvernement en Russie n'a pas le sens que les Franç:i.is attachent à ce nom, c'est-à.dire le sens d'être un agent du gouvernPment, une âme damnée du pouvoir. Tous les conspirateurs du l-1/?G Décembre occupaient des places dans le service. Une distinction parfaitement tracée se fait dans l'opinion publiqne. Entre les employés réels, dévoués, pleins de z~le, les employés par goût et les employés qui ne sont rien de cela. L~s J>remi rs rnnt quelquefois craints, mais jamais respectés. Les autres forment presque exclusi\·em2nt la société in1lépcndante dans les capitales (t clans les provinces. Cette classe est 'lssez nombreuse, si on y compte les offü:iers qui, en général, sont loin d'être sen iles et m:rnvais, comme les emp!oy~s civils, les hommes qui ont quitté le service à. 2 J ou 2ü ans, les propriétaires 'lui demcnrent dans leurs terres et ne serccnt que lorsqu'ils sont llùs p::r la noblesse. C'est là. que l'étlncation uni-verselle et polyglotte a produit les l10m:ues les plus inclépcndant1: de l'Europe. Le despotisme: écrasant, l'absence <lela parole, la nécessité <l'être toujours sur ses ga~ùes, ont habitué la pensée à la concentration, à un tranil intérieur, hardi et plein de haine. La littérature mod.:-rne a.dévoilé r.e qu'il y a <lepassions sourdes, accumulées dans la P'JÎtrinc russe. L'opinion de la minorité civilis6e le constate aussi. S:,ns peur et sans remords ()Il arriva au socialisme en politique, au réalisme, à la nég:üion de toute rdigion en philosophie.~ Le socialisme unit les révolutionnaires Cl.llopéens aux révolutionnaires panslnves. Le socialisme ramena le parti révolutionnaire au peuple. C'est très signific:itif. Tandis qu'en Europe le socialisme a1>paraît comme un drape:tu de discorde, comme une menace; chez nous, il se lève comme l'arc-en-ciel des révolutions, commt. une esp6raY:.ce. :Maintenant que vous conni.issez un peu les éléments de la vie russe, vous êtes à même de voir qu'il est de toute impossibilit(;! de foin· un pas en aYaut, sans eutrer dans une phase révolutionnaire on d,ms une guerre européenne, Toutes les questions vitales sont posées de manière que leur solution nous entrai11e de toute nécessit/\ à une réorganisation sociale, à moins qu'elle ne soit différée par une préoccupation extérieure. L'émancipation des paysans, chose si facile dans les autres pays, est impossible sans la concession de la terre; l'émancipatic:1, l'émanci11ation a1:ec la terre, c'est l'expropriation partielle de la noblesse. Les conditions d'existence de la noblesse seront chaugées, àYec elles ses rapports an gouvernement, et n'oublions pas que la juridiction et la police cxtra-urhaine appartiennent à la noblesse, et que la noblesse de chaque province est organisée en corps clélib6rant avec les mar6c11aux, ayant des réunions régulières. Si un homme énergi(lue occupait le trône russe, il se mettrait à la tétc du monvcment émancipa~eur; il couvrirait d'une véritable gloire la !L1 de la période <le Péter31Jou~g et il aurait hâté un mouvement inévitable qui, à défaut de cet homme, cnglout; !'a le trône ; mais pour cela, il fallait être J:licrre Ier et non Nicolas. Pcnuc.ttez-moi d'expliquer ma pensée daxantagc. Cc n'est pas seulement l'alJsolutismc, comme tel, q1li empêche en Ru:;sie tout progrès. Le d"spotisme d~ Percrsbourg conserve, comme nous l'avons <lit, sa' forme dictatoriale, r6volutionnaire, clénnée de tradition et de princi1>e,-c'est une machine de guerre, cb lutte, qui pourrait senir à d•vers usages. ?.fois le pli abominable que le gouverne_ ment russe a pris