Le Contrat Social - anno XII - n. 2-3 - apr.-set. 1968

LE VIOL DE LA TCHÉCOSLOV AQ!IIE par Paul Barton L'ARTICLE CI-APRÈS était depuis deux mois et quelque à l'imprimerie quand Brejnev et c10 , à l'imitation d'Hitler dont leur maître Staline fut sans vergogne le complice pour attaquer la Pologne en 1939 et déchaîner la deuxième guerre mondiale, ont machiné l'invasion de la Tchécoslovaquie où, depuis le 20 août, une soldatesque de 650.000 hommes impose l'ordre qui règne à Varsovie. L'article est dépassé, mais n'a rien perdu de sa valeur. On a eu juste le temps de lui ajouter, en le précédant de par les exigences de l'actualité, ces quelques notes. Le Contrat social n'a cessé d'exposer, d'explipliquer et de prouver, contre les illusionnistes et les faux experts, sans parler des politiciens pervertis et des publicistes vendus, que le communisme transmué en stalinisme n'a pas changé de nature en prenant de nouveaux aspects et en renouvelant quelque peu ses méthodes : le viol de la Tchécoslovaquie en apporte, douze ans après les tueries de Budapest, une nouvelle démonstration éclatante et tragique. Un demi-siècle après la révolution d'Octobre, le régime pseudo-soviétique se montre égal à lui-même en écrasant sous les roues de ses chars d'assaut une nation paisible qui s'affirmait communiste à sa manière, comme il avait jadis conquis par la force des_armes la Géorgie soci~liste et les autres républiques du Caucase, puis les pays musulmans d'Asie centrale, plus tard les Etats baltes et d'autres territoires. Une fois de plus, devant le monde entier impuissant par inconscience mais sourdement écœuré, se déploie impudemment le seul impérialisme en expansion ayant survécu aux deux guerres mondiales, l'impérialisme sous le masque du communisme. Et une fois encore, à la manière d'Hitler, les criminels de guerre entourent leur crime de mensonges éhontés, d'apologies insolentes. Alors que la faible Tchécoslovaquie était seule à cher- · BibliotecaGino Bianco cher sa voie, aspirant à un avenir meilleur, n'ayant pour se réconforter que l'appui moral tout platonique de deux petits Etats communistes, la Yougoslavie et la Roumanie, les parvenus du stalinisme l'accusent de connivence avec des« impérialismes» imaginaires, de menées contre-révolutionnaires et autres inventions aussi abjectes. Il ne leur suffit pas d'abuser de la violence pour briser des communistes qui manifestent des velléités libérales, ils ne reculent devant rien pour les salir et les discréditer. On rapporte cette parole du malheureux Alexandre Dubcek perdant ses dernières illusions : « Comment ont-ils pu me faire cela à moi? J'ai dévoué ma vie entière à la coopération avec l'Union soviétique. C'est une profonde tragédie personnelle.» A ce moment, pensait-il à la tragédie personnelle d' Imre Nagy et du général Maleter, traîtreusement capturés et lâchement assassinés par Khrouchtchev et Kadar? « L'Occident pourri » a vite classé leur supplice aux archives, ainsi que toute la tragédie hongroise brochant sur tant de tragédies personnelles. D'autres que Dubcek avaient dévoué leur vie entière au communisme et au régime soviétique, d'autres· qui s'appelaient Trotski, Boukharine, Zinoviev, Kamenev, Racovski, Piatakov, Rykov, et des milliers, des milliers d'autres que Staline et ses Brejnev, ses Kossyguine, ses Souslov et consorts ont voué à une mort ignominieuse. Le grand savant russe André Sakharov, écrivant al\ nom d'une élite intellectuelle qui résiste stoïquement au stalinisme de nos jours, ne craint pas de souligner les traits communs à Hjtler et à Staline, avant de rappeler dans son « Essai » qui circule à Moscou sous le manteau (New York Times du 22 juillet) : « Rien qu'en 1936-39, plus d'un million deux cent mille membres du Parti, la moitié du nombre total, furent arrêtés. Cinquante mille seulement ont recouvré la liberté : les autres ont été torturés durant les interrogatoires ou fusillés

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