Symboles, lois, institutions, tout croule, tout tombe. Dites: conn:i.issez-vous un gouvernement qui soit sfir de son existence, un trône qui demain peut-être n'aura point jonché le sol de ses débris? 11suffit d'une étincelle pour allumer le volcan dont la lave doit engloutir les iniquités du passé. Les cxp)oiteurs de toutes espèces ont .beau se coaliser dans une alliance sans nom pour le maintien de leurs rapines et de leurs brigandages, c'en est fait de leur règne. L'eau bénite ne sauvera pas Je trône des Césars, ni le sabre brutal la tiare des pontifes prév::1ricateurs. Leur prestige est détruit aux yeux des masses et la force matérielle sur laqo,elie seule ils comptent ne tardera pas à les abandonner. Lorsque cette heure solemuelle aura sonné au tocsin des peuples, lt!s Napoléon sortis de la fortt de Bondi, et les Pie IX mitrailleurs tomberont du faite de leur ambition criminelle et se frapperont la poitrine, sans pouvoir échapper à la sentence tei-- ·rible qui les attend. ·Tl n'y aur::1plus de ces Seigneurs et maîtres qui traitaient les )1ations comme un troupeau de bétail et les tondaient jusqu'au seng, qui faisaient passer leur or dans leu-r cofl.'res et lenr moëlle dâns leurs os. Plus de pape, plns de rois, plus d'empereurs trônant sur l'abrutissemeut et la misère: plus de hauts barons de la finance s'en~ graissant de vol et d'usure, plus de ces dignitaires de l'église. princes de Sodome et Gomorrhe, couverts d'or et de pourpre, prê- • chant l'abstinence ou l'escbv:ige au nom de Dieu, plus de généraux coupe-bourses et de janissaires coupe-jarrets, à qui l'on dit TUE et qui tuent; plus de magistrats iniques, ni de juges vendus à dei pouvoirs parjures. • Tout cela aura été jeté à la voirie. Au souffle de l'esprit nouveau, les opprimés et les déshérités de ce monde renaîtront à la vie; tous les peuples seront frères, et frères dans la liberté et l'égalité. Alors Citoyens, aura lieu l'avènement que nous appelons de tous no~ désirs _etpour lequel nous souffrons tout, l'avènement DE LA iU'.;l'llBLIQUE UNIVERSELLE, Dt:MOCRATIQUE ET SOCIALE. Après ce discours s'.'lgee,t bien pensé, nous avons cru que la nationalité dont nous fêtions la gloire et ]es malheurs qui sont encore de la gloirë, ferait entendre une 11ouvelle parole; mais. les soldats .polonais· sont restés calmes, .silencieux, comme autrefois dans les rangs ; ils ont voulu pratiquer 1'hospita1ité toute entière, en laissant aux proscriptions amies l'honneur de ]a journée, et c'est un Jersais,,M. ,vellman, qui s'e,st·levé pour la cause: voici son discours : CiToYENi, • Un nouve! ~nniversaire _de la ~é~elution de la Poldgne réunit enc_orew1c lois; sous ce· toit hospitalier, les proscrits de toutes les nations. .• Le 29 ~1~v~mbre1853 n_ousdo~me, à nous Jersiais, le privilège de_nous ~eli_c(~eqr ,u'a~1m_o~ns h liberté de penser n'est p:i.s ici un cnme, ams1 qu_e1a dit s1 eloquemment • le journal I' 1-lomme, dont 1a. première apparition aujourd'hui est une admirable coïnci- <Jenceet un heureux p,ronostic. . AOui,c_itoyens, de~ant cette auguste vérité, il est bon que les trones, les monarchies et les républiques s'inclinent se voilent et clispa)·aisse!1t,il est bon. que dans des fête~ telles ci~e ceiles-ci, les habitants de tous les pays s'unissent pour renouveler ensemble, devant le ciel et les hommes, leur serment de fidélité à la libe.-t,f politit1ue, ·parfaite èt illimitée. • _Oitoy~ns, c;est_votre dévoueme~1tà ce grand priricipe qui ,•oüs pr!ve ~ll.JOu!·hdm _et. de vos droits et de votre patrie, c'est ce meme dévouement qui no~ts ·port(! à partager avec vous les donle~11·sde !'