dans toutes les que~tious de l'intérieur d"puis le 26 Décembre 1:::25, le rrn,i arfaitcmcnt inca-' palilc de faire quelque chose <le hou. ~ icolas a immensément rétrogradé et cela n.vecune mnlatlrcsc surprenante. Kic<'las vo •lut (lt:•s le commencement de son règne être plns Tzar qu'Empcreur - mais faute cle comprendre le génie slave, fau:c cl'en avoir l'intuition, il n'y parvint pas, tt se 1JOrn!l. à persécuter toute a<;pirntion ver:; la liberté, à étouffer tout désir ùe 1>rogrès, et à arrêter tout mouveme1 t. Il Youlait faire de son Empire une Bysance militaire. De là son orthodoxie de parade, froide, glaciale comme le climat de Petersbourg. Nicolas n'a compris que la compression, que lïmmobilité, que le côté chinois dfr la qucstiou. Il n'y a dans son système rien d'actif, ri1m de national même, il a cessé d'être européen, sans devenir russe. Pendant son long règne, il a touché à toutes les institutions, à toutes les lois, pour y introduire un élément de mort - de paralysie. La nobleese ne pouvait devenir une easte dose, id.ce-
à la faculté de l'obtenir. Nicolas y mit des (;ntravcs el"\ liant le titre de noLle héréditaire au rang de Juajor dans l'armée et au rang de Conseiller d'Etat au service civil. Avant lui chaque noble était électeur; lui, il fit un cens électoral. Avant lui tonte la police des· districts était active ; lui, il envoya des officiers de police (stanoii) de la couronne, som: le commandement du Capitaine de police, élu par la noblesse. Auparavant, lo code criminel russe ne connaissait pas de peine capitale. Nicolas l'introduisit pour les crimes politiques et le parricide. De même le code criminel ne connaissait pas l'absurdité de la prison, comme châtiment - Nicolas l'introduisit. La tolérance religieuse était une des bases glorieuses de l'Empire créé par Pierre Ier. Nicolas fit une loi sévère contre les hommes qui changeaient de i·eligion. La chai te donnée à la noblesse lui garantissait le droit de vivre partout où elle voulait et de prendre service dans les pays étrangers. Nicolas restreignit le droit de locomotion, le temps des voyages. Il introduisit la confiscation. Depuis Pierre III, la chancellerie secrètE:, sorte d'inquisition laïque, était abolie. Nicolas l'a retrouvée; il a form~ un corps entier d'espions avec ou sans armes, qu'il donna en apprentissage à Benker.dorff et qu'il confia plus tard à son arr.i Orloff. Avec ces moyeus, Nicolas n'a réussi qu'à enrayer le mouvement, il a mis <lespierres sous toutes les roues, et maintenant il s'indigne lui-même de ne rien voir marcher. Il veut maintenant faire quelque chose à tout prix, il y tend de toutes ses forces ... les roues sauteront peut-être et le cocher se cassera le cou. Mais il peut encore avoir le dess11s dans sa lutte avec le vieux monde, divisé, fatigué, asservi. J'ai dit, cher Linton, dans ma première lettre, que si le peu1)le russe n'avait qu'un avenir possible,-pour l'empire russe, il pouvait bien y avoir deux éventualités. J'ai la plus profonde conviction que l'impérialisme russe se dessécherait, se décomposerait et cela très vîte, en face d'une Europe libre, unie (autant que les variétés nationales le comportent.) L'autocratie de Pé1ersbourg n'est ni un principe, ni un dogme; c'est une force; et pour rester telle, elle doit toujours faire quelque chose. Faire ùe la police et de la rési:,tance, ce n'est pas faire quelque chose, et les ,autres matériaux pour une autre activité lui manquent ou lui font peur. Vis-à-vis de l'Europe révolutionnaire, l'impérialisme russe n'aurait que deux