Le Contrat Social - anno XII - n. 4 - dicembre 1968

294 vraiment méritoire, conclut à l'unanimité dans le même sens que les enquêteurs et témoins précédents, « contre l'Union des Républiques socialistes soviétiques pour avoir commis le crime de Katyn, en violation des principes généraux de la loi reconnue par les nations civilisées ». Joseph Czapski, peintre et écrivain polonais bien connu et estimé, un des rescapés des camps soviétiques, s'est adressé en 1962 à Ilia Ehrenbourg, complice de Staline, pour l'inciter à rompre le silence sur « le massacre de milliers de Polonais, officiers et soldats, dont la seule faute fut d'avoir défendu leur patrie contre Hitler. Il n'y a personne, écrivait-il, absolument personne, en Occident et en Pologne, parmi les hommes qui réfléchissent, qui doute de la responsabilité de Staline dans cette affaire » (Preuves, n° 142, décembre 1962). Ehrenbourg se déshonora une fois de plus en refusant net d'entendre l'auteur des Souvenirs de Starobielsk (Paris 1945) et de Terre inhumaine (Paris 1949 ), témoignages que ne saurait se dispenser de lire quiconque s'intéresse au sort des Polonais prisonniers en Russie soviétique. Ajoutons celui de S. Maximov, « J'étais à Katyn », dans la revue Na roubéié, nos 3-4 (Paris, juillet 1952 ). Mais... Et le livre d'Henri de Montfort? demandera-t-on. Ce livre, les éditions de la Table ronde nous l'ont refusé, ce qui explique notre manque à lui consacrer en son temps les pages et les éloges qu'il mérite. Mais nous l'avons lu avec deux ans de retard et l'attitude des éditeurs ne nous empêchera pas de recommander instamment cet ouvrage si convaincant à tous ceux qui étudient la deuxième guerre mondiale, le régime de Staline, le destin de la Pologne. Beaucoup mieux que nous ne l'avons pu en quelques lignes, Henri de Montfort expose sobrement la tragédie de Katyn sans rien laisser dans l'ombre, en historien irréprochable qui tient compte de toute la documentation disponible, confronte les témoignages et les arguments, cite ses références et aligne les preuves avant de conclure sans se départir du sang-froid nécessaire en pareille matière. On ne peut que contresigner l'hommage que lui rend M. Marcel Pellenc dans une émouvante préface où il retrace la carrière de son ami, décédé avant d'avoir vu paraître ce livre. Une question subsiste : que sont devenus les sept à huit mille Polonais dont les corps ne se trouvent pas à Katyn ? Certains récits rapportés par Joseph Matskevitch dans la Rouskaïa Mysl des 21 et 23 septembre 1961, sous le BibliotecaGino Bianco LE CONTRAT SOCIAL titre : « Y a-t-il une énigme du crime de Katyn ? » donnent à penser que Staline les aurait fait noyer dans la mer Blanche. D'autre part, est-il vrai que Khrouchtchev aurait proposé à Gomulka de dénoncer publiquement Staline et Béria comme coupables du massacre et que Gomulka n'a pu s'y résoudre, craignant de détériorer ainsi irrémédiablement les relations soviéto-polonaises ? (Cf. la Rouskaïa 1vl.ysl du 25 novembre 1965, article de S. Koch : « Sur le forfait de Katyn ».) Nous n'en savons rien. Il y a donc encore beaucoup à faire avant de répandre toute la lumière sur cette atrocité innommable commise par Staline, parmi tant d'autres. EUGENE LYONS : Workers' Paradise Lost. Fifty Years of Soviet Communism : a Balance Sheet, New York 1967, Paperback Library, 416 pp. UN des plus compétents spécialistes des affaires soviétiques aux Etats-Unis dresse dans ce livre le bilan significatif d'un demi-siècle de régime prétendument communiste en Russie. Ancien correspondant de United Press à Moscou, auteur de plusieurs ouvrages sur !'U.R.S.S. qui font autorité à bon droit, Eugene Lyons dégonfle ici tous les mythes accrédités dans le monde au sujet de la révolution russe et de ses conséquences, toutes les légendes qui décrivent la société soviétique comme le contraire de ce qu'elle est en réalité. « Un excellent antidote à la propagande soviétique officielle », écrit notre collaborateur Sidney Hook au sujet de ce livre. En effet, Eugene Lyons examine successivement toutes les idées reçues en matière de communisme soviétique, sans rien laisser dans l'ombre. Qu'il s'agisse de l'avènement des bolchéviks au pouvoir, du prétendu marxisme soviétique, de la société sans classes, de l'industrialisation planifiée, de l'adhésion populaire au « système », de la grande guerre « patriotique », des plans quinquennaux, de l'agriculture collective, de la dernière réforme économique, de la libéralisation du régime, de la déstalinisation, du niveau de vie, de l'impérialisme, du pacifisme et autres thèmes de l'idéologie propagée sans vergogne par les parvenus de l'oligarchie communiste, Eugene Lyons en fait justice avec calme et pertinence. A la fin, il répond à la question : « Ce qu'a coûté le communisme », et pas seulement en vies humaines, puis il esquisse des perspectives d'avenir. Mais cela ne peut pas se résumer, il faut le lire.

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