Le Contrat Social - anno XI - n. 1 - gen.-feb. 1967

E. DEL/MARS sevré de tout sur le front et qui ne devait être présenté que le lendemain matin au général Krebs. Schwarzbruck avait déjà sur lui tous les papiers nécessaires au chef de « CycloneSud », qu'il devait commander sous l'uniforme et avec les pièces d'identité de Willis Doutis, lieutenant du M.V.D., d'origine lettone, ce qui justifierait son accent étranger aux yeux des Russes. Liebel fit naturellement connaître à ses chefs soviétiques la substitution de personnes. Lemke, présenté le lendemain matin à Krebs, repartit aussitôt pour être parachuté dans les Carpathes, tandis que le major Melnitchenko, èhef du contre-espionnage dans ce secteur, recevait l'ordre suivant : En complément aux directives données précédemment, j'ordonne de capturer le groupe « Cyclone• Sud » aujourd'hui, à 18 heures au plus tard. Le plan de l'opération reste inchangé. Il est essentiel d'assurer la sécurité du commandant du groupe arrivé aujourd'hui et porteur des pièces d'identité au nom de W. Doutis, lieutenant du M.V.D. Aussitôt pris, cet officier doit être isolé des autres membres du groupe de diversion et amené chez moi. Signé : le général-major Bystrov. La capture fut opérée avec plein succès. Pendant longtemps, le radio du groupe fut contraint par les Russes d'envoyer à Berlin les comptes rendus des exploits imaginaires de « Cyclone-Sud » ; de plus, il recevait des instructions qui permirent de liquider, dès leur formation, les autres groupes similaires. Grâce au tchékiste Liebel, l'opération « Cyclone » fut complètement sabotée (Front, pp. 201-57). * * * LA GLORIFICATIONdes « héros positifs » tchékistes par la littérature et la presse est puissamment secondée par le cinéma. Au cours de ces dernières années, de nombreux films ont été consacrés à ce genre de héros, à commencer par Dzerjinski. Un film documentaire très détaillé sur ce tchékiste idéal et ses collaborateurs a été terminé en juin 1966 (Pravda, Biblioteca Gino Bianco 31 14-6-66). Au cours d'un festival du cinéma à la gloire des tchékistes, on a projeté, dans vingt salles de Moscou, en décembre 1965, les films suivants : Jeu sans règles, Comment fautil vous appeler maintenant?, Exploit d'un éclaireur, Rafales hostiles, Criminel d'Etat, Coup de feu dans le brouillard, Collaborateur de la Tchéka, Noir business, Poste de garde dans la montagne, Loin de la patrie, L'Aff aire des bigarrés, etc., ainsi que les documentaires à long métrage : Sur un sentier noir, Ombre étrangère, Goutte de poison, Tribunal du peuple, La patrouille longe la frontière (Izvestia, 8-12-65). Il est encore tôt pour juger de l'empreinte laissée par cette intense propagande sur la mentalité du lecteur ou du spectateur soviétique. Pourtant, certains indices semblent indiquer d'ores et déjà que les « héros positifs » n'émeuvent guère : « La qualité de beaucoup de films récemment tournés est nettement médiocre » (Kom. Prav., 18-11-65). Comme les récits littéraires, ils sentent trop la « commande sociale » et la littérature de guerre que le public sursaturé ne lit plus. On essaie de varier leur ambiance en peignant les héros tchékistes de périodes plus anciennes, comme dans le nouveau film La Mort du commissaire, _de R. Karmen, consacré au tchékiste Zouïev qui avait combattu en Espagne et tomba en automne 1942 à la tête d'un détachement de partisans dans les forêts de Novgorod (Kom. Prav., 28-12-65 et Pravda, 25-6-66). Mais tout cela ne suffit pas à distraire le public de la réalité soviétique. Le désir d'évasion lui fait préférer les films importés, tel Les Canons de Navarone, les romans traduits et les récits de voyage à l'étranger. Dans les revues, on trouve de ·plus en plus de nouvelles traduites de l'anglais ou de l'américain et ce n'est pas· par hasard que, dans les quatre derniers numéros du mensuel antireligieux la Science et la Religion, on pouvait lire, à la fin de 1965, La Villa du Cheval-Blanc, d'Agatha Christie. E. DELIMARS.

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