chances : l'une, c'est de devenir despotisme démocratique et social, ce que je ne dis pas ~tre absolument impossible, mais ce qui rendrait le tzarisme tout autre chose qu'il ne l'est. L'autre, c'est de se pétrifier, de s'immobiliser à Pétersbourg et de perdre chaque jour l'influence, la force, le prestige, et enfin, <lese voir chassé un beau matin par l'insurrection des paysans ou par une révolte des soldats. Près de vingt millions de serfs, aidés de cosaques profondément offensés par la perte de leurs droits et franchises ; aidés des dissidents dont le nombre <::lta force morale sont très grands, et dont la haine contre le gouvernement est irréconciliabl~, aidés d'une partie de la noblesse !... Cela peut donner à penser aux habitants du Palais <l'hiver. Est-ce que Pougatcheff n'a pas été m:iître absolu de quatre provinces pendnnt des mois entiers? Il est vrai que les mesures militaire:. sont bien autrement prises maintenant qu'elles ne l'étaient en 1777. Et pourtant je me rappelle très-bien l'insurrection des colonies militaires à Staraia-Roussa, en ] 831, à 150 kiloL'HO~1ME·. mètres de Pétersbourg et 450 <le Moscou, dans un endroit où il y a to,Jjours d:is musses clc troupes cantonnées! Les insurgés interceptèrent les communications entre les deux capitales, ~urent le temps d'exécuter tous les officiers et d'insta1ler un certain gouvernement composé des scribes des régimens .... Depuis, les idées ont marché. Le soldat russe n'est pas habitné à assommer des Russes. Un jour, dans une émeute des paysans, lors de l'installation du nouveau ministère des domaines, on envoya un régiment pour dissiper le peuple. Le peuple ne s'en alla pas, il cria, il demanda je ne sais quoi. Le général, après avoir sommé la foule, ordonna de charger les fusils et d'ajuster...... la foule ne bougea pas ; alors le général fit signe de faire feu ... Le colonel commanda : Feu!.... pas un coup ne partit. Le général étonné, stupéfait, répéta d'un air terrible : Feu ! Les sold·-its abaissèrent les fusils et restèrent immobiles. Le général. pâle comme la mort, pria le colonel et les officiers ... de garder le secret.-Cela pent se reproduire ... .L'air devient si vif, si électrique, lorsql'l'il y a révolution en Europe .... En un mot, !'Impérialisme r11sse ne peut être que très-triste et très-précaire, à côté de l'Europe révolutionnaire et libre. Il ne peut être colossal et victorieux que près de l'Europe réactionnaire. L'Europe mnnarchique, mais peu martiale, ne veut pas et ne peut pas Jaire de guerre sérieuse au Tzar. Le Tzar, cle son côté, ne peut pas s'abstenir de faire la guerre à l'Europe, à moins qu'elle ne lui fasse cadeau de Constantinople. Constantinople? - Oui, Constantinople. Il la iui faut pour que le peuple russe ait les yeux tournés vers l'Orient ; il la lui faut pour être soutenu à outrance par l'église orthodoxe; enfin, il la lui faut instinctivement, car, au fond, lui aussi est le porteur d'ulle Destinée : il continue, sans le comprendre, l'accomplissement des vues internes de l'histoire; il travaille pour rendre plus rapide la pente qui doit l'engloutir, lui ou ses successeurs. • Le temps du monde slave est arrivé. Le taborite, l'homme de la commune se sent agité ...... Est-ce le socialisme qni le réveille ?...... Où plantera-t-il son drapeau? Autour de quel centre se ralliera-t-il? Ce n'est pas Vienne, ville roc;oco-allemande; ce 11'est pas Pétersbourg, ville allemande-moderne; ce n'est pas Varsovie, ville catholique, ni Moscou, ville exclusivement russe, qui peuvent prétendre au rôle de la capitale des Slaves-Unis?