Homme - anno I - n.19 - 5 aprile 1854

r. déte1minent le comment, et la possibilité flottante devient fait accompli. La Russie pent aussi bien envahir l'Europe jusqu'à l'Atlantique, qu'en être envahie jusqu'à l'Oural. Ponr le premier cas, il faut une Europe profondément divisée. Pour le second, une Europe profondément unie. L'est-elle? Le Tzarisme est poussé par instinct de conservation et par une force naturelle, comme celle qui guide les oiseaux aux migrations, vers la mer Noire, vers la Méditerranée. Il lui est impossible de ne pas rencontrer l'Europe dans cette marche. Ce serait une folie de penser que l'empereur Nicolas puisse tenir tête à l'Euro1)e, à moins que l'Europe ellemême ne se mette à l'avant-garde de son armée et ne combatte contre elle-même; mais c'est ce qui se fait; c'est ce qui est. Le conservatisme peureux, soucieux, sénil, trouvera dans un conflit entre l'Europe et la Russie, les moyens de paralyser chaque élan des peuples. Car il y a deux Europes qui s'entre-haïssent, s'entreclétestent beaucoup plus profondément que les Turcs et les Russes, et ce manichéisme social existe dans chaque état, dans chaque ville, dans chaque hameau. Quelle unité d'action est donc possible avant le triomphe d'un des lutteurs? Les armées ne combattent héroïquement aux frontières que lorsqu'il y a un comité de salut public à la maison. C'est lui qui avait imprimé aux armées révolutionnaires cette énergie étonante qui dura vingt années après sa mort, Il n'y a rien au monde qui démoralise plus les armées, que la pensée funeste d'une trahison derrière leur dos. Peut-on avoir confiance aux gouvernemens tels qu'ils sont? Dans leur propre camp, les hommes de l'ordre se soupçonnent l'un l'autre. Nous trouverons partout, jusque dans les hauts parages de la diplomatie, des traitres qui vendent leur pays à Nicolas. Nicolas a non seulement des banquiers et Jes journalistes, il a des premiers ministres, des frères de roi, des cousins régnant; il a un nombre prodigieux de grandDuchesses, qu'il octroie aux princes allemands, à condition de faire des serfs russes de leurs maris ; et ces grand-duchesses, lorsqu'elles sont malades, vont pren~rt:: " les brouillards de Londres," dont la vertu eurativa a été découverte par Nicolas. ,-4 " La Fusion" est très-russe;-" l'Assemblée Nationale " a l'air d'être une feuille de Kazan ou de Pensa.- Mais si l'empereur Nicolas voulait abandonner tous ces. Chambord-Nemours aux délices d'une réconciliation de famille et d'une partie de chasse à Frohsdorff, le bonapartisme serait à l'instant même, non seulement Russe, mais Tartare. Le roi des Belges tient nue agence russe à Bruxelles ; le roi de Danemark, un petit bureau à Copenhague. L'Amirauté,-la fière Amiraut~ de la Grande-Bretagne fait humblement la police du Tzar à Portsmouth, et un officier ~amojè<lefoule impunément aux pieds l'acte de l' habeas corpus sur le pont d'un navire anglais. Le roi de Naples est le iervile imitateur de Nicolas, et l'empereur d' Autriche son Antinoüs, son admirateur passionné. on· parle tant d'agents russes que l'on cherche toujours parmi quelques misérables espioHs que le gouvernement russe paie, pour être au courant <letous les canca11s. Les véritables Chenu et Delahodde du tzar sont les oints du .. ~e1gneur, leurs agnats et cognats, leur panmté dans les lignes ascendantes et descendantes. Le registre des espions russes, le plus complet, c'est!' Almanach de Gotha. Vous voyez donc qu'une lutte s,·rieuse avec la Russie e~t totalement impossible avant d'avoir balayé, et bien balayé, la maison. Il y a une solidarité fatale qui lie l'Europe r~actionnaire au Tzarisme ; et ce sera une sublime ironie providefltielle si nous la voyons périr par lui. Nicolas a ,fait la plus grande espièglerie du XIXe siècle en déclarant la gtH:rre à la Turquie. Ce sont les conservateurs, les amis, les clients de Nicolas qui crient le pl11shaut maintenant contre lui. Ils prenaient le tzar pour 1m sergent de ville, et étaient tr<~s contents de faire peur aux révolutionnaires des 400,000 bayounettes russes ; ils croyaient qu'il se résignerait au rôle passif d'épouvantail ; ils avaient oublié que même un Louis Tionaparte n'a pas voulu se résigner à la fonction de " sapeur pompier .... " L.HO 11I\IE. Les jours heureux étaient revenus, on