_exil, et -~ vous offrir un asile contre la tyrannie des troncs. • ~u'il est beau le-rôle que Jersey est appelé à jouer dans l'his- . foire de l'humanité! Il semblerait qu'une Providence, douée d'omniscience, prévoyan~ la -chute_•)ct~1elledes i~1térêts des masses, ait voulu que cc p~~1tpaY}i_si mt1mement h~ par ses vieilles gloires, par ses tr~~1t1?ns venerabl_es à la France et à l'Eµrope, échappe il l'hum1l!a~10nd_u Contment, élève sa voix énergique et sincère contre les mJnst1ces des monai;ques, et invite les opprimés de tontes les nat_ions à se réfugier dans son sein. Compatriotes jersiais, il est vrai que nous ne pouvons nous vanter de !los trophées d'Austerlitz, de Tr;tfalgar ou cle Waterloo ;. 11'.a1sces victoires je les méprise, lorsque je me rappel le Î'ms1gne honneur réservé à l'île _ql.\im'a '{U naître. Et vous, nobles proscrits,.vivez en toute paix dans cette île qui vous était déjà bi~u ehèrc il y a un an, mais qui doit vous l'être ènccire bien plus aujourd'hui, puisque penclant la dernière année vous lui avez confié le$ cl4pouilles mortelles de trois de vos mar~yrs. Qu'ils dorment en paix, ces nobles soldats de la d~1110crat1e; au p~ys ~c l'étranger! fis n'ont pu survivre à l'humiliation de leur patrie : ils ont v6cu pour l'Humanité. Ils étaient rlignes d'être confiés à un sol de liberté, .et nous, Jersiais, nous jurons solennellement de surveiller, avec le soin le plus religieux, leurs toi_nbessacrée~! Quant à moi, je n'hésite pas à le déclarer, je sms ~er d'avoir été le premier Jersiais choisi pour porter à sa dern1~re demeure ~n de ces trois témoins de l'indépendance humarnc, et cc sentunent, je le conserverai jusqu'à l'heure de ma mort. J~~sjours les_plus l1eureux de ma vie, je les ai _passésau milieu des epa11chemen_tsde la proscription, et je ne me rends que·l'écho de mes cornpatnotes jersiais en remerciant la Providence de vous a~o_iip· o-i-_té ~ passer _p:irini nous les ann6es de votre exil, Jmisque la proscnpt10n vous était réservée. Et quoique nous désirions t~u~, du fo~d de notre cœur, qu'un Dieu propice vous rende bientot .et )ps foyers de vos pères et le ciel de votre patrie chérie, vot_~ed~part, nous n'osons vous le cacher, nom; plongera dans un demi bien profond. Il ne nous restera· alors qu'à aller méditer sm: les tombeaux ,de vos compatriotes, en nous rappelant· qu'il existe un monument de votre séjour tlans cette île, non certes une col?nne de bronze ou de pierres taillées par la main des mortels, mais un monument dont le Tout-Puissant a été le sublime fonds.- teur. et le divin architecte; oui, citoyens, nous nous transporterons ve1:scc rocher, type si beau, si fidèle de l'fi1ergie avec laquelle vous combattez les vagues du despotisme, et des principes ~ternels que vous_représentez et <lu triomphe <!omplet qui ·vous attend, rocher qui portera pour tonjonrs le uom si touchant de Ra.cher des Proscrits; et pent-~tre, assises au pied de ce rocher, des. générations encore il naître, réfléchissant sur l'histoire du P.as~~, s~ rappelleront que ~'il y a divers pays, s'il y a cliflërents nv~ges, 111. ~'?'a ~pr~s tout ~u'une seule mer, qu'un seul océan et que cette mer ne doit plus etre la Baltique tumultueuse des nation_,~lith oppo~ées. ni même l'Atlantique agité de rivalités de co1~)ments, mais bien !'Océan pacifique, paisible, calme, tranqmlle, d'une liberté universelle, <l'une égalité pai:faite d'une fraternité immortelle! ' Il y a .du cœur, de l'élévatiou ùans ces paroles et surtout un grand sentiment de l'humanité: un m,ot seulement-: nous prosc.r.its de la République, nous croyons que· les formes sont absolues comme les idées, et que la liberté L' HOM11 E"; humaine; pour rayonner et s'épandre entière, a besoin de la souverainetê vivante constituée républicàiuement, comme le soleil a besoin du c_iel: mais si la rigueur du droit nous oblige à marquer ici une différence, notre reconnaissance n'en est pas moins profonde pour les inspirations