Sachez-le bien, vous tous que Pair libre importuüe Et qui dans ce fumier plantez votre fortune, Nous ne J.aisserons pas Je peup·Je s'assoupir; Oui, nous appellerons jusqu'au dernier soupir, ·, Au secours <le h France aux fers et presque éteinte, Comme nos grands aïeux, .l'insurrection sainte! Nous convierons Dieu-même à foudroyer ceci. Et c'est notre pensi!e et nous sommes ainsi, Aimant mieux,.dfit lc"sort nous broyer sous sa roue, Voir couler notre sang que croupir votre boue. V1c•roR Huco. ' LESMYSTEREDSUPEUPL.E. PAR RlTGENE SPE. • La ;Révolution française qui n'est au fond qu'une philosophie a non seulement ouvert un ordre nouveau, mais elle a répandu ses clartés sur les temps antérieurs - et, révélation à deux faces, elle a transformé l'histoire comme la politique. Avant que la méthode scientifique et l'esprit de libre examen n'eussent élargi, renouvelé la connaissance humaine, que disaiEmt les chroniques, lts ~nnales et les compilations entassées dans la Babel des siècles? Qu'y avait-il au fond de !'Ossuaire historique et que pouvait-on trouver aux archives du temps? - des récits de sang ou d'orguej.l, des légendes de succession, des chroniques de guerre, des fastes et des noms illustres, l'histoire en un mot des_maisons royales, <les courtisanes et des conquérans-c'est-à-dire l'éternelle monographie de la puissance, en ses' diverses figures, écrite par l'ambition servile ou la peur eunuque, sous l'œil et la main des maîtres: Eglise, royauté, noblesse, parlemei1t, sénat, le monde officiel,: partout et toujours, occupait seul la scène, et cela, dans la mort, comme 1fans la vill: les quelques tombes sans blas.on qui marqUaient ça et là. clans l'herbe des siècles ne portaient que des épitaphes de fortune; et, les peuples pass~ient, dans le temps, èomme les bœufs au joug ; l'historien nomenclateur n'en tenait compte que :pour les inventaires! En veut-on la preuve, une preuve décisive? La voici : • Certes, il n'y a pas dans les anuales de la monarchie française d'ép9que plus illustre, plus civilisée que le siècle de Louis XIV: c'est la période rayonnante et lettr~e par excellence;_ c'est le temps des victoires_ et des chefsd'œuvre, ües grandes guerres et des grandes langues, des Turenne et des Bossuet, des Corneille et des Cati11at. Eh bien, au milieu de ces beaux génies qui portèrent si haut l'a gloire des lettres françaises, parmi ces maîtres illustres de l'éloquence et de l'art, en trouve-t-on un seul qni se soit inqujété de la France, de son passé,. de ses douleurs présentes, de son avenir? y â-t-il une page, une ·seule page vengeresse, pour le peuple martyr aux. Cévennes et chassé de sa patrie, pour le peuple éleva11t l' Alhambra de Versailles et mourant tle faim, dans ses chenils,. pour le peuple tombant aux armées et se couc_hant sous la gloire d'un seul? Ce ne sont pas les historiens qui manquent, pourtant : il y a des Légendistes, des Rapsodes, des Chroniqueurs par centaine,s : les mémoires de cour, de boudoir et d'académie foisonnent : les oraisons funèbres tomhent comme des fleurs sur les cercµeils princiers, et l'idylle ellemêmè. se fait dithyrambe : mais toutes ces voix co1\courenf à la même idolâtrie; elles chantent le grand Narcisse, et, pas une strophe, pas nne larme, pas 1rn mot ne tombe de tous ces Hélicons ~ur la France é_1rnisée: il n'y a que Vaubal;l, un soldat, qui pleure sur le peuple. à l'écart, et qui~nous parle de ses misères muettes et défaillantes ! Plus tard, au dix-huitième siècle, l'analyse philosop}lique ouvrit les mystères, les dogmes, les tabernaclts et pénétra partout, comme la sondé au)t fond des eaux : •il _fallait d'abord affranchir la raison publique et l'on prit à. partie les religions, les J)rivilèges, les gouvE:rnemens ; mais l'hist~ire ne se· dégage pas ei1core de ses habitudes