B. SOUVARINE taires et littérateurs, entichés de gloses arabisantes et d'exégèses islamiques. Il fallut l'impérialisme britannique, les entreprises de la British Agency du Caire, de l'Indian Political Service de Delhi, du Foreign Office et du Colonial Office, secondés par !'Intelligence Service, pour monter de toutes pièces une « Ligue arabe » aussi bruyante que nocive, bientôt foyer d'âpres discordes interarabes. Favorisée par des complaisances françaises, profiteuse ensuite de la généreuse incompétence américaine, cette Ligue vite infiltrée d'influences communistes ne tarda pas à se faire l'instrument de l'impérialisme soviétique, un instrument dont le prix coûteux augmente à mesure de la surenchère chinoise. Le Contrat social, depuis dix ans, a fait justice des mythes, des légendes et des mensonges qui nourrissent ~ la fiction de la « nation arabe » et de son expression conquérante, le panarabisme*. ,,,. * * UNE DES PLUS remarquables réussites de l'entreprise panarabe fut d'ériger l'Egypte en pays pseudo-arabe, voire en République arabe unie. Jamais ce pays ne s'était regardé comme arabe au cours de son histoire millénaire. Au début de notre siècle, les recensements n'y tenaient pour arabes que 60.000 âmes de tribus transhumantes. Les Egyptiens proprement dits, imbus de leur passé prestigieux, toisaient de haut les Arabes. Leur arabisadon relative est de date récente, tandis que l'islamisation découle surtout de la domination turque. « Aussi extraordinaire que cette affirmation puisse paraître (écrivait M. Henri Dupriez dans Communautés et Continents, n° 12, octobre 1961), l'Egypte, pays arabisé, n'est pas un pays arabe. Les fellahs sont des l-Iamites ; c'est de loin l'élément le plus important de la population ... Mais paradoxalement la volonté d'un dictateur a fait de l'Egypte le socle du panarabisme révolutionnaire. » M. Vincent Monteil, auteur arabophile * Cf. A. Horon : Le panarabisme (n° 3 de 1957) ; J. Carmichael : L'Islam et le monde arabe (n° 4 de 1957); A. Horon : Les Arabes depuis l'Islam (n° 3 de 1958); A. Horon : Les Arabes, par Vincent Monteil (n° 2 de 1959); W. Laqueur : Le panarabisme et /'U.R.S.S. (n° 5 de 1959); J. Carmichael: Le national-communisme arabe (n° 6 de 1959) ; Chronique: La Ligue arabe (n° 2 de 1962) ; H. Haddad: L'Evolution de l'Islam, par R. Charles (n° 3 de 1962) ; A. Horon: A Lonely_Minority: the Modern Story of Egypt's Copts, par E. Wakin (n° 4 de 1694). Biblioteca Gino Bianco 197 patenté, reconnaît dans son livre sur Les Arabes : « L'Egypte est ethniquement copte (il n'y a que 6 % d'Arabes) et les fellahs de la vallée du Nil ressemblent souvent aux statues des Pharaons. » Auparavant, il avait noté : « Les Etats du Levant ne sont pas arabes. Le fonds de la population est nabatéen ou chaldéen en Iraq, araméen ou syriaque en SyrieLiban. » Et ensuite il constate : « De la Libye au Maroc, enfin, le Maghreb est berbère. » Bref, puisque racisme il y a, il ne reste guère que l'Arabie pour être arabe. Le savant chanoine égyptologue Etienne Drioton n'a pu se contenir, en 19 5 6, devant les sottises que débitent à l'envi la presse et la radio dans leur ensemble, et il a donné aux Nouvelles littéraires (11 octobre 1956) un article intitulé : « L'Egypte, première victime des Arabes », où l'on peut lire notamment : « Les anciens Egyptiens étaient parfaitement conscients de leur supériorité sur tous ces barbares ainsi que de la différence raciale qui les séparait ( ...). Le langage courant ne les mentionnait pas sans accoler à leur nom le qualificatif infamant de vil, à la façon d'une épithète homérique ( ...). Il est impossible de reconnaître dans les grandes réalisations politiques, sociales et culturelles de l'ancienne Egypte une manifestation quelconque de !'arabisme. Ce serait aller contre l'évidence. » Rien ni personne ne retient pourtant les imposteurs actuels du Caire de s'enorgueillir des Pyramides, sans plus de titres à cet égard qu'au sujet du canal de Suez, œuvre d'initiative et de réalisation françaises, cependant que leurs congénères de Bagdad et de Damas exercent un insolent chantage au pétrole, richesse naturelle fabuleuse dont ils sont redevables entièrement aux techniques occidentales, et dont les Arabes n'ont jamais été capables d'extraire ou de raffiner une seule goutte. Nul en Europe ne les a jugés aussi sévèrement que leur « frère » arabe-musulman, le roitelet de Jordanie qui (26 mai 1957) dénonçait le panarabisme en ces termes : « Le véritable nationalisme n'est pas l'allié du communisme, ennemi de toutes les religions divines ( ...). Le président Nasser, en se vendant à Moscou, a trahi la cause des Arabes. » Un numéro entier de la présente revue ne suffirait pas à relater les luttes intestines sordides de la Ligue arabe, dont le premier Secrétaire général, Abdel Rahman Azzam, ne se gênait pas de déclarer en 1950 : « Nous sommes d'abord Egyptiens, puis Arabes, et en troisième lieu musulmans... » Le 20 juillet 1961, le repré-
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