- C'est Constantinople,- Rome de l'Eglise orientale, centre de gravitation pour tous les Slaves-Grecs, ville entourée d'une population Slavo-Hellène. Les races Germano-Latines continuent l'Empire occidental,- les Slaves continueront-ils l'Empire oriental? - Je ne sais, mais Constantinople tuera Pétersbourg. Pétersbourg serait une absurdité pour un Empire qui possèderait Constantinople ; et un Holstein-Gottorp, déguisé en Porphyrogenète ou en Paléologue, serait par trop ridicule, pour être possible. Ces braves émigrés allemands feront bien de rentrer dans leur patrie qui les réclame ... ou qui s'arrangera pour se passer d'eux; mais alors au prix ùe flots de sang ...... Est-ce que vous n'entendez pas, comme si c'était derrière votre porte, le Cosaque chuchottant avec deux amis qui vous trahissent et qui lui serviront de guides jusque clans le cœur de l'Europe ? Nous l'avons prédit dès 1849 (1): LEs HABSBOURGET LESHOHENZOLLERNvous AMENERONTLESRussEs. Pour le Tzar, l'invasiou est le seul moyen de popuhrité, de conservation. Ce débordement provenant <le trop de forces sans emploi, sera pour lui un moyen d'éviter les (l) Lettre à J. M:izzini, publiée dans l' Italia del P<rpulo 1849. questions intérieures, en même temps que l'assouvissement d'un désir sauvage de combat et d'agrandissement. Pour l'Europe - toute guerre est un malheur. L'Europe n'est plus d'âge où on fait des guerres poétiques. Elle a d'autres questions à résoudre, d'autres luttes à soutenir,- mais elle l'a voulu! ... C'est une expiation. Si la guerre d'invasion ne va pas à la civilisation, au développement industriel de l'Europe, la monarchie absolue, le despotisme soldatesque ne lui vont pas non plus ; et pourtant tout le continent les a préférés à la liberté. Monarchique vent <lire- militaire. C'est le régime de la force matérielle, c'est l'apothéose de la bayonnette. Il n'y a pas de Bonaparte civil, et le fils de Jérôme est lieutenant-général. Peut-être qu'au milieu de ce sang, de ce carnage, de cet incendie, de cette dévastation, les peuples se réveilleront et verront, en se frottant les yeux, que tous ces rêves terribles, dégoù.tans, affreux, ne sont que des rêves ... Bonaparte, Nicolas, manteau aux abeilles, manteau au sang polonais, empereur du gibet, roi aux fusillades-cela n'existe pas, et les peuples s'étonneront de leur long sommeil en voyant le soleil déjà long sur l'horison .... Cela peut êti;e...... mais ...... Dans tous les cas, cette guerre sera l'lntroduzione maestosa e rnarziale du monde slave dans l'histoire universelle et u,namarcia funebre du vieux monde. Je vous salue fraternellement. A. HERZEN, Londres, le 20 février 1854. JERBDY, IMPRIMERI-E UNIVER.8ELLE, 19, DOltl:'ET STREET. EN TENTE A L'IJJfPRIMERIE UNIVERSELLE, 19, DORSET STREE'l' : Les Biographù1s Bonapartiltes par Ph. RerJeau. Prix : 3 francs. LESBAGNDE'SAFRIQU HISTOIRE DE LA TRANSPORTATION DB DÉCEMBRE, Par CHARLES RII3EYROLLES. 1 volume in-8. FULBERT MARTIN, avocat français, proscrit, donne des leçons de langue française et italienne, de littérature et de musique. Il donne également des leçons et des consultations sur toutes les matières de la législation française. S'adresser au professeur, Roseville-strett, Anglesea Cottege. Réjér,nces: cheE MM. Welmann., P. Asplet et docteur Barbier. AlTIS Il sera publié avec chaque numéro un supplément spécial pom les ANNONCESdans l'intérêt du Commerce, de !'Industrie et de la Science. Les Annonces de V I tous les pays seront acceptées à la condition d'être écrites