Le Contrat Social - anno X - n. 6 - nov.-dic. 1966

LE CONTRAT SOCIAL « Selon les lzvestia : La Chine et les EtatsUnis entretiennent d'importantes relations commerciales» (F., 7 novembre). « Manifestations à Pékin... Un vice-ministre demande la restitution à la Chine des territoires perdus» (M., 8 novembre). « 20.000 camions transportant un million de gardes rouges défilent devant le président Mao» (F., 11 novembre). « Chine nouvelle : Moscou trahit les intérêts du peuple vietnamien» (F., 11 novembre). « Le président Mao Tsé-toung participe à de nouveaux rassemblements de masse » (M., 12 novembre). * * * Le mystère dont s'entourent soigneusement les parvenus du communisme chinois, plus exactement du national-socialisme jaune, pour dissimuler leurs actes et desseins inavouables reste entier. Mais du fatras des informations pa;tielles reçues de chez eux au cours de l'an écoulé (jusqu'au 20 novembre) se dégagent néanmoins quelques évidences. Il est clair que la hiérarchie du parti de Mao s'avère divisée contre elle-même. (Qui est contre qui, et contre quoi, on ne le saura que plus tard.) Après dix-s_ept a~s d'absolutisme rigoure~x et de lav_ageintensif des cerveaux, le pouvoir communiste n'a pas gagné l'adhésion de la .société, chinoise, ni même celle du parti ~nique, detent~ur de tou~ les avantages politiques et matériels. Impuissant à lutter contre un« impérialisme» imaginaire qui sert de cible à sa propagande vociférante, il est en guerre effective contre son propre peuple et même contre une notable partie de la classe privilégiée : mandarins, fonctionnaires, militaires. Pour vaincre certaines résistances à sa politique absurde, résistances dont on n'a pas le fin mot il juge nécessaire de recourir à des moyens terro: ristes d'intimidation en levant une force neuve, to~t récem~ent .constituée, organisée, endoctrinée, fanatisée, irresponsable, celle des jeunes gardes rouges dont les agissements ne rappellent que trop la Hitlerjugend, de sinistre mémoire. Cela montre à quel point le public, en Occident comme en Orient et ailleurs, a pu être si longtemps abusé par de serviles sinologues à la manque, opérant dans une presse indigne, complai~ante à tous les despotismes pourvu que le papier se vende. A lire les récits renouvelés des multiples manifestations « monstres », à proprement parler monstrueuses, qui embrigadent en rangs serrés l~s ~i~lions de ga~des rouges si bien dressés, d1sc1phnés, mécanisés, on se demande si et quand ces jeunes gens jamais travaillent? Car pour réaliser les mises en scène auxquelles la Biblioteca Gino Bianco 373 télévision convie la multitude des spectateurs, de longues et nombreuses répétitions sont indispensables. Les grenadiers de Frédéric II et les soldats de Nicolas Jer, automates de réputation célèbre, font rétrospectivement figure de conscrits mal dégrossis, comparés aux autom~tes jaunes munis d'une brochure rouge. On sait de reste ce qui a été dit de« l'homme d'un seul livre ». Il reste encore à savoir ce qu'on peut attendre des gamins d'une seule brochure, surtout d'une brochure aussi misérable. Mao a éprouvé le besoin de s'exhiber huit fois en quatre mois, après une longue éclipse, mais en se montrant incapable de prononcer une phrase, comme s'il avait perdu l'usage de sa lan~u~. Il imite Staline en imposant le culte artificiel de sa personnalité médiocre dont il avoue précisément la médiocrité en tisant de tant d'artifices pour paraître ce qu'il n'est pas. Comme Staline aussi, il se révèle obsédé par la manie de passer à la postérité pour un« penseur» dont le nom s'inscrirait derrière ceux de Marx et de Lénine. Sa piètre brochure, de même niveau que le Précis mensonger d'histoire du Parti, si cher à Staline, veut accréditer le mythe d'une« pensée de Mao », cliché publicitaire ressassé comme leitmotiv par les millions de perroquets à sa dévotion et, chez nous, par la presse bourgeoise courtisane. Le sort ignominieux réservé au Précis et aux écrits de Stali,1:1-rermet cepend~nt d~ supposer que Mao s il~usionne quand il croit perpétuer sa mémoire en tant que « penseur» par des procédés aussi charlatanesques. Le déluge d'imbécillités, d'extravagances et de sauvageries dont l'écho parvient ici très atténué ne doit pas inspirer à la « blanche espèce » un sentiment .de supériorité sur les hommes plus ou moins jaunes. On a vu des choses aussi abjectes en Europe, nommément en Russie et en Allemagne. Et bien des Américains se leurrent qui affirment avec certitude : « Il cannot happen here. » Tout devient possible dans un monde sans principes qui se rit de la morale, singulièrement en France où déjà l'on assiste à l'apologie des chinoiseries les plus ignobles. Que tel crétin ou vendu exalte la contre-~évolution culturelle qui consiste à brûler les hvres, fermer les écoles, proscrire Shakespeare et B~eth~ven, saccager des églises, profaner des cimetières, pourchasser des nonnes octogénaires et promettre que cela va durer un milliard d'années, et le Monde (27 septembre) s'empresse de vanter la« sincérité», le« désintéressement», l' « humanisme» de ces saletés. Le Tout-Paris-pourri se rue au spectacle conçu en hommage au maître nageur et laveur de cerveaux, toujours avec l'approbation admirative du Monde (18 novembre) au nom de la respectabilité bourgeoise. On voit que les vidangeurs de Pékin font école. En vérité Euripide avait raison : « Zeus rend fous ceux qu'il veut perdre. »

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