élevées, et les sympathies ardentes qui viennent librement, spontanément saluer le malheur ! .. L'assemblée O.esproscrits a couvert de ses acclamations le discours de l\'.I. Wellman, et l'un des plus grands esprifs et des plus religieux de ce temps, Pierre Leroux, lui-a ré~ pondu. ; nous ne pouvons donner ici cette réponse improvisée, courte harangue du cœur : mais tous ceux qui con: naissent la parole cordiale et pleine de tendresse élevée du philosophe proscrit seront convaincus que ses remercîmens à Jersey_sont dignes ét de C:etteîle hospitalière et de l'excellent citoyen qui a bien voulu la représenter au milieu de nous. Après le citoyen Pierre. Leroux, le citoyen Cahaigne a pris la parole et dit CITOY~NS, Brutalement jetés !tors ae la p:itrie, livrés par le despotisme à l'inspection infâme des policiers de tous les étages et de tous les pays, accolés à la vie forcément errante et incertaine des bannis, à l'abandon, aux misères. aux tortures cle l'exil ; arrachés violemment, par une embuscade de voleiu-s nocturnes, de la tcn:e sacrée où reposent, ô profanation de l'âme! où reposent la m~re, l'amante, l'épouse, l'enfailt; traqués, poursuivis sans relâche, espionnés, calomniés, outragés comme ne le sont pas les courtisanes par la voix éraillée• des sénateurs impériaux, blessés ainsi dans tout ce que l'homme a de plus cher, de plus digne et de plus pur, mais luttant toujours avec une invincible énergie ; luttant iu_flexibles, <le toute la puissance de la force morale, de toute la grande11r du sentiment, les proscrits de toutes nations, quand ils touchent enfin une terre hospitalière, la saluent avec un respect religieux. Et c'est là un devoir, en vérité, 11ndevoir haut et noble comme l'e~t toujours le devpir humain : un devoir à la fois doux et digne, car l'homme, le proscrit, retrouve des hommes comme lui, des hommes fiers et jus tes, bienveillans aussi,. généreux et tendant une main fraternelle, faisant entendre une voix amie à tous les soldats blessés, mais non détruits, q11ise présentent tenant d'une main la plume et l'épée ; de l'autre, le fus·il et le clr:i.peau de l'humanité. • Jersey est une tonte petite île, diront les sénateurs de VerhuelBonaparte, un petit 1;ocperdu au milieu de l'océan. Qu'importe? Depuis q11a11da-t-on pris la coutume de·mesurer le courage et le sentiment selon la taille ·mét-rique cle l'homme et l'étei'1due de la terre qui l'encadre. -Non, non ; cela n'est pas, cela ne peut être ; la vertu brille partout, le courage aussi et le sentiment fraternel ; ou1, partout où l'on rencontre l'homme vr11iment digne de son titre .. Trouve-t-on cela dans le Sénat de Bonaparte? non! • Citoyens, tout à )'heure je parlais du devoir ; non pas de celui selon l'arithmétique et la banque, mais du devoir social et moral, clu grand devoir. C'est -pourquoi, citoyens, je ne trouverai jamais trop de remercimerts pour les sentiments sympathiq11es si clignement exprimés par le citoyen Wellman. Il a saisi la phis précieuse note, il a touclié la plus sensible corde du• clavier humain, la vraie : il faut du èœur ! , Oui, citoyens, il faut du .c·œurHà est le foyer des hautes inspirations, du sentiment éleyé, de l'héroïsme, d11grand devoir. La pl1ysiologie de l'homme .nous l'enseigne : ce qui, tout d'abord, apparaît chez l'embryon commençant à se constituer. da11sle sein de sa mère, c'est le point rouge à la poitrine, le cœur; dru1s la mort naturelle, quanti la .<).écr~pituclea refroidi les extrémités, le cœur s'éteint le der11ier.Vous le voyez, citoyens, le cœur-annonce le commencement de la vie physique; il la développe, l'entretient iltravers les phases diverses, puis il l'emporte en s'éteignaiii .