était si content, si tranquille ; les masses, écrasées par les troupes, mouraient de faim avec une résignation chrétienne. Pas de presse, pas de tribunc .... pas de France! Le Saint-Père, appuyé sur une armée sortie de la rue de Jérusalem, distribuait à droite et à gauche sa bénédiction apostolique. Les affaires reprenaient après la catastrophe de Février. L'anthropophagie sociale était plus stationnaire que jamais. Une ère " d'amour et de sympathie " s'ouvrait. La Belgique se mariait à l'Autriche dans la personne d'une archiduchesse autrichienne,-le jeune empereur de Vienne soupirait aux pieds de sa fiancée, Napoléon III,-" Werther " de 45 ans-épousait par caprice amoureux sa " Charlotte " de Téba. , Au milieu de cette tranquillité, de ce bien-être universel, l'empereur Nicolas jette l'alarme en commençant une guerre inutile, fantastü1ue, religieuse, une guerre qui peut très bieu passer des bords de la mer Noire aux bords du Rhin, et qui apportera dans tous les cas tout ce qu'on craignait des révolutions :-expropriations, contrihutions, violences, et, par dessus le marché une occupation étrangère, des cours martiales, des fusillades et des contributioils de guerre. Donoso Cortès, dans un discours célèbre prononcé à Madrid en 1849, prédisait l'invasion russe et ne trouvait d'autre ancre de salut pour la Civilisation que l' Unité de l'autorité, c'est-à-dire la Monarchie absolue au service du Catholicisme. C'est pour cela aussi qu'il demandait pour première condition l'introduction du Catholicisme en Angleterre. Il est possible qu'avec une Unité pareille, l'Europe serait très forte ; mais cette unité est totalement impossible, aussi impossible que toute autre; à l'exception de l' Unité révolutionnaire. Si on ne craignait pas la Révolution plus encore que les Russes, quoi de plus simple que d'aller à Sébastopol, d'occuper Odessa. La population mahométane de la Crimée ne serait pas hostile aux Turcs. Une fois là, on ferait un appel à la Pologne, on déclarerait la liberté des paysans de la Petite Russie qui abhorrent le servage ..... . Nous verrions ce qu'entreprendrait alors Nicolas, avec son Dieu orthodoxe. Mais, dira l'Autriche- la Pologne c'est la Gallicie; Mais, dira la Prnsse-la Pologne c'est la Pomanie. Et une fois la Pologne debout-quelle force retiendra la Hongrie, la Lombardie? Eh bien, il ne faut pas aller à Sébastopol, - ou faire une guerre d'apparat qui se terminera au profit de Nicolas ou de Louis Bonaparte. C'est-à-dire, dans les deux: cas, au profit du despotisme et contre les conservateurs. Car le despotisme n'est pas du to11tconservateur. Il ne l'est pas même en Russie. Le despotisme, c'est ce qu'il y a de plus corrosif, de plus Mlétère, de plus dissolvant. Quelquefois les peuples jeunt::s, cherchant à s'organiser, commencent par le despotisme, le traversent, s'en servent comme d'une dure éducation ; mais plus souvent ce sont les peuples retombés en enfance qui _succombent sous lEl joug du despotisme. Le despotisme militaire, algérien ou caucasien, Bonapartiste ou Cosaque, ·une foismaître de l'Europe, sera nécessairement entrainé à une lutte acharnée contre la vieille société ; il ne pourra laisser exister les institutions semilibres, les droits semi-indépendants, la civilisation habituée à la parole, la science habituée à l'analyse, l'industrie s'érigeant en puissance. ' Le clespotisme, c'est la barbarie, c'est l'enterrement d'une civilisation décrépite - et quelquefois l'étable dans laquelle naît le sauveur. Le monde européen, tel qu'il est, a fini sa tâche ; mais il nous semble qu'il pourrait finir plus honorablement sa carrière - passer à une utre forme d'existence, non sans secousses, mais sans abaissement, sans dégradation.