domestiques ; elle continue son œüvre, en fidèle servante des cours, des académies, ùes cultes, des parlcmens, et nous voyous les Rollin, les Cuvier, les Lebeau, les Anquetil, charrier-entre Voltaire qui rit et Rousseau qui pense - leurs brouettes chargées de rois, ùe héros, <ledemi-dieux et de courtisanes ! La Révolution éclate enfin, ~ le Yolcan qui fumait se ilécliire, vomissant les idées, le fer et le feu, les armées et les orateurs, les ca1Jitaines et les gnw<les assemblées : la basti 1le est rasée, la sorbonue est vit1e, les -tuileries sont veuvesi le peu_11lJest CH scène et souverain : va t-il fouiller les origines et le secret <les tombes, relever son, arbre généalogique, éplucher des trarlitions, des épitaphes et travailJer au livre <le ses morts? - l{élas ! l'action dévore le temps, il fout dGfcnùre 1a Révolution et couvrir la patrie : vaincre ou mourir, voilà le. de:,·oir; et le grand bâtard cle l'histoire, l'œil à la frontière; la main sur le canon, ~écrète, organise, comb:tt -- avant le:. reliques, les glaives ! ' . Ce ne fut qu'aprè:,o une guerre <leviugt ans, et quand la France moderne constituée daùs sa loi civile, mais :i,battue par une défaite, vivait de nouveau sous la main de ~es ançiens rois, que la lutte change:i tle teuain et s'en-· gagea sur celui des siècles. Les Francs alors étaient revenus des bords du Rhin, • en maigt-es comparses de· b victoire, mais toujours orgueilleux et voulant dominer, comme jadis : L'Eglise, <le sou côté, leur vassale et leur complice séculaire excommuniait la liberté, la philosophie, les sciences, et faisait croisade avec tous les ù.ébris cfu passé, ?Jo_urla ·sainte foi des pères : C'était le moment du choit d'ainesse et de la loi du sacrilège. Or, tandis que par la presse et par h tribune, la Révolution se 1léfendait, contre les deux puissances ligu•ées, avec les tronçons de libertés constitutionnelles qui lui 1·estaieut dans les maii1s-des écrirnius uonveaux, pour la plupart, sortaient des bibliothèques, pour porter témoignage-et, déblayant le passé, depuis les champs de bataille rle la République, jusqu'aux pierres llruidiques des G.aulois, ils établissaient-les 1111s, le travail constant du peuple, à travers les ûges et les défaites,-les autres, le progrès continn des inéés, ,laHs leurs formations. successi,·es. C'était là plaider la canse; Hstoriquement et scientifiquement, en fait comme. e.u droit, et la Révolution frnn- ~mise pouv:.it <lésormais ·dire à ses ennemis : non seulement, je suis la volonté de la conscience cont.emporair,e,· ~ais je J~lÎ~ la veil rn~-e'c¼s·siècles opprimés, je suis la justice progressive qui est supfrfe.:ure•à- t'outes vos religions. C'es deux évolutio11s critiques se sont rl{'.·cluppées depuis, et, de p::iït et tl'autre, on a creusé plus profondément, jusgu'au jour enfin, où le peuple _affranchi pst deux ré·:olutjons, ,an lieu de retenir le pouYoir en ses mains, le mit en suffra'.ses. Ce jom ll, ._c'_éiaitl y a quatre ans· à peine, c'était hit'r, et l'on sait déjà commrr en ont l:sé les llènénciaires de l'ancien temJi"s, les hêq ues, les financiers, les hauts barons du parcllemin, de la fonction, du capital-tout ce qui .. vient, en un mot, de l'Eglise ou de l'nsure, des caf:ernes, des monopoles ou du prétoire ! Tro11:-paut la corifün1tc loyauté <lu peuple qÜi les a,•ait admis, eux, les oppres,;eurs de b veille, à tous -les droits, à tous les profits du lendemain, ils organisèrent d'abord contre la République la commandite des calom- _nies; ils exploitèrellt la misère des uns,· l'ignors.nce -des autres, la crédulité ùe tous; et, groupant enfin leurs iiitrigues, leurs richesses, lems perfidies, ils envahirent le gouvernement - en sorte qu'aux derniers jours, dans l'assemblée général~ de. France, et, sous les devises républicaines, toutes les monarchies, tous les abus, tous les priviléges avaient leurs représentants; l'inquisition elle-mê:me y tenait ses siéges !