Le Contrat Social - anno XI - n. 1 - gen.-feb. 1967

8 pourraient avoir le caractère d'organes politiques du pouvoir, mais ils seraient exclusivement des organes .de lutte autour desquels se concentreraient toutes les activités de la classe ouvrière. Le mot d'ordre des soviets avait comme but essentiel de populariser le sens social qui devait caractériser le développement de la révolution espagnole (José Bullejos, op. cit., pp. ·135-36). Plus loin, Bullejos dit que lui et Adame rentrèrent en Espagne « accompagnés par la nouvelle délégation internationale maintenant renforcée par deux membres en vue des partis communistes allemand et polonais ». Il est évident que la délégation du Comin-. tern en Espagne était nombreuse. Les deux 1nembres « en vue » des partis communistes allemand et polonais, selon l'aveu de Bullejos, venaient « renforcer », c'est-à-dire augmenter la délégation internationale assignée à l'Espagne. Cela démontre, en premier lieu, que la Russie, au moyen de son agence, le Comintern, intervenait dans la politique intérieure de l'Es• pagne. Et en second lieu, que la direction espagnole du Parti avait un caractère purement nominal : Bullejos, Adame, Trilla, José Diaz, Jesus Hernandez n'étaient que de simples marionnettes dont la délégation du Comintern tirait les ficelles. Le Parti, dirigé par des agents de Moscou, voyait à travers le prisme du marxisme-léninisme-stalinisme le panorama historicopolitique de l'Espagne : les soviets et la révolution socialiste. Cependant, Moscou et ses agent:_;souffrirent un contretemps en Catalogne : « Maurin parvint par de vilaines manœuvres à arracher une partie de la· Fédération communiste catalanebaléare. Cette déchirure eut des conséquences douloureuses pour le développement du Parti en Catalogne » (Historia.., op .. cit., p. 53 ). Non par de « vilaines manœuvres », mais en se révoltant contre la politique stupide du Comintern, la Fédération communiste catalanebaléare se sépara du Parti et se transforma en Bloc ouvrier et paysan lorsqu'elle fusionna avec le Partit Comunist Catala, dirigé par Jordi Arquer. Le Bloc ouvrier et paysan (B.O.C.), sans au- ~re recours que sa foi et son enthousiasme, publiait à Barcelone La Batalla, hebdomadaire qui soutenait une politique diamétralement opposée à celle du parti communiste. Le B.O.C. croyait que la République représentait un grand pas en avant et qu'il fallait la soutenir. Pour le parti communiste et pour Moscou, le B.O.C. était un groupement national~ste petit-bourgeois BibliotecaGino Bianco LE CONTRAT SOCIAL au service de la gauche républicaine catalane (Esquerra). Le parti communiste confondait le B.O.C.. avec l'Union socialiste de Catalogne, groupement socialiste modéré, toujours en coalition avec la Esquerra et qui, lors de la guerre civile, fut l'axe du parti socialiste unifié de Catalogne (P .S.U.C.). Le B.O.C., sans avoir besoin de « penseurs » internationaux, élabora la théorie de la révolution démocratique socialiste, face au parti communiste qui préconisait les soviets et autres balivernes élaborées par la bureaucratie stalinienne. Sous la direction pléthorique du Comintern, le parti communiste commit une telle série de bé;ues en 1931·32 qu'il accentua son éloignement des masses populaires. Il évoluait en sens inverse de l'histoire. Jamais il ne comprit le processus historique de l'Espagne. Incapable de penser pour son propre compte, il transposait en Espagne ce qui s'était passé en Russ~e en 1917. Or la différence était grande entre la révolution espagnole de 1931-32 et celle de la Russie en 1917: De plus, .dans la Russie de 1917, il y avait des .révolutionnaires de l'envergure de Lénine, Trotski, Boukharine, tandis qu'en Espagne on ne trouvait que des nains comme le Suisse Humbert-Droz, l'Argentin Codovila, le Français Rabaté, le Bulgare Stépanov, etc. En novembre 1931, Jvlundo·Obrero, organe du parti .communiste, dont la publication avait commencé en tant qu'hebdomadaire en août 1931, fut transformé en quotidien. Publier et maintenir un quotidien est une entreprise difficile, car il faut un capital initial et un fonds de roulement pour le faire vivre jusqu'à ce qu'il parvienne à s'imposer. Le parti socialiste dut attendre plusi.eurs dizaines d'années avant de pouvoir transforrper son hebdomadaire en quotidien. On se souvient encore avec. admiration de l'époque où El Socialista, quotidien, paraissait sur deux pages. La Confédération nationale' du travail (C.N.T.) ne put transformer Solidaridad Obrera en quotidien que lorsque se produisit la grande avalanche syndicaliste en 1916-17. Le parti communiste d'Espagne, avec à peine quelques milliers de membres, sortit son quotidien sans la moindre dif-. · ficulté. Il est évident que Munda Obrero était alimenté, de même que l'appareil bureaucratique du Parti, par l'argent envoyé de Moscou. Mundo O brero, dirigé dans la coulisse par le journaliste péruvien César Falcon, était en fait une version espagnole de la Pravda. Le soulèvement du général Sanjurjo, le 10 août 1932, .surprit naturellement le parti corn-,

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