Homme - anno I - n.13 - 22 febbraio 1853

Il prenait pour de l'or pur toute la partie décorative, hyperbolique de la chose, toute la mise en scène,-et voilà qu'il s'obstine:, qu'il se révolte ; il présente comme une lettre de change échue, les livres et les théories au:;iquelles il a cru sur parole, il exige la réalisation de ses convulsions-on lui rit au nez, on le plaint-et il commnce à s'apercevoir que les débiteurs sont insolvables. Leurs préteJ1.dues richesses n'étaient que des actions sur un capital futur, c'était le système de Law appliqué à la morale! Mais où sont donc ceux qui nous ont guidé, nos prophètes, nos oracles, les forts, les sages, les chefs ? Ce sont les premiers insolvables. Le cœur leur a ma•- qué à deux pas du bord. Eux, si braves, si dévoués, si persü:tants, - ce sont des poltrons en logique ; ils redoutent les conséquencei extrêmes des principes pour lesquels ils avaient versé leur sang. Ils ont pris en pitié ce monde, - et pendant qu'ils essuient leurs larmes, - le monde futur leur échappe ; il leur est pénible de détruire .celui du passé, et presque tous, ils se tiennent sur l'autre rive, - là où il y a pour nos ennemis des palais et des Jglises, pour nous des gibets et des prisons .... Eh bien, nous voyons en cela le triste indice de l'arrêt l'impuissance, le signe de la mort ; e,t Dous le voyons f crit de la même manière sur le front de beaucoup de saints martyrs, et sur le front de tous les galériens des Tuileries .... - " Et ce sont des esclaves du Tzar, qui apparaissent, Dieu sait pourquoi, perçant leur neige ; ce sont des Russes qui prétendent voir ce signe ! " Ce n'est pas leur faute, s'ils le voient. Les barbares se sont distingués de tous temps par une exceJ.lente vue, et vous savez qu'Hérodote nous fait l'honneur de nous appeler le peuple aux yeux de lézard. Permettez-;.moi de citer ce que j'écrivais en 1851 à J. Michelet dans une lettre publiée à Niee (Le peuple russe et le socialisme), et dont l'édition m'a été soustraite ,Par la douane française de Marseille, de manière qu'il n'en reste pas un exemplaire. " Le Russe émancipé est l'homme le plus indépendant de l'Europe. Qu'est-ce qui pourrait l'arrêter? serait-ce le respect pour son passé?... mais l'histoire de la Russie n01w1lle ne commence-t-elle pas par une négation absolue de la nationalité et de la tradition? " Serait-ce cet autre passé indéfini, la période de Pétersàourg peut-être? Ah! celai-là ne nom, oblige à rien ; " ce einquième acte d'une tragédie sanguinaire jouée dans un lupanar" nous émancipe, mais il ne nous impose aucune croyance. " D'un autre côté, votre passé à vous, occidentaux, nous sert d'instruction, et voilà tout ; nous ne nous considérons nHllement comme les exécute11rs testamentaires de votre histoire. • L'HO}l)iE. " Vos doutes, nous les acceptons ; votre foi ne nous émeut pas : vous êtes pour nous trop religieux. Vos haines, nous les partageons ; votre attachement pour l'héritage de vos ancêtres, nous ne le comprenons pas ; nous sommes trop opprimés, trop malheureux pour nous contenter d'une demi-liberté. Vous avez des ménagemens à garder; des scrupules vous retiennent; nous autres, nous n'avons ni ménagemens, ni scrupules, mais la force nous manque pour le moment. " C'est de là, monsieur, que nous vient ·cette ironie, cette rage qui nous exaspère, qui nous mine, qui nous pousse en avant, qui nous conduit quelquefois en Sibérie, à la torture, en exil, à une mort précoce. L'on se dévoue sans aucun espoir ; par dégoüt, par ennui .... Il y a maintenant q11elquechose d'insen~é dans notre vie, mais rien de banal, rien de stationnaire, rien de bourgeois. • " Ne nous accusez pas d'iII).moralité parce que nous ne respectons pas ce que vous r4spectez. Depuis quand reproche.