J. DE KADT toute clarté. Et cela ne pourrait se faire que par des partis et groupements ayant une juste notion des choses. Pour cela, un nouveau rassemblement (plus tard, une nouvelle Internationale) serait nécessaire. Et âprès toutes ces tirades que nous connaissions tous par cœur, voici de quoi il s'agissait. Selon Trotski, les groupes qui collaboraient ensemble et avaient participé à la conférence de Paris ne lui semblaient que partiellement capables et disposés à se charger de cette tâche. Et les partis ici présents ne pourraient prétendre assumer ce rôle qu'en rompant avec le parti ouvrier norvégien et en s'unissant aux trotskistes. J'étais d'accord avec Trotski quand il disait que la conférence de Paris n'avait donné que peu de résultats. Il m'était également évident qu'un groupement dans lequel le parti ouvrier norvégien serait la formation la plus forte ne signifierait pas grand-chose, non que ce parti fût mauvais, mais du fait que la Norvège, par sa situation géographique, n'avait pas d'importance dans la lutte contre Hitler. Mais, selon moi, les petits groupes de trotskistes en avaient encore moins, leurs effectifs étant tels qu'un petit parti comme celui de Sneevliet pouvait faire figure de grand parti par comparaison. Et en écoutant les réponses à l'exposé de Trotski, le sentiment de gaspiller notre temps en discussions irréelles devint pour moi prédominant. Quelques porte-parole du S.A.P. proposèrent une base plus large que celle de Trotski, ~liant même jusqu'à défendre la position du N.A.P. qui, dirent-ils, faisait en Norvège ce qu'il pouvait dans la situation donnée. Je ne pus qu'approuver leur point de vue, ce qui fit que j'eus ma part des blâmes que Trotski prononça après de pareilles observations. Selon lui, le S.A.P. n'avait, en Allemagne, aucun succès à son actif. Mais qui en avait? demanda l'homme du S.A.P. Peut-être les trotskistes ? En Hollande, l'O.S.P. avait saboté l'unité avec le groupe de Sneevliet, dit Trotski, approuvé par Sneevliet, et c'était la faute au Genosse de Kadt, qui professait ouvertement des conceptions antimarxistes et antiléninistes. Quant à la Norvège, Tranmael, le leader norvégien, n'était qu'une sorte de Louis Blanc. Savais-je qui était Louis Blanc ? « Das war ein Schuft, in 1848 » (C'était un coquin, en 1848). Je répondis que je connaissais l'histoire du mouvement ouvrier et du socialisme et que l'on pourrait peut-être regarder Louis Blanc comme un mauvais politicien en 1848. Mais que celui qui le traite de Schuf t se montre incapable de donner une explication marxiste des Biblioteca Gino Bianco 143 phénomènes historiques. Du reste Tranmad avait eu, en Norvège, de grands succès. Et en ce qui concerne le sabotage en Hollande, Trotski tenait ses renseignements uniquement sans doute de Sneevliet. Cependant, l'affaire ne me parut pas assez importante, à côté des problèmes mondiaux, pour être discutée. D'ailleurs, toute discussion avec Sneevliet n'avait jamais le moindre sens. Il va de soi que Trotski et Sneevliet me traitèrent d'impudent personnage, se disant sûrs que les ouvriers de l'O.S.P. finiraient à la longue par condamner ma position petitebourgeoise. Ces amabilités se poursuivirent pendant quelque temps encore. A la fin, Trotski, à son habitude, présenta une motion résumant un certain nombre de ses opinions. Ce qu'elle contenait au juste, je ne le sais plus, .car dès la fin de cette soirée à Paris je n'eus plus la moindre envie de la lire ni d'écouter la discussion qui s'ensuivit. Je la mis dans ma poche, me proposant d'en prendre connaissance plus tard et, surtout, de démontrer à l'O.S.P. que toute collaboration avec Trotski n'avait plus d'intérêt. Le S.A.P. eut beaucoup d'objections sur lesquelles on s'étendit longuement. Moi, je dis simplement que j'étais contre, ce que la discussion précédente avait déjà laissé comprendre. Sneevliet se prononça, d'une façon prolixe qui lui était chère et coutumière, pour la motion, condamnant ceux qui esquivaient la discussion et votaient contre. J'étais donc visé, mais peu m'importait, car depuis de nombreuses années déjà, je n'avais plus pour Sneevliet qu'un haussement d'épaules. * * * L'INUTILITÉ DE CETTE RÉUNION m'était apparue évidente, et je n'eus plus aucune envie de la prolonger en participant à la discussion. Apparemment, le but de la réunion avait été de lier 1~ S.A.P. et l'O.S.P. à une motion trotskiste, ce qui eût pu donner l'impression qu'un jugement avait été prononcé par une conférence « élargie ». Ce dessein échoua à cause des nombreuses objections du S.A.P. et de mon aversion pour ce « jeu stérile », position qui, quelques mois plus tard, me fit rompre avec l'O.S.P. où ce « jeu stérile » était hautement coté. Mais à cette soirée de fin 1933, il ne s'agissait encore que de ma rupture avec Trotski. Il se montra déçu du peu de soutien qu'il avait obtenu de la part du S.A.P., et indigné de mon « sabotage ». De mon côté, je regrettai qu'il e0t fait le voyage
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