•Mais c'est le côté physique. - JI est nue autre vie du cœur, bfoü plus large et plus haute, presque divine ; elle se mêle, elle aide cette sublimité éthérée qu'on appelle l'âme : c'est de cette union admi- . rable de la vie du cœur et de l'âme, <1ueJ. J. Rousseau tirait cette magnifique prosopopéé ·: 0 Fabricius ! qu'eût pensé ta g1·ande âme ... etc. C'est à la même source que puisait le véritable vainqtiet~·. de Marengo, non pas Boi:iaparte, entendez bien, mais Je grand Desaix qui, à trois. heures de relevée, le vieux Mélas ayant expédié tous ses courriers pour annoncer la défaite de Bonaparte à l\farengo, reprenait, lui, Desaix, la bataille perdue, la changeait en _victoireau prix de son sang de héros, et mourait en exprimaut le regret de n'avoir pas assez fait pour ht République, et l'âme remontait vers le ciel, ne soupçonnant pas, ne pouvant pas soupe çonner, elle si grande et si pure, qu'un héros en herbe allait lui· voler b:i.ssement l'honneur de la victoire. C'est encore au moyen de ce saint mariage de la vie du cœur et de l'âme, que le digne compagnon d'armes de Desaix, le valeureux Kléber, assez fort et assez noble pour donner sa vie comme l'avait fait le vrai vainqueur de Marengo, n'hésitait pas, lui, âme de héros aussi, à demander ce noble sacrifice a11chef du bataillon de Saône-et-Loire : "Corn- " mandant, lui disait Klébér, vous défendrez ce pont à toute ex- " trémité ; vous vous y f~r.e:i:t;uer avec tout votre monde ; pendant " ce temps je sauverai 1.'a.rmée."- Et l'autre, trempé en héros comme son chef, répondait ~aconiquernentet patriotiquement :"Oui, "général.''- Il faisait bj,e_umieux, en vérité, il tenait parole, il mour:iit, le brave Chevardip _! . Ah ! vraiment, les grandes âmes se comprennent et s'entendent vîte, ]'intrépide Klé_beravait _pressenti, deviné le modeste et non moins intrépide Chevardin-cornment cela ?-comment '? demande-t-on: c'est que ce grand courant de la vie, du cœur et de l'îlme, cette électricité de -s.e11timentraverse les plus pesantes atmosphères, les plus dures. poitrines humaines; c'est bien mieux que la foudre; c'est le soufüe de Dieu! Eh! qu'eûssent donc tait ilèispères, saints aujourd'hui du calendrier de la république, salis cette appétence subiime? auraient-ils brisé la féodalité, prociam§ -les Droits de l'Homme? auraient-ils fait des lois, la parole tril,~i11itienne éclatant plus fort et portant. plus loin que la voix dti ï:::i:ion? auraient-ils pu lever 11uatorze armées et comm:mder h n,tr:1ite au despotisme envahisseur? qui donc poussait leurs héroïques légions, sans souliers et sans pain? -l'esprit de Dieu, citoyens, b voix du cœur et de l'âme, voix incessante, voix divine, répondant à ces bataillons toujour%garnis de héros affamés et meurtris; il fiutt clu rœur 1 / Et vraiment, nous ponvons le dite ici, sans fausse modestie comme sans orgueil, la noble traditior\ n'a paB été pefèlue.-/1 faut du cœur ! avaient crié de leur voix d'airai_n les grands érnancipatemii en. 93; il faut du cœur ! "citoyen du mèm.cl.e_,...kommep,our tout "dire, fais ce que dois, adviem1e que pourra, •'-enfans clela grande école, nous avons suivi la loi: nous sommes à Jersey. . Mais du sommet de ce rocher, si infime eu égard aux territoires du continent, nous crions en plein porte-voix: droit de l'Homme, Justice, Liberté, Egalité,)haternité des peuples, des peuples, ai-jedit~. oui, citoyens, regardez : Hongrois, Polonais, Italiens, Français, Allemands, Anglais et Jersiais, (l'Humanité ne connait que les hommes; elle passe, tranquille et bienveillante, sur les nations et sur les sectes,) regardez, citoyens, regardez et dites s'il n'est pa_sv_raique des_quatre points cardinaux de l'Europe, l'idée répubhcame, le sentiment fraternel, sont venus rayonner sur cet asile sacré, sur cet î16t, tant petit soit-il, q11ilaisse l'idée républicaine, le seus moral, le sentiment, se dégager à l'aise, selon la devise de nos pères : vivre libre ou mourir! Pourquoi somm~s-nous à J.ersey ?