-t-on aux enfans trouvés de ne pas vénérer leurs paren3? " Nous sommes libres, car nous commençons par nousmêmes. Le traditionnel est nous, c'est notre organisme, c'est notre nationalité; ils sont inhérens à tout notre être; c'est là notre sang, notre instinct, et nullement une autorité obligatoire. Nous sommes indépendans, car nous ne possédons rien, nous n'avons presque rien à aimer; il y a de l'amertume, de l'offense dans chacun de nos souyenirs: la civilisation, la science, on nous les a tendues au bout d'un knout. "Qu'avons-nous donc à démêler avec vos devoirs traditiormels, nous les mineurs deshérîtés? Et comment pourrions-nous franchement accepter une morale fanée, une morale ni chrétienne, ni humaine, existant seulement dans les exercices de rhétorique, et dans les réquisitoires des procureurs? Quelle vénération voudrait-on nous inspirer pour ce prétoire de votre justice barbaro-romaine, pour ces voûtes lourdes, écrasantes, sans air, sans lumière, rebâties au moyen-âge, e:t replâtrées pour les affranchis du tiers-état? Ce n'est peut-être pas là le guet-apens <les tribuooux russes, mais qui pourrait nous prouver que c'est de la justice ? " Nous voyons clairement que la distinction entre vos lois et les ukases gît principalement dans la légeade du préambule. Les ukases commencent par une vérité acca- ·blante : " le tzar l'ordonne;" vos lois portent en trile le mensonge offensant de la triple devise républicaine, l'invocation ironique du nom du peuple français. Le code Nicolas est, dis-je, exclusivement contre les hommes et en faveur de l'autorité; le coie Napoléon ne nous parait pas avoir d'autre caractère. J,' ous traînons assez de chaînes que la force nous a imposées, sa11s les alourdir encore par d'autres dues à notre propre choix. Sous ce rapport, nous nous trouvons parfaitement les égaux de nos p2tysans. Nous obéissons à la force brutale ; nous sommes des esclaves parce que nous n'avons pas le moyen de nous affranchfr ; toutefois, du camp ennemi nons n'accepterons rien. " La Russie ne sera jamais protestante. " La Russie ne sera jamais juste-milieu. " La Russie ne fera pas de révolution dans le seul but de se défaire du tzar Nicolas, et d'obtenir, pour prix de sa victoire, des représentants tzars, des tribunaux tzars, une police tzar, des lois tzar. " Nous demandons trop, peut-être, et nous ne parviendrons à rien? C'est possible, mais nous ne désespérons pas; la Rus$.ie, avant 1848, ne pouvait, ne devait pas e~trer da~s la ;phase révolutionnaire; elle n'avait qu'à fane son educat1on, et elle l'a faite en ce moment. Le tzar lui-même s'en aperçoit; aussi assomme-t-il, à coups de massue, les universités, les idées, les sciences, s'e!Yorce-t-il d'isoler la Russie de l'Europe, de tuer la civilisation : il fait son métier. " Réussira-t-il ? "Je l'ai dit ailleurs : il ne faut pas se fier aveuglement à ~'avenir ; chaque fœtus a le droit au développement, mais chaque fœtus ne se cléveloppe pas pour cela. L'avenir de la Russie n 1 e dépend pas d'elle seule; il est lié à celui de l'Europe entière. Qui pourrait prédire le sort du monde slave, lorsque la réaction et l'absolutisme auront vaincu la révolution en Europe ? " Le Loyd, parlant d'une de mes brochures allemandes, " m'appelle un Jérémie russe pleurant sur les barricades " de juin, et ajoute que mon livre est très intéressant " dans le_genre d'un fait pathologique tendant à montrer " tout le dégoût que peuvent produire la philosophie al- " lemande et la Révolution française dans un cerveau " russe." Eh bien, j'accepte tout cela. Oui, j'ai pleuré sur les barricades de Juin, chaudes encore dn sang, et je pleure maintenant lorsque je pense ;}. cts journées maudites, au triomphe des cannibales de l'ordre. Je serais très heureux si mes lettres pouvaient être utiles à l'étude de la pathologie de la Rév~lution, et mon but sera complètement atteint si elles font voir comment les derniers éclairs révolutionnaires se réfl.ètent dans un cerveau russe. C'est de ce triple point de vue, Citoyen rédacteur, que je vous offre mes autres lettres. Je vous salue fraternellement, A. HERZEN. Londres, 7 fév,rier 1854. Nous aimons tous ceux qui osent, soit dans Ia pensée, soit dans le combat, ; et nous publierons avec plaisir les lettres du citoyen Herzen, sauf à donner notre opinion de civilisé français. . . . . . et impuissant. C. R. AVIS Il sera publié avec chaque numéro un supplément spécial pour les ANNONCESdans l'intérêt du Commerce, de l'Industrie et de 1a Science. Les Annonces de , tous les pays seront acceptées à la condition d'être écrites en français, conformément au spécimen ci-après. Les Avis et Annonces sont reçus jusqu'au vendredi à midi, à Londres, à la librairie et agence de l'Imprimerie Universelle, 50 172, Great Queen Street Linco1n's-Inn-Fie1ds, et à l'office de !'Imprimerie Universelle, 19, Dorset Street, à Jersey, S-Hélier, jusqu'à l'arrivée du courrier du ma1di. Tonte