29Ô « Archiv für die Geschichte des Sozialismus und der Arbeiterbewegung » (vol. 6, Leipzig 1916). M. Adam Ciolkosz, comme Riazanov, expose les faits et les idées en toute objectivité, l'esprit critique en éveil et avec un souci de précision qui ne laisse rien à désirer. Il a raison de rappeler que Marx, ayant perdu ses illusions de 1848, écrivait à Engels en février 1851 : « J'aime l'isolement politique dans lequel nous sommes, toi et moi. Cela convient entièrement à notre position et à nos principes. » A quoi Engels répond : « Enfin nous avons de nouveau, pour la première fois depuis longtemps, l'occasion de montrer que nous n'avons besoin d'aucune popularité, aucun appui d'aucun parti d'aucun pays... Désormais nous ne sommes reasponsables que pour nous-mêmes. » Quoi de commun entre ces deux hommes et leurs pseudodisciples actuels, bruyants et stupides ? Dans l'édition des « Œuvres de K. Marx et F. Engels » en 39 volumes due à l'Institut du marxisme-léninisme (sic) de Moscou, une part importante des notes de Marx sur la question polonaise est escamotée, de même que les écrits ayant trait à l'impérialisme russe. (Le volume promis à l'origine, contenant les textes à ne pas mettre entre toutes les mains et réservé à un petit nombre de privilégiés, n'a jamais paru.) M. Ciolkosz donne une idée suffisante des notes manquantes et, en usant des sources polonaises, précise des points intéressants,. par exemple le projet de légion allemande qui devait combattre en Pologne contre la Russie, projet concerté en 1863 chez Alexandre Herzen, 'à Londres, par Marx avec Ogarev, Mazzini, Ledru-Rollin et des Polonais. Le sort de la Pologne fut le thème du meeting tenu à Londres le 28 septembre 1864, où Marx prit part en témoin muet, et-d'où naquit la 1re Internationale dont l'Adresse inaugurale, écrite par Marx, exalte « la Pologne héroïque assassiné,e par la Russie ». Les dissensions qui s'ensuivirent dans l'Internationale sous l'influence des proudhoniens sont exactement rapportées par M. Ciol.. kosz. « Non, les Polonais n'ont pas droit à l'indépendance et à la souveraineté », écrivait Proudhon pour qui la restauration de la Pologne serait « une absurdité, voire un crime » ; il approuve en ces termes le démembrement de ce pays : « Ni dans l'histoire de l'ancien monde ni dans celle du moyen âge ou des temps modernes, il n'y a d'autre exemple ·d'une· exécution aussi justifiée « (ici,"retraduit de l'anglais). Re~taurer la Pologne, dit Proudhon, ce serait « le triomphe du féodalisme industriel, le règne BibliotecaGino Bianco LE CONTRAT SOCIAL des Juifs, la cause première et le fondement du paupérisme moderne ». (Cf. Si les traités de 186.5 ont cessé d'exister ? de Proudhon, ainsi que La Guerre et la Paix). Marx et Engels ne purent surmonter la polonophobie des proudhoniens français et suisses dans l'Internationale. Pendant la guerre franco- allemande de 1870, Marx prédit l'absorption de la Prusse par l'Allemagne et, réprouvant catégoriquement l'annexion de l'Alsace et de la Lorraine, qui engèndrerait fatalement l'alliance franco-russe, il annonça comme inévitable une guerre entre l'Allemagne et ia Russie, « grosse d'une inévitable révolution sociale en Russie ». On sait comment cette prophétie remarquable s'est réalisée en tout point. Ce que Marx n'a pas prévu .et que nul ne pouvait prévoir, c'est que la Pologne retombée sous la domination russe après deux guerres mondiales serait contrainte d'adopter une forme de despotisme oriental compliqué d'antisémitisme à la Proudhon et renchéri par Hitler, tout en se réclamant du marxisme à la sauce tartare cuisiné par Staline. Dans ses préfaces aux rééditions polonaise et italienne du fameux Manifeste ( 1892 et 1893 ), Engels que cite M. Ciolkosz estime qu' « une sincère collaboration des nations européennes n'est possible que si chacune d'elles reste autonome chez soi » et que « sans restaurer l'autonomie et l'unité de chaque nation, il sera i~possible d'accomplir l'union internationale du prolétariat ou la coopération pacifique et intelligente de ces nations vers des buts communs ». Sages paroles toujours actuelles et qui viennent à point ici pour conclure. B. S. IDA METT : Le Paysan russe dans la révolution et la post-révolution. Patis, s.d. Edition Spartacus, René Lefeuvre, in-12 carré, 80 pp. IDA METT passe en revue les tribulations et vicissitudes du monde paysan russe depuis l'abolition du servage jusqu'à nos jours, en passant par les réformes, les révolutions et les tragédies qui ont abouti à la faillite désastreuse de l'expérience communiste dans les campagnes. Après un bref historique de la condition paysanne sous le tsarisme et un exposé succinct des théories populistes ainsi que des vues marxistes sur la question agraire, elle définit la réforme de Stolypine et décrit la situation économique des paysans au début du siècle, pour
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