Le Contrat Social - anno XII - n. 4 - dicembre 1968

202 les « dictatures policières hypocrites et perfides, monstrueusement cruelles » que « sont .avant tout les régi?1e.s de Stalin~, d'I:~tler, ~e ~ao Tsé-toung, a1ns1 que certat?s reg1mes ;~a~ttonnaires dans des pays moindres ». L emt~ent physicien dont la pensée transcende exceptionnellement la science exacte et dont la morale tient en quelque respect l'arbitraire de l'oligarchie soviétique, ce savant qui parle au nom d'une véritable élite de l'intelligentsia russe s'exprime sur la Chine en des t~rm~s qui renforcent les nôtres dans ses « Reflex1ons sur le progrès, la coexi~tence pacifique et la liberté intellectuelle » qui circulent sous le manteau dans l'Empire ~oviétique et récemment publiées en France (cf. Est et Ouest, n° 415 de décembre 1968 ; et la Documentation française, n ° 0.1933 du 6 décembre 1968). Ces dernières années, écrit André Sakharov, « un vent de démagogie, de violence, de cruauté et de lâcheté balaye de nouveau un grand pays engagé dans la voie du socialisme. Je parle naturelleme1;t de la Chine. 9n 1;e peut lire sans horreur nt douleur les temo1gnages relatifs à la contagion gigantesque d'inhumanité que propagent le " grand timonier " et ses compagnons, les gardes rouges qui, selon la radio chinoise, " sautaient de joie " pendant l'exécution publique des " ennemis de la pensée " du président Mao. L'imbécillité du culte de la personnalité a pris en Chine ?es f?rmes monstrueuses, grotesques et trag1-co~1ques, poussant à l'absurde maints traits du stalinisme et de l'hitlérisme. Mais cette absurdité s'est révélée efficace pour abrutir des dizaines de millions d'individus, pour en détruire et humilier des millions d'autres parmi les plus intelligents et les plus honnêtes ». On comprend q1:1ele Monde ait soigneusement escamoté les BibliotecaGino Bianco LE CONTRAT SOCIAL passages essentiels de ce papier .d'A!1dré Sakharov : .raison de plus pour leur fatre echo, pour l'amour de la vérité, de la morale et de la justice. En prophétisant : « Plus de chaos,. mieux cela vaut », Mao ignorait évidemmen_tNietzsche et son aphorisme selon lequel « il faut du chaos pour qu'en jaillissent des étoil~s ». Le chaos a eu lieu en effet, on ne vo1t pas la moindre étoile, Î'armée impose la discipline au travail et la sécurité dans la rue comme toutes les armées policières dans tou~, les pays _en?anger de chaos, et il ne reste qua se munu,. ~ une longue patience en attendant qu~ s~ rev~lent tout simplement des hommes ch1no1s raisonnables. Si le IXe Congrès du Parti unique se réunit en 1969, treize ans seulement après le huitième, ce ne sera probablement pas pour confirmer que les Chinois marcheront désormais sur la tête, les pieds en l'air, mais pour constater que l'agriculture et l'industrie doivent obéir à des nécessités inéluctables, qu'elles ont besoin de cadres compétents et stables, que les techniques productives nécessaires à une immense population croissante ne progressent qu'en rapport avec la tradition v~rnaculair~ et l'expérience internationale, contratrement a ce qu'un Mao pense. Faute de quoi, dans le ?ouveau parti communiste refait de toutes pièces et aussi étranger au marxisme que son préd~- cesseur naîtrait tôt ou tard une nouvelle « poignée »' d'hérétiques contre laquelle aurait à combattre un nouveau « groupe » de Mao ou d'un autre, puisque c'est ainsi que s'ex~ri?1ent à Pékin et à Moscou les parvenus du stalinisme, tout en jurant par les « masses » qu'ils méprisent et en se disputant, à titre de propriété privée, le prétendu « sens de l'histoire ». B. SouvARINE. ,

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