· Les conservateurs, comme tous les avares, ont eu surtout peur de l'héritier ; eh bien ! le vieillard sera étranglé nuitamment par des voleurs et des brigands. Après avoir bombardé Paris, fusillé, déporté, emprisonné les ouvriers, -- on peµsa que le danger était passé ! - Mais la mort est un Prothée. On la chasse comme ange de l'avenir, - elie revient comme spectre du passé, - on la chasse comme République àémocratique et sociale, elle revient comme Nicolas, Tzar de toutes les Russies, ou comme Napoléon, Tzar de France. L'un ou l'autre - ou les deux ensemble, achèveront la lutte. Pour lutter, il fout que son adversaire ne soit pas encore terrassé. Où est doue le dernier champ-clos, le dernier retranchement où la civilisation peut livrer une bataille, se déf'endre au moins contre les despotes ? A Paris? - Non. Paris, comme Charles-Quint, a abdiqué, de son vivant, sa couronne révolutionnaire, - un peu de gloire militaire et beaucoup de police suffiront pour maintenir l'ordre à Paris. Le champ-clos est à Londres. Tant qu'une Angleterre libre et fière de ses droits existe, - rien n'est fait définitivement pour la cause de la barbarie. Depuis le Dix Décembre 1848, la Russie et l'Autriche n'ont plus de haine contre Paris. Paris a perdu son prestige pour les rois, ils ne le craignent plus. - Toute leur haine s'est portée contre l'Angleterre. Ils l'abhorrent, ils la détestent et ils voudraient .... la piller! Il y a en Europe des pays réactionnaires, mais non des pays conservateurs. L'Angleterre seule est conservatrice, et le pourquoi est tout clair, elle a quelque chose à conserver-la liberté individuelle. Mais ce seul mot résume tout ce qui est poursuivi, haï par les Bonaparte et les Nicolas. Et vous pensez qu'ils laisseront, eux vainqueurs, à 12 heures de distance de Paris esclave, - Londres libre, Londres foyer de la propagande et port ouvert à tout ce qui fuira les villes désertes et incendiées du continent ? Car tout ce qui doit étre sauvé et peut l'être - au milieu de l'orgie de la destruction, - sciences et arts, industrie et culture - tout cela sera nécessairement poussé en Angleterre. Cela suffit pour une guerre. Enfin le rêve du premier barbare mtiderne, de Napoléon, se réalisera. Quel plus grand malheur peut attendre l'Angleterre, d'une Europe révolutionnaire que du despotisme européen ? Les peuples ont assez à faire chez eux pour ne pas penSt!r à des invasions. Ce n'est ni l'égoïsme ni la Cllpidité qui empêchent les anglais de voir cela clairement. Disons le franchement, c'est leur ignorance et la maudite routine des affaires qui rend ces hommes incapables de comprendre qu'on doit quelquefois marcher non par des chemins battus, mais en se frayant une nouvelle route. Eh bien, ceux qui ont des yeux et ne veulent pas les ouvrir, ceux-là sont dévoués aux Dieux infernaux. Comment les sauver? Une nuit profonde et silencieuse couvrira le travail de la décomposition ..... . Et après?...... Après la nuit vient le jour! Il est juste de verser des larmes sur les malheurs qui s'accomplissent ...... mais laissons les morts enterrer leurs morts-et, tirant avec pitié et recueillement le drap mortuaire sur l'agonisant, ayons le courage de répét'llr le vieux cri: Le roi est rnort--Vive le roi!. .. A. HERZE:\'. Londres, le 15 janvier 1854. DERNIERES NOUVELL Constantinople, 23 mars. Le Sheik-ul-Jelam, Grand Mufti,, a été dépos!!.-RifaJ Pacha, président du Conseil, est renvoyé.-Les floues combinées vont rentrer incessamment dans la mer Noire. Vienne, 30 mars. Le prince Paszkiewicz a quitté Varsovie et est attendu le 4 avril à Bucharest.-Le général Kotsebue a commencé le siège de Mutschin et le général Aurep, celui de Isaktscha, Je 23 mars. Le général Schielders dirige les opérations. Vienne, le 31 mars. Une dépêche affirme que les Russes ont attaqué Kalafat le 29 mars et ont enlevé trois retranchements. Bucharest, 28 mars. Les Turcs oat passé le Danube à Siemnitza, vis-à-vis de Sis. towa.-La lutte a déjà duré quelques jours, de manière que toutes les troupes disponibles de Buch.irest y ont été envoyées. Vienne, Je 2 avril. Les forteresses ùe Hirsowa, Mutschin et Isaktscha orù été prises par les Russes, le 28 mars, ainsi que celle de Babadagh. -Les Russes !<ont donc maîtres de la majeure partie de la province <le Dobrntschaz. Malte. Les flottes combinées ont pris mer le 24 mars.-On suppose quc leur destination est Varna. JER~Y, IMPRIMERIE UNIVERSELLE, 19, DORSET STREET. AB.I lN c. HI Rroscr!t politique ,vrir un eours d'Equitation à son manège, sur b ~ le ~~iple&v:rntage d'unir l'élégance, la légerté et lrança1s, rédacteur· Parade. 1a somllté. . 1 "" ' . . , en chef pendant! GUTEL PROSCRIT DU 2 DÉCEMBRE, _Les semelles so~t_~xé_esa, ;~c /ù:1 laito?- _et, ne en plâtre, en cire, en mastic et en gélatine sm nature morte on vivante. 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