-Pourquoi? parce que nous a_vonsdéfendu la raison, le droit sacré de l'homme, la liberté, la justice, }e cuit~ <:lubien et du beau; nous sommes à Jersey, parce que nos ames hbres et fières n'ont pas fléchi, ne fléchiront jamais. Nous sommes aujourd'hui à Jersey, demain ailleurs, peut-être, parceque nous avons combattu pour la dignité de l'homme; parcequ~Anous avons fidèlement gardé, loyalement smctionné cet ax10n:iede morale publique : jètis ce que dois, advienne quepourra f nous sommes à Jersey, citoyens de l'Europe pàrce nue nous avons cl, 1 1· , ' •1 gar ; e en sac1:e,parce q~e nous avo11stoujours suivi cette voix supreme nous criant en meme temps que le soleil nous chauffe: il faut du cœur ! Tous ont-ils écouté la grau de voix? ont-ils suivi la belle route? un moment d'attention, citoyens, assistez au défilé de ces mar- ~ha~ds, faux et immondes comme des prêtres, de ces bateleurs Joram~ ve~~an: aux rois, pour opprimer les peuples, cette marc!1and1selrelatee, nausfabonde et funeste, cachée par eux sous l'étiquette d'un mot sacré, Justice! regardez passer les Troplo11g, les Persil, les B::1roche,les Roulland, les Zangiacomi, et surtout, oh! surtout, la cour de Cassation, l:i cour Suprême, comme on avait coutu~~ ~lela no?1mer, effaçant d'un trait de plume.sa réputation, usurpee Je le sais, et pourtant séculaire cle probité d'inflexible l 1 1 • ' 10nneur. a cour de cassation, la cour suprême la o-ardienne de la loi, Je la m_orale, (on disait cela et beaucoup le ~royaient) la cour de cassat10~ consacran~ par ~n·arr~t motivé l'acte le plus rév?lta1~t, le plus !ache <les,cnmes mventes par le .despotisme, la v10lat10ndu secret des lettres ! : Citoyens, en face de ces énormités devant lesquelles reculeraient des sauvages, n'est-il. pas bon de crier plus haut ·que jamais: il , faut du cœur ! ... C!es~ H notre foi,_citoyens, notre fl:>i.. il nous reprêsentans vrais du Dro1f, de la Justice, de la Morale;. c'est là notre déclaration r;Iigieuse· à nous, pauvres pro~cri~s, ve·nus de toutes les régions de 1 Europe, pour affirmer le droit naturel, jnébranlable de l'homme sa dignité,. sa Liberté! ' . Et de J?île d~ Jersey qui nous offre sa-côte hospitalière, nousjetôns ~u despotisme toujours bas, hideiix et lâche, nous lui jeterons du sem des morts, le défi solennel tle ··la-conscience humaine aujourd'l~nî si :violemm~nt outragée. ; .•, Esperance ~one, c1to7ens, esperan~~ et foi toujours! les temps ne sont_pas 1~m, peut~c~re, où chacun ·c1enous pourra enfin revoir s:i patrie. Mais _reconna1s~ans, nous_·.J'\eperdrons pas le souvenir de. ce rocher qui fut le refuge des e.~1~~s; nous garderons au fond . du cœur, comme. le. d_oiventles 'homrjte~ ?ignes, la gratitude que nous devons a11xJ_ers1a1se; t quand_J_taradition aura repris son cours, lorsque·, dept!IS bien longtemps deJil, la: tombe nous aura donné ce repos impossible .pour nous sur terre, tant que le despotisme empoison!le 1'air; alors, peut:être, ·au coin du Jbycr, clans la douce ~ausene de famille, un bon pè~e, quelqtre Wellman, par exemple, t!duquant ses enfans leur dira: -<•·Un jour nous avo"ns fait une . "bonne action, nous Jersiais; quand le crime sous sa forme la , " plus hideuse,·-qujnd le despotis1n~ dans toute sa brutalité dat!s "toute son infamie, menaçaient--1e···monde, notre terre de jersey _"_f11tle champ d'asile des énergiques soldats du droit, de la liberté, "de ·la dignité hui:naine; oni, mes é1~fans, c'étaient de bons h6tes :'. fermes, loyaux-et francs; ils ont•pl'is droit rie cité parmi nou~ : quelques-uns des :leurs reposent chez nous, lé gazon de Jersey "recouvre leurs·tombes; oui, rrtes e11fans,c'étaient de bons hôtes, "vivanrav.ec