Homme - anno I - n.18 - 29 marzo 1854

' . L'Europe fait les crois11des,- les Slaves restent chez eux. L'Europe développe le féodalisme, les grandes cités, une législation basée sur le droit romain, sur les lois germaines ; l'Europe civilisée devient protestante, libérale, parlementaire, révolutionnaire. - Les Slaves n'ont nigrandes cités, ni noblesse aristocratique; ils ignorent le droit romain, ne connaissent pas de distinction entre les pay:.ans et les citadins, ils habitent de préférence leurs villages, gardent leurs institutions communales, démocratiques, communistes et patriarchales ( 1). Il semble que le temps de ces peuples ne soit pas venu, qu'ils attendent quelque chose, que leur stat·u quo ne soit que provisoire. Maintes fois les Etats slaves commencent à se former avec vigueur, leur tentative prend consistance, cela se développe (comme la Serbie sous Douchan) ...... et cela -éc.houe,sans qu'on puisse bien. comprendre le pourquoi. S'éten,lant des bords du Wolga et de ceux de l'Elbe, jusqu'à la mer Adriatique et à l' Archipel, les Slaves ne savent pas même se lier pour la défense commune. Les .uns succombent sous les coups des Allemands, les autres sous ceux des Turcs. Une troisième peuplade fut conquise par les hordes sauvages qui s'abattirent sur la P:mnonie. • Une grande partie de la Russie resta longtemps courbée sous le joug des Mongols. La Pologne seule était indépe~dante et forte ...... ma:is c'est qu'elle était moins Slave que les autres : elle était Catholique. Or, le catholicisme est complètement contraire au génie slave. Vous vous rappelez que ce sont les Slaves qui ont les premiers commencé la grande lutte contre le Papisme et q1û lui ont de suite imprimé un caractère profondément social (le11 Taboristes). Réduite et ramenée au catholicisme, la Bohême a cessé d'exister ...... La Pologne donc garda son indépendance en rompant l'unité nationale et en se rapprochant des Etats tle l'Occident. / L~s autres Slaves, restés indépendans, étaient loin de former des Etats organi,és; il y avait quelque chose de flottant, d'indéterminé, de peu gouverné, d'anarchique, (comme diraient nos amis de l'ordre), dans leur vie sociale. Je ne connais rien au monde de plus conforme au caractère slave que l'existence de l'Ukraine (par exemple) ou de la petite Russie, dep11isla période de Kiow jusqu'à Pierre Ier. C'était une république .:osaque et agricole, organisée militairement sur des bases complètement démocratiques et communistes. ·Sana. centralisation, sans gouvernement fort, se régissant par des coutumes, n'acceptant ni la suprématie du Tzar de Moscou, ni celle du roi de Po1ogmi. Il n'y a pas de traces d'aristocratie dans cette république rudimentaire ; c.haque nomme majeur était citoyen actif, toutes les charges étaient électives, depuis le décurion jusqu'au Hetman.- Je, vous prie de remarquer que cette république a existé depuis le XIIIe siècle jusqu'au XVIIIe, en se défendant continuellement contre les Moscovites, les Polo11ais,les Lithuaniens, les Turcs et les Tatars de la Crimée. En Ukraine, comme chez les Monténégrins, même chez les Serbes, les Illyriens, les Dalmates - le génie slave a donné quelques indications assez claires de ses aspirations : - aucune forme politique. Pourtant il a fallu passer par la dressure d'un Etat fort., il a fallu s'assembler, se centraliser et quitter le laisser a1ler de la vie cosaque et l'éternel sommeil de la vie communale. Vers le XIVe siècle· la Russie commence à avoir un centre aut.,our duquel gravitent et se _cristallisent les diverses parties de l'Etat-c'est Moscou. Dès sor, apparition comme ville centrale, elle prend le rôle de la capitale rlu monde slave orthodoxe. C'est à Moscou que se forma l'absolutisme bysantin et oriental des tzars, c'est par elle que périrent les dernières franchises du peuple. Tout fut sacrifié à l'idée de l'Etat, et pour cela tout s'ur,iformise, tout plie. Gomme si en sortant du joug des Mongols, en continuant les guerres ( 1) Et aussi le servage et le despotisme !