en français, conformément au spécimen ci-après. Les Avis et Annonces sont reçus jusqu'au vendredi à midi, à Londres, à la librairie et agence de l'Imprimerie Universelle, 50 lf3, Great Queen Street Lincoln's-Inn-Fields, et à l'office cle !'Imprimerie Universelle, 19, Dorset Street, à Jersey, S-Hélier, jusqu'à l'arrivée du courrierdu ma1di. Tout~ correspondances doit être affranchie et contenir 1m bon, soit sur la poste anglaise, au nom de M. Zéno SwIETOSLAwsxr, soit sur un des banquiers cle Jersey ou de Lonclrei:. Le prix des \.n ,onces est uniformément de six sous (trois pence) la ligne, pour les trois sorte3 de caractères courants employés clans ce journal. Les lignes en capitales et en lettres de fantaisie, seront payées en proportion de la hauteur qu'elles occuperont, calculée sur le plus petit texte. ABIANCHI 1~roscr~t politiqne 1 vrir un cours cl'Equitation à son manège, sur h ~ le t~i?I:, av:mtage cl'unir l'élég:mce, la légerté et . tra11ça1~,rédacteur,Parnae. ,a sohcl1te. 1 ' • , en chef pendant n fJTEL 'PROSCRITDU 2 DÉcr:,rnRE. _Les semelles so~t. ~xé_es_a;~c _cl)llaito:1 ,et, ne huit ans dn journal <JUotidiente ,'v[essagerdu Nord.! i i- p1.•oa"ess~1.11c1le.• co-i.pe la1~~cntau<'nne asperite Ill al mt1meur m _al ~xparaissant à Lille (Frnn_cc), rl,on:1eà _d_omicile ~es, l'ail/, !11' tl' Ifabits.-zg, Belmont Road, St.-Hél:cr, tér'.ei_1r-: On peut marcher à l'eau sans nmre a la laçons de langue fr:mç·11se, d anthmctrque, d'h1s. Jersey. solid1te de la_._ch__a,_1s_s_ur_e_. _ _ ___ _ toire, de géof\'raphie, de littérature, etc. -M1 ,\]-. S-Ü}\•11 DE CQJlfMJSSTON Il se charge également de toutes correspon- LmJn K0IUJECm, :1. lH_ - dan ces, écritures commerciales et autres, et des l'ROSCRITPoLrnouc l'0L0NA1s, No 3, SURLEPORTA; JERSEY• mémoires dont on lui confie la rédaction. Donne à domicile des leçons de langue /.llemamle «;, ll!l'eu 11 ,.te~iise, Commissic.nnaire en marS'adresser au profes;eur, 20, Don-street, St.- et Latit1e; il démo~t'.·c ni:ssi l~ Gymnastiqn~. . chandiset., se charge <le vendre et acheter to11te Hélier (Ile de Jersey). M. Lu<l. KorclecK1désirerait trnuvcr <lel emploi sorte de marchandises, et de faire des recouvrement Références chez MJ.II. ,vellman, P. Asplet, comme professeur dans une pension.-61, Newman en France ou en Angleterre et en Amérique. • Geo. Vickcry. Street, Oxford Street.-Londres. Correspondants à Paris, Bordeaux, Lyon, Lille, 15, COL0MBERIBSTRI:ET, sT.-HÉLIER, JERSEY. Londres, Birmingham, Liverpool, NewsYork, etc. F on~1V1'ROFESSJ;un D'É<WJTAT!ONa,n- GUAY proscrit du 2 Décembre, faiseur 1 i\.lt\81'1 I cien élève ile l'école cl<'Saumur, ,ae BOTTES sana couture, pou:,. A [ PHNOS E moli'leur en p!Stre, se ch:\rge a l'honneuT diepr-éveuir }c p'lolh!iequ'il vicut d'o11- li.ommrsetpour àames. - ~e genre ,lCilobauss-ure J • • , cle to'llte espèce de moula!le en plâtre, en cire, en mastic et en gélatine sui: nature morte 011 vivante. Il moule aussi les ornements, les statu('s et fournit des épreuves il un ::,rix mo<léré.---20, Donstreet, St.-Hélier. HOTELDEL'EUROPE DON STREET, No 11, TErmPARG. ROUSSEL. G. RoussBL a l'honneur de pré,enir l\'f},f. }e,s Yoyagew-s qui YiM!1ent Yisiter cette île, soit pour agniment, soit pour affaires, aussi bien que lei lla.- bitants <le cette localité, qu'ils, trou,-eront <hlns son Hôtel, bonne table, bons vins, et tous lei iOÎlJI! ainsi que tous renseignements possibles. ' ~ Table ù'Hôte à 10, 1 et 6 heures.-Repas à i1mtQbou{'e.,-Il so.rt a~i ea ville. '
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