dignité et sachant mourir de même. Avant de quitter "la terre, ces martyrs, aéfenseurs du ·droit·de l'homme et- de la " grande idée sociale; s'enroulaient noblement dans le\lr ùrapeo.n et " dis_a_ienptour derni~re parole: Ufaut du cœ11r ! Ces paroles du citoyen Cal~àigneont eu p·our dernier coro1laire ~n chant dont le refrain vengeur châtie les lâche.:. tés contemporaines, et. ce ré'frain :est le beau motif.de son discours - il faut il;ucœur;· Le citoyen X; Durrieu prend· ensuite la parole et commence ainsi : • • C1TOYFNS, Vous m'excu~erez si j'ajoute _qµelques mots aux éne~·giques discours que vous venez d'entendre, et dont l'Gmotion dure encore• vous m'excuse\éz, je !'.espère,. si, _pris à l'improviste, je n'élèv; pas ma parole a la hauteur du ·sentunent qui nous réunit. Je veux parler ~e 1~per;-~v~r_ancedans.l'exil et dans la lutte, jusqu'au jour .de_la v~cto,1r~de .fi~11t1vdeu dro~t,_con,tre le crime, des principes de Liberté,_ d Égahte, de Fraterll)te contre tous les despotismes! . J'ai à_oxpr!mer, citoy~ns, _d:s senti~1ens Lien vrais, bien prof-Onds,b1e11vivaces·, caT ils res1stent vaillamment à toutes les colères de la persécution; ils bravent et dominent toutes ·les douleurs de l'exil. L'indispensable conditi.on des victoires définitives c'est .de savoir souffrir,_-. souffrir beaucoup~ -----s-o:uffrir longtemp~, s'il le fa_ut,- souffrir Jusqu'a_u ?out. •Quiconqu~ en douterait un seul mstant ne comprendrali rien il cette admirable Pologne~ dont nous .sommes aujourd'hui les conv.iés sympathiques : comment, en ..P,:é:ence de ce colo_ss~lmartyre, déjà_ séculaire, s'expliquerait-il t mebranlable conv1ct10nfde ses enfant.s, leur résplution constante, leur foi invincible? Ah! ne craignons pas de regarder au •fond de ce passé, si horrible et si glOTieux : ce sont surtout les· , _tribulations du passé, ce sont aussi les tribulations du présent qui: ·promettent l'avenir. Je n':ii pas l'intention de reproduire ici la brillante et douloureuse histoire de la Pologne, éloquemmént e!- ·quissée déjà par un précédent orateur; qu'il me soit permis; cependant, pour notre encourai;ement à tous, d'en, rappeler briève-. ment les principaux traits. . En 1772, h Pologne est violemment démembrée, <lépécée,~t ·toute saignante encore, dévorée par trois ·goules royales, àJa hontè: ineflitçable des autres gouvernemens européens qui s'étaient lavé les lllai11s,comme Pilate, des tortures de cette passion. Plus tard, sous l'empire, la Pologne, déçue comme la France elle-même, éblouie aussi par une gloire fausse, la Pologne met svn dévouement au service du premier Bonaparte. Bonaparte accepte ce dévouement; il le harasse, il l'épuise, et, pour toute reconnaissance, à Erfuth, il donne d'ignobles- accolades d'empereur au czar Alexandre. Le czar les lui a fait rendre, à Paris, par les cosaques et les amis des cosaques, qui traînèrent sa statue aux gémonies. Voilà toute la politique du premier Bonaparte! Voilà tout son cœnr, toute son intelligence ! Je conseille à l'ancien monde d'exalter ses grands hommes : le grand Fré~éric qui a si gloutonnement.et si mal avalé son lambeau de Pologne qu'il l'a bissé dans la gorge de ses successeurs, au risque de les étouf~ fer! Le grand Napoléon qui n'a pas même compris combien il importait de replacer, armé de toutes pièces, aux avant-postes de la civilisation européenne, ce noble Peuple-chevalier! Ils se valent tous, vous le .voyez, ces coupe-jarrets parvenus et ces brigands de vieille race, - Brandebourg et Lorraine, Bonaparte et Romanolf! En 1830 et en 1831, la Pologne subit l'acte le plus effroyable peut-être et, à coup.sûr, le plus éclatant de son martyre. Seule, toujours seule ! toujours abandonnée à elle-même ! La France en •
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