- Ainsi, la Révolution était traq11éedans le temple même qu'elle avait ouvert ù. la conciliation : elle y était Hon seulement traquée, mais frappée, mutilée dans ses droits souverains,. et comme tous les vieux dogmes ennemis s'é- • l , l taient_f,01:ne renc ~~-vous _e~ce grand carrefour, la longue consp1rat10n <les s1ecles étatt là, tout entière vivante et . ' debout comme une armée. Ce fut au milieu <l_eces comulsions tragiques, en prése~ce de toutes ~es hg1ies cle la vieille op1wession, qu'un artiste-conteur ~1mé du pays, un romancier-philosophe, M. Engène Sue, :fit tout à. coup Ïl;tenenir le cliœur des esc!aves, e~ jeta toute saignante l'histoire du peuple, en plemes assises. • . L'histoire <lupeuple !_c'est-à-dire la cl1ronique successive et détaillée <le toutes les servitudes morales et maté- ~-ielle~ q11e n?s pères ont traversées, ÙE:puis 1~ grande rnvaswn roma111eJusqu'à nous ; . ~'histoire '.dupeuple! C:est-à.-dire le poème éternel et jarnats fermé cl,esluttes vaillant!;!s, des saintes révoltes et <lu travail incess·ant ;;'élevant to1~joursvers la liberté; voilà sans c_ontredit une riche, une merveilleuse épopée~ et comme on n'en trouverait point a.illeurs, ni claus les maisons royale_s, ni chez l~s dieux ,d'Escl1yle, le grand tragique! Mais pour dérouler ces fresques héroïques,. pour tai.ller . dans les annales cette statue gigantesque' dn peu1:ile, on n'a que les gr~n_deslignes: le peuple, en effet, ne s'appelle . pas Agamemnon, Alexandre, César, Charlemagne : il est le ., rouet qni tourne, la faux qui moissonne, le travail qui scie•, 1èwld,tt l[Ui )~1tte, l'irlée qui cherche, le dévouement qui, meurt : tout vit de ses labeurs et de son sang ; mais il -,11,'estpas. lui-même une JJ_ersonnehistorique, un héros qu'on puisse. étuflier et suivre pas à pas du berceau jus- ~u'à _la tombe :_dan~ sa vie :~ultip1e, il est mystérjeux, rnfi.111 comme la mer et comme Dieu. ' M. Eugène Sue, dont le talent <le mise en scêue et l'habileté 1m;tique sont adrnitables, a su trouver, lui, pour se dégager de ces difftcultés, un moyei1 bien simple et vraiment fécond : il a mis le peu1lle dans une famille et • ' ' cette fami11etypique, généalogie vivante <lu travail et de la douleur, i,l l'a suivie de ·~iècle en siècle, de s11ppli'ceen ~upplice, de lutte en· lutte, depuis ses origines gauloises si pleines tl'omhre, si ',lointaines, jusqu'à nos grandes guerres sociales de ce temps. • Il nous serait impossible d'indic;uer ici, même en p~ss:rnt, la suite, et la s"érie de ces po~mes vigoureusement éfiauch6.s, qui l?,'enchaî.nent et se développent dans la grande li'gne; mais 'nous devons et voulons constater que la ,font::iisie si diYer:;e et si riche s'appuie partout sur le document sév~re ; oue dia1111egénération dans ce livre J. '1 ' • ' se "l~Yebien à son tour et passe avec sa clameur ou son fardeau ; qu'il n'y a ni .faiblesse, enfin, ui 'déguisement, .ni fraude, pou1; ou contre les martyrs. . Jusqn'à ..ce~joui·, le pèui)le 11e savait rien t1es ancêtres : j] n'av~it pu lite 1ü lès Thierry, ni l~s Guizot, ni les Monteil , et sa g1'anùe histoire lui était fe;-mée. Anjouid'hni, grâce :l. JVI.Eugène Sue, dont l'œuvre, en ses derniers feuillets, porte la marqne ôe l'exil, le peuple a son épopée : il counaîtra les aïe1ix, leurs traditions patientes, leurs _saints cléYouemens : il saura qu'il n'y a pas de maison royale au monde plus haute que son échoppe et sa dtstinée ; il ne dormira pas au cl1enil; et ''1e beau livre de l\L Sue sern son covr11a'/l,t ! C. R. JCHSEY, ll!PRI,~IERIE UNIYEflSELLE 1 19, DOR!