Le Contrat Social - anno XII - n. 1 - gen.-mar. 1968

revue l,istorÎIJ~eet crilÏIJue Jes faits et Jes idées Janvier-Mars 1968 · Vol. XII, N° 1 .LE VIETNAM ET LA POLITIQUE MONDIALE par Jacques de Kadt TOUTE _SPÉCULATTON sur la dignification des événemeJ:?.tSqtii s~ déroulent au Vietnam, considérés comme facteur de · la politique mondiale, présuppose que l'issue de la lutte influencera le rapport des forces en présence dans le monde. La situation qui prévaudra. après les opérations militaire~ 1?-esera pas seulement déterminante pour l'avenir du Vietpam, en ce sens que c'est ~:l'elleque dépendra la pérennité d'un Sud-Vietnam indépendant, ou, au contraire, l'emprise progressive du Nord sur le Sud, l'ensemble du territoire devenant ainsi un Etat totalitaire gouverné suivant les méthodes actuellement en vigueur dans le Nord. En soi, cette question n'est déjà pas dépourvue d'intérêt, parce qu~ ·la solution démontrera du même coup si, oui ou non, la technique de la guérilla peut, à la longue, s'avérer décisive dans la conquête d'un territoire et provoquer la chute d'un gouvernement, même si celui-ci est soutenu par la plus grande puissance non communiste. Mais même si l'on admet un instant que la population du Sud-Vietnam désire à ce point la réunion du pays avec le Nord qu'elle en vienne à considérer les guérilleros comme l'instrument de ses propres intérêts, et par conséquent à leur donner l'appui qui leur Cet « essai » de ] acques de Kadt a été écrit à la fin de l'année 1967, mais les derniers événements ayant trait au Vietman n'ont entamé en rien la pertinence de son argumentation. Voir d'autrepart, p. 85, notre Chronique : CauchemarauVietnam, articlede date plus récente. Biblioteca Gino Bianco permettra de se rendre maîtres du territoire et de la masse de la population, on n'en aurait pas quitté pour autant le domaine de la signification locale de la lutte et de son issue. On peut poursuivre ce raisonnement de portée « locale » et montrer que les situations sociales que les guérilleros font miroiter aux yeux de la population attirent la grande majorité de celle-ci (parce que les situations promises sont meilleures que celles qui existent actuellement, et même que celles qui seraient possibles si elles pouvaient se développer sans entraves), à un point tel que la masse el) arrive à souhaiter l'instauration d'un régime comme celui du Nord-Vietnam - en sorte qu'on ne saurait rendre à cette population plus grand service que de lui permettre de choisir ellemême la voie de son salut - cela même· ne conférerait toujours au conflit qu'une ~ignifiacation locale. Et cet autre raisonnement que l'on entend souvent, suivant lequel le peuple du Sud ne veut que la paix et la fin des horribles combats qui dévastent actuellement le pays, et que ce peuple place la paix au-dessus de toute autre considération au point d'accepter un gouvernement qu'il exècre en- réalité, si ce gouvernement la lui apporte - cela aussi, on pourrait le considérer comme étant d'importance purement locale. · Même si ces hypothèses étaient fondées - en réalité, elles sont contraires à tous les faits - la question resterait posée : la guerre au Sud-Vietnam et son issue n'ont-elles pas une signification qui dépasse à ce point l'intérêt local, qu'elle transcende les désirs de la population, parce que des intérêts internationaux

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