-(Note du rédacteur). L' UO11I,IE. sang1antes contre les Lithuaniens, en voyant la Pologne s'armer, le peuple sentait qu'il agissait d'abdiquer tous les droits humains pour sauver son indépendance nationale et son avenir. Novgorod-cité grande et libre-était un re1noche vivant pour la viile parvenue, pour la ville des tzars. Moscou écrasa sa rivale avec une cruauté sa11guinaire et sans le moindre remords. Lorsque toute la Russie fut à sts pieds, Mo3cou se trouva face à face avec Varsqvie. La lutte entre ces deux rivales fut longue et ne devait finir q11'àune autre époque. Pendant un moment la Pologne eut le dessus. Moscou plia, Vladislas, fils de Sigismond roi de Pologne, fut pro.clamé tzar de toutes les Russies._ La maison de' Ruvik, de Vladimir monomaque était éteinte-il n'y avait pas de gouvernement, les généraux polonais et les Hetmans des Cosaques regnaient à Moscou. Alors le peuple entier se leva à la voix d'un boucher de ~ijni-Minine-et la Pologne se vit obligée d'abandonner Moscou et le sol russe. Après avoir accompli son œuvre de soudage, Moscou s'arrête. Elle ne sait que faire de ses forces évoquées par elle et restées sans emploi. L'issue se trouva de suite.- Là où il y a beaucoup de force, l'issue se trouve toujours. Pierre Ier fit de l'Etat ,·usse un état européen. La légèreté avec laquelle une partie de la nation se fit aux mœurs européennes et renia ses habitudes est une preuve palpable que l'état moscovite n'était nullement une véritable expression de la vie populaire, mais bien une forme transitoire. Là où on touchait aux élémens réellement nationaux, le peuple les défendait avec opiniâtreté. Toute la classe des paysans n'accepta rien de la réforme de Pierre Ier. Aussi était-elle le véritable dépositaire de la vie nationale, et la base de cette vie était ( comme l'a dit le célèbre historien Michelet), le Communisme, c'està-dire pertage continuel de la terre d'après le nombre des travailleurs et absencr. de propriété territoriale indivi- ·dualisée. Comme l'Amérique du Nord représente la dernière conséquence des idées républicaines et philosophiques de l'Europe du XVIIIe siècle; c'est ainsi que l'Empire de Pétersbourg a développé juspu'au monstrueux les principes du monarchisme et de la bureaucratie européenne. Le dernier mot de l'Europe conservatrice est dit par Pétersbourg; ce n'est pas sans raison que tous les réactionnaires se tournent vers cette Rome de l'absolutisme. Quelles forces immenses avait sous ses mains le despotisme de Pétersbourg? C'est facile à juger par l'état gigantesque qui se forma. }~s forces étaient tellement exubérantes que même pendant la confusion et la détestable administration de Pierre Ier à Catherine II,-l'Etat s'est accru matériellement avec une rapidité inouie. Après avoir absorbé, subjugué tout ce qui étai-t à sa portée- prenant les provinces Baltiques et la Crimée, la Bessarabie et la Finlande, l'Arménie et la Géorgie, partageant la Pologne et arrachant une province après l'autre à la Turquie-l'Empire russse trouva enfin un rival formidable. C'était la révolution fra11çaiserenversée, avortée, dégénérée en un despotisme tout pareil à celui de Pétersbourg. La Russie se mesura avec Napoléon Et le