-ET STREET, AVIS Il sera publié avec chaque numéro nn supplément spécial po11rles ANNONC"ES dans l'intérf.t <~~1 Commerce, <le l'Iudustrie et de la Science. Les Annonces de 1 tons les pays seront acceptérs à la condition <l'être écrites eu français, conf'ormémeut au spécimen ci-uprè.;. Les _\.yi:; et A11no11ct's oHt reçus jusqu'au vctidredi à mi~i, à Londres, à la librairie et agence de l'Irnprirnerie Universelle, 50 ]72, Great Queen Street Lincpln's-Inn-Fielùs, et à l'office c1e]'Imprimerie llniverselle, 19, Dorset $treet, à Je!'sey, S-Hélier, jusqu'à l'arrivée du courrierdu mardi. Toute cone~pondance doit être affnmchie et contenir 1111 ho11,soit sur la poste anglaise, au nom de M. Zéno 8WIET03LAWSK_r, soit sur ?n des b_anquiers de Jersey ou de Lonùr~::-. te prix des Annoncrs est uniformément de douze som (six pence) la liglie, lJ0m· les frois to,'tes de caractères courants employés dans ce JOU~nal. Les lignes en capitales et en le!tres de fantaisie, seront payées en proportion de la hantcnr qu'elles occuperont,_ calculée sur le plus petit texte. : EN VENTE ANNONCJES@ CATALOGUEDES OUVRARESPOLITIQUESET SCIENTIFIQUES A la Librairie et dgence de l'Impr:,nerie UniYerselle, 50· lf] Grl:'al Queen Strw!, Lincoln's-lnn-Fielrl.~, Lombes, et à l'Office de l'l/}/primerie U,,i.:ersrlle, 19, Dorset-Street, Saint-llé(iei·, .Te1·s~y. •VIC'.{'O_RSHŒL_CHER, repr6sentant dn penple.1Chdtime11ts, poésies p0litiques, ouvrage nouveau,IPH. BER.JE AU, ex-rédacknr clr la Vraie Rrpu- français et· Jps Polonais ( French empire and II,sto~re des Crmze:~Ju 2 Décembre, l vol. in-12. 1 vol. in-3~. / bliquc. - Riographies bonapnrtisLeH (sons presr.c) 1 the Polc>s), l vol. in-8. Tra_duct101_1en anglais du même ouvrage, sous le Discours prononc6 à Jer~ey sm la tombe du pro~- contenant la vie ùe Persigny, Saint-Arnaud, La France c1 l'Angleterre comparées, par Golotitre: H1story of the Cri111esof the Second o crit .Jean Bou•;quet. Morny, Magnan Ilarochc Achille Fould et vi11e. Dece111ber, 1 vol. in-12. Traduction rn a11glais, format in-8. autres qui ont pri;; p:irt au 'Conu-'d•:Etat, 1 vol. Du J)(,rclop~lcmcnt des Idées ré,·olnt ionnaires en LeGmwernment du Deu.1·DJcembre, pour faire suite Discours prononcé sur la tombé cle la citovenne in-32. ' R11~~iep, ar Alex. Hcrzeu. à l'Hi~toire du DfuJ.•Décembre, 1 vol. in-_12. . .Julien, etc. .T. CAHAJGNP, rx-rédactenr - l)ropriétaii-e du RecLh•il de docurnentfl secret~ et inédits, pom Traductwn du même ouvrarre so·1s Je t1·1·ec•e· • ' , • 0 en·ir > I'~- ·1• l l'H' ·t • ·, l't· ·' _ · . " ' L ~ ' JEANNE DEROlN. Almanarlt des Femmes. 011 ,, JOUl'llalla Commtml' de Pal'is.-111 Co111'om1P impe. .. , a e,n- e 1 _e JS 0111 • P? 1 '.qu~ ue i~;e;neme,zt of the Seco,1d of December, 1 vol. 18531 1 vol in-Hi. , • - P riale, satire en ver~, déùiGe à Lonis-N:ipoléon- !' l~~ll"opedans la cnse actuelle, trois hvr:n~ons PI .ERI;E LERO · Le m~me pour 1854 (sous JJres~e) • \Verhuel <litBonaparte, 1 YOl. in-12. 111 -. • "' , U:X', représentant du peuple. • • • .,,, , . Rrlat10n de la campap·ne de Sicile en 1849 l vol. _ Cours de Phrénologie. les douze premières linai- CH. RIBEYROLLES, ex-rédacteur en chef d" J. ;· AHI.é.~, ~:;q. Sunntei:d~1:~} .J_erSt>-y. in-12. • 0 ' $")US (ouvrage interrompu). '' la Réforme. - Les Bagnes d' Aji·ique, précédés Ta~leaux lu,l_oru/ùes de let Civtl,sa,ion a Jasey, Poésies politiques c>n ]lQlonais, par Roch RnpLettre aux Etats d: Jerse'!/ sur lei:,moy~ns de quin- ~•une dé<licac.e il Napoléon .Ro,iap:ir!e; J l'Ol. 1 ml. gqt1<lm- 8 • niewski, 1 l'o!. in-12. tu;iler les _p.rodu1tsagricoles, l vol. m-12. m-12. • • La C:difornie et les routes intero9éaniques, par VICTOR H.UGO, reprl)sentant du peuple. -Traduction du même ouvrage, 1 beau vol. in-8 Holimki, 1 beau vol. Napoléon-le-Petit. 1 vol in-32. (sous presse). Inva?ion· de l'Angleterre, sous le titre : l'EmpÎl'I' •
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