80 gion. C'est l'a b c de tout matérialisme, et par conséquent du marxisme. » Sans doute, la social-démocratie, pour des raisons de tactique, veut que l'Etat bourgeois déclare la religion affaire privée ; mais pour la social-démocratie elle-même, la religion n'est pas affaire privée. Il est clair d'après cela que, la révolution accomplie, quand la social-démocratie sera l'unique maîtresse du pouvoir, la religion sera nécessairement combattue aussi par le pouvoir. La lutte contre la religion deviendra alors pour l'Etat, comme elle l'était déjà pour le parti, une obligation de principe. Voilà de quoi il faut partir pour exposer justement les rapports entre l'Eglise et l'Etat en Russie après 1917. Il n'y a pas duel : l'Etat bolchévik, par nature, par définition, doit mener et mène, contre la religion comme telle et contre toutes les religions, une guerre à mort. Les religions, comme elles peuvent; c'est-à-dire faiblement, désarmées qu'elles sont en face de l'Etat tout-puissant, ne font que se défendre. Ce point acquis, il existe cependant une histoire des relations entre religion - ou les Eglises, ou les religions - et l'Etat soviétique, par.ce que, pour atteindre son but immuable : la destruction de toute religion, cet Etat a usé de diverses tactiques et de multiples procédés. N. Struve n'a pas voulu faire l'histoire des rapports entre Eglise et Etat. Il s'est placé face à l'Eglise, et s'est proposé de donner « un tableau de la vie des chrétiens » en Russie soviétique. Il commence donc par le concile de 1917-18 et relate ensuite les diverses péripéties vécues par les chrétiens : la première vague de persécution, les schismes suscités, la grande entreprise de« liquidation » de 1928-32. le court répit de 1933-36, la reprise de la terreur en 1937-40, la « résurrection » relative de 1940, le nouvel assaut de 1947 devenant persécution virulente en 1958 et qui se prolonge sans discontinuer jusqu'à maintenant. Il précise fort bien les modalités de la guerre ainsi conduite, les moyens et les thèmes de la propagande antireligieuse, mais il n'expose pas les principes qui, pour les bolchéviks détenteurs du pouvoir, rendent cette guerre et cette propagande obligatoires jusqu'à la complète disparition de toute religion. Il aurait pourtant fallu, tout en maintenant tel qu'il a été conçu le sujet du livre, marquer fortement la différence entre une quelconque politique anticléricale à la Bismarck ou à la Combes, ou bien encore les persécutions féroces, mais incohérentes et sans but détérminé, de quelques empereurs romains, et l'entreprise d'annihilation Bjbl.ioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL systématique par tous les moyens, des plus sanglants aux plus hypocrites, menée par l'Etat bolchévik. Cela dit, il n'en reste pas moins que N. Struve a composé sur la question une véritable somme, à laquelle on peut faire une entière confiance.· Il a utilisé des renseignements de sources privées, mais ce n'a été que pour illustrer les informations puisées aux sources soviétiques : à qui sait lire - non pas entre les lignes, mais simplement en faisant abstraction des phrases creuses - il n'est pas difficile d'extraire des revues antireligieuses, de la presse du parti communiste, des journaux provinciaux, ou même de la Revue du patriarcat de Moscou, beaucoup de faits concrets. Il serait trop long d'énumérer tout ce qu'on peut trouver dans le livre. Je mentionnerai du moins une descrip- ~ tion très complète de l'Eglise orthodoxe entre 1940 et 1962, suivie d'un aperçu sur les sectes et d'un chapitre sur les « Eglises périphériques », comprenant l'Eglise catholique. Un grand nombre d'Annexes apportent des textes, provenant de l'Eglise orthodoxe ou des autorités, et des listes diverses : effectifs de l'Eglise comparés à ceux de 1914 ; diocèses actuels et leurs titulaires ; églises ouvertes à Moscou et Léningrad ; ouvrages publiés par le patriarcat de Moscou ; évêques martyrs (114 certains et 16 dont on ne sait rien). Un, dernier et bref appendice parle des Eglises russes de l'émigration. L'utilité du livre n'est pas à démontrer, puisqu'il a eu les honneurs d'une nouvelle édition augmentée et mise à jour jusqu'au printemps de 1964. PIERRE PASCAL. Histoire et politique . ANGELO T ASCA : Naissance du fascisme ; l'Italie de l'armistice à la marche sur Rome. Préface d'Ignazio Silone, avant-propos de Ch.- André Julien. Paris 1967, Gallimard, 497 pp., 29 ill. IL y A trente ans, Naissance du fascisme avait paru sous le nom d'A. Rossi. Quelques années plus tard, l'Italie retrouva sa liberté, mais l'auteur continua cependant (en -France tout au moins) à user du même pseudonyme, notamment lorsqu'il publia plusieurs ouvrages importants sur l'histoire et la physiologie du parti communiste français. A titre posthume, sa famille lui restitue son état civil, mais ce changement de nom ne doit pas faire oublier
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