K. A. WIITFOGEL de ses associés après que Lo eut cessé de paraîtrè en public en novembre 1965 (il ne fut officiellement remplacé par un nouveau chef d'état-major qu'au milieu de l'été 1966 ). Lo fut également accusé d'avoir tenté de créer une armée « bourgeoise » au lieu d'une « armée prolétarienne », c'est-à-dire une armée qui, outre qu'elle sait se battre, étudie, aide aux travaux agricoles, fait marcher les usines, bref., participe au travail parmi les masses (Journal de !'Armée de libération, 1er août 1966 ). Des chefs militaires « bourgeois » ne purent conserver leur poste si longtemps que parce que leur loyauté ostentatoire camouflait leur lutte contre la politique de Mao. Lo et ses associés avaient-ils vraiment l'intention de s'emparer du commandement? Il est fort possible qu'ils aient envisagé cette éventualité au cas où la situation ne s'améliorerait pas. Il est aussi probable qu'ils avaient des alliés dans les milieux civils. De sources officielles, il fut affirmé que l'armée et de hauts dignitaires civils du Parti avaient tramé ensemble un coup d'Etat pour remplacer la direction maoïste par des révisionnistes « bourgeois ». Evidemment, le centre de ces activités était le comité du Parti à Pékin dont le président, Peng Chen, était le compagnon d'armes de Mao et resta un de ses intimes jusqu'en 1965. Le comité de Pékin EN UNION SOVIÉTIQUE,deux organisations régionales du parti communiste avaient joué temporairement un rôle très important : celle de Léningrad et celle de Moscou. Le comité du Parti à Pékin combinait en lui seul le rôle de ces deux organisations. Mais, comme cela avait été le cas pour le comité de Moscou, Je fait que son siège était également le siège national du Parti et de la police politique représentait pour Mao un sérieux handicap. Dans ces conditions, comment se faisait-il que Peng Chen eût tant de pouvoir ? Il s'était acquitté avec Liou Chao-chi de missions difficiles au cours des années 30. L'amitié qu'ils avaient ainsi nouée fut d'un grand secours à Peng à la fin des années 50 et au début des années 60, lorsqu'il toléra, peut-être même encouragea, des attaques voilées contre Mao. Cette amitié explique en grande partie pourquoi Peng Chen jouit si longtemps de l'impunité. Cela explique aussi - du moins partiellement - pourquoi Liou Chao-chi cessa d'être le compagnon favori de Mao en 1965, lorsque Biblioteca Gino Bianco 115 des membres du comité de Pékin furent ouver- , tement attaques. Dès 1958-59, ce comité avait abrité des membres aux tendances « de droite ». Comme nous l'avons rappelé plus haut, Wu Han était maire adjoint de Pékin à l'époque où il s'était mis à écrire au sujet de Hai Jui. Teng To rallia le groupe de Peng en 1958, l'année du « grand bond en avant » et des « communes populaires ». Il venait de perdre son poste de rédacteur en chef de l'organe central du parti, le Quotidien du peuple. A partir de 1958, Teng publia également un bimensuel local, En première ligne, et il écrivit un certain nombre d'essais satiriques, plus tard attaqués à cause des sous-entendus « empoisonnés » qu'ils contenaient. Dans un article de 1961, Teng To raillait ceux qui, ayant perdu la faculté de penser, paraissent devenus « stupides et fous >>. Idées subversives ? Tel était l'avis des directeurs des principaux quotidiens de la Chine communiste qui, les 8 et 9 mai 1966, produisirent cette expression de « stupides et fous » comme une des preuves de l'hostilité de Teng envers le Parti et le socialisme. Ces idées couvaient-elles depuis longtemps ? Les fidèles maoïstes le pensaient puisqu'ils en recherchèrent l'origine jusqu'en 1960-61 et, en ce qui concerne Wu Han, jusqu'à l'année 1959, ajoutant que ces malfaiteurs auraient dû être démasqués beaucoup plus tôt. Ces idées bénéficiaient-elles d'un appui et avaient-elles une portée politique ? En 1966, les maoïstes déclarèrent que Teng, Wu et consorts appartenaient au « royaume » révisionniste qui s'était formé autour du comité du Parti à Pékin. Ils ajoutaient que le mouvement avait de profondes racines et de vastes ramifications. En novembre 1965, Wu fut publiquement discrédité (à l'instigation personnelle de Mao, à ce qu'on dit maintenant). Le 8 mai 1966, au moment même où Mao faisait sa réapparition en public, Teng To et autres « plantes vénéneuses » étaient mis au pilori. Fin n1ai, Peng Chen perdit son poste (un nouveau maire de Pékin fut nommé le 3 juin). Mais, de l'avis des auteurs de l'opération, le royaume anti-Mao ne fut pas détruit pour autant. Existait-il un esprit supérieur manœuvrant dans les coulisses, un « monarque » plus dangereux que le « roi » apparent, Peng Chen ? Selon les maoïstes, il aurait existé à travers tout le pays un réseau de personnes partageant les sentiments de Peng, des gens qui occupaient des postes importants dans le Parti et
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