QUELQUES LIVRES Problèmes paysans MARCELFAURE: Les Paysans dans la société française. Paris 1966, Libr. Armand Colin (collection U), 344 pp. OUVRAGEDIDACTIQUsEur les problèmes actuels du monde agricole en France, composé comme un manuel d'histoire avec textes d'auteurs choisis, documents et compléments bibliographiques commentés sur les principaux thèmes à l'ordre du jour. Comme les autres livres de la collection, il s'adresse plus particulièrement aux étudiants du premier cycle en leur apportant une vue synthétique sur une matière donnée ; cela dit, il peut être fort utile à celui qui, sans être spécialiste, veut s'initier aux problèmes complexes de notre agriculture. L'auteur est directeur de la revue Paysans et directeur adjoint de l'Institut de formation pour les cadres paysans qui, sauf erreur, est lié au C.N.J.A. (Centre national des jeunes agriculteurs). C'est dire- qu'il est représentatif du courant dynamique et réformateur en agriculture. Il ne s'agit pas d'une histoire des agriculteurs car les quelques pages relatives à l'Ancien Régime, qui fut déterminant dans ce qu'on nomme le « paysage agricole », encore visible de nos jours, sont notoirement insuffisantes. Or la persistance des jachères et de la vaine pâture au XIXe siècle, cent ans après leur condamnation par les physiocrates, a contribué à maintenir une agriculture sous-développée. En même temps, et peut-être sous l'inspiration lointaine des mêmes physiocrates, la bourgeoisie française affectait de mépriser les activités industrielles ou commerciales pour se contenter de cultiver ... la rente foncière. Ajoutons à cela la passion propriétaire absorbant la totalité de l'épargne paysanne et les lois successorales, sources tantôt de morcellement, tantôt d'endettement. Ces faits sont suffisants pour expliquer Biblioteca Gino Bianco la stagnation des rendements à l'hectare, la faiblesse du capital d'exploitation et les progrès trop lents des techniques qui ont caractérisé l'agriculture française pendant un siècle et demi, la laissant en dehors de la société industrielle. On eût aimé que l'auteur développât davantage ces points, tellement ils ont été et demeurent importants pour comprendre notre . , , SOClete. En revanche, l'évolution sociale et politique des populations agricoles dans le dernier demisiècle est décrite d'une manière vivante : le problème des prix et des structures, la création ou la disparition des syndicats agricoles, les conflits ouverts ou discrets qui les traversent, autrefois, entre la droite et la gauche, aujourd'hui, entre la vieille et la jeune génération. Celle-ci, selon M. Marcel Faure, se serait organisée dans la Jeunesse agricole chrétienne (J.A.C.), à laquelle il attribue le rôle principal dans la création du Centre national des jeunes agriculteurs dont les revendications de structures sont bien connues. L'auteur note le caractère historiquement fermé de la démocratie paysanne, longtemps peu accessible aux idées politiques de la bourgeoisie ou du prolétariat des villes. A notre avis, il subsiste beaucoup de cet héritage dans la manière toute empirique avec laquelle les agriculteurs réinventent des modes d'association classique en leur donnant un certain aspect révolutionnaire : telle l'agriculture dite de groupe, union coopérative de propriétés individuelles, dont la formule théorique n'est pas nouvelle, mais qui pose de redoutables problèmes de réalisation. Jusqu'à notre époque, l'agriculture française a vécu en marge des méthodes industrielles ; participant à la fois de l'économie naturelle close et de l'économie de marché concurrentielle, elle a été un être hybride, échappant le plus souvent aux catégories de la comptabilité
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