vainquit. (I) . Du moment où l'Europe à Paris, à Vienne, à Aix-laChapelle et à Vérone reconnut nolens, volens, l'higémoriie d'un Empereur de Russie - l'œuvre de Pierre était terminée et le pouvoir impérial se trouva dans la même position où s'étaient trouvés les tzars de Moscou avant Pierre Ier. L'empereur Alexandre le !':entit bien. Le p<,uvoir impérial peut certainement se conserver pendant" quelque temps encore, s'imposer par tous les moyens qui sont dans les mains d'un gouvernement arbi- ( 1) Napoléon fut vaincu en Russie; mais la Rusiie eut peu de part à la victoire. - (Note dtL rédac:leur). traire ; mais il ne peut rien créer, ni produire de plus à l'intérieur,-sans rencontrer partout l'esprit qu'il ne veut évoquer. Tout ce qu'il peut faire-c'est une guerre à l'extérieur. Nicolas s'est pourtant constamment abstenu de la gt1.erre. Comment se fait-il qu'après un règne effacé de 25 années, tout à coup une audace téméraire s'empare de cet homme, et qu'il jette sa mitaine rnsse à la tête de la France et de la Chine, de l'Angleterre et du Japon, de la Suède et des Etats-Unis ...... sans parler de la Turquie ... On dit qu'il est devenu fou? Moi, je commence à penser qu'il est devenu sage. Pour commencer une guerre, il lui fallait la plus eBtière certitude de la lâcheté <letous les états de l'Europe_; il lui fallait avoir pour eux un mépris sans bornes ... Eh bien! il l'a. Nicolas boudait les gouvernemens occidentaux avant 1848,-mais ne les méprisait pas. Nicolas tremblait en apprenant les révolutions. de 1848-et ne s'est rassuré qu'en recevant la nouvelle de la dictature ensanglantée de Cavaignac. Mais après le coup de main qu'il a donn~ à l'Autriche-par son intervention en Hongrie, intervention tolérée par l'Angleterre, comme l'invasion à Rome, il.a mieux compris le terrain de ses amis-adversaires. Il a sondé lentement, peu à peu, l'abime de leur ignominie, de leur pusillanimité, de leur ignorance-et le voilà qui fait LA GuERRE.-Voulez-vous parier qu'il en sortira vainqueur, si un tiers imprévu n'y intervient ?-leur ennemi commun à eux tous, la Révolution, bien entendu! "Dans ce cas, pas de guerre ! déclarons nous battus pac avance, sacrifions la Turquie, cédons eonstantinople :plutôt que de rompre avec le tzar. " . Voilà le raisonnement de tous les diplomates, banquier.11 et autres gens qui pensent que le conservatisme consiste à ne pas lAcher la pièce de 5 francs qu'on a daijs la main et à fermer les yeux sur les dangers du lendemain ... Eh bien, cédt'z; ne faites pas la guerre,-mais sachez bien qu'alors, au lieu d'avoir, ou la Révolution, ou Nicolas ........ .. Vous aurez Nicolas et la Révolution. Voilà ce que je développerai, cher Linton, dans ma deuxième lettre. A. HERZEN. Londres, le 2 mars 1854. Le défaut absolu d'espace nous empêche, bien à regret, de do1;ner place aux vers qui nous ont été adressés par Mme Aârienne Baillot. Il en eet cle,même pour l'article de notre ami Schœlcher auquel, toutefois, nous donnons la rectification d'une faute de typographie dans le numéro du 21 mars. Au lieu de "la punition est un droit criminel qu'on ne peut lui refuser ... ", lisez: "la punition ei,;tun droit DU criminel, etc.'.' JERSBY, IMPRIMERIE UNIVERSELLE, 19, DOJ:.SET STREET. EN VENlTE A L'IJJIPRLl:IERIE UNIVERSELLE, 19, DORSET STREET : Les Biograph~es Bonapartistes par Ph. BerJeau. Prix : 3 francs. LESBAGNDE'SAFRIQU HISTOIUE DE LA TRANSPORTATION DE DÉCEl.\IflR.E, Par CHAULES Rl.EEYROLLES. 