co:respo:1tlances doit être affranchie et contenir 1mbon, soit sur la poste anglaise, au nom de M. Zéno SwrnTOSLAwsxr, soit sur un des banquiers de Jersey ou de Londres. Le prix des \. :1 urne.es est uniformément de six sous (trois pence) la ligne, pour les trois sortes de caractères courant-s employés dans ee journal. Les lignes en capitales et en lettres de fantaisie, seront payées en proportion de la hauteur qu'elles occuperont, calculée sur le p1us petit texte. ANNONCES. AB. I AN CHI proscrit politique vrir un cours d'Equitation à son manège, sur l3 a le t~i~le avantage d'unir l'élégance, la légèreté et français rédacteur Parade. la solidité. 1 , en ch:f pendant GUTEL PROSCRIT DU 2 DÉCEMBRE, _Les semelles sont_~xé_esa,;~c _d~ laito!1 _et, ne httit ans du jo~rnal quotidien le Me~sager ~~ Nord, protè§seur de eoupe !~1~sentaucu11easpénte ~1 a ,1 1~teneur m _a1;xparaissant à Lille (France), donne a dom1c1le des Tailleur d' Habits,- 29 , Belmont Road, St.-Hélier, ter~e1_1-r: On peut marcner al eau sans nuire a la leçons de langue f:ançaisf;, _d'arithmétique, d'his- Jersey. 1 _s_ol_1d_1_te_d_e_l_a_c_h_a 1 _1s s u re_. _ _ -,--_____ _ toire, de géograp~ue, de htterature, etc. LUD. KORDECKI, MAISONDE co"ln!fISSION Il st charge egalement de toutes correspon- lUlU <lances, écritures commerciales et autres, et des PROSC~I:-" POLITIQUE POLONAIS,, No 3, SURLEPORT, AJERSEY. mêmoires dont on lui confie la rédaction. Donne à dom1c1ledes leçons Je langue Allemande V. 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Géographiedu Moyen-Age, avec Atlas. Tavola di navicari ùi Nicoli et Antonio Zeni, et Traduction du même ouvrage sous Je titre de : Traduction du m~me ouvrage, l beau vol. in-8. Pythias de Marseille et la géographie de son temps, les cartes des régions septentrionales. History of the Crimes of the Second of December, PH. BERJEA U, ex-rédacteur de la Vraie Répu· accompagné de 3 planches. De l'Autorité, brochure. l Tol. jn,.}2. blique. - Biographies bonapartistes (en vente), ALEX. HERZEN, Du développementdes idées ré- Du Souverain, brochure. LeGouvernement du Deux Décembre, pour faire suite contenant la vie de Persigny, Saint - Arnaud, volutionnairesen Russie. Question turque, par Golovinc, brochure. à !'Histoire du Deux Décembre, l vol. in-12. Morny, Magnan, Baroche, Achille Fould et ROCH RUPNIEWSKI, Poésies10Utiques en po- Les Réfugiés à Londres, brochure. Pl ERRE LEROUX, rep~ésentant du peuple. autres qui out pris part au Coup-d'Etat, l vol. lonais, l vol. in-12. L'Occupation de Constantinople, brochure. Cours de Phrénologie. les douzll premières livrai- in-32. HO LIN SKI, La Californie et les routes interocéa- Lord Aberdeen, the nuns of Minsk Nicholas, and sons (ouvrage interrompu). J. CAHAIGNE, ex-réJacteur - propriétaire du 11iq11es, l beau vol. the Russian, state church. By V. 0 Zienkiewicz. Lettre aux Etats de Jersey sur les moyens de quin- journal la Communede Paris.-la Couronneimpé- How do the Czars of St. Petersbourg, educate the tupler les produits agricoles, 1 vol. in-12. riale, satire en vers, dédiée à Louis-Napoléon- Poles. By the same. VICTOR HUGO, représentant du peuple. - Werhuel dit Bonaparte, l vol. in-12. Invasio1i de l'Angl.eterre, sous Je titre : l'Empire Zasady Religji Chrzeséjanskiej. Napoléon-le-Petit. l vol in-32. J. P. AHIER, Esq. Surintendant à Jersey. - français et les Polonais ( French empire and Czartoryszczyna w obec Emigracji Polskiej we Chdtiment,, poésies politiques, ouvrage nouveau, Tableaux historiques de la Civilisation à Jersey, the Poles ), J vol. in-8. Francji. 1 vol. i.n-32. l vol. grand in-8. Relation de la campagne de Sicile en 1849, l vol. JEANNE DEROIN. Almanach des Femmes, pour JOACHIM LELEWEL. Histoire de Pologne, in-12. Sous presse r 1853, 1 vol in-16. ' grand in-8, 2 vol. avec Atlas. Recueil de documen!s secrets. et inédits, pour Le même pour 1854, l Tol. in-16. ' Antiquités de Pologne, accompagné de deux servir à l'étude de !'Histoire politique de Lud Poh,ki w Emilfaracji, 1835-1840, CH. RIBEYROLLES, ex-rédacteur en chef de planches. • l'Europe dans la crise aetùclle, trois livr:iisons Poez~e Karola _Bahnskieg~. la Réforme. - Les B"gnes d'Afrique, précécl€s Etudes n11mismt1tiq1œest archéologiques, avec Atlas. in-8. PoezJe Ludom1la Kordeck1ego• •

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