1 volume in-8. AVIS Il sera publié avec chaque numéro un supplément spécial polll' les ANNO~CESdans l'intérêt du Commercr, de l'Inclustrie et de la Science. Les Annonces de li • tous les pays seront acceptées à la condition d'être écrites en français, conformément au sp<:!cimenci-après. Les Avis et Annonces sont reçus jusqu'au vendredi à midi, à Londres, à la librairie et agence de l'Imprimerie Universelle, 50 1z2, Great Queen Street Lincoln's-Inn-Fields, et à l'office de l'Imprimcrie Universelle, 19, Dorset Street, à Jersey, S-Hélier, jusqu'à l'arrivée du courrier du ma1di. Toute correspondances doit être affranchie et contenir 111b1on, soit sur la poste angkise, au nom de :M. Z6110 SwrnToSLAwsin,. 8oit sur un des banquiers de Jersey ou de Londre~. Le prix des \ n ionces est uniformément de six sous (trois pence) la ligne, pour les trois sortes de caractères courants employé~ dans cc journal. Les lignes en capitales et en lettres de fantaisie, seront payées en proportion de la hauteur qu'elles occuperont, calculée sur le plus petit texte. A · BIANCHI proscrit politique vrir un cours d'Equitation à son manège, sur ha le triple av.mtage d'unir l'élégance, la lég·erté et . fr:inçais, rédacteur Parade.===-c=------------- !a solidité. ' 1 9 en chef pendant GUTEL PROSCRIT DU 2 DÉCEMBRF: Les semel!cl. sont fixées avec du laiton et ne lluit _ans du)o~rnal quotidien le Messager~~ Nord, s•rofes§ei:u• •h~ coupe i~i~sent aucune aspérité ni à _l'i,ntérieur ni _à l':xpara1ssant a Lille (Fran_ce), d 0 on_ne à, d_om1cile~es 1'ailleur d' Habits.-:!. 9 , Belmont Roa<l, St.-Hélier, rer~e1_1-~: On peut rr.archer a I eau sans nuire a la leçons de laague fra11ça1s~,d anthmet!que, d'lus- Jersey. ~ohd1t~de la chaussure. • toirc, de géographie, de EUérature, etc. M ISQND}-;,QQl\ifMJSS i ON Il se charge également de toutes correspon- • LUi), KOROECIU, A. i ~ 1 l élances, licritures commercides et autres, et des PROSCRIT POLITIQUE POLONArs, No 3, SURLEPORT 9 A JERSEY, mémoires dont on lui confie ia rédaction. Donne à domicile des leçons de la:1gue Allema11de e]. 1rn.~ui•tebige, Commiss:o.nnaire en mar- ~'.,:d::-estr dU profes,_eur, 20, Don-street, St.- et Latine; il démont:re ~~ssi _l~ Gym11aetiq~~- . ~handises, se charge de vendre et acheter to11te Hehcr-(I.e de Jersey). .l\I. Lud. Kordcck1 des1rcrmt trouver de 1 emploi sorte de marchandises et de faire de recouvrements Référ_ei;ccs chez M:!IL "\Vellman, P. Asplet, c,omme pro'.esse~r d~ns une pension.-61, Newmar: 11 France ou en AngÎet~rre et en Amériqi:e. . Geo. \;1cY-~ry. , .. . Street, Oxford Stred.-Londres. Correspondants à Pans, Bordeaux, Lyon, L!lle, ------·----------- 1-5, COLOltBERIE STREET, ST.-HÉLIER, JERSEY. Londre;;, Birmingham, Liverpool, N1.w-York, etc. F Cf~~JVr:toF~SSEUR ~:f:Qu1TATION, an- GU /Ay proscrit du 2 Décembre, faiseur ----- ~ o~,~-'ff c1er._elùvede _l ecol~ d~ Sam~ur,' 11. rie BOTTES sans couture, pour A f IHIOYSL' mouleur en plâtre, se charge a l llOuc.~urde p1•6'Yemrle publ?c qu'ai v:ent d ou- hommci et pour da.mes. - Ce genre àe chaussun J J Li .r,, de toute esp~ce dé mou!age en plâtre, en cire, en mastic et en gél11tine tur· nature morte ou yiv1mte. , Il moule aussi les ornements, les statues ,et fournit des épreuves à un prix modéré.---20, Donstreet, St.-Hélicr. HOTELl)E L'EUROPE DON STREET, No 11, TENU PAaG. ROUSSEL, G. RoussEr, a l'honneur de prévenir MM. lea voyageurs qui viennent visiter cette île, soit ponragtém~1:t, s'.lit pour affaires, aussi bien que les h~ l:itants de cette local" .:i, qu'ils troÙvcront dans son Hôtel, bonne tab!t.·, bons vins, et tous les soins, ainsi q:rn lvus rPn~eignements ~ossibles. ~" Table tl'Hête à 10, 1 et 5 heu.res.-Repa11_l to11